BAZAAR DERRIÈRE LE FAIRE TABLE RASE D'UN QUARTIER : UNE OPÉRATION DE REDÉVELOPP
BAZAAR DERRIÈRE LE FAIRE TABLE RASE D'UN QUARTIER : UNE OPÉRATION DE REDÉVELOPPEMENT AU COEUR DE MUMBAI CORENTIN ORTAIS et JULIETTE PARAPONARIS Forum 2017 Nouvelles approches pour le financement des villes du Sud Un projet soutenu et financé par Référent.e.s : Dominique Gaudron et Sukriti Issar Rapport consultable en ligne : www.urbanistesdumonde.com Disponible en téléchargement pour les adhérents d’Urbanistes du Monde. Réalisé à la suite d’une mission encadrée par l’association Urbanistes du Monde, ce rapport de recherche s’inscrit dans la préparation d’un forum international sur les nouvelles pratiques de financement des projets urbains dans les villes du Sud. Dans un contexte de croissance urbaine rapide, de globalisation et de financiarisation de l’économie tout autant d’autonomisation croissante des villes, analyser les dispositifs et outils de financements innovants et leurs impacts socio-spatiaux et de gouvernance constitue l’objectif central de ce projet. 11 villes sont étudiées dans ce cadre. Ce document d’analyse, d’opinion et/ou d’étude n’engage que ses auteurs et ne représente pas nécessairement la position d’Urbanistes du Monde et de ses partenaires. Il ne reflète pas non plus nécessairement les opinions d’un organisme quelconque, y compris celui de gouvernements ou d’administrations pouvant être concernés par ces informations. L’exhaustivité et l’exactitude des informations mentionnées ne peuvent être garanties. Sauf mention contraire, les projections ou autres informations ne sont valables qu’à la date de publication du document. L’objet de la diffusion de ce document est de stimuler le débat et de contribuer à la constitution d’une base de données sur les grandes tendances à l’œuvre dans les politiques territoriales et urbaines des villes du Sud. Les droits relatifs à ce document appartiennent à l’association Urbanistes du Monde. Toute autre utilisation, diffusion, citation ou reproduction en totalité ou en partie ne peut se faire sans la permission expresse du ou des rédacteur(s). Son stockage dans une base de données autre que celle d’Urbanistes du Monde est interdit. © URBANISTES DU MONDE, Corentin Ortais et Juliette Paraponaris, 2017. 1 Résumé Bhendi Bazaar, quartier du centre de Mumbai, est actuellement en cours de démolition et reconstruction, afin de le moderniser et d’améliorer les conditions de vie des habitants, en grande majorité issus de la communauté des dawoodi bohras. Ce projet colossal qui a été initié par le guide spirituel de la communauté il y a huit ans va encore s’étaler sur plusieurs années. Cette étude se concentre sur le financement du projet ainsi que son mode opératoire et leurs conséquences. Le projet de redéveloppement de Bhendi Bazaar se situe à l’intersection de trois phénomènes : le financement par le foncier à Mumbai, la nouvelle politique de cluster redevelopment ainsi que la gestion et le financement d’un projet par la communauté bohra. Le projet, qui va fournir des logements gratuits aux individus et des infrastructures sans frais à l’Etat, est soutenu par les pouvoirs publics et par une grande majorité de résidents. Cependant, il va aussi provoquer des bouleversements urbains et sociaux dans le quartier et des mécanismes d’exclusion semblent être à l’oeuvre. Cet article questionne la possibilité de répliquer ce projet aux paramètres uniques ; de surcroît, les conséquences envisagées amènent à remettre en cause l’attrait de ce modèle. Abstract Bhendi Bazaar, a neighbourhood in the centre of Mumbai, is undergoing a large-scale redevelopment project in order to modernize the area and improve the living conditions of the residents, many of whom are members of the Dawoodi Bohra community. This huge project has been launched by their religious leader eight years ago and will take several years to be completed. This study focuses on the project’s financing arrangements, its modus operandi and their consequences. The Bhendi Bazaar redevelopment project is situated at the intersection between three phenomena: land-based financing in Mumbai, the new cluster redevelopment policy, as well as the management and funding of the project by the Dawoodi Bohra community. The project will provide free housing to individuals and costless infrastructure to the State, and is supported both by the public authorities and a large majority of residents. However, it will also cause urban and social disruption in the neighbourhood and is not likely to be inclusive. Considering the unique conditions in which this project has evolved, it is unlikely that it can be easily replicated elsewhere; moreover, the potential consequences lead the article to question the desirability of this urban model. 2 Sommaire Remerciements 4 Introduction 5 1. Un exemple de la fabrique de la ville par les acteurs privés 8 A) Contexte historique et cadre théorique 8 a) La néolibéralisation des politiques publiques urbaines comme patron général d’analyse b) Le financement par le foncier c) De l’encadrement des loyers aux opérations d’aménagement par les acteurs privés B) Financer par le foncier : le redéveloppement par les acteurs privés à Mumbai 9 a) Un exemple célèbre de ce mode de financement : la SRA b) Des incitations financières pour répondre aux ambitions municipales d’une World Class City c) L’article 33(7) : inciter les acteurs privés au redéveloppement C) Un mode de financement qui redessine la ville 11 a) Des projets urbains aux frais des acteurs privés b) La régénération non-planifiée de la ville c) Les mutations du profil sociologique et le changement des modes de vie 2. Le SBUT, défricheur d’une nouvelle politique urbaine : la cluster policy 12 A) Une nouvelle échelle de régénération urbaine 12 a) La cluster redevelopment policy, 33(9) b) Une réponse aux problèmes du 33(7) B) Un modèle en devenir 13 a) Un enjeu pour les pouvoirs publics b) Faire réussir ce modèle C) Les conséquences démesurées du projet de redéveloppement de Bhendi Bazaar 14 a) La pesanteur d’un projet sur le temps long b) La transformation radicale du tissu urbain et architectural c) Des conséquences sociales ambiguës 3. Un projet communautaire ? 18 A) L’importance de la communauté bohra dans le projet 18 a) Un projet mené par les dawoodi bohras b) Un projet communautaire mais top-down B) Un projet financé par la communauté 19 a) L’opacité du financement b) Les ressorts du financement communautaire C) Un projet exclusif et tyrannique ? 20 a) Un projet imposé b) Un projet pour les dawoodi bohras c) Un projet exclusif ? Conclusion 23 Annexes 25 3 Remerciements Nous tenons à remercier les nombreuses personnes qui ont rendu ce travail possible. D’abord, l’équipe d’Urbanistes du Monde, et particulièrement Gabriel Rousseau et Dominique Gaudron, ainsi que l’agence 360, qui a financé notre recherche. Merci à Sukriti Issar, notre référente locale pour Urbanistes du Monde, pour nous avoir donné d’importants conseils et orientés dans la bonne direction. Nous sommes aussi reconnaissants à toutes les personnes que nous avons rencontrées et qui nous ont donné leur point de vue, ainsi que les personnes qui nous ont aidé dans notre recherche, comme Kasab Vora qui a traduit en temps réel un entretien de l’hindi à l’anglais. Enfin, nous voulons remercier le SBUT, Abbas Master et plus particulièrement Murtaza Sadriwala, pour nous avoir donné du temps et de l’aide dans notre recherche. 4 Introduction Bombay hier et Mumbai aujourd’hui : une histoire complexe du logement La structure urbaine de Mumbai est largement héritée de l’aménagement colonial : initialement constituée de 7 îles, son territoire est unifié sous la domination britannique, constituant aujourd’hui la ville insulaire (Island City). Après l’incendie de 1803, les Britanniques construisent en-dehors des fortifications, donnant à l’actuel centre de Mumbai sa structure quadrillée. Cette opération correspondait à un besoin de logement pour les travailleurs venus d’autres Etats de l’Inde. Les chawls, des immeubles composés en majorité de bois, comprenant trois à cinq étages, avec cinq ou six chambres individuelles par étage et des toilettes communes sur le palier, sont conçus pour loger cette main-d’oeuvre, généralement des hommes venus seuls. Peu à peu, les chawls accueillent également les familles, ce qui pose un problème d’espace et de qualité de vie. Longtemps, des projets d’aménagement de résidences étaient auto-gérés par des communautés religieuses. Ces colonies étaient financées par les communautés, et leur construction fonctionnait sur un modèle bottom-up. Plus récemment, les grandes opérations de haut standing se sont multipliées, pour répondre aux besoins grandissant des classes moyennes et supérieures. Mumbai est extrêmement dense : le centre-ville et sa banlieue (Greater Mumbai) comptent 21000 habitants par km² ; en comparaison, l’aire métropolitaine de New York compte 689 habitants par km². La surface moyenne de logement par personne est de 2,9 m² (Bertaud, 2004). Le marché du logement y est tellement cher et tendu que seul 5 à 6% de la population a la capacité financière d’acheter un logement aujourd’hui (Gandhi, 2012). Relativement, les prix à l’achat ou à la location sont comparables à Hong-Kong ou New York, sans que la ville ne soit dotée des mêmes aménités. En outre, 82% de la population vit dans un logement d’une pièce, et plus de 80% habite un logement de mauvaise qualité (Nijman, 2008). En parallèle, la moitié de la population vit dans de l’habitat informel. Le logement est donc une préoccupation centrale pour les pouvoirs publics. Néanmoins, les plans de développement publics ne sont jamais financés entièrement uploads/Ingenierie_Lourd/ derriere-le-bazaar-faire-table-rase-d-x27-un-quartier-une-operation-de-redeveloppement-au-coeur-de-mumbai.pdf
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- Publié le Jul 22, 2022
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