23 AVRIL 2021, 16H30 1 Membres du Conseil scientifique associés à cette note :

23 AVRIL 2021, 16H30 1 Membres du Conseil scientifique associés à cette note : Jean-François Delfraissy, Président Laetitia Atlani-Duault, Anthropologue Daniel Benamouzig, Sociologue Lila Bouadma, Réanimatrice Simon Cauchemez, Modélisateur Franck Chauvin, Santé publique Catherine Chirouze, Infectiologue Angèle Consoli, Pédopsychiatre Pierre Louis Druais, Médecine de Ville Arnaud Fontanet, Epidémiologiste Marie-Aleth Grard, Milieu associatif Olivier Guérin, Gériatre Aymeril Hoang, Spécialiste des nouvelles technologies Thierry Lefrançois, Vétérinaire/One Health Bruno Lina, Virologue Denis Malvy, Infectiologue Yazdan Yazdanpanah, Infectiologue Cette note a été transmise aux autorités nationales le 23 avril 2021 à 16H30. Note d’éclairage du Conseil scientifique COVID-19 23 avril 2021 SITUATION EPIDEMIOLOGIQUE EN INDE : LE VARIANT B.1.617 23 AVRIL 2021, 16H30 2  Le Conseil scientifique a produit plusieurs notes ou avis sur les variants depuis fin décembre 2020. La plupart ont été consacrés au variant UK (variant B.1.1.7 dit « britannique ») et à ses conséquences sur la crise sanitaire en France et en Europe. Plus récemment, deux notes d’alerte ont été consacrées aux variants SA (lignage B.1.351 dit « sud-africain ») et BR-P1 (lignage B.1.1.28 dit « brésilien »).  Dans cette note, le Conseil scientifique souhaite alerter les autorités sanitaires sur les trois points suivants : o Situation sanitaire critique dans certaines régions de l’Inde ; o Le variant B.1.617 dit « indien » ; o Crainte d’une reprise de l’épidémie dans un nombre limité de pays d’Asie du Sud-Est. Dans cet immense pays (1,3 Milliards d’habitants) avec une population très jeune, la situation sanitaire semble hétérogène selon les états, avec des données épidémiologiques difficiles à rassembler. Cependant, depuis quelques semaines, on observe une reprise épidémique très forte, voire critique, avec un impact majeur sur le système de santé dans plusieurs états incluant de très grandes métropoles. Les Indiens sont admis dans les hôpitaux à un rythme sans précédent. A New Delhi, la situation est très grave et inquiétante avec plus de 30 000 contaminations par jour et une saturation du système de soins (manque de lits et d’oxygène). Il s’agit d’une deuxième vague massive, concomitante à la mise en évidence d’un nouveau variant B.1.617 dans l’état de Maharashtra (Mumbai) (voir plus loin) alors que le variant UK est très présent, notamment dans le nord du pays (Delhi). Un confinement d’une semaine a finalement été mis en place le 16 avril 2021, après plusieurs semaines sans prise de décision politique. INTRODUCTION I. SITUATION SANITAIRE CRITIQUE DANS CERTAINES REGIONS DE L’INDE Nombre de nouveaux cas confirmés de COVID-19 quotidiens en Inde. Source : Our World in Data 23 AVRIL 2021, 16H30 3 En dehors de l’état de Delhi, d’autres états sont également touchés. L’Inde a enregistré le 21 avril dernier, 315 000 nouveaux cas et 2 000 décès en 24H, avec plus de 185 000 décès depuis le début de l’épidémie (chiffre très probablement sous-estimé). L’Inde sort d’une période électorale avec de très nombreux rassemblements qui ne sont pas interdits. Le niveau des mesures de prévention prises parait globalement très faible. Pour des raisons culturelles très fortes incluant les traditions religieuses, les bains de foule dans le Gange lors de certaines fêtes sont jusqu’ici conservés. Au niveau de la vaccination, 140 millions de doses semblent avoir été administrées, correspondant à environ 9% de la population (1,3 milliard d’habitants !). Les deux vaccins utilisés sont Covishield (vaccin d’Astra Zeneca produit en Inde par le Serum Institute of India) et Covaxin, vaccin inactivé manufacturé par Bharat Biotech. La première vague en Inde avait fait l’objet d’un confinement très strict de mars à mai 2020 suivi d’une phase d’expansion de l’épidémie de mai à septembre 2020, avant un reflux d’octobre 2020 à février 2021. Les conséquences sanitaires mais aussi économiques et sociétales avaient été multiples. Bien que le bilan humain en termes de mortalité de la première vague semble avoir été limité, les plus de 60 ans représentant moins de 10% de la population, plusieurs enquêtes sérologiques en population rapportent des prévalences de l’ordre de 50% en zone urbaine, notamment à Mumbai et Delhi. La deuxième vague observée actuellement semble liée à plusieurs facteurs : difficultés à maintenir dans le temps les mesures de prévention, et apparition du variant UK avec un niveau majoré de transmission. Dans ce contexte de circulation virale élevée a été mis en évidence un nouveau variant B.1.617 dont le lien de causalité avec cette 2ème vague n’est pas encore prouvé. Ce variant est présent dans l’état de Maharashtra, où se trouve Mumbai, mais est peu retrouvé ailleurs, et notamment dans l’état de Delhi où l’épidémie semble la plus active, et où le variant UK (B.1.1.7.) représente de 50% à 80% des virus séquencés. 1. DETECTION DU VARIANT B.1.617 EN INDE Ce variant B.1.617 a été isolé la première fois en octobre 2020 près de Nagpur (état du Maharashtra comprenant Bombay). Sa prévalence actuelle est difficile à chiffrer, et le manque de données épidémiologiques corrélées aux résultats virologiques de séquençage moléculaire à une large échelle incite à une certaine prudence. Un effort majeur est en cours au niveau du pays pour optimiser le réseau de laboratoires pouvant effectuer des séquençages et un suivi II. LE VARIANT B.1.617 DIT « INDIEN » 23 AVRIL 2021, 16H30 4 génomique. Parmi les autres variants, le variant UK est dominant, en particulier dans la région de Delhi, après des premiers cas importés fin décembre 2020. Au niveau international, le variant est considéré comme « en investigation » et pas encore comme « VOC » ou « Variant of concern ». 2. VIROLOGIE Le variant indien B.1.617 est différent des variants UK, SA et BR-P1, mais aussi du variant B.1.427/9 dit « californien ». En effet, le variant B.1.617 a 15 modifications sur des aminoacides différents sauf 2 communes avec d’autres variants qui se situent dans le RBD de la protéine Spike (zone critique pour la liaison au récepteur et la neutralisation par les anticorps).  L452R : est identique à celle du variant californien  E484Q : la majorité des variants of concern (VOC) présente une mutation E484K avec un changement de polarité qui est donc en partie différente La combinaison de ces deux mutations déjà connues mais non-associées jusqu’ici (d’où le nom inapproprié de « double mutant ») pourrait conférer au variant B.1.617 une transmission augmentée mais ceci reste à prouver au plan épidémiologique. Le variant B.1.617 porte d’autres mutations dans les protéines structurales type enzyme de réplication NSP ou protéines accessoires type ORF. D’autres variants différents du B.1.617 ont été isolés en Inde récemment dans un contexte de circulation virale très élevée dont on ne connait pas la signification. Rappelons que le variant majoritaire jusqu’ici est le variant UK. 3. AU PLAN INTERNATIONAL  On ne connait pas la situation au Bangladesh ni au Pakistan où l’épidémie ne semble pas avoir repris.  A ce jour, 104 cas de variants B.1.617 ont été récemment isolés en Angleterre, 4 en Ecosse, mais aussi en Belgique et en Allemagne, secondaires à des retours de voyages en Inde, alors même que le niveau de circulation virale est très limité en Grande-Bretagne actuellement après un confinement strict et une campagne vaccinale très active avec le vaccin AstraZeneca. La Grande Bretagne a classé l’Inde en zone rouge.  Le variant a également été identifié aux Etats-Unis en Australie et au Canada en nombre jusqu’ici très limité. 23 AVRIL 2021, 16H30 5 4. SENSIBILITE AUX ANTICORPS NEUTRALISANTS ET AUX VACCINS Aucune donnée solide n’est disponible. La mutation L452R pourrait diminuer la sensibilité de ce variant aux anticorps. La mutation E484Q est proche mais différente de la mutation E484K qui facilite un échappement partiel aux vaccins. On peut donc s’attendre à une efficacité vaccinale conservée mais diminuée. Les premières données indiennes avec les deux vaccins décrits plus haut semblent aller dans ce sens. Ce variant B.1.617 dit « indien » se rapprocherait donc des autres VOC déjà connus sans qu’on ne puisse prévoir son niveau de transmission par rapport au variant UK par exemple.  Le variant B.1.617 n’a pas été détecté jusqu’ici sur le territoire français. Récemment, un groupe de 43 élèves infirmiers en provenance d’Inde sont arrivés le 12 avril 2021 à l’aéroport Charles-de-Gaulle avant de rejoindre la Belgique. 24 d’entre eux se sont avérés positifs pour ce variant B.1.617 (investigation en cours).  Au plan diagnostique, le variant donne un signal avec la technique PCR de criblage (avec certaines sondes, en particulier TIB-MOL-BIOL) et bien sûr par séquençage. Il est diagnostiqué par les tests antigéniques.  Les vols directs en provenance de l’Inde viennent d’être suspendus. En cas de reprise, les mêmes précautions suggérées par le Conseil scientifique dans son avis « Le variant « brésilien » P1 : Anticiper pour l’été » du 16 avril 2021 pourraient être mises en œuvre. Il faut surveiller avec attention les liaisons aériennes indirectes via la Grande-Bretagne et les pays du Golfe, mais également les vols entre l’Inde et la Réunion qui ont des liens particuliers au niveau de certaines communautés. 23 AVRIL 2021, 16H30 6 L’épidémie est actuellement en train de repartir de façon active dans plusieurs uploads/Geographie/ note-conseil-scientifique-23-avril-2021.pdf

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