2- MATURATION D’UN PROJET D’INNOVATION TECHNOLOGIQUE 2-1 Les étapes de la matur

2- MATURATION D’UN PROJET D’INNOVATION TECHNOLOGIQUE 2-1 Les étapes de la maturation d’un projet innovant Avant de répondre à cette question, je vous propose de revenir à une définition d'un projet et de rappeler les principes et méthodes mobilisés en management de projet pour examiner la validité de l'application de ces notions dans le cas d'un projet innovant. Prenons par exemple cette définition : Un projet est une combinaison de ressources humaines et non humaines, matérielles et immatérielles mises en œuvre dans le cadre d'une organisation temporaire pour atteindre un but spécifique. Comme vous l'avez vu, j'ai distingué trois éléments dans cette définition : La dimension temporaire, le but spécifique et les ressources. Commençons par le temps. Les membres d'une équipe de développement d’un projet peuvent convenir d'un événement ou d'un délai pour marquer la fin d'un projet par convention. Le lancement sur le marché, la validation de la technologie si c'est une grande rupture technologique, le premier tour de table, et cetera. Examinons maintenant les autres éléments. Le but spécifique. Un projet innovant se caractérise par une grande incertitude sur la technologie, son usage, les fonctionnalités valorisées par les utilisateurs, les acheteurs, quelle valeur accorderont ils ? Il est ainsi difficile de spécifier l'objet au départ. Bien au contraire, tout le projet consistera à spécifier ces éléments progressivement. Concernant les ressources, maintenant. En management de projet, nous avons des outils de management des parties prenantes. Nous identifions les parties prenantes, primaires et secondaires, celles qui contribuent directement et indirectement au projet. Ce sera donc, par exemple dans le cas d'un projet de création d'entreprise innovante, les futurs utilisateurs, les futurs acheteurs, les prescripteurs, les distributeurs, financeurs, les incubateurs d'accueil par exemple. Et nous voyons que, dans le cas d'un projet innovant, tous ces éléments et tous ces acteurs vont être identifiés progressivement, et cette liste est, de plus, évolutive. Une partie du projet va, là encore, consister à la préciser progressivement. Ainsi, la définition d'un projet doit être considérée avec précaution lorsqu'il s'agit d'un projet innovant. Examinons maintenant les principes et outils du management de projet. Manager un projet, c'est le concevoir, puis l'exécuter, simplement. La conception passe par l'identification du périmètre, des ressources, des contraintes et des risques. Identifier le périmètre, ou scope, consiste à identifier, lorsqu'il s'agit par exemple d'un produit, toutes les composantes qui vont constituer ce produit résultat du projet, ce qu'on appelle un Product Breakdown Structure. Ensuite, identifier toutes les tâches qu'il va falloir exécuter pour réaliser ces différentes composantes-là. Organiser les tâches en tâches mères et tâches filles dans un ordre hiérarchique. C'est ce qu'on appelle le WBS, le Work Breakdown Structure ou organigramme technique, qui est le coeur de la conception d'un projet. Et enfin, les ressources nécessaires pour l'exécution de ces tâches. Qui est responsable de quelle tâche? C'est ce qui est désigné généralement par la matrice des responsabilités ou Organization Breakdown Structure. Là aussi, dans le cas d'un projet innovant, il est difficile d'identifier les composantes et les tâches et les ressources dès le départ du projet puisque le projet va consister à progressivement les identifier. Alors, en management de projet, pour gérer l'inconnu, nous avons recours au management des risques. Un risque, c'est un événement qui a une certaine probabilité d'occurrence avec un certain impact et manager les risques, c'est prévoir ces événements-là et prévoir des plans de mitigation pour ces risques-là. Dans le cas d'un projet innovant, nous sommes face à des événements imprévisibles, inconnus. Il est très difficile de prévoir l'occurrence et a fortiori l'impact. C'est ce que Christopher Loch désigne avec ces collègues par Unknown Unknown. Nous sommes dans une situation de grande incertitude et d'inconnu. Il ne s'agit plus de manager des risques mais de manager de l'incertitude. Et pour cela, Christopher Loch préconise deux méthodes. Soit le sélectionniste ou il s'agit de mener en parallèle plusieurs voies dans plusieurs projets et le meilleur vaincra. Ou l'Essai-Erreur, c'est-à-dire une approche de réajustement progressif au fur et à mesure et donc d'apprentissage. Dans une situation de création d'entreprise innovante, c'est bien évidemment la seconde approche qui sera adoptée, celle de l'apprentissage et de l'Essai-Erreur. Nous pouvons mieux comprendre cette approche de projet en apprentissage si nous adoptons la modélisation du projet proposée par Christophe Midler. Un projet est une progression dans le temps. Nous avons ici dans l'axe des x le temps. Dans l'axe des ordonnées, à gauche de l'écran, nous avons modélisé la marge de manœuvre ou les actions et les décisions prises. Au fur et à mesure du temps, le chef de projet et son équipe perdent de la marge de manœuvre puisqu'ils décident quant à la fonctionnalité, quant à la technologie, quant aux partenaires, aux fournisseurs, et cetera. Parallèlement à ces décisions et à cette perte de marge de manœuvre, il y a une augmentation des connaissances, représentée ici par l'axe des ordonnées à droite de l'écran puisqu'au fur et à mesure du temps, l'équipe projet va acquérir de plus en plus de connaissances sur ces mêmes éléments-là. Nous comprenons bien que l'intérêt est donc d'accroître au maximum cette courbe de connaissances pour prendre les décisions en situation de connaissance. C'est d'autant plus le cas dans une situation d'incertitude où il y a beaucoup d'inconnues sur tous ces éléments désignés précédemment. Il faut donc accroître la courbe de connaissances pour prendre des actions, mais aussi entreprendre des actions pour accroître cette courbe de connaissances. 6:24 Si on résume, un projet innovant est donc un processus de découverte et d'exploration. C'est un processus d'apprentissage. Nous pensons que nous pouvons mobiliser une démarche structurée pour gérer ce projet. La démarche de management de projet traditionnelle consiste à concevoir un projet, l'exécuter, mesurer des écarts, les analyser, reconcevoir pour essayer de ramener le projet selon la planification prévue, ou reconcevoir lorsque cela n'est pas possible. Or, selon Peter Drucker, l'un des principaux auteurs en entrepreneuriat et innovation, il nous dit que lorsqu'une startup se lance sur le marché avec succès, c'est rarement avec le produit prévu ni à destination des clients anticipés et encore moins pour l'usage planifié. Ainsi, il y aura des écarts mais c'est l'analyse des écarts qui sera différente. Il ne s'agira plus de remettre le projet sur les rails, ne dit-on pas lorsque le plan est une fiction, la progression est un mirage? Il s'agit de reconcevoir le projet à chaque fois. Chaque écart va être révélateur d'enseignements et de connaissances. Les écarts sont donc structurels et le plan de départ n'est qu'une idée. Ce sont donc des hypothèses compte tenu de l'importance de l'incertitude. Prenons l'exemple du réalisateur de plusieurs films à succès, Stanton, chez Pixar. Il nous dit que, il reconnaît qu'au début d'un projet innovant, l'équipe va se tromper plusieurs fois, et une manière de gérer ça, c'est de multiplier les storyboards. Et vous voyez le nombre très important de storyboards pour WALL-E, par exemple, près de 100 000 storyboards. A chaque fois, on recueille des réactions et on propose le storyboard suivant. 8:15 En résumé, nous retenons la méthodologie de management de projet pour sa dimension systématique et rigoureuse. Mais c'est la posture et le traitement qui va changer. Le management d'un projet innovant consiste à réduire l'incertitude. Donc, à formuler des hypothèses, entreprendre des actions pour les confirmer ou les infirmer et les transformer en connaissances validées. Ce processus de découverte est très bien décrit dans l'ouvrage de McGrath, dont le titre est très explicite : Discovery-driven Growth. Ou, comment planifier cette découverte? La première étape est donc la formulation d'hypothèses. Nous allons formuler des hypothèses internes et externes sur le business modèle, la technologie ou sur la compétition ou les partenaires. Ces hypothèses vont ensuite être documentées et qualifiées de manière très complète et très rigoureuse. Chaque hypothèse sera numérotée. Sur quelle information a-t-elle été formulée? Quelle est son estimation? Qui en est responsable? Quel est son état à telle date? Comment des tâches on identifiera des hypothèses critiques? Une hypothèse critique est une hypothèse qui affecte plusieurs éléments, qui a un effet important sur les performances, qui détermine la faisabilité du projet, qui engage des investissements importants ou qui est très sensible. Nous identifierons également des jalons qui sont des rendez-vous auxquels les principales hypothèses seront levées. Et là aussi, nous allons avoir un tableau très documenté qui sera un outil de pilotage. Pour chaque jalon, on aura une description précise, les hypothèses qui seront levées, les coûts, à titre indicatif, donnés ici par exemple. On planifiera ces jalons dans le temps, comme dans un ordonnancement de projet classique. Chaque jalon sert à valider au moins une hypothèse. Chaque hypothèse doit être validée au moins à un jalon. Et un jalon critique permet de valider une hypothèse critique, par exemple. Tout cela est donc très rigoureux et très outillé. Simultanément, nous identifierons et préparerons les actions à entreprendre pour infirmer ou confirmer ces hypothèses. Il s'agit donc pour chaque hypothèse d'identifier l'action ou l'expérimentation qui permettra de générer la connaissance recherchée. Pour chaque hypothèse, il uploads/Ingenierie_Lourd/ cours-sur-la-maturation-technologique-d-x27-un-projet.pdf

  • 14
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager