Mohamed Tounsi CIHEAM/IAM, Montpellier (France) Résumé. Les objectifs de la str

Mohamed Tounsi CIHEAM/IAM, Montpellier (France) Résumé. Les objectifs de la strategie alimentaire adoptée en Algbrie ont été longtemps determinés par l’ambition dun développement indépendant dont le noyau était l’industrialisation, avec pour corollaire le developpement agri- cole, afin d‘assurer la sécuritb alimentaire du pays. Dans ces conditions, le secteur des industries agro-alimen- taires se développe mais le choix. d’un modèle de consommation alimentaire va influer sur le systame technique et le type d‘industrie mis en place. Des distorsions graves vont apparaître et contrarier durablement les objectifs de s6curité alimentaire. Face aux faibles performances agricoles et en raison dune pression démographique forte dans le contexte. dune amelioration relative du pouvoir d‘achat des consommateurs, le recours aux importations agricoles et alimentaires devient inevitable. Les limites du projet de politique agro-alimentaire indépendante capable d‘assurer un certain seuil de sécurité alimentaire sont exarninbes. La mise en oeuvre de la Reforme éco- nomique B partir des années 80 et les accords relatifs au Programme d‘Ajustement Structurel en 1993 risquent d‘être A l’origine de nouvelles contraintes sur le système agro-alimentaire. Mots clés. Sécurité alimentaire - Industries agro-alimentaires - Industrialisation - Politique agro-alimentaire - Algérie. Abstract The objectives of the food strategy adopted in Algeria have long been determined’by the aim of indepen- dent development with industrialisation as the core and agricultural development as a corollary to ensure food security for the country. This has led to the development of considerable potential in the agrofood industry but the choice of a food consumption pattern influenced the technical system and the type of indus@ setup. Sérious distortions emerged and formed a lasting hindrance to the food securiiy objectives. Poor petformance in agriculture and strong population pressure in. the context of a relative increase in consumer purchasing power made agricultural and food imporis inevi- table. The limits of the independent agrofood policy capable of providing a cettain degree of food security are exami? ned. The implementation of economic reform from the 1980s onwards and the agreements concerning the sb-uctuml adjusrmentprogramme in 1993 may prove to be the source ofnew constraints on the agrofood system. Keywords. Food security - Agrofoodindustry - Industrialisation - Agrofood policy -Algeria. I - Introduction Les projets de politique agricole et alimentaire adoptés en Algérie ont longtemps avancé comme préoc- cupation centrale la nécessité de définir une stratégie alimentaire dont l’objectif premier consistait B pro- duire, par une série de mesures techniques, économiques et sociales, de façon à réduire la dépendance au marché mondial. Cette option était conforme à la démarche globale du développement économique et social qui affichait d’emblée, par un programme ambitieux dont le noyau était l’industrialisation, une volonté d’indépendance et de sécurité alimentaire du pays. Les options algériennes largement industrialo-centristes ont développé deux axes importants : O La construction d’une infrastructure industrielle articulée autour du rôle privilégié des hydrocarbures et des effets structurants de l’industrie lourde (métallurgie, sidérurgie, électromécanique et chimie). Plus tard, en aval de cette hyperstructure, a été édifié un complexe industriel capable d’offrir une large gamme de biens d’équipements - principalement destinés à satisfaire lés besoins d’intensifica- tion de l’agriculture - et de produits de large consommation ; . le secteur de l’industrie agro-alimentaire (IAA) y occupait une place déterminante. O La dynamique d’un marché intérieur impulsant la croissance d’une agriculture fournie en -intrants (mécaniques, chimiques ...) par l’industrie locale qui elle-même réalise des performances en termes d’inttigration et d’efficacité. Cette orientation en matiere de développement avait pour premier effet attendu de favoriser un. renforcement des relations agriculture-industrie et de promouvoir la satisfac- tion des besoins de la population, au centre desquels les besoins alimentaires. , Options Mdditerrandennes, Sér. A /n026, 7995 - Sécurité alimentaire en Méditerranée CIHEAM - Options Mediterraneennes Serie A: Seminaires mediterraneens Ces deux axes se trouvaient étayés par la nécessaire maîtrise technologique, partie intégrante de la volonté d’indépendance et de la sécurité que devait garantir I’édifice économique - la maîtrise technolo- gique, objectif et moyen, passant nécessairement par le transfert des technologies modernes et adap- tées. L’adoption par le planificateur d’un cerain modèle de consommation alimentaire va se traduire par des choix techniques qui influenceront le type d’industrie agroialimentaire mis en place et qui vont constituer l’objet principal de notre réflexion. Avant d’examiner les conditions d’évolution du secteur des IAA, il nous faut retracer à grands traits le cadre général du developpement économique et social tel que le dessina le mouvement d’industrialisa- tion qui marque les trois dernières décennies. II - Industrialisation et stratégie agro-alimentaire L’agriculture etant incapable de dégager des excédents et de mobiliser des recettes d’exportation, très vite la valorisation d’une ressource naturelle unique et prépondérante, les hydrocarbures, jouera un rôle décisif dans le modèle d’accumulation et sera à l’origine paradoxalement de nombreuses distorsions liées au trend d’évolution des recettes pétrolières. Ce modèle en faveur d’une industrialisation rapide va absorber le plus gros des investissements. II privi- légiera, par remontée de filières, les secteurs industriels de base : sidérurgie et pétrochimie et se préoc- cupera d’assurer la promotion des autres branches des industries électromécaniques, métallurgiques, en vue de fournir en équipements divers les autres secteurs et, à l’arrière-plan, d’améliorer l’intégration intersectorielle et la satisfaction des besoins de consommation. La structure de la Valeur Ajoutée (VA) de l’industrie à la veille du lancement des grands projets des annees 70 montre que les industries de transformation procurent 33,6% de la VA totale (IAA, Industries électromécaniques, Chimie, Textiles et Cuirs et Matériaux de construction), laissant une part relative- ment faible pour les Mines et carrières (3,2%), Energie (5,6%) et Bâtiments et Travaux Publics (7,6%), tandis que les hydrocarbures réalisent déjà 50% de la VA. Ajoutons qu’entre 1963 et 1969, le volume des investissements industriels s’accroît considérablement, passant de 23 à 60% de l’investissement total annuel (le secteur des hydrocarbures, de la pétrochimie, de la sidérurgie et de la mécanique reçoi- vent B eux seuls plus de 45% du total). 1. Les deux phases du mouvement d’industrialisation Les programmes planifiés retenaient l’horizon 1980 comme étape charnière mais des infléchissements de politique économique importants ont été opérés au-delà de cette date. Les nécessaires réformes de I’économie nationale et les restructurations en vue d’instaurer les conditions d’une économie de marché, ainsi que les mesures contraignantes d’ajustement structurel préconisées par les institutions financières internationales à partir du milieu des années 80, ont trouvé une issue fatale avec le rééchelonnement de la dette en 1993. Dans une première phase et jusqu’en 1980, le projet national se constitue avec une priorité absolue aux investissements industriels qui passeront de 54% à 60% du volume total des réalisations (Tableau 7). La particularité reside à trois niveaux : D distorsion entre les branches industrielles en raison de la place privilégiée accordée aux hydrocar- bures ; D derapages en matière de rythme et de structures d’investissement réalisés par rapport aux objectifs du plan (A la fin du 2ème plan quadriennal, l’industrie réalise 60,7% du, total des investissements alors que l’objectif fixé était de 43,6 %.seulement) ; Q insuffisantes r6alisations en matiere d’investissements agricoles (pour la même période, ils atteignent à peine 7,3% alors que le projet était de 13,2%). - 62 Options Méditerranéennes CIHEAM - Options Mediterraneennes Serie A: Seminaires mediterraneens L’accent est mis, dans tous les projets planifiés, sur la mise en place d’une structure industrielle cohe- rente )) favorisant l’intégration interindustrielle et la modernisation de l’appareil productif national. Cet effort consacre certains secteurs industriels dont les taux de croissance de la VA industrielle moyen- ne sont élevés : hydrocarbures (4,8%), eau-énergie (17,7%), ISMME (16,3%), matériaux de construction (1 7,2%) et industries manufacturières (1 0,8%). Après 1980, une nouvelle etape de ‘l’industrialisation commence et si les principales orientations sont maintenues, les objectifs tels qu’ils ressortent des deux plans quinquennaux (1980-1984 et 1985-1989) vont se fonder sur le rattrapage des programmes précédents et inachevés. Ces derniers envisagent la correction des désequilibres observes dans l’exécution des, projets industriels et d‘infrastructure. Les nouveaux plans renvoient à l’horizon 1990 la perspective d’une couverture plus complète des besoins sociaux et culturels d’une population déjà plus nombreuse et plus exigeante sur les conditions générales du cadre de vie (habitat, santé, education, alimentation). Les,motivations pour la recherche d’une plus grande adaptation du système productif aux besoins vont aller de pair avec l’affirmation d’une volonté d’obtenir une meilleure efficience (amélioration des capacités de réalisation et d’engineering, maturation des projets industriels et agricoles). L’inflechissement est cependant plus important puisque cette période va ouvrir une perspective de refonte du système 6conomique et social, considéré comme une pause dans le grand mouvement d’industrialisation, et se traduire tout au long de la décennie par une serie de réformes et de restructura- tions des secteurs industriels et agricoles qui se fondent de plus en plus sur la nécessité de mettre fin i l l’economie planifiée et de reunir les conditions du passage à I’économie de marché. Au-delil de ces considérations préliminaires, les plans affichent des objectifs avec un taux d’accumula- tion plus faible pour l’industrie qui va s’établir autour de 38% de l’investissement total. Cela conduit i l un réel ralentissement du rythme des investissements industriels au profit d’un réequilibrage uploads/Industriel/ securite-alimentaire-en-algerie 1 .pdf

  • 16
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager