HAL Id: hal-01561625 https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01561625 Submitted on

HAL Id: hal-01561625 https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01561625 Submitted on 13 Jul 2017 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entific research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés. Distributed under a Creative Commons Attribution - NonCommercial - NoDerivatives| 4.0 International License Exposer l’architecture Pascal Amphoux To cite this version: Pascal Amphoux. Exposer l’architecture : Propos autour d’un pléonasme fondateur. Faces, Journal d’architecture, 2004, vol. hiver 2003-2004 (n°53), p. 18-22. ￿hal-01561625￿ Exposer l'architecture Propos autour d'un pléonasme fondateur Pascal Amphoux, LADYT, EPFL, Lausanne article pour la revue Faces, juillet 2003 L'architecture, par principe, s'expose – aux rigueurs du climat, à l'usure de l'usage, à la culture du regard. Je veux dire qu'elle ne peut exister, au sens fort du terme, que dans et à travers des procédures d'exposition : c'est dans et par l'exposition que l'architecture peut prendre – forme, sens ou valeur. Autrement dit : un bâtiment qui n'est pas exposé n'est pas "de l'architecture" ; une architecture qui mérite son nom est quelque chose qui se tient ; et ce n'est que lorsque ce quelque chose est exposé à certaines contraintes (de durée, de fonctionnement ou de goût) que l'on peut en apprécier la plus ou moins bonne tenue 1. Du coup, l'exposition devient, dans la diversité de ses modalités existentielles, le principe même de l'architecture – son principe fondateur. L'architecture, donc, naturellement s'expose. Mais comment l'exposer, intentionnellement ? Est-ce seulement possible ? Ou encore : à vouloir délibérément l'exposer, ne risque-t-on pas de perdre le sens naturel et premier précédent ? Je veux dire cette fois que l'exposition d'architecture, en son sens plus classique, est souvent vouée à l'échec, parce qu'elle n'est pas précisément l'architecture : c'est qu'elle ne la présente pas, elle la représente. Autrement dit (et à l'inverse de ce que l'on disait dans le premier cas) : un bâtiment qui est exposé n'est pas l'architecture ; ce n'en est qu'une réplique 2. Du coup l'exposition devient, dans la diversité de ses modalités scénographiques, le principe même du redoublement de l'architecture – son principe "réplicateur". Ces remarques préliminaires nous amèneraient à distinguer deux sens du mot : un sens mineur, désignant un dispositif constitué de mise en scène, en valeur ou en exergue de l'architecture, une sorte d'appendice ou de supplément d'âme que lui confère la représentation ; et un sens majeur, signifiant une disposition constituante de 1 En ce sens fort, il n'y a d'architecture qu'extra-ordinaire. Sans doute parlera-t-on légitimement d'"architecture ordinaire", mais ce n'est qu'en tant que posée comme telle qu'elle mérite ce nom. Et c'est alors par la simplicité d'un mode constructif, le prosaïsme de la modénature ou l'économie des proportions que s'appréciera cette architecture de l'ordinaire. C'est, littéralement, par l'ex-position de l'ordinaire que de l'architecture s'arrache à l'indifférenciation du bâti ordinaire – on pourrait dire à la sous-exposition du milieu bâti. 2 En ce sens plus faible, l'exposition ne ferait que redoubler un sens déjà donné, elle ne ferait donc que l'affaiblir voire le dissoudre dans une suite de représentations toujours plus éloignées de ce qui fondamentalement, fait l'architecture. Le cas est ici inverse du précédent : l'exposition apparaît comme une sorte de surenchère de représentations ou d'explications : à l'inverse du phénomène de sous-exposition du milieu dans lequel on ne voit rien parce que l'on y est enfoui, on pourrait dire ici qu'il y a sur-exposition de l'environnement construit, sur lequel on produit comme un excès de luimière. 3 l'architecture, une condition de son existence ou une propriété consubstantielle - qui est constitutive de son écart à elle-même (de sa ressemblance autant que de sa différence à elle-même). Tel est le double sens du mot que le texte qui suit se propose d'explorer. Entre fondation et réplication, l'exposition intentionnellement devrait éviter le piège de la sous-exposition que sous-entend la première, celui de la sur-exposition que signifie la seconde. DISPOSER, TRANSPOSER, REPOSER Exposer, c'est littéralement "poser hors de". Exposer l'architecture, c'est poser l'architecture hors de son contexte d'origine. Encore ce "contexte" doit-il être envisagé dans sa diversité – contexte spatial sans doute, mais aussi social ou temporel. Premier sens, spatial. L'exposition comme dis-position. C'est en échappant à sa propre place que l'architecture s'expose et que l'exposition littéralement a lieu. Ainsi peut-elle consister tout simplement en un déplacement physique de l'objet architectural : qu'il s'agisse du sauvetage d'un objet emblématique (des églises romanes ou des halles de Baltard aux reliefs d'expo 02) ou de la présentation d'une collection d'objets comme dans le cas des expositions d'architectures vernaculaires (type Ballenberg), le bâtiment est démonté pour être remonté hors de son contexte d'origine, soit dans un milieu vivant ordinaire (un quartier ou une place publique), soit dans un environnement spécifique (exposition à visiter). Mais l'exposition peut aussi consister en une reproduction matérielle des objets architecturaux : reproduction grandeur nature de morceaux d'architecture, de bâtiments entiers ou de sites existants (des jardins d'Hadrien de l'Antiquité aux musées de monuments du XXème siècle) ou reproduction miniaturisée par toutes les techniques de représentation : relevé, photographie, photogrammétrie, plans-coupes-façades, maquettes, … A cela s'ajoute un troisième mode de déplacement dans l'espace, celui de la simulation, qui change le rapport entre le réel et le virtuel 3. Non seulement l'image proposée n'est plus extérieure au sujet percevant, mais le bien-nommé visiteur peut bientôt s'immerger dedans et s'y promener quasi physiquement 4. Et de même que le concepteur pourra manipuler réellement sa maquette virtuelle (comme un objet ordinaire), le visiteur pourra physiquement traverser l'exposition en lignes. Déplacement, reproduction, simulation, c'est à disposer l'architecture entre l'espace physique et l'espace imaginaire (on pourrait presque dire à l'"indisposer") que ces trois premières modalités d'exposition contribuent - à ne lui laisser prendre sens que dans un rapport de conaturalité entre le matériel et l'immatériel, ou encore entre l'actuel et le virtuel. Second sens, social. L'exposition comme trans-position. C'est cette fois en échappant à 3 Entre le déplacement et la reproduction, on peut faire remarquer que l'on passe de l'expérience physique de l'espace réel à l'expérience qu'il faut bien qualifier de virtuelle, d'un espace de représentation. Dans le premier cas, tout un chacun peut faire cette expérience, dans le second il faut un minimum de connaissance ou d'initiation : qui ne connaît pas le code de la représentation n'a pas accès à son contenu. D'où l'avenir sans doute des techniques de simulation. 4 Certes l'on reste pour le moment généralement à distance d'une image qui ne fait guère illusion (les animations 3D utilisées par les architectes sont encore de piètre qualité, les promenades virtuelles dans les collections d'un musée le plus souvent encore abstraites, les dispositifs d'immersion à disposition du public dans les expositions d'art contemporain encore très lourds, etc.), et pourtant… On connaît d'ores et déjà les incertitudes qu'une bonne image de synthèse introduit dans l'identification des éléments existants et des éléments projetés, et force est de constater la progression technique en matière de simulation : à mesure que les capacités de mémoire s'accroissent, la définition de l'image s'améliore, le son s'y accouple et bientôt le geste. La promenade muséale ou la maquette virtuelle ne seront plus seulement données à voir, mais également à entendre, à manipuler ou à toucher (retour d'effort). 4 sa fonction initiale que l'architecture s'expose. Là encore, il est possible de distinguer plusieurs modalités d'exposition. Il faudrait parler en premier lieu de l'adaptation de tout bâti existant à de nouvelles normes sociales du confort, du voisinage ou du goût. Et l'on sait bien qu'adapter un bâtiment aux normes de sécurité, d'isolation ou d'éclairage peut en détruire l'architecture, comme lui redonner une vie nouvelle. Seconde modalité : la reconversion. Faire un musée dans un entrepôt, des logements dans une usine, une piscine dans une station de métro oblige à poser la question de la transposition d'usage. Au-delà de l'adaptation technique ou fonctionnelle, n'importe quel usage ne va pas dans n'importe quel lieu et il y a des formes d'adéquation symbolique qui peuvent valoriser ou dévaloriser réciproquement l'architecture du bâtiment initial et sa fonction nouvelle 5. Enfin, peut-on évoquer le principe de festivalisation qui dans les politiques urbaines des vingt dernières années, a pris une ampleur considérable et qui, au-delà de la simple mise en scène de l'architecture de la ville, peut être l'occasion de catalyser des usages nouveaux de la ville ou de l'espace public et de faire évoluer l'imaginaire ou le regard porté sur l'architecture ou la ville. Adaptation, reconversion, festivalisation, c'est à transposer l'usage que ces trois modalités d'exposition, entre adaptation technique et appropriation symbolique, contribuent : l'immeuble réhabilité génère de nouvelles formes d'habiter, l'appropriation spontanée de grands équipements induit leur reconversion, un festival du jardin ouvre de nouveaux espaces publics aux habitants de la ville 6. Troisième sens, uploads/Ingenierie_Lourd/ 2003-pa-art-exposer.pdf

  • 28
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager