0 Organiser l’activité d’innovation : structures, processus et hommes. Le cas d

0 Organiser l’activité d’innovation : structures, processus et hommes. Le cas de l’ambidextrie organisationnelle du Groupe SEB 1.1 - Présentation du groupe Le groupe SEB (Société d’Emboutissage de Bourgogne) est une entreprise régionale devenue, en 50 ans, le leader mondial du petit équipement domestique avec, en 2006, 2 652 millions d’euros de CA et 13.741 personnes employées dans 45 pays. Une forte croissance externe l’a conduit à détenir 5 marques mondiales (Rowenta, Moulinex, Tefal/T-Fal, Krups, Lagostina) et des marques régionales (Amérique du Nord : All-Clad ; Amérique du Sud : Arno, Panex et Samourai ; France et Belgique : Calor et SEB). Le groupe se focalise sur les produits pour la cuisine, la maison et la personne avec 5 activités: 1) articles culinaires, 2) cuisson électrique, 3) préparation des aliments et des boissons, 4) soin du linge et de la personne et 5) entretien de la maison. Afin de renforcer la cohérence, la transversalité et l’efficience, le groupe SEB a plusieurs fois changé d’organisation. La structure du groupe SEB au début des années 2000 est née d’une volonté managériale de rationaliser et d’homogénéiser un ensemble devenu complexe, mais aussi de favoriser les innovations d’exploration. Avant 1999, le groupe avait une structure divisionnelle par société anonyme (SEB, Tefal, Calor, Rowenta…), la société mère se chargeant de consolider les résultats des sociétés qui suivaient leur propre stratégie industrielle et commerciale - avec la responsabilité sur la R&D : « Auparavant, chaque entité du groupe était autonome sur sa recherche, ce qui conduisait à un émiettement des ressources (…) A l’époque, nous avions identifié pas moins de 92 projets de recherche ! C’était intenable » (Directeur général industriel de SEB, 2004). Figure 1 – Organisation du Groupe avant 1999 La structure du groupe SEB s'articule en 2004 autour de 3 directions générales : 1 - Les Directions Générales d’Activités ont pour mission d’établir la stratégie mondiale sur les familles de produits dont elles ont la charge. Elles assurent le développement des nouveaux produits, de leur conception à la mise en œuvre des stratégies industrielles (investissements, localisation des productions…) et marketing mondiales (gammes, prix, moyens publicitaires, circuits de distributions …) ; - Les Directions Générales Continentales sont chargées de coordonner et de développer les positions du Groupe sur leur zone géographique respective. Elles assurent l’application de la stratégie commerciale et marketing des Activités ainsi que la gestion des réseaux de distributeurs sur leurs territoires respectifs ; - Le Groupe complète son organisation par des fonctions transversales au service des Activités et des Continents. Pilotées par les Directeurs Généraux adjoints, elles couvrent les Ressources Humaines, la Finance, la Stratégie et les Activités, les Marques, l’Industrie, la Technologie, le Développement durable, les Systèmes d’information, la Supply Chain, la Qualité, les Achats et le Juridique. Elles veillent au bon fonctionnement de l’organisation générale du Groupe 1.2 - L’organisation de l’innovation Rattachée depuis 2005 à la Direction de la Stratégie du groupe, la Direction de la Technologie est responsable du portefeuille technologique du groupe, de la définition des axes clés, de la direction des pôles technologiques et de la propriété industrielle, ainsi que de la mise en oeuvre de méthodes et d’outils de management de la R&D. Sa mission première est de gérer un portefeuille de projets (identification, évaluation et focalisation) à partir des stratégies déterminées par les Activités. Les ressources, méthodes et outils pour faire vivre ce portefeuille sont managés : - au niveau central, la Direction de la Technologie (40 personnes sur les 520 en R&D) située au siège à Ecully, regroupe des ressources technologiques (matériaux et électronique) et organisationnelles (méthodes, propriété industrielle et relations extérieures). - au sein des activités : chaque activité a un management propre de sa recherche pour développer ses familles de produits. Des équipes de développement sont dédiées à chaque site de production ; 2 Figure 2 – Organisation du Groupe après 2000 Avant la réorganisation, la recherche et le développement étaient effectués au sein de chaque société. Chaque société avait son modèle d’organisation propre. Lorsqu’une nouvelle activité au sein d’une société était créée, une nouvelle organisation de la recherche et du développement pouvait naître et se superposer à l’ancienne. La réorganisation a permis d’harmoniser l’organisation de la R&D en composant avec ces logiques locales. Aujourd’hui, un pôle Recherche est dédié à chaque activité et un service de Développement est prévu pour chaque site industriel. Cette réorganisation a également permis de mutualiser des expertises transversales, centralisées au niveau du groupe : « Avec la nouvelle organisation, on a véritablement une vision globale, on sait qui fait quoi et cela permet de ne pas être redondant d’un site à l’autre : on ne fait plus deux fois le même travail » (Directeur Méthodologie et Outils R&D, 2006). Le tableau 2 ci-dessous montre l’organisation précise des différentes activités du groupe au niveau des activités de R&D : Tableau 2 : Organisation de la recherche au sein des activités du groupe SEB Articles culinaires Cuisson électrique Préparation des aliments / boissons Soin du linge et de la personne et confort domestique Entretien de la maison Direction R séparée du D Non Oui Oui Oui Non Recherche et Marketing sur le même site Oui Oui, sauf pour un site Non Non Oui Séparation géographique de la R et du D Non Non Oui, sauf pour un site Non Non Recherche et Industrie sur le même site Oui Oui Oui, sauf pour un site Oui Oui Recherche sur Non Oui Oui Oui Non 3 plusieurs sites Pôle d’expertise/recherche sur site Oui Matériaux Non Oui Electronique Oui Electronique Non Avantages perçus de la nouvelle organisation Être proche des problèmes de développement et de production Clarifier le rôle de la recherche qui se trouve ainsi moins sollicité par le développement Être proche des activités et donc des marchés. Eviter le syndrome « tour d’ivoire » de la recherche Être proche des problèmes de développement et de production Ne se prononce pas Inconvénients perçus de la nouvelle organisation Trop de niveaux de décision Aucun Le rattachement de la recherche à la direction industrielle de l’activité nuit à ses ambitions de long terme Trop de niveaux de décision. Frilosité sur la rupture Ne se prononce pas 1.2.1 L’organisation interne de l’innovation La majorité des projets d’innovations sont menés dans les activités géographiquement dispersés en France et à l’étranger. Le groupe souhaite ainsi rapprocher le plus possible l’innovation de la production et des marchés. La sélection des projets d’innovation et l’obtention de financement dépendent de la décision du comité d’innovation. Ce dernier est composé du directeur d’activité et des responsables fonctionnelles en lien avec l’innovation (R&D, marketing, achats, etc.). Il intervient lors de la phase de recherche. Les projets d’innovation ont fait l’objet d’un gros travail de rationalisation pour homogénéiser les pratiques entre les activités. L’objectif de disposer d’un flux régulier « cadencé » d’une à deux innovations majeures par an est aujourd’hui atteint après la mise en place de la Direction de la Technologie. Afin d’harmoniser les pratiques d’innovation et de connaitre leur état d’avancement, le groupe a formalisé le processus d’innovation en deux grandes phases (Recherche puis Développement) applicable à tous les domaines d’activités (cf. schéma en page suivante). Ce processus d’innovation permet de structurer et de fiabiliser la démarche d’innovation. Il a permis d’une part d’augmenter la vitesse de mise sur le marché des produits et d’autre part de mieux définir les dates de lancement des nouveaux produits, dates qui précédemment restaient floues et rendaient problématique la mesure des délais. Ce processus offre l’avantage de ne pas découpler le processus de recherche (souvent considéré comme déconnecté des préoccupations du marché) du processus de développement et d’industrialisation. Cette conception intégrée de la R&D permet de profiter des synergies entre les deux métiers pour développer plus rapidement les produits. D’autant que le groupe est connu pour ses capacités à transformer rapidement des technologies issues d’autres secteurs pour créer des produits dans leurs propres marchés. 4 Figure 3 : Organisation du processus de conception et développement de nouveaux produits « La force du groupe est la connaissance de son métier d’industriel. On prend une technologie très coûteuse issue d’autres domaines que ceux déjà explorés par le groupe ou ailleurs et on l’adapte en l’optimisant en fonction des contraintes et des moyens de fabrication pour en faire des solutions performantes et économiquement viables. Avec le pèse-personne à impédance mètre, on est passé d’un produit à 50.000 euros destiné au marché médical à un produit à 50 euros. C’est le travail de la recherche de parvenir à muter la technologie pour qu’elle corresponde à nos besoins et nos contraintes industrielles. Pour faire cela, nous sommes obligés d’avoir un réseau de veille efficace pour repérer les technologies intéressantes » ; (Un responsable de la recherche, 2006). Si ce processus d’innovation permet d’innover plus vite, il ne contribue pas nécessairement au développement des innovations d’exploration. En effet, dans certains domaines d’activité, l’industrialisation se trouve à proximité de la R&D. Dans l’activité article culinaire par exemple, le procédé industriel qui est à l’origine de l’antiadhésif (innovation uploads/Industriel/ cas-seb.pdf

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