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République Tunisienne Ministère de l’enseignement Supérieur et de la Recherche

République Tunisienne Ministère de l’enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique Université de Sousse Institut Supérieur des Beaux-Arts de Sousse Département Design 2ème année Master de Recherche en Design Spécialité : Design La mode durable entre esthétique et engagement environnemental : Le biosourcing comme alternative dans l’industrie textile Mots clés : design de mode, esthétique vestimentaire, durabilité, pollution, innovation, biosourcing, textiles biodégradables Réalisé par : Boubakri Najla Encadrée par : Mme. Mosbah Chiraz Année Universitaire : 2021-2022 2 INTRODUCTION 3 Introduction Dans un monde où nous accordons beaucoup d’importance au vêtement et à la parure, la mode s’impose comme l’une des industries les plus puissantes du monde. Le design de mode est une vaste discipline de création de produits d’habillement, d’accessoires et de textiles où le designer se présente en tant qu’un dénicheur de tendances et de bonnes idées dans l’air du temps et dont la culture de son esprit créatif se nourrit des arts, des techniques, des technologies, des sciences humaines, de la nature… Ainsi, les produits de mode reflètent toutefois une importance formelle de considérations esthétiques et autres de fonctionnalité, de ce qui se joue à travers l’objet de mode, ses usages et ses principes d’utilité. Aussi, presque toujours avec des considérations cognitives, le produit de mode comme tout design présente un intérêt primordial d’esthétique, une discipline qui a pour objet les perceptions, les sens et le beau. Ce qui s’implique dans le premier contact avec l'objet de mode, son image résiduelle et notre impression. En effet, la mode est définie par Dominique Waquet1 et Marion Laporte2 comme un phénomène social dynamique et d’interactivité qui entretient des relations complexes entre le designer et son milieu. La mode est « un tissu, une couleur, un motif de décoration, une forme de vêtement, mais aussi un accent étranger, une destination de voyage, un auteur, un compositeur, une politique, une idée, bref tout peut être objet de mode »3. Elle met en œuvre le volume, la matière, la couleur et toute autre chose qui intervient dans la création d’objet de mode. Définie comme un art, la mode s’adresse à nos sens, nos émotions, notre intellect, jouant sur notre état d’esprit4. C’est ce qui est affirmé par R. Brathes5 en prouvant que ce phénomène de codage vestimentaire est une expression de nos engagements, humeurs et nos occupations. Entre effort créatif et productivité, les concepteurs de mode ne cessent d’explorer de nouveaux styles, concepts, matières et outils de fabrication, d’où les diverses révolutions successives6 qui ont marqué l’histoire de la mode illustrant dans ses différentes périodes des relation de dominance entre les exigences esthétiques et l’environnement. En effet, l’origine de 1 Waquet Dominique, ancien directeur général de l’Institut Français de la Mode, est conseiller de la Fédération Française du Prêt-à-porter Féminin. 2 Laporte Marion, ancienne chargée de mission design-mode au Ministère de l'Éducation, est consultante en industries créatives. 3 WAQUET, Dominique et LAPORTE, Marion. La mode, PRESSE UNIVERSITAIRE DE FRANCE, Paris, 2010, page 3. 4 BRATHES, Roland. Système de la mode, POINTS Édition, Paris, 1967, page 31. 5 Brathes Roland, sémiologue et essayiste, a élaboré une pensée critique singulière en constant dialogue avec la pluralité des discours théoriques et des mouvements intellectuels de son époque. 6 https://www.label-chaussette.com/blogs/news/lhistoire-de-la-mode-de-lindustrie-textile-jusqua-larrivee-de-la-fast-fashion https://www.fibre2fashion.com/industry-article/3730/fashion-designing-the-then-and-now KENNEDY, Alicia, BANIS STOECHRER, Emily et CALDERIN, Jay. Fashion design referenced, ROCKPORT Édition, Beverly, 2013, page 68. 4 la mode remonte à l’art artisanal, la Haute Couture et les pièces sur mesure, l’utilisation des matières premières à base naturelle (exemple du coton, lin, cuir, laine, soie…). Mais, au fil des siècles les avancées technologiques et les machines ont révolutionné le processus de fabrication qui était extrêmement long et limité surtout en ce qui concerne le traitement de fibres. C’est la raison pour laquelle les premiers progrès technologiques dans l’industrie de mode sont orientés vers l’extraction et la transformation des fibres ainsi que la fabrication des tissus. Au milieu du XXème siècle, la mode est devenue une source de tendances et notre relation avec les vêtements a été transformée par l’introduction du Prêt-à-Porter. L’industrialisation accélérée a inauguré une nouvelle ère de l’industrie de mode avec la production en masse où les gens commencent à adopter tout un style de vie derrière ce qu’ils portent. Aussi, c’est à travers la majorité des innovations liées au textile, telle que la création de fibres artificielles plus performantes (exemple du nylon et du polyester ainsi que les nouvelles techniques pour la teinture) que les concepteurs ont pu avoir plus de liberté pour créer. Cela marque l’avènement de la mode comme nous la connaissons aujourd’hui avec les nombreuses innovations introduites, telle que la digitalisation de l’industrie de mode qui a abouti à l’automatisation de nombreux processus de production révolutionnant ainsi le design de mode. Pour plus de pertinence, il ne faut pas nier que suite aux stratégies mondiales de fabrication et de vente, la mode présente des failles7 qui touchent à l’être humain et à son environnement en étant le deuxième secteur le plus polluant dans le monde après le pétrole et qui pratique un certain esclavagisme moderne en exploitant la misère sociale. Dans la même perspective, le « Fast-Fashion »8 et la production immersive de produits de masse, ainsi que l’utilisation abondante de matières synthétiques dont le premier et le dernier but est la maximisation des revenus, ensevelissent le côté humain qui doit exister fortement chez le designer. Assurément et avec de nouvelles tendances et créations, la mode passe et fait appel à une autre mais les impacts environnementaux, sociaux et économiques qu’elle provoque s’inscrivent dans le temps. À titre d’exemple des actes non responsables impliqués dans le processus de création : l’utilisation des fibres synthétiques qui représentent 64.8% de la 7 URL : https://youmatter.world/fr/impact-environnemental-mode-fast-fashion-textile-pollution-environnement/ URL : https://multimedia.ademe.fr/infographies/infographie-mode-qqf/ Ellen MacArthur Foundation. A New Textile Economy, Redesigning Fashion’s Future, « Revue de Ellen MacArthur Foundation et Circular Fibers Initiative », 2017, page 18-21. URL: https://emf.thirdlight.com/link/2axvc7eob8zx-za4ule/@/preview/1?o/ 8 La « Fast-Fashion » concerne les enseignes de mode qui renouvellent régulièrement leurs collections pour produire à bas coûts et vendre à petits prix. Définie par Livia Firth, fondatrice et directrice créative d’Eco-Âge comme étant « un phénomène qui nous a tous piégés dans un cercle absurde de micro- tendances-environ deux mini-saisons par semaine dans les magasins. Les vêtements jetables restent en moyenne dans le placard d’une femme cinq semaines avant d’être jetés ». 5 production mondiale de fibres textiles de par leur faible coût, dont pas moins de 70% de ces fibres proviennent du pétrole et donc à base de substances chimiques très nocives9. Auxquels s’ajoutent l’exploitation affreuse des ressources naturelles en faveur de la culture et le traitement de matières premières (exemple du coton, la fameuse fibre textile qui exige beaucoup d’énergie et d’eau), ainsi que la surexploitation des espèces ce qui menace la biodiversité. Un tel constat nous amène à nous interroger sur la responsabilité de l’homme dans une industrie qui est en perpétuel changement. Malgré ces défauts, on ne peut pas séparer la mode de nos pratiques de vie quotidienne, et puisqu’on vit le design, aujourd’hui, les créateurs repensent la mode tout en envisageant des stratégies avec plus de responsabilité et engagement. Ainsi, avec une certaine empathie et sensibilité humaine, le designer de mode doit assimiler les conditions qui l’entourent et bien évidemment celles non favorables à l’être humain pour prévoir un futur plus abordable, commode et respectueux de l’homme. Étant avant-gardistes, plusieurs marques s’emparent de la mode durable, voire éthique10, pour faire face au désastre environnemental, telles les enseignes Stella McCartney, Prada, LEVIS... Selon les statistiques de l’industrie de la mode durable réalisées par « the Business Research Company 2020 », le marché devrait croître à 9.81 milliards de dollars en 2025 et à 15.17 milliards de dollars en 2030 à un TCAC de 9,1 %11. Cet engagement est devenu une stratégie imposante dans le domaine de la mode qui allie innovation, conscience collective avec les notions de développement durable à partir de laquelle une relation intrinsèquement humaine se crée entre la mode et nous. Ainsi, si le vêtement répond aux besoins pragmatiques (s’embellir, protection, confort…), la mode durable nous plonge au-delà de nos simples besoins suite aux collaborations des individus actifs dans le secteur de la mode et d’autres de différentes spécialités. Pendant les dernières années, la mode durable commence à s’émerger partout dans le monde, elle est devenue demandée par le consommateur car elle répond toutefois à ses besoins d’esthétique, d’usage et lui garantit parallèlement le milieu favorable pour vivre en bonne santé 9 URL : https://www.wedressfair.fr/blog/c-est-quoi-le-probleme-des-fibres-synthetiques URL : https://atelier-53.be/blogs/green-diy/les-matieres-textiles-zoom-sur-les-fibres-synthetiques 10 « Les définitions identifiées de la mode éthique se concentrent principalement sur les aspects liés aux impacts environnementaux et au bien-être des personnes impliquées dans la production des articles de mode ». Article de HANG, Andreas et BUSH, Jacob. Towards an Ethical Fashion Framework, « Fashion Theory: The Journal of Dress Body & Culture», 2015, page 1. 11 URL : https://goodonyou.eco/sustainable-fashion-statistics/ 6 ainsi que pour la bonne gestion d’argent. D’ailleurs, « la mode durable et écologique ne serait pas seulement une solution alternative, mais deviendrait la norme uploads/Industriel/ boubakri-najla.pdf