24 ALTER AGRI n°88- MARS-AVRIL 2008 Technique - Semences Traitements de semence

24 ALTER AGRI n°88- MARS-AVRIL 2008 Technique - Semences Traitements de semences compatibles avec l’AB Focus sur la thermothérapie La qualité des semences biologiques doit être optimale. Alors qu’aujourd’hui la plupart des semences biologiques ne sont pas traitées après récolte, plusieurs pistes sont envisagées pour améliorer leur qualité et pour lutter contre les maladies transmises par les semences. Parmi ces techniques figurent la thermothérapie et plus précisément les traitements à l’eau chaude. Très efficaces contre de nombreux agents pathogènes véhiculés par les semences, ces traitements peuvent être délicats à mettre en œuvre (durée du traitement, température...) pour ne pas affecter la faculté germinative des graines. Après une période d’oubli ou de déclin, cette technique n’a pas dit son dernier mot, on l’expérimente encore de nos jours sur de nouvelles espèces. Par Frédéric Rey (ITAB) BGH Ragna Hinke et Andreas Wisbar – Bingenheimer Saatgut AG Né il y a plus de 25 ans, le Cercle d’Initiative allemand pour la production de semences de légumes biologiques et biodynamiques, issu de la volonté de quelques produc- teurs, a permis la création de deux structures distinctes : KULTURSAAT : association des sélectionneurs de variétés potagères en biodynamie. BINGENHEIMER SAATGUT AG : entreprise de commercialisa- tion de semences potagères et florales biologiques et biodynamiques. Les clients de BINGENHEIMER SAATGUT AG (BGH) sont des maraîchers (65% des ventes) et des jardiniers amateurs. La multiplication est assurée par près de 80 agriculteurs mul- tiplicateurs situés en grande partie en Allemagne (65%), mais aussi en Hollande, Italie, France, Israël pour les espè- ces trop difficiles à multiplier sur place. BGH emploie plus de vingt personnes et dispose d’un laboratoire d’analyse de qualité des graines qui lui permet d’analyser systématique- ment tous les lots susceptibles d’être contaminés par des maladies transmises par les semences. Les pathogènes pour lesquels un traitement à l’eau chaude est réalisé : • Sur Chou et Radi : Alternaria, Phoma, Xanthomonas. • Sur Betteraves et Epinard : Phoma, Cercospora • Sur Persil, Carotte, Céleri : Septoria, Alternaria, Xanthomonas. Le traitement à l’eau chaude sur potagères en pratique par BGH : 1. Un premier essai est réalisé sur un petit échantillon afin de déterminer les paramètres de température et de durée optimaux. 2. La semence est versée dans des sacs en nylon de 2kg. 3. Les sacs sont trempés dans un bain thermostatique de 500 litres (cf photo) (à la T° et durée définies en essai). 4. La semence est ensuite refroidie à l’eau froide puis essorée dans une centrifugeuse (cf photo). 5. Le séchage est enfin réalisé sur tamis puis en caisses. 6. L’efficacité du traitement est mesurée en laboratoire. Témoignage sur semences potagères B ien qu’elles ne constituent pas le seul obstacle à la produc- tion de semences biologiques, les maladies transmises par les se- mences représentent un facteur important qui influence leur pro- duction et leur utilisation. Les producteurs souhaitent pouvoir bé- néficier de semences biologiques de qualités physique, germinative et sanitaire comparables à celles des semences conventionnelles. Les maladies transmises par les se- mences induisent notamment des manques à la levée (fonte des semis) ou des foyers primaires d’infection dans la parcelle. Une garantie de la qualité sanitaire des semences est àla base d’une production réussie, particulièrement dans les itinérai- res biologiques où les agents de protection des plantes sont peu nombreux et où les moyens pro- phylaxiques sont privilégiés. Au cours des dix dernières années, plusieurs méthodes et produits de traitements de semences poten- tiellement utilisables en agriculture biologique ont été tes- tés avec des résultats prometteurs. Entre 1999 et 2002, la FNAMS, le GEVES1 et l’ITAB ont mis en œuvre un programme de recherche, sou- tenu par le Ministère de l’Agriculture et l’ONIFLHOR, qui comprenait un volet sur la qualité germinative et sanitaire des semences. Les analyses sanitaires, menées sur des semences potagères biologi- ques fournies par différents établissements, ont mis en évidence la présence de pathogènes fongi- ques pouvant affecter la qualité germinative (ex. Alternaria,Phoma). Des travaux prometteurs ont éga- lement été menés sur la désinfection des semences de ca- rottes contaminées par Alternaria dauci (cf. Alter-Agri n°532). Faute de moyens, ces travaux n’ont pu être poursuivis jusqu’à présent. Un programme sur cette thématique 1 GEVES : Groupe d’Etude et de Contrôle des Variétés et des Semences 2 Numéro téléchargeable sur www.itab.asso.fr , rubrique Publications 25 MARS-AVRIL 2008 - ALTER AGRI n°88 Technique - Semences vient cependant d’être déposé par l’ITAB et plusieurs partenaires dans le cadre de l’appel d’offre des contrats de branche du Ministère. Il propose de reprendre et de déve- lopper ces travaux tout en poursuivant les bilans sanitaires exhaustifs des lots produits en agri- culture biologique. Un autre dossier aété déposé sur la carie commune du blé, principale problématique sur semences de céréales. Méthodes de désinfection de semences compatibles avec les principes de l’AB Plusieurs pistes sont étudiées pour améliorer la qualité des semences biologiques et lutter contre les ma- ladies transmises par les semences. Les techniques culturales et les me- sures préventives restent à la base du contrôle de ces agents pathogè- nes (isolement, zones de production, rotations, pratiques culturales et d’ir- rigation, choix variétal…) et les traitements ne sont envisagés que lorsqu’il n’y a pas d’autrealternative. La désinfection d’une semence consiste à améliorer son état sani- taire, par élimination de tout ou partie de la flore pathogène qu’elle porte en surface, voire en profon- deur parfois, selon les propriétés du procédé employé. Il existe de nom- breuses publications en matière de désinfection de semences compa- tibles avec les principes de l’AB. Cependant, l’évaluation de ces tech- niques porte surtout sur leur efficacité et prend rarement en compte la faisabilité pratique et l’in- cidence sur les facteurs de production. A ce jour, peu d’entre elles sont d’ailleurs appliquées à l’échelle industrielle. Méthode de désinfection Elles sont regroupées en quatre catégories :(Micheloni et al., 2007) • Méthodes physiques : la ther- mothérapie est la technique la plus étudiée. Différents fluides de trans- fert de chaleur sont possibles (eau, air, vapeur). D’autres méthodes sont aussi développées : rayonne- ment infrarouge, pression osmotique, ultrasons, vide, mé- caniques (brossage, ventilation), stockage (Mériaux, 2008). •Méthodes chimiques :traitement au cuivre, acides (lactique, acéti- que), éthanol... • Extraits organiques : poudre de lait, de moutarde (ex. TILLECUR), ex- traits de plantes, huiles essentielles. • Micro-organismes : ce sont les méthodes les plus récentes. Il est potentiellement possible de déve- lopper des agents de contrôle biologiques contre différents pa- rasites, mais ils seront spécifiques d’un pathogène, la technique ne pourrapas êtreuniverselle.Cesont souvent des champignons ou des bactéries qui sont utilisés, en en- robage de semences.Des produits de ce type sont déjà commerciali- sés en Europe,comme le CEDEMON sur céréales, par exemple. Aspects réglementaires : Seules les méthodes physiques telles que la thermothérapie n’ont actuellement pas de contrainte réglementaire, excepté le respect de conditions de sécurité. (encadré 2). Les traitements de semences à l’eau chaude Très efficaces contre de nombreux agents pathogènes véhiculés par les semences, ces traitements peu- vent être délicats à mettre en œuvre (durée du traitement, température) pour ne pas affecter la faculté ger- minative des graines. Après une période de déclin liée au dévelop- pement des traitements chimiques des semences, cette technique est ànouveau expérimentée, voire uti- lisée à l’échelle industrielle (Wisbar et Hinke, 2008), en particulier dans certains systèmes de culture biolo- gique où il n’existe aucun traitement de semences homologué à ce jour. Le 22 janvier dernier, une journée technique organisée par l’ITAB a permis de faire un point sur cette méthode et de dégager des pistes de travail. Elle a rassemblé une cinquantaine de participants dont de nombreux techniciens d’établissements semenciers. Outre les témoignages de praticiens (voir encadrés), les interventions de la SNES* et de la FNAMS ont permis de faire le point sur les maladies transmises par les semences et les méthodes de désinfection. Actes complets disponibles sur www.itab.asso.fr ITAB * SNES : Station National d'Essais de Semences Sur potagères, la technologie du traitement à l'eau chaude peut être appliquée sur la plupart des espèces avec une bonne efficacité contre les infestations fongiques et bactériennes. ITAB 26 ALTER AGRI n°88- MARS-AVRIL 2008 Technique - Semences Sur potagères, la technologie du traitement à l’eau chaude peut être appliquée sur la plupart des espè- ces avec une bonne efficacité contre les infestations fongiques (95% sur les espèces d’Alternaria, 80 à 95% contre les Phoma lingam et Phoma valerianella(Nega et al., 2003) et bactériennes. Les paramètres du traitement va- rient de 50 à 53°C et de 10 à 40 minutes suivant les espèces et pa- thogènes concernés. Cette technique présente cepen- dant quelques inconvénients (Wisbar et Hinke, 2008) : - On peut difficilement générali- ser les paramètres du traitement : les réactions de chaque lot varient en fonction de son degré de ma- turation, de son infestation en pathogènes et de son origine. -Certaines espèces ne supportent pas ce procédé comme par exem- ple le cresson, la roquette et le basilic. - Elle nécessite un équipement spécifique et une adaptation du process industriel : matériel per- Stéphane Le uploads/Industriel/ alteragri-88-2008-p24-27.pdf

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