Roger Le Tourneau David L. Woolman, Rebels In the Rif, Abd-el-Krim and the Rif
Roger Le Tourneau David L. Woolman, Rebels In the Rif, Abd-el-Krim and the Rif rebellion In: Revue de l'Occident musulman et de la Méditerranée, N°6, 1969. pp. 168-170. Citer ce document / Cite this document : Le Tourneau Roger. David L. Woolman, Rebels In the Rif, Abd-el-Krim and the Rif rebellion. In: Revue de l'Occident musulman et de la Méditerranée, N°6, 1969. pp. 168-170. http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/remmm_0035-1474_1969_num_6_1_1018 168 COMPTES-RENDUS BIBLIOGRAPHIQUES Rebels in the Rif, Abd el krim and the Rif rebellion by David L. Woolman, Standford : Standford University Press, 1968. La guerre du Rif est une prodigieuse aventure : quelques tribus ber bères montagnardes menées par deux frères originaires de l'une d'entre elles, contre une, puis deux puissances coloniales qui ne veulent pas s'en laisser conter. Les montagnards remportent pour commencer d'extraordi naires succès, puis finissent par être étouffés par leurs deux puissants ad versaires réunis et par se courber sous le joug du plus fort. En fin de compte, Mohammed ben 'Abd el-Krim, le chef de l'entreprise, échappe aux Espagnols, se rend aux Français et est exilé à 111e de la Réunion, d'où il ressurgira, quelque vingt ans plus tard, pour tâcher de diriger du Caire la lutte antiimpérialiste en Afrique du Nord. Mais la lutte aura pris alors un tout autre caractère et le vieil homme ne pourra plus brandir qu'un sabre de bois. Après plusieurs autres, M. David Woolman a voulu raconter l'histoire du Rif, dont il a beaucoup entendu parler quand il résidait à Tanger. Il l'a fait d'une façon fort sérieuse et en s 'appuyant sur une information déjà pu bliée par des témoins directs comme Léon Gabrielli, Vincent Shean, Walter Harris et bien d'autres, ou recueillie sur place. Avec le recul du temps , il a pu en présenter une synthèse qui, si elle ne renouvelle pas la question , l'analyse sans passion et de manière fort claire. Si l'on venait à disposer de nouveaux documents provenant du Rif, peut-être pourrait-on écrire une histoire un peu différente sur certains points. Disons tout de suite, pour nous débarrasser des critiques, que le pre mier et le dernier chapitre (the backiround et Conclusion) sont loin d être le s meilleurs. L auteur a voulu y dire trop de choses en trop peu de lignes et y a commis quelques erreurs de fait. Il aurait dû supposer connu le déroulement des faits avant l'établissement des protectorats français et espagnol et n'avait pas besoin de résumer en quelques mots la destinée des protagonistes après la fin de l'aventure ; ce qui leur est arrivé par la suite n'apporte aucun éclaircissement supplémentaire sur la guerre du Rif. Par contre les chapitres qui traitent des relations de l'Espagne et du Maroc depuis la "guerre de Tétouan" (1859 - 1860), et de l'établissement du protectorat espagnol dans le Nord du Maroc présentent beaucoup d'inté rêt, parce qu'on y trouve en partie l'explication des événements qui ont suivi . Des siècles de relations tendues entre "Moros" et chrétiens avaient précédé la guerre de 1859 que les Espagnols entreprirent pour s'affirmer en face des Anglais et des Français au moins autant que pour régler un incident de frontière banal. Vieilles haines religieuses, ressentiment d'une puissance devenue de second ordre à l 'encontre des deux grands colonisateurs de l'épo que, et enfin médiocre organisation de l'armée et de l'administration espa gnoles d'alors, voilà quelques éléments du drame qui va se jouer jusqu'en 1926. COMPTES-RENDUS BIBLIOGRAPHIQUES 169 D'abord les Espagnols eurent pour principal adversaire au Maroc le personnage haut en couleur qu'était le chérif Raisuli, aussi habite à gagner les bonnes grâces de certains Espagnols qu'à se dresser avec arrogance contre d'autres et qui ne pardonne jamais aux autorités du protectorat de ne l'avoir pas choisi comme représentant du sultan à Tétouan. Après la pre mière guerre mondiale, les Espagnols décidèrent de s'occuper davantage de la partie orientale de leur zone de protectorat et y nommèrent comme com mandant en chef le général Silvestre qui s'était déjà fait remarquer à l'Ouest pour son dynamisme, mais aussi pour sa brutalité. Il allait rencontrer cAbd el-Krim sur sa route. Ce Berbère se considérait à tort ou à raison comme un descendant de Omar b. al-Khattab, l'un des successeurs du Prophète. Ce qui est certain , c'est que ses ancêtres avaient vécu des siècles dans le milieu berbère du Rif et que sa famille jouissait d'une certaine réputation dans la tribu des Béni Uriaghel, l'une des plus nombreuses et des plus guerrières de la ré gion. C'est lui qui, avec son jeune frère Mhammed, se dressa contre les Espagnols. Après avoir uni quelques tribus contre eux, ils attaquèrent à la mi -juillet 1921 un général Silvestre d'autant plus surpris qu'il était plus con fiant. L'effet de surprise joint au mordant des troupes rifaines transforma l'affaire en une extraordinaire déroute et peu s'en fallut que Melilla fût prise par les Rifains. L'affaire porte le nom d'Anoual et commença le 17 juillet Elle produisit en Espagne et dans le monde entier un effet extraordinaire. eAbd el-Krim s'était emparé d'un armement considérable lors de sa vic toire et put constituer une sorte d'Etat semi-moderne, seml -traditionnel qu'il appela la République du Rif, tout en se faisant nommer "prince" ou même "sultan". Avait-il l'ambition de courber sous son autorité le Maroc tout en tier ? Il ne sembla pas, mais il envisageait de faire reconnaître par le monde entier la formation d'un Etat destiné à remplacer la zone espagnole de protectorat, ce que ne pourraient pas admettre les Français, malgré le soin que prenait cAbd el-Krim à bien les distinguer des Espagnols. Quant aux Espagnols, ils avaient été cruellement ébranlés par l'affaire d'Anoual et la monarchie d'Alphonse XIII tendait vers l'anarchie. C'est à ce moment que le général Primo de Rivera prit le pouvoir à Madrid avec l'assentiment tacite du roi et s'efforça de rétablir la situation dans la métropole et dans la zone espagnole de protectorat. Il n'hésita pas à prendre au Maroc des mesures radicales, décidant en 1924 l'évacuation de toute la zone montagneuse de l'Ouest, y compris la petite ville de Che- chaouen (en arabe : Shafshawn) qui prenait valeur de symbole. Naturellement les habitants de la zone évacuée, ou Jebala, firent cause commune avec cAbd el-Krim. C'est la période triomphale de l'Etat rifain, soutenu par les con voitises de certains financiers internationaux, Allemand entre autres, mais miné par les rivalités des tribus et plus encore peut-être par l'hostilité des personnages religieux. C'est à ce moment qu'intervient la France. Même au temps d'Anoual, le maréchal Lyautey et le gouvernement français avaient considéré l'affaire du Rif comme ne les concernant pas d irectement. Mais lorsqu'on 1924, le chef rifain, enhardi par ses succès, 12 170 COMPTES-RENDUS BIBLIOGRAPHIQUES essaya de gagner à sa cause des tribus qui bordaient la zone française d'oc cupation, Lyautey décida alors de mettre un frein aux ambitions de rÂbd el- Krim en occupant la plus importante de ces tribus, celle des Béni Zarwal (mai 1924). fAbd el-Krim tenta d'amener les Français à revenir sur leur décision, mais n'y parvint pas. Dès lors il décida d'attaquer. Il le fit à la mi-avril 1925, avec la même soudaineté qui lui avait si bien servi contre les Espagnols à Anual et avec un résultat presque identi que. Toutefois, si l'armée française se trouva à de certains moments dans une position critique, en mai au Nord de Fès, au début de juillet au Nord de Taza, elle parvint à réagir et à revenir sur ses positions d'avril ; quand le maréchal Lyautey quitta le Maroc au début d'Octobre 1925, la menace rifaine était endiguée ; non seulement les troupes françaises étaient solides et préparaient une grande offensive, mais les Espagnols avaient débarqué dans la baie d'Alhucemas au début de Septembre et une manoeuvre en tenaille prenait forme. Après un hiver qui rendait les opérations militaires quasi- impossibles dans cette région difficile, Français et Espagnols reprirent leur offensive au printemps de 1926. fAbd el-Krim essaya alors de traiter, mais se heurta aux exigences de ceux qui se savaient déjà vainqueurs. Il se vit donc obligé de reprendre une lutte sans espoirs, avec des partisans qui d iminuaient sans cesse et finit par se rendre aux Français le 27 mai 1926 . Dès lors les Espagnols eurent peu à combattre pour occuper intégralement leur zone de protectorat. Le rêve d'indépendance caressé par fAbd el-Krim s'était évanoui. A supposer même que les Espagnols et les Français eussent admis un Rif indépendant, l'auteur doute fort qu'il eût été capable de survivre longtemps , malgré les idées modernistes des frères *Abd el-Krim, car les tribus rifaines n'étaient pas prêtes pour un régime si éloigné de leur tradition, et aussi parce que (Abd el-Krim était beaucoup moins moderniste qu'il ne le croyait lui-même. Qu'il ait préparé à l'unité les tribus et ainsi créé un moule dont les Espagnols se sont servis après lui, on l'admet volontiers ; qu'il soit apparu comme un symbole à ceux qui, nombreux au Maroc, étaient trop fiers pour admettre un protectorat, cela uploads/Histoire/ article-remmm-0035-1474-1969-num-6-1-1018.pdf
Documents similaires
-
13
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Apv 01, 2022
- Catégorie History / Histoire
- Langue French
- Taille du fichier 0.3631MB