DIAGNOSTIC PATRIMONIAL DU RESTAURANT N°1 COMMISSARIAT A L’ENERGIE ATOMIQUE CENT
DIAGNOSTIC PATRIMONIAL DU RESTAURANT N°1 COMMISSARIAT A L’ENERGIE ATOMIQUE CENTRE DE MARCOULE BAGNOLS-SUR-CEZE Département Economie et Emploi Direction de la Culture et du Patrimoine Service Patrimoine Régional Secteur Inventaire général du patrimoine culturel 3 Le service Patrimoine Régional assure le diagnostic d’un res- taurant d’entreprise situé sur l’emprise du Commissariat à l’Energie Atomique de Marcoule. L’édifice est attribué à l’in- génieur constructeur designer Jean Prouvé (1901-1984), créa- teur incontournable du XXe siècle en matière d’architecture et de mobilier. La Région Languedoc-Roussillon, dans le cadre de son projet de Parc Régional d’Activités Economiques Marcel Boiteux, souhaite statuer sur le devenir de ce bâtiment. Ce diagnostic patrimonial met en oeuvre la méthodologie scientifique de l’Inventaire Général du Patrimoine Culturel afin de répondre à plusieurs attentes. Objectifs scientifiques - apporter les premiers éléments de connaissance historique et architecturale sur l'édifice - examiner l'hypothèse d'une attribution de l'œuvre à Jean Prouvé - vérifier la présence de vestiges mobiliers Objectifs évaluatifs - confronter les résultats aux valeurs de patrimonialisation Objectifs prescriptifs : - examiner la pertinence d'une conservation - nouvelles valeurs, nouveaux usages ? - proposer des pistes de conservation et d’embellissement DIAGNOSTIC PATRIMONIAL DU RESTAURANT N°1 COMMISSARIAT A L’ENERGIE ATOMIQUE CENTRE DE MARCOULE BAGNOLS-SUR-CEZE Texte et photos : Lionel Rodriguez Analyse du mobilier et photos : Josiane Pagnon Maquette : Véronique Marzo-Marill Relectures : Jean-Michel Sauget Synthèse L’édifice diagnostiqué présente une valeur patrimoniale qui milite en faveur de sa conservation. La construction n’est pas dûe à Jean Prouvé mais il est probable qu’il ait travaillé à sa conception avec les ar- chitectes Daniel Badani et Pierre Roux-Dorlut, maî- tres d’oeuvre de l’Etat. Ce tandem a contribué à la reconstruction de la région après la guerre et a ensei- gné à l’école des Beaux-Arts de Montpellier. La valeur architecturale et esthétique de l’édifice re- pose sur la volonté de l’Etat de donner un caractère édilitaire à ses installations nucléaires. C’est pourquoi le CEA a passé commande à Jean Prouvé d’un ensemble mobilier de première importance. Il s’agit de sa der- nière réalisation conçue et fabriquée dans ses ateliers de Nancy. Sa carrière de designer s’achève avec ce pro- jet en 1953. En préservant ce bâtiment, la Région s’approprie l’unique témoignage de l’aventure nucléaire nationale présent sur son territoire. Sa qualité architecturale et son capital symbolique sont des facteurs d’attractivité pour les entreprises, sensibles à l’image de modernité. 4 Résultats scientifiques L'édifice Les maîtres-d'oeuvre Le Commissariat à l'Energie Atomique est créé par le Gouvernement provisoire présidé par le général de Gaulle le 18 octobre 1945. Cet organisme de recherche entend impulser et coordonner les travaux scienti- fiques autour de l'activité nucléaire, inaugurés en 1896 par la découverte de la radioactivité naturelle par Bec- querel. La vocation du CEA est à la fois d'expérimenter une nouvelle source d'énergie dans le contexte de la reconstruction et d'assurer la sécurité de la France dans le nouvel ordre politique mondial. En 1951 le CEA lance un programme industriel ambitieux pour lequel le site de Marcoule est retenu dès le 4 décembre 1952. L'acquisition des terrains s'effectue à partir de 1953 et les constructions s'élèvent à un rythme accéléré. L'Etat fait appel à un groupement d'entreprises spécialisées fortement qualifiées. Le chantier des infrastructures concerne l'édification de la cantine, des bâtiments administratifs et techniques. Ces édifices, tout comme l'ensemble de l'usine, bénéficient d'un traitement esthétique. En effet, l'aventure nu- cléaire française entend fonder une nouvelle ère industrielle qui, à la différence de la précédente, se veut "propre", belle et humainement valorisante. La cité idéale de Marcoule se dote donc d'un plan d'urbanisme, d'un parc orné de bassins, de bâtiments aux proportions harmonieuses et d'un mobilier de qualité réalisé par Jean PROUVE (1901-1984) pour la cantine et la direction (Mazzucchetti 2005). Un code couleur est adopté pour tous les bâtiments et équipements mobiliers du site : c'est le bleu Marcoule. La consultation des archives du CEA indique que les architectes Daniel BADANI et Pierre ROUX-DOR- LUT assurent la maîtrise d'œuvre du restaurant d'entreprise, des bâtiments administratifs, d'un belvédère sur la Dent de Marcoule et peut-être de villas du comité d'entreprise dans le parc du château de Paniscoule. Les plans de la cantine sont datés du 15 juillet 1954, le chantier s'achève en décembre 1955 pour une mise en ser- vice début 1956. La construction est complétée d'un porche dont les plans sont fournis le 24 février 1956. Le restaurant accueille les ingénieurs et cadres du CEA. Les ouvriers disposent de leur propre restaurant. Daniel Badani (1914-2006) est architecte et urbaniste, diplômé en 1941. Il est nommé Inspecteur général ad- joint de l'urbanisme et de la reconstruction pour la région Languedoc-Roussillon. En 1956, il devient archi- tecte en chef des bâtiments civils et palais nationaux et conseil auprès du ministère de la Construction. Il sera le maître d'œuvre de la préfecture et du palais de justice de Créteil. Pierre Roux-Dorlut (né en 1919), ancien élève de l'Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts et de l'Insti- tut d'Urbanisme de Paris, est diplômé en 1944. Il est lui aussi architecte conseil du ministère de la Construc- tion et préposé à la reconstruction de l'Hérault. Les deux hommes s'associent en 1946. Ils créent une agence à Montpellier et enseignent l'architecture à l'Ecole des Beaux-Arts de la ville. Ils ouvrent aussi des agences à Paris, à Nice et à Bône (Annaba) en Algérie. Ils réaliseront de nombreux établissements pour le ministère de l'Education nationale, quelques ensembles de logements, 1400 logements à Villiers-le-Bel et à Nice, la tour Gambetta à La Défense en 1975 et l'ensemble de tours du pont de Sèvres, à Boulogne-Billancourt, en 1975 également, deux centres de recherche pour le CEA (Marcoule et Cadarache), et dresseront des plans d'ur- banisme pour les villes de Toulouse, Avignon, Champigny-Chennevières, Nice, Bône, Abidjan, etc. Leur col- laboration au ministère de la France d'Outre-mer les amène, en outre, à beaucoup construire à Abidjan (palais de justice, aéroport, hôpital, etc.), ainsi qu'à Dakar, à Niamey et au Cameroun (Clerc 2006) 5 Description Le choix du site a été effectué avec le plus grand soin. Le restaurant s'établit près des bureaux du CEA dont le personnel, ingénieurs et cadres, composait la clientèle. Il est conçu comme un lieu de repos et de convi- vialité. C'est pourquoi il se situe à l'opposé des installations industrielles, près de l'enceinte mais à l'intérieur de la clôture. L'implantation est décidée à l'extrémité d'une terrasse naturelle, au cœur d'une zone de garrigue aujourd'hui arborée. L'édifice tourne le dos à l'usine et s'ouvre largement au sud afin de bénéficier du point de vue privilégié sur la plaine viticole rhodanienne. La construction adopte un plan rectangulaire sur trois niveaux, avec un sous-sol technique, un rez-de-chaus- sée à usage de cafétéria pour les ingénieurs et un premier étage occupé par le restaurant des cadres. Les fa- çades sont orientées selon les points cardinaux, avec les deux murs gouttereaux au nord et au sud. L'édifice est couvert d'un appentis versant vers le nord. On accède au sous-sol en façade ouest par un plan incliné creusé à ciel ouvert, suffisamment large pour permettre le passage de camions. Le sous-sol émerge légère- ment du terrain dans le lequel il est creusé, jusqu'à un mètre en façade sud. Ce premier niveau construit en béton sert de fondation à la structure du bâtiment. Elle est composée de poteaux qui portent le plancher de l'étage et les fermes de la charpente. La structure s'appuie également sur le mur gouttereau nord et une par- tie du gouttereau sud, construits en béton comme le sous-sol. Les niveaux sont fermés par des panneaux de vitrage préfabriqués, indépendants de la structure porteuse. Le choix de la structure métallique sur sous-sol béton permet d'ajourer les murs au maximum. 6 Le programme constructif répond à la nécessité de superpo- ser une cafétéria et un restaurant au sein d'un bâtiment uni- taire. Ces deux espaces séparés doivent traduire les distinctions catégorielles au sein de l'entreprise, reflet de la hiérarchisation sociale des années cinquante. C'est pourquoi la distribution et le décor diffèrent selon les niveaux. La distribution s'organise autour d'un hall situé à l'extrémité ouest du bâtiment. Deux entrées le desservent : les ingénieurs accédaient à leur cafété- ria par le sud, tandis que les cadres empruntaient une entrée sous porche par le nord, donnant sur une aire de stationne- ment. L'accès des cadres par le rez-de-chaussée constituait un empiètement sur l'espace des ingénieurs, contraints de céder une partie du hall. Celui-ci était divisé par une cloison vitrée munie de portes. Elle délimitait les deux zones, distinctes au point de posséder un pavement différent. La cafétéria est re- couverte de carreaux de grès céramique rouge à carroyage lâche de tesselles blanches. Le hall des cadres, l'escalier et le sol de l'étage possèdent des carreaux de grès Rhune rouge. 7 Après avoir pénétré dans le hall des ingénieurs, une porte vitrée sans menuiseries donnait accès au self et au réfectoire. L'espace était organisé de part et d'autre d'un axe longitudinal. Côté nord, l'axe était brodé par un long comptoir de distribution. Il communiquait di- rectement avec uploads/Ingenierie_Lourd/ diagnostic-patrimonial-du-restaurant-n01-a-marcoule 1 .pdf
Documents similaires










-
28
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Nov 11, 2022
- Catégorie Heavy Engineering/...
- Langue French
- Taille du fichier 4.1155MB