Innovations Agronomiques 16 (2011), 181-192 Le bananier et ses produits dans l’

Innovations Agronomiques 16 (2011), 181-192 Le bananier et ses produits dans l’alimentation animale Archimède H.1, Gourdine J.-L.1, Fanchone A.1, Alexandre G.1, Marie Magdeleine C.1, Calif E.1, Fleury J.2, Anais C.2, Renaudeau D.1 1 : INRA, Unité de Recherches Zootechniques, UR143, 97170 Petit-Bourg, Guadeloupe 2 : INRA, Plateforme Tropicale d’Expérimentation Animale, UE2294, 97170 Petit-Bourg, Guadeloupe Correspondance : Harry.Archimede@antilles.inra.fr Résumé : Les feuilles et faux tronc (stipe) du bananier, les fruits non commercialisés (écarts de triage) peuvent être valorisés par les animaux d’élevage. Les ruminants peuvent utiliser tous les produits du bananier alors que les monogastriques n’utilisent efficacement que les écarts de triage. Quelque soit l’espèce animale, les fruits ont une valeur énergétique proche de celle des céréales. Les écarts de triage, ainsi que les stipes, sont par contre carencés en protéines. Les feuilles consommées par les ruminants ont la même valeur alimentaire d’une herbe de qualité moyenne. L’optimisation de la valorisation des produits du bananier passe par l’évolution des bananeraies, aujourd’hui en monoculture, en unités de production de type polyculture élevage. Des travaux sont encore nécessaires pour développer ces nouveaux systèmes de production. Mots-clés : bananes, feuilles, stipes, ruminants, monogastriques Abstract: Banana plant and byproducts as animals feeds The leaves, pseudostems of banana and non-marketed fruits can be valued by the livestock. Ruminants can use all the products of banana plant while monogastrics use efficiently only the fruits. Whatever the animal species, the fruits have an energy value similar to cereals. The fruits and the speudostems are deficient in protein. Leaves eaten by ruminants have the same nutritional value as a medium-quality grass. Optimizing value of banana products needs a change in banana plantations, from a monoculture to mixed farming systems. Work is still needed to develop these new production systems. Keywords: Bananas, leaves, pseudostems, ruminants, monogastrics Introduction La banane d’exportation couvrait en 2009, 2100 ha en Guadeloupe et 5700 hectares en Martinique respectivement. La production de fruits était de 59 000 et 190 000 tonnes pour la Guadeloupe et Martinique. La fonction première d’une bananeraie est de produire des fruits pour l’exportation. Depuis quelques années, des jachères assainissantes ont été introduites dans les bananeraies afin de couper le cycle des nématodes du sol responsables de lourdes pertes en fruits (Sarah et al., 1983). Ces jachères sont quelquefois plantées en canne à sucre mais peuvent aussi accueillir des prairies naturelles ou plantées, pâturées principalement par des bovins. En Guadeloupe, des ateliers d’élevage, principalement de porcs, se sont développés à l’extérieur des bananeraies. Ils valorisent la fraction non commercialisée (écarts de triage, 15 à 20% de la production) de la banane produite. En Martinique, des élevages de ruminants et de porcs se partagent les écarts de triages. H. Archimède et al. 182 Innovations Agronomiques 16 (2011), 181-192 Hormis les écarts de triage, les faux troncs (stipe) et feuilles de bananier sont aussi des aliments potentiels pour les herbivores (Geoffroy, 1980). Ils sont déjà utilisés de façon épisodique chez les petits producteurs. De plus, les feuilles et les stipes sont des alicaments dont l’activité anthelminthique a été testée (Marie-Magdeleine et al., 2011). Les pelures de banane sont aussi des aliments potentiels à destination principalement des herbivores et secondairement des porcs (Tartrakoon et al., 1999 ; Lapenga et al., 2009). L’utilisation des produits du bananier dans l’alimentation animale doit intégrer la contrainte des produits phytosanitaires utilisés en bananeraie. Ainsi, compte tenu de la pollution des terres par la chloredécone, la base de certaines herbes des jachères peut être contaminée. Il en est de même pour la base des stipes alors que les fruits et les feuilles seraient indemnes de chloredécone. L’objectif principal de cet article est de faire le point sur les modalités pratiques d’utilisation des produits du bananier dans l’alimentation animale. De fortes différentes existent dans la composition chimique des bananiers, notamment entre les variétés dessert (Cavendish) et légumes (Plantains). Cette étude porte sur les variétés Cavendish. Les produits du bananier : disponibilité et composition chimique Disponibilité des produits La production totale moyenne d’un hectare de banane est d’environ 188 tonnes de matière verte ce qui correspond à 27 tonnes de produit sec. Cette biomasse se décompose comme indiquée dans le Tableau 1. Les pelures de banane, bien que faiblement disponibles en Guadeloupe et Martinique du fait de l’absence d’industries agroalimentaires, sont aussi des ressources de bonne valeur alimentaire pour les ruminants. Dans l’organisation actuelle de la chaîne de récolte de la banane, le temps de travail pour accéder aux ressources est une contrainte forte. La disponibilité de feuilles et de stipes est comparable à celle d’une prairie. Aujourd’hui, les feuilles et les stipes restent sur les parcelles comme fumure organique. Cependant, un ouvrier agricole peut sortir d’une parcelle de bananeraie en plaine, en moyenne 12 à 15 bananiers (feuilles + stipe) par heure, soit environ 160 kg de matière sèche. Cela correspond à la ration fourragère quotidienne d’une dizaine de taurillons à l’engraissement entre 150 et 450 kg. A la sortie de la chaîne, il faut environ 80 minutes à un homme pour charger manuellement 1 tonne d’écarts de triage. Dans l’hypothèse d’une introduction d’ateliers d’élevage hors sol sur les bananeraies, le fumier produit pourrait être valorisé à l’intérieur de la parcelle suivant un itinéraire qui reste à déterminer. Dans les bananeraies contaminées par la chlordécone, il conviendrait de s’assurer que les stipes ne soient pas contaminés. Des travaux préliminaires indiquent que dans certains cas les stipes seraient contaminés alors que les feuilles pourraient être indemnes. Tableau 1. Estimation des quantités de biomasse disponible par hectare de bananeraie Biomasse Totale Fruits Total Ecarts de Triage Feuille Verte Stipe Feuilles Hampe Vert (kg) 188000 45000 7000 40000 95000 4000 5500 Sec (kg) 27000 8800 1300 8000 7800 2600 360 Le bananier en alimentation animale Innovations Agronomiques 16 (2011), 181-192 183 Fruit : 24% de la Matière fraîche; 32% du poids sec Feuilles : 21% de la Matière fraîche; 29% du poids sec Stipe (faux tronc) : 50% de la Matière fraîche; 25% du poids sec Hampe : 2% de la Matière fraîche 1,3% du poids sec Contribution des principaux « organes » du bananier à sa biomasse totale Composition chimique des produits La banane fruit La composition chimique de la banane fruit (Tableau 2 a et b) varie avec son stade de récolte (maturité) appréciée en somme de degrés.jours 1 . Les régimes de banane destinés à l’exportation sont généralement récoltés à 900°C.j. La banane fraîche a une teneur élevée en eau qui limite la densité énergétique de la ration de certains animaux d’élevage (porc, volaille, etc..). Elle est pauvre en matières minérales (4 à 10%) de la Matière Sèche (MS) dont le potassium représente le principal élément (70 à 80 % des cendres totales). La banane a une faible teneur en azote comparativement aux céréales. De plus, une fraction importante de cet azote (25 à 30%) est sous forme soluble non valorisable par les monogastriques. Cela entraînera une plus forte complémentation en protéines lors de la formulation des rations des ruminants et monogastriques. . Les stades de récolte variant 750 à 1050°C.j ont peu d’effet sur la composition chimique et la valeur énergétique des différentes fractions d’un régime de banane et du fruit en particulier (Renaudeau et Marie-Magdeleine, 2010). En conséquence, ces évolutions ont peu d’effet sur la valeur énergétique sur la valeur énergétique du fruit. A l’intérieur de cette fourchette (750 à 1050°C.j), la banane est encore verte et riche en amidon. La composition chimique de la banane mûre est par contre différente de celle de la banane verte. L’amidon initialement présent dans le fruit vert se transforme progressivement en sucre. Les tanins présents dans la peau du fruit disparaissent. La pulpe quant à elle, a une valeur énergétique proche de celle du maïs. 1 Degrés jours : sommes des écarts de la température ambiante avec une température de base ou température zéro de croissance. Pour le bananier la somme de degrés jours est calculée à partir de l’apparition du fruit et la température de base est 14°C. H. Archimède et al. 184 Innovations Agronomiques 16 (2011), 181-192 Tableau 2 a. Evolution de la composition de différentes fractions du régime de banane Constituants chimiques MS MO MAT Amidon Sucre NDF ADF Fraction Fruit entier vert 19-21 94,7-96 5,0-5,3 67,7-71,0 1,4 -2,2 11,0-11,8 7,7 mûr 19,5 95,5 5,0 5,5 70,0 10,2 8,0 Pulpe verte 30,3 91,7-96,5 3,2-3,5 74,8-77,7 4,4-8,7 15,6-16,2 mure 22,5 97,0 4,0 12 Peau verte 82,0 6,6 mure 8,8 Hampe 71,3-74,2 7,6-9,9 1,1-2,1 2,5-4,5 55,4-58,7 Feuilles 21 90 11,4 89 61 33 Stipe 10 90 3,5 85 67 20 Tableau 2 b. Composition minérale de la banane en pourcentage (Geoffroy, 1985) Fruit entier Peau Pulpe Calcium 0,05 – 0,21 0,14 0,02 – 0,04 Phosphore 0,03 – 0,17 0,13 - 0,17 0,08 – 0,13 Potassium 2,0 - 4,0 5,0 - 8,3 1,0 – 2,5 Sodium 0,07 0,26 0,15 Les feuilles et stipes du bananier Le bananier est une grande herbe. Les compositions chimiques des feuilles et stipes de bananier sont indiquées dans le Tableau 2. Contrairement aux feuilles qui ont des uploads/Industriel/ vol16-14-archimede.pdf

  • 12
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager