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HAL Id: halshs-00801532 https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00801532v2 Submitted on 25 Sep 2013 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entific research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés. Linguistique textuelle et enseignement du FLES Denis Vigier To cite this version: Denis Vigier. Linguistique textuelle et enseignement du FLES. Le Français dans le monde. Recherches et applications, CLE International, 2012, pp.34-49. ￿halshs-00801532v2￿ 1 Linguistique textuelle et enseignement/apprentissage du FLES Denis Vigier, Université Lyon2 / UMR ICAR (5191) Discipline jeune, encore largement en construction, la linguistique textuelle ne bénéficie pas de ce socle « partagé » (avec beaucoup de guillemets et de « failles » dans le socle, bien entendu) qui réunit généralement la plupart des linguistes lorsqu’ils s’occupent de morphologie ou de syntaxe, objets de la grammaire depuis deux mille ans. Tenter de circonscrire la tâche de la linguistique textuelle aujourd’hui expose donc nécessairement à la critique… C’est pourtant ce que nous proposons de faire dans les lignes qui suivent, adossant notre propos aux travaux d’auteurs qui, depuis la fin des années soixante, ont largement concouru à constituer la linguistique textuelle en branche à part entière des sciences du langage. Nous dresserons ensuite un état des lieux rapide des outils et des documents dont disposent désormais les enseignants de FLES pour les aider à mieux identifier les problèmes de mise en texte rencontrés par leurs apprenants et à mieux y remédier. Notre propos s’achèvera par quelques propositions d’activités de classe. 1. Un petit tour par la notion de cohérence A la fin des années soixante s’est constitué, en sciences du langage, le projet d’une grammaire du texte. A ses origines, ce courant de recherche s’inscrivait dans le paradigme théorique de la grammaire générative transformationnelle chomskyenne. Il était possible, jugeait-on, d’élaborer une grammaire générative « textuelle » (Van Dijk 1972, 177), capable d’engendrer les textes « bien formés » d’une langue (Van Dijk, 1973, 64). Parmi les concepts générativistes que cette grammaire souhaitait étendre à l’unité texte figurait chez certains celui de grammaticalité. Ainsi Van Dijk (1972, 184) déclare-t-il : il va sans dire (…) que le concept de grammaticalité doit s’étendre également à des structures transphrastiques. Cependant, comme l’a montré depuis Charolles notamment (1988b, 1994b, 2005), les tenants de ce projet grammatico-textuel se heurtèrent très rapidement à une série d’obstacles insurmontables que soulevait notamment la question de la cohérence et de ses critères. Pour le dire vite, les suites de phrases volontairement incohérentes que les linguistes engagés dans ce projet se donnaient comme point de départ, en vue de mettre au jour les règles constitutives d’une compétence textuelle, se voyaient toujours à un moment ou un autre remises en cause par d’autres linguistes. Il était en effet toujours possible, avançait-on, d’imaginer un contexte de communication ad hoc qui permettait de lever l’incohérence postulée pour une suite de phrases donnée et de la rendre ainsi parfaitement interprétable. Voici un exemple que nous empruntons à Charolles (2005). Soient les deux séquences (1) Max est malade. Il a attrapé la grippe. (2) Max est malade. La terre tourne. Dira-t-on que (1) est cohérente mais (2) « mal formée » car incohérente ? A première vue certainement. Mais qu’on imagine une situation de communication où il serait clair pour le locuteur de (2) comme pour son allocutaire que la phrase la terre tourne a pour but d’exprimer, à travers l’image de la rotation de la terre, l’œuvre destructrice du temps qui passe. Aussitôt, la séquence redevient cohérente et l’on peut imaginer une paraphrase (parmi d’autres possibles) pour (2) comme : Max est malade. Autrefois, il ne l’était jamais mais le temps passe et corrompt tout, même la santé des plus vigoureux. 2 Le fait pour les grammairiens du texte d’éprouver ce type de difficulté lorsqu’il s’agissait de juger qu’une suite de phrases était ou non cohérente1 a permis de mettre au jour ce point crucial : la cohérence, loin d’être un trait du discours, apparaît plutôt comme une sorte de forme a priori de sa réception, comme un principe général gouvernant son interprétation (Charolles, 1994b, 133). Si localement, un jugement de cohérence porté sur l’enchaînement entre deux phrases peut donc entièrement dépendre de cette forme a priori de la réception dont parle Charolles, il en va cependant autrement lorsqu’on se situe à des niveaux de complexité supérieurs : paragraphes, chapitres, etc. – et cela jusqu’au texte. A ces niveaux, pour que l’interprétant puisse porter un jugement positif de cohérence, il est impératif qu’à l’encodage, le locuteur ait tissé aux niveaux intra- et interphrastiques divers réseaux de relations essentiellement sémantiques et pragmatiques, à même de guider l’interprétant vers la reconnaissance de cette cohérence. Ces réseaux de relation constituent l’objet d’étude privilégié de la linguistique textuelle (désormais LT). Leur présence au sein d’un texte n’est cependant pas une condition suffisante pour assurer la cohérence de ce dernier. D’autres paramètres entrent en jeu, parmi lesquels i) le respect d’un certain nombre de conditions qui président au jugement de cohérence (cf. Bellert 1970, Charolles 1978, Reinhart 1980, … ; pour une synthèse, Salles 2006) ii) une bonne utilisation des marques de cohésion discursive (mal ou trop utilisées, elles peuvent détruire la cohérence (cf. les expériences de Garnham, Oakhill & Johnson-Laird 1982) ; iii) la prise en compte de diverses catégories socio-discursives régulatrices des pratiques discursives individuelles : adéquation de la production discursive avec la situation d’énonciation (au sens étroit et large), prise en considération des attentes de la communauté discursive relatives aux normes du genre / sous-genre discursif mobilisé, etc. Ces catégories ne relèvent pas du domaine de la LT mais plus largement de l’analyse du discours dont la LT ne constitue qu’une « zone ». 2. Définir la linguistique textuelle. Nous proposons donc de définir la linguistique textuelle comme une branche des sciences du langage qui a pour tâche de théoriser et de décrire les différents réseaux d’organisation2 dont le pouvoir s’exerce depuis le niveau de la phrase jusqu’à celui du texte et qui concourent à rendre ce dernier cohérent. 2.1. Le domaine d’analyse de la LT commence dès le niveau de la phrase … Comme y insiste M. Charolles (1994b : 127), les linguistes qui s'intéressent au discours n'auraient pas à se préoccuper du système des connexions structurales qui pèse sur l'organisation des phrases si certains phénomènes relevant typiquement de leur champ d'étude ne s'expliquaient, au moins partiellement, par des considérations syntaxiques. De fait, M.-P. Péry Woodley (1985) montre par exemple que les enchâssements de subordonnées au sein des phrases dites complexes possèdent une incidence directe non seulement sur la hiérarchisation de l’information au niveau intraphrastique mais aussi sur l’architecture 1 Une telle prise de conscience joua un grand rôle dans la réorientation du projet grammatico-textuel (voire sa reconversion). (Charolles, 2005). 2 Nous préférons recourir au terme de réseau d’organisation plutôt qu’à celui de niveau d’organisation (Combettes, 1992) ou de plan d’organisation (Charolles, 1988a). Pour d’autres définitions de la linguistique textuelle, voir inter alii, de Beaugrande & Dressler (1981), Combettes (1992), Charolles (1994b), Adam (1999, 34-42 ; 2005, 38) ainsi que le Dictionnaire d’Analyse du Discours (Charaudeau & Maingueneau, eds., 2002). 4 Ici comme ailleurs, le global détermine le local (Rastier 2001, 13) 3 informationnelle générale du texte, celle-ci déterminant celle-là et non l’inverse4. Sur un plan didactique, une telle analyse met au jour le fait qu’un apprenant qui recourrait par exemple, dans sa production, à des subordinations parfaitement correctes du point de vue morphosyntaxique, mais sans maîtriser les incidences qu’ont ces choix intraphrastiques sur le réseau des relations informationnelles intratextuelles, produirait un texte peu voire pas cohérent. On touche là du doigt la limite de certains exercices fréquemment proposés en grammaire du FLES et qui consistent par exemple à faire de deux phrases simples partageant un SN coréférentiel une phrase complexe avec subordonnée relative. Certes, on entraîne les élèves à maîtriser les opérations morphosyntaxiques qui régissent la relativisation, mais on ne leur donne pas les moyens d’appréhender que, en phase de production, le choix de faire de telle ou telle proposition la relative ou la principale se joue à un niveau transphrastique. Le cas des circonstants détachés constitue une seconde et parfaite illustration du fait que des choix opérés en syntaxe intrasphrastique sont susceptibles d’avoir une incidence cruciale sur des niveaux d’organisation supérieurs à la phrase. Nous y reviendrons infra (§ 5). 2.2. … et finit avec le texte. Le pouvoir d’analyse de la LT s’exerce, avons-nous dit, dès le niveau de la phrase. Jusqu’où s’étend-il ? Jusqu’au texte, bien entendu. Si la notion de texte bénéficie d’une apparence d’évidence (nous manipulons et produisons tous les jours des textes - en particulier les enseignants !), elle devient problématique lorsqu’on veut la serrer de plus près. uploads/Ingenierie_Lourd/ fdm-dvigier-version-hal-25-09-2013.pdf

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