San-antonio Se met à table Blandine Vié Illustrations de Michel Tolmer © Michel

San-antonio Se met à table Blandine Vié Illustrations de Michel Tolmer © Michel Tolmer pour les illustrations © Les éditions de l’Épure/Fleuve noir, un département de Univers Poche, Paris 2011 « Chez nous, quand on se met à table, le sévice est toujours compris. » San-Antonio Tout le plaisir est pour moi, 1959 9 Faut qu’on S’cauSe * Bien qu’on soit – presque – dans un polar, je n’ai pas voulu commettre de crime. Pas de crime de lèse-majesté, en tout cas ! « Fectivement », j’ai choisi de laisser intactes les citations de San-Antonio, même quand il était patent qu’il s’y était glissé quelques petites co(q)uilles. Par exemple : – Des fautes de frappe toutes bêtes ayant échappé à la vigilance des correcteurs des éditions originales, voire des suivantes. – Des orthographes hasardeuses – et je ne fais évidemment pas allusion ici à la créativité effrénée des néologismes de Frédéric Dard – ou mouvantes d’un opus à l’autre : panner avec un ou deux « n », s’empiffrer avec un ou deux « f », steak écrit steack, calandos ou calendos, inclues au lieu d’incluses, harengs saures pour harengs saurs, Condrieux avec un « x », rétroquer pour rétorquer (mais celle-là, San-A la revendique), et même l’orthographe du nom de certains chefs comme Guy Savoy que, volontairement ou non, il écrit parfois Savoye. Etc. – Des graphies justes à l’époque, mais qui ont été codifiées depuis : par exemple l’appellation des vins qu’on écrit aujourd’hui en minuscules, alors que dans les années cinquante-soixante, on aimait bien les affubler d’une majuscule, comme Pommard, qui s’écrirait aujourd’hui pommard. Ne pas unifier, c’est aussi ne pas faire d’anachronisme et laisser le texte original témoigner de son temps. Et sûrement d’autres choses encore. J’préfère vous prévenir avant qu’un irascible vienne me tartiner comme quoi y a gourance. Et puis, ça dédouane ma correctrice, vu qu’elle aimerait pas qu’on pense qu’elle a pas fait son boulot **. Ah ! Et puis encore une chose pour ta gouverne. J’écris San-A sans point final quand il s’agit du bonhomme et San-A. avec un point à la fin quand j’cause d’un des bouquins de la série. San-Antonio (le vrai), lui, il a le point baladeur. Mais c’est son droit, non ? C’est quand même lui l’auteur. B. V . * C’est mieux que « note de l’auteur », non ? ** C’est exprès que j’ai pas mis la négation, commence pas à me chercher des noises ! tout ce que tu doiS Savoir Sur ce book de a juSqu’à Zob ! Préalavement (les amuse-gueule) Signé Bertaga (Préface de Berthe Bérurier) San-Antonio et moi, émoi, émoi (Avant-propos) Profilage (Profil alimentaire de San-Antonio) Les goûts alimentaires du commissaire San-Antonio Ce que l’écrivain San-Antonio pense de la bouffe Ma littérature fait ventre la tortore Les bons petits plats de Félicie La bectance et la cuistance des Bérurier San-Antonio casse la croûte avec son équipe Quand San-Antonio croque en solitaire Quand un poulet sort une poulette (Sana et ses nanas) Quand San-Antonio clape chez des tiers La jaffe des enquêtes à l’étranger la picole Du comptoir à la cave n’encore un peu de rab (de lapin) Délices cul…inaires, façon San-Antonio Pastiche (51) d’un menu, façon Bérurier table des matières … pas encore fécales, mais ça va viendre ! (Conclusion intestinale) Par le menu (Table des recettes par chapitres) On remet le couvert (Index général des recettes) thank you very muche (Remerciements) 15 20 22 24 33 41 45 157 227 270 279 292 298 313 351 355 361 362 368 373 Préalavement 14 PRÉALAVEMENT 15 PRÉALAVEMENT Signé bertaga L’ascenseur hydraulique de la Maison Poulaga s’élève lentement, comme à sa pous- sive habitude. Quand il arrive enfin au bon palier, alors ses doubles portes claquent et la tornade Bertaga en sort. Bioutifoule ! Avec une robe mettant admirablement en valeur ses deux jambons de trente-cinq livres chacun, vu que le tissu de la par- tie juponnante est d’un rose charcutier qu’envierait n’importe quel jambonneau demi-sel, et que le corsage représente des odalisques – ou, pour mieux dire, des olidalisques – lascives, mollement étendues sur leurs couches ou au bain. Enfin, elle arbore un chapeau de style tyrolien garni de plumes de faisan faisandé, et une paire de boucles d’oreilles qui représentent chacune un perroquet vert pomme sur son perchoir. Pour couronner le tout, elle s’est maquillée avec un rouge à lèvres couleur violine-marronnasse qui lui fait une bouche semblable à un tronçon de boudin dans lequel on aurait déjà mordu. Planton de service, le brigadier Poilala, moustache en brosse et képi vissé sur un crâne aussi vide que le préservatif d’un éjaculateur précoce qu’aurait même pas eu le temps de l’enfiler, en reste comme deux ronds de flan. « – Madame Berthe ! – J’vous prillerai d’m’appeler Mâame Bérurier. Que je suce, on na pas gardé les cochons zensemble. – Bien M’dame ! En quoi que je puisse vous aider ? – Si j’sus là, c’est parce que j’viens voir M’sieur le commissaire principal Santantonio soi-même en personne, et en chair et en os, pour porter plainte. – M’dame Bérurier, M’sieur le commissaire est absent. Il enquête sur le terrain. – Quel terrain ? Poilala, c’est-il que vous me prendrilliez pour une conne ? Terrain ? Tes reins, oui ! L’enquéquette, ça pour sûr ! J’le connais le beau commissaire de mes deux ! L’enquéquette ent’ les cuisses d’une radasse et lui tamponne la raie culière ! Et qui c’est-il qui va z’enregistrer ma plainte, alors ? Passeque j’viens déposer plainte, figurez-vous-le-pour-dit. – Et si M’sieur le commissaire de mes choses n’est point là, j’doive vraiment m’rabatte (de baise-ball) sur mon cochon d’mari ? – M’sieur votre époux n’est pas là non plus. – Quoi ? Comment ça ? l’est pas là non plus. Où c’est-il qu’il est-il, cet enviandé de poivrot ? Vous m’racont’riez pas des salades, Poilala, des fois ? Ça sent l’andouillette jusqu’ici. – Fectiv’ment Mâame Berthe ! Euh ! M’dame Bérurier, pardon ! Le commissaire Béru- rier est passé au bureau tout à l’heure, et il a casse-croûté deux andouillettes panées et un sandouiche aux rillettes. Mais il est parti depuis déjà z’une bonne demi-heure. Et d’après c’que j’en suce, à l’heure qu’il doive être, il doive questionner un témoin à son domicile. 16 PRÉALAVEMENT – Mouais ! J’y croive pas beaucoup. Encore un alibaba, j’veux dire un alibibi, pour une partie de jambes en l’air. Faites-moi donc z’annoncer à la Vieille Pinasse, alors. Car ma plainte est urgente comme le lait qui bouille sur le feu. – M’dame Bérurier, le commissaire Pinaud peut pas vous r’cevoir, il est en mission. – En mission ? Vous entendez quoi t’est-ce par mission, Poilala ? Une virée au troquet du coin, oui ! À torcher du muscadet ! Écoutez, Poilala, j’viens porter plainte au sujet d’un livre qu’est un vrai torchon vu qu’l’auteur y prétende qu’il s’agisse des meilleures recettes de la Poule, mais qu’j’y figure que d’manière necdotique. Qu’y en a qu’pour la cuistance d’la mère Félicie, qu’on comprend bien qu’elle aille été pistonnée vu qu’elle est la mère du commissaire Santantonio. Pourtant, c’est d’notoriété publique qu’ma cuisine à moi, c’est du touille premier choix. Que d’la crème, du beurre et du lard ! Irrésistib’. Par conséquence de quoi, je veuille absolument déposer plainte. Et si toute cette équipe de bras cassés est en promenade, alors j’vous prille ardemment, brigadier Poilala, qu’on aille à l’étage supérieur et que vous m’introduisassiez chez le Vieux. – Le Vieux ? – Oui, Poilala. Ne vous faites pas plus bête que vous n’êtes. Le Vieux, le Dabe, Big Dabuche en personne. Achille, quoi ! – Impossib’ M’dame Bérurier. D’abord, moi tout seul, j’peux pas m’permette de déranger M’sieur le Directeur d’la Police Nationale. N’ensuite de quoi, d’toute façon, ça va pas z’ête possib’, car M’sieur le Directeur est présent’ment chez le coiffeur. – Chez le coiffeur ? Mais il est chauve !!! L’a pas un poil su’ le caillou. Même qu’on croiverait qu’il s’astique le crâne tous les matins à la peau de chamois ! – Justement, Mam’zelle Zouzou a réussi à l’convainc’ qu’y paraîtrait beaucoup plus jeune s’il consentissait à s’replumer du chef. » Berthe part alors d’un rire à la fois chevalin et moutonnant qui fait trembler de concert ses jambons, ses seins en forme de sacs de farine et son triple menton. Et encore, parce qu’on ne la voit que de face. Car ça doit danser la gigue aussi par-derrière. « – Achille avec une moumoute ? – J’sais pas, mais en tout cas, il avait rendez-vous avec un certain M. Alfred, coiffeur pour dames. – Alfred ? Mon Alfred ? Qu’est-ce que c’est-il encore qu’c’t’histoire ? Alfred qui met des rouflaquettes sur la gueule du Vieux qu’a l’crâne lisse comme un œuf ? C’est quoi c’bintz ? Casse la tienne ! Et Vous Poilala, vous z’êtes bien dans la police ? Alors, v’zallez venir avec moi dans l’bureau du commissaire et vous zallez enregistrer ma plainte que j’viens déposer uploads/Geographie/ san-antonio-se-met-a-table.pdf

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