La fabrique architecturale du La fabrique architecturale du Studio Mumbai Studi

La fabrique architecturale du La fabrique architecturale du Studio Mumbai Studio Mumbai Bijoy & Priya jain, architectes utsav house, Alibag, Inde/India. Pavillon d’angle/Corner pavilion. 79 ProjetS PROJECTS Dans cet atelier où résonne une architecture d’artisans, à l’écart de la folie urbaine de Mumbai (Bombay), Bijoy Jain rend possible un mode de production radicalement autonome des mécanismes du marché global. Studio Mumbai, créé en 2005, en maîtrise pourtant tous les codes : le travail de son fondateur, né là en 1965 et diplômé de la Washington University de St Louis, aux États-Unis, a déjà obtenu plusieurs récompenses majeures. Dont, en 2010, l’Inside Outside Architect of the Year Award et une mention spéciale pour l’installation Work-Place à la 12e Biennale d’architecture de Venise. In this workshop resounding with the architecture of craftsmen, well away from the urban madness of Mumbai, Bijoy Jain implements a method of production that is radically independent from the mechanisms of the global market. However, Studio Mumbai, created in 2005, masters all of its codes. The work of its founder, born here in 1965 and with a degree from Washington University of St. Louis, in the United States, has already received several major awards, including, in 2010, the Inside Outside Architect of the Year Award and a special mention for the installation of Work-Place at the 12th Venice Architecture Biennale. U ne installation au Victoria and Albert Museum à Londres en juin 2010 (In-between Architecture), une présence remarquée à la Biennale de Venise 2010 (Work-Place) et des publications à haute visibilité (GA Houses…), Studio Mumbai témoigne d’une maîtrise impeccable des codes et des circuits de légitimation de l’architecture mondiale contemporaine – pour une fois au service du meilleur de cette scène. La visite de l’exposition Work-Place et un voyage à Alibag (à 40 kilomètres au sud de Mumbai) pour voir quelques œuvres récentes confirment pleinement notre constat. Depuis le pèlerinage à Vienne, au numéro 19 de la Kundmanngasse et le choc de la Villa Wittgenstein, aucune architecture ne nous avait fait une si profonde impression. L’analogie avec le chef-d’œuvre viennois est suggérée par les qualités spatiales, la conduite de la lumière, les dispositifs de plan, et vérifiée par le souci minutieux porté aux détails, aux matériaux et à leur mise en œuvre. L’architecture du Studio Mumbai offre la « fine mesure » en toute chose. Le lecteur en jugera par les projets publiés, ou ira s’imprégner des conditions de sa création, telles qu’évoquées dans l’exposition Work-Place qui circule cette année, notamment en Europe 1. Sur une échelle de temps long, le travail du Studio Mumbai se profile aux confins du défunt empire britannique et à l’âge post- industriel, et renoue avec certaines des options les plus radicales de William Morris, réhabilitant le labeur, le cerveau, le cœur et la main de l’ouvrier. Plus récemment, la visite de l’exposition Work-Place et la lecture presque simultanée du dernier ouvrage de Juhani Pallasmaa, The Thinking Hand, nous ont suggéré une complicité saisissante entre la pratique du studio indien et les développements conceptuels de l’architecte finlandais. Le travail de Studio Mumbai s’articule autour d’un bureau qui ressemble davantage à la fabrique du chantier médiéval. On songe aux reconstitutions documentées livrées par Eugène Viollet- le-Duc ou Fernand Pouillon. Cette fabrique, située à deux pas de la maison des architectes, est à la fois le lieu de vie des dizaines de personnes de leur équipe, l’atelier de menuiserie-charpente, la forge, la fonderie, l’atelier de mécanique, le four à chaux et la salle des ordinateurs ! L’attention que Bijoy et Priya 2 Jain portent à leur personnel, et à leur environnement en général, se comprend, pour un occidental, comme une sorte de karma au terme duquel ils endossent la responsabilité du bien-être de ceux dont ils se considèrent en charge. C’est d’autant plus impressionnant que leur position est clairement celle de passeurs entre deux mondes ; à l’instar du romancier Suketu Mehta 3, ils appréhendent la culture de leur pays par le prisme du citoyen du monde occidental, dont ils maîtrisent parfaitement les codes. La fabrique de Studio Mumbai est le lieu où la force de travail est mise en œuvre – le lieu qui produit et se produit à la fois. Il résulte de cette symbiose une sérénité fébrile qui impressionne le visiteur. Celle-ci est au service d’une méthode que Bijoy Jain explique simplement en affirmant : « Nous avons perdu notre dignité, abandonné l’attitude qui oblige de faire les choses avec une certaine discipline. » Pour la reconstruire, il suggère de se référer à la tradition et à la culture matérielle qu’elle a produite. Pour lui, l’ancien serait caractérisé par « la qualité intrinsèque qu’il communique ». Studio Mumbai conçoit et construit réellement, de ses propres mains, une architecture sans concession. Il se cantonne volontairement à des échelles qu’il peut contrôler sans perdre son âme et démontre que la grandeur d’un projet n’est pas déterminée par son volume. Les matériaux choisis – maçonnerie traditionnelle et bois de préférence – permettent une conduite du chantier où le travail manuel occupe la partie centrale. L’organisation met en œuvre, valorise et permet l’essor des savoir-faire ancestraux. Il leur rend leur dignité et accrédite leur usage contre la marée des ready- made industriels du marché global et écrit une page essentielle de ce que nous appelons la « nouvelle architecture vernaculaire ». Les projets récents de Studio Mumbai s’inscrivent avec délicatesse dans le territoire de la jungle côtière au sud de Mumbai. L’agence y édifie une architecture furtive, introvertie en même temps que rigoureuse et expressive. La dimension bioclimatique détermine le projet dès ses prémices, si bien que ses maisons se lisent comme des prothèses fonctionnelles du territoire auquel elles empruntent leurs caractéristiques, quelquefois en les aménageant. On construit après avoir creusé le puit, surélevé le terrain pour bénéficer d’un drainage pendant la saison des pluies ou au contraire établi un palier qui sera occupé par le patio et où l’humidité se conservera à la saison sèche. Le confort thermique est porté à un niveau élevé, mais il est obtenu avant tout en tirant parti des masses, de l’évaporation, de la circulation de l’air. La physique du bâtiment et les propriétés du matériau sont mises en œuvre passivement pour minimiser absolument le recours aux artifices industriels énergivores. architectural WorkShop Studio Mumbai Bijoy & Priya Jain, architects 1 Biennale de Venise, 2010 ; Lausanne, EPFL, Espace Archizoom, jusqu’au 23 avril ; Saint-Gall (Suisse), Sitterwerk, en juin 2011 ; Dornbirn (Suisse), VAI, juillet 2011 ; Tokyo, Galerie Tata, 2012. 2 Née en 1971 à Mumbai, Priya Jain est diplômée en design d’intérieur de l’Inchbald School of Design de Londres. 3 Auteur de l’impressionnant, Bombay Maximum City, Buchet Chastel, 2006. Projets/projects 80 A n installation at the Victoria and Albert Museum in London in June 2010 (In-between Architecture), their conspicuous presence at the Venice Biennale 2010 (Work-Place) and high visibility in publications (GA Houses, etc.): Studio Mumbai demonstrates perfect control of the codes and circuits for the legitimation of global contemporary architecture; for once serving the best of this arena. A visit to the Work-Place exhibition and a journey to Alibag (40 kilometres south of Mumbai) to see some of their recent work, fully confirm our observation. Since the pilgrimage to Vienna, to No. 19 Kundmanngasse and the shock of the Villa Wittgenstein, no other architecture had left us with such a deep impression. The analogy with the Viennese masterpiece is suggested by the spatial quality, the conducting of light, the design schemes, and verified by the painstaking concern given to detail, materials and their implementation. Studio Mumbai’s architecture offers “fine measurement” in everything. The reader will judge from the projects published or will soak up the conditions of their creation, as evoked in the Work-Place exhibition which is on tour this year, notably in Europe 1. On a longer time scale, the work of Studio Mumbai emerges on the borders of the late British Empire and in the post-industrial era, and revives some of the more radical options of William Morris, restoring the work, brain, heart and hand of the labourer. More recently, the almost simultaneous visit of the Work-Place exhibition and the reading of the latest work by Juhani Pallasmaa, The Thinking Hand, suggested to us a striking resemblance between the practices of the Indian studio and the conceptual developments of the Finnish architect. Studio Mumbai’s work is centred on an office which bears a closer resemblance to the medieval construction “manufacture”. It makes us think of the documented reconstitutions delivered by Eugène Viollet-le-Duc or Fernand Pouillon. This workshop, located a short distance from the architect’s home, is at once the living place of dozens of people from their team, the joinery-carpentry workshop, forge, foundry, mechanical workshop, lime kiln and computer room. The attention that Bijoy and Priya 2 Jain pay to their staff and environment, in general, is understood, by a Westerner, as a sort of karma through which they ensure the responsibility of the welfare of those they consider themselves responsible for. This is all the uploads/Ingenierie_Lourd/ frey-p-aa-383-2011-mumbai.pdf

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