JEAN-LUC VIRUÉGA Traçabilité Outils, méthodes et pratiques © Éditions d’Organis
JEAN-LUC VIRUÉGA Traçabilité Outils, méthodes et pratiques © Éditions d’Organisation, 2005 ISBN : 2-7081-3260-1 © Éditions d’Organisation De l’étalonnage… La traçabilité est un concept que l’on trouve au début des années 1960 dans des manuels militaires américains de définition des bonnes pratiques de mesure1. La traçabilité comporte alors trois points essentiels. Tout d’abord, une mesure était considérée comme traçable par le NIST2 si et seulement si le matériel avait été calibré avec des gran- deurs physiques dérivées de constantes naturelles, ces standards de référence ayant été certifiés et reconnus comme tels au préalable. Ensuite, la traçabilité est la rela- tion entre un résultat de mesure et des étalons nationaux via une chaîne ininterrompue de comparaisons. Enfin, la traçabilité est la capacité à relier une mesure à des réfé- rences qui sont des étalons provenant du NIST, ou des grandeurs physiques fondamentales reconnues par le NIST ou encore des standards d’autres pays en équiva- lence avec le NIST. Ces trois points fondent la définition actuelle de la traçabilité en métrologie, à savoir : « Propriété d’un résultat d’un mesurage ou d’un étalon tel qu’il puisse être relié à des références déterminées, généralement des étalons nationaux ou internationaux, 1. GARNER E. L., RASBERRY S. D., « What’s New in traceability », Journal of testing and Evaluation, vol. 21, n˚ 6, November 1993 ; pp. 505-509, American Society for Testing and Materials, 1993. 2. NIST : National Institute of Standards and Technology. 1 18 L’évolution de la traçabilité : des années 1960 à nos jours © Éditions d’Organisation par l’intermédiaire d’une chaîne ininterrompue de comparaisons ayant toutes des incertitudes déter- minées1. » En note, on trouve les remarques suivantes. « 1. Ce concept est souvent exprimé par l’adjectif “traçable”. 2. La chaîne ininterrompue de comparaisons est appe- lée chaîne de raccordement aux étalons ou chaîne d’éta- lonnage. 3. La manière dont s’effectue la liaison est appelée “rac- cordement aux étalons”. » Les points principaux qui ressortent de ces deux défini- tions sont la présence d’une chaîne ininterrompue d’infor- mations, une base reconnue par l’institution nationale ou internationale et une application générique. Cette appa- rente stabilité entre ces deux définitions masque des évo- lutions dues autant à des critiques qu’à des progrès. On peut répartir ces évolutions en trois catégories : la notion d’incertitude, les effets du secteur industriel sur l’évolution de ce concept et les liens entre l’assurance qualité et la traçabilité. La notion d’incertitude Cette notion apparaît à deux niveaux : la traçabilité comme outil de maîtrise de l’incertitude2 et l’existence d’incertitude dans la chaîne de comparaisons du système 1. Vocabulaire international des termes fondamentaux et généraux de métrologie, VIM, 1993, rubrique 6.10. 2. CLARKE Kenneth K., HESS Donald T., « Phase Measurement, Tra- ceability, and Verification Theory and Practice », IEEE transactions on instrumentation and measurement, vol. 39, n˚ 1, February 1990, IEEE 1990. De l’étalonnage… 19 © Éditions d’Organisation de traçabilité1. La traçabilité comme outil de maîtrise de l’incertitude de la mesure est un premier usage de la traçabilité. Il correspond aux définitions classiques (cf. ci- dessus), à savoir un outil de maîtrise des appareils de mesure par un calibrage et un étalonnage standard et défini par des organismes reconnus dans le domaine. Donc la traçabilité est un outil du management de la qua- lité des mesures2 qui permet une gestion adaptée de l’incertitude de la mesure en bout de chaîne de traçabilité. Mais les contraintes industrielles rendent souvent cette chaîne de traçabilité trop rigide par rapport aux temps de mesure et aux changements incessants des caractéris- tiques des produits. Aussi, il est nécessaire d’intégrer l’incertitude dans la définition de traçabilité3. Ces auteurs montrent au travers des exemples de différents secteurs qu’il est nécessaire d’admettre la présence d’incertitude tout au long de la chaîne de traçabilité pour maîtriser plus efficacement la mesure en bout de chaîne. En outre, cette 1. KEITH Lawrence H., « Rethinking Traceability », Environment Science Technology, vol. 28, n˚ 13 ; 590A-591A 1994, American Che- mical Society 1994 et GARNER E. L. et RASBERRY S. D., « What’s New in traceability », Journal of testing and Evaluation, vol. 21, n˚ 6, November 1993 ; pp. 505-509, American Society for Testing and Materials, 1993. 2. THOMPSON Michael, « Sense and Traceability », The Analyst, vol. 121 ; pp. 285-288, 1996. 3. BELL Malcom R., « What is Traceability of Measurement ? », The Quality magazine, February 1993 ; pp. 55-57, 1993, GARNER E. L. et RASBERRY S. D., « What’s New in traceability », Journal of tes- ting and Evaluation, vol. 21, n˚ 6, November 1993 ; pp. 505-509, American Society for Testing and Materials 1993, KISETS D., « Traceability - Traceability and Quality Assurance », Bulletin de l’Organisation internationale de Métrologie, vol. 39, n˚ 1, January 1998 ; pp. 11-17, 1998, et EHRLICH C. et RASBERRY S., « Traceability - Metrological timelines in traceability », Bulletin de l’Organisation internationale de Métrologie, vol. 39, n˚ 3, July 1998 ; pp. 16-28, 1998. 20 L’évolution de la traçabilité : des années 1960 à nos jours © Éditions d’Organisation incertitude inhérente au contexte industriel amène à remettre en question l’organisation du système d’accrédi- tation1 et donc à proposer non plus un choix standard mais plutôt des choix de système de traçabilité adaptés aux secteurs2. Ces propositions de choix sont bien mises en évidence dans le secteur de la chimie où la traçabilité n’est pas complètement acceptée car trop éloignée des méthodes analytiques de mesure3. En définitive, la traçabilité n’est plus une chaîne ininter- rompue de comparaisons, c’est plutôt une chaîne ininter- rompue d’incertitudes. Cette première évolution met en évidence les deux autres faits importants : l’interaction entre le domaine industriel et la définition de la traçabi- lité, et le lien entre la traçabilité et l’assurance qualité. 1. KEITH Lawrence H., « Rethinking Traceability », Environment Science Technology, vol. 28, n˚ 13 ; 590A-591A 1994, American Che- mical Society 1994 et EHRLICH C. and RASBERRY S., « Traceability - Metrological timelines in traceability », Bulletin de l’Organisation internationale de Métrologie, vol. 39, n˚ 3, July 1998 ; pp. 16-28, 1998. 2. GARNER E. L. and RASBERRY S. D., « What’s New in traceability », Journal of testing and Evaluation, vol. 21, n˚ 6, November 1993 ; pp. 505-509, American Society for Testing and Materials, 1993 et RIOS A. and VALCARCEL M., « Is traceability an exclusive property of analitycal results ? An extended approach to traceability in chemical analysis », Fresenius Journal of Analyti- cal Chemistry, 1997, n˚ 359 ; pp. 473-475, Springer-Verlag 1997. 3. CHRISTENSEN J.M. and KRISTIANSEN J., « Traceability and uncertainty in analytical measurements », Annals of Clinical Bio- chemistry, 1998, n˚ 35 ; pp. 371-379, 1998, ADAMS Freddy, « Traceability and analytical chemistry », Accreditation and Quality Assurance, 1998, n˚ 3 ; pp. 308-316, Springer-Verlag, 1998 et BECK Charles M. II, « A traceability protocol to the SI by gravimetric analysis », Accreditation and Quality Assurance 1998, 3 ; pp. 482- 484, Springer-Verlag, 1998. De l’étalonnage… 21 © Éditions d’Organisation Effet du secteur industriel d’application de la traçabilité sur la définition Le secteur de la chimie est exemplaire de la remise en cause empirique du côté générique de la traçabilité et donc de l’unicité de la définition. Ce domaine à la marge des grandeurs mesurables telles que la masse ou la longueur demande des protocoles et une structure parti- culière de traçabilité. Il s’agit de baser la chaîne de traçabilité sur des grandeurs spécifiques1 ou encore de combiner des méthodes expérimentales et analytiques2. Des termes associés à la traçabilité apparaissent3 tels que la traçabilité des standards de mesure, la traçabilité des équipements de mesure ou encore la traçabilité d’un échantillon. Dans le domaine du courant électrique, on retrouve aussi cette remise en cause et cette volonté de spécifier et d’établir des « artefacts » de traçabilité4 et des méthodes pratiques de traçabilité de valeurs complexes5. 1. THOMPSON Michael, « Sense and Traceability », The Analyst, 1996, vol. 121 ; pp. 285-288, 1996. 2. CHRISTENSEN J.M. and KRISTIANSEN J., « Traceability and uncertainty in analytical measurements », Annals of Clinical Bio- chemistry, 1998, n˚ 35 ; pp. 371-379, 1998. 3. RIOS A. and VALCARCEL M., « Is traceability an exclusive pro- perty of analitycal results ? An extended approach to traceability in chemical analysis », Fresenius Journal of Analytical Chemistry, 1997, n˚ 359, pp. 473-475, Springer-Verlag 1997. 4. HUNTLEY Les, « Establishing traceability for a high performance AC/DC transfer standard », ISA Transactions, 1990, vol. 29, n˚ 4, ISA 1990. 5. CLARKE Kenneth K. and HESS Donald T., « Phase Measurement, Traceability, and Verification Theory and Practice », IEEE Transac- tions on instrumentation and measurement, vol 39, n˚ 1, February 1990, IEEE 1990. 22 L’évolution de la traçabilité : des années 1960 à nos jours © Éditions d’Organisation Ces deux secteurs nous montrent bien combien la traçabi- lité est un concept délicat à appliquer à tous les secteurs de la même manière. Les liens entre la traçabilité et l’assurance qualité Ces liens se décomposent en deux catégories uploads/Industriel/ tracabilite-viruega-montpellier.pdf
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- Publié le Mar 22, 2022
- Catégorie Industry / Industr...
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