LES PRINCIPES DE LA TRANSLITTÉRATION Partie IV LA TRANSLITTÉRATION DE L'ARABE E

LES PRINCIPES DE LA TRANSLITTÉRATION Partie IV LA TRANSLITTÉRATION DE L'ARABE ET LA NOUVELLE NORME DE L'ISO LA RECOMMANDATIONS ISO C'est que, depuis quelque temps déjà, un système de translittération était à l'étude en France pour les bibliothèques. L'auteur de ces lignes, alors bibliothécaire à la Bibliothèque nationale où il était chargé des imprimés en langues du Proche-Orient, établit un rapport qui fut présenté d'abord à une Commission composée de bibliothécaires. Celle-ci se réunit plusieurs fois à la Bibliothèque nationale au cours du premier semestre 1952. Le rapport fut ensuite présenté à une commission d'orientalistes qui se réunit le 2 juillet 1952 au même endroit. On consulta ensuite par écrit vingt-cinq orientalistes de langue française en France, Algérie, Maroc, Tunisie, Égypte et Liban. A partir des éléments ainsi rassemblés, une commission de l'AFNOR, ayant pour président Mr R. Blachère, professeur à la Faculté des Lettres de l'Université de Paris, et pour rapporteur Mr M. Rodinson, établit un projet de fascicule de documentation portant le sigle DZ n° 46-002 qui fut multigraphié et diffusé largement en décembre 1955. Il comportait, outre les règles de translittération générales, des règles spéciales aux noms propres intéressant surtout les bibliothécaires, d'assez abondants commentaires (en partie repris ci-dessus) et des notes destinées à justifier les solutions adoptées. Ce document considéré comme avant-projet fut remis au secrétariat du Comité ISO/TC 46 le 4 février 1956. Celui-ci le diffusa parmi les « membres participants » du Comité et reçut des réponses critiques des membres danois, allemand et hongrois, puis autrichien, belge, portugais et néerlandais au cours des années 1957 et 1958. Mais un effort sérieux fut surtout fourni par un groupe de travail britannique qui examina de près l'avant-projet et les critiques qu'il avait suscitées. En gros, il se déclarait d'accord avec les solutions proposées par le premier, mais en trouvait la présentation trop complexe. Il proposait lui-même un texte sous forme de tableau avec des notes réduites au minimum. Cette présentation convenait mieux en effet à une norme de l'ISO. Aussi la réunion plénière du comité ISO/ TC 46 réunie à La Haye en septembre 1958 décida-t-elle de choisir le projet britannique comme second avant- projet et demanda à nouveau leurs observations aux comités-membres. Des réponses substantielles furent reçues de Belgique, d'Israël, de Norvège, de Pologne, de Suède, des États-Unis. Un groupe de travail se réunit alors à Paris les 21 et 22 avril 195920. Composé de P. J. M. Geelan de la « Royal geographical society » et du « Permanent committee on geographical names » représentant les Britanniques et de M. Rodinson représentant les Français, il examina l'avant-projet à la lumière des critiques et commentaires qu'il avait suscités. Le texte auquel aboutit le groupe de travail fut adopté par le comité technique ISO/TC 46 et devint le projet de recommandation ISO n° 353. Il fut diffusé, ainsi que le rapport qui l'accompagnait (rédigé par P. J. M. Geelan) et qui expliquait les raisons des décisions prises, et soumis à tous les comités membres de l'ISO. Ceux-ci avaient désormais à voter sur ce projet de recommandation. Vingt membres l'approuvèrent (Allemagne, Autriche, Chili, Espagne, France, Grande-Bretagne, Hongrie, Inde, Israël, Italie, Japon, Norvège, Nouvelle Zélande, Pays-Bas, Pologne, Roumanie, Suède, Suisse, Tchécoslovaquie, Yougoslavie), trois votèrent contre (Belgique, Danemark, États-Unis). Plus de 60 % des votants ayant accepté le projet (en fait près de 87 %), suivant les statuts de l'ISO, celui- ci devint une « recommandation ISO » approuvée par le Conseil en décembre 196I sous le sigle ISO/R 233. Une première édition en fut faite le même mois en anglais, en français et en russe. AUTRES SYSTÈMES RÉCENTS Le long processus qui aboutit, avec les précautions minutieuses que l'on a vues, à l'adoption de la recommandation ISO ne coupa pas court évidemment à la multiplication des systèmes proposés. On se contentera ici d'en citer quelques-uns parvenus à notre connaissance. Peu après la rédaction du premier avant-projet, G. M. Wickens proposait un système de translittération qui avait l'avantage de n'utiliser que des signes se trouvant sur les machines à écrire ordinaires. Du point de vue théorique, il suivait de façon très stricte les règles de la translittération. Mais ce système montre bien qu'on ne peut négliger le principe posé ci-dessus d'une correspondance minima, entre le phonème rendu par la lettre translittérée et une prononciation assez courante du signe choisi pour translittérer. A titre d'exemple, le système de Wickens écrit le nom du Prophète de l'Islam Muh:em2eduu (dans la recommandation de l'ISO Muhammad), le nom de Dieu 'all2oh (Allah), celui du premier calife omayyade Muxeawyec (pour nous Mu'awiyat, dans le Petit Larousse Moawiya), celui du célèbre calife des Mille et une nuits hearuwnu-alr2eshiyd (ISO : Harun ar-rašid Larousse, Haroun er- rachid), etc. Il est clair qu'un tel système ne peut convenir (à la rigueur) qu'à la communication entre spécialistes dans un cercle très restreint. Il ne pourrait être utilisé dans des ouvrages ou articles consultables par des spécialistes d'autres domaines ou un public plus large tel que celui qui a été défini ci-dessus. Il est d'ailleurs caractéristique qu'un des rédacteurs de la revue Bibliotheca Orientalis, où J. Koopmans avait repris et modifié le projet, fait suivre l'article de celui-ci d'une note où il en montre les inconvénients et propose une méthode simple pour rendre au moyen de la machine à écrire ordinaire... la translittération usuelle du type de celle adoptée par l'ISO21. En 1955, Mr Yahya Boutémène de Tlemcen envoyait à l'AFNOR un projet qui consistait plutôt en une réforme de l'écriture arabe, projet qu'il avait fait breveter en 1954. Ce projet, original et intéressant, consistait en fait à transformer les lettres arabes à l'image des lettres latines, les séparant les unes des autres et donnant à chacune une forme constante en toute position. Cela réduisait de façon considérable le nombre des signes typographiques nécessaires pour imprimer l'arabe. D'autre part, il donnait à chaque lettre une forme qui, tout en dérivant des formes arabes usuelles, suivait un canon de proportions analogue à celui des lettres latines. On voit qu'il ne s'agissait pas en vérité de translittération puisque le nouvel alphabet, avec tous les avantages qu'il pouvait présenter sur l'ancien, devait, comme celui-ci, être translittéré en écriture latine. La question qui se posait pour lui était celle de son adoption dans les pays musulmans, ce qui semblait très aléatoire pour des raisons sociales et culturelles. Il ne semble pas d'ailleurs qu'aucun progrès ait été fait en ce sens depuis huit ans22. Après l'adoption de la recommandation ISO, un projet turc fut tardivement communiqué au secrétariat de cet organisme. Tout en se rapprochant beaucoup sur de nombreux points du projet adopté, il en divergeait fortement par ailleurs. La base essentielle de ces divergences était dans l'adoption de lettres latines (avec signes diacritiques) correspondant à la prononciation turque des mots arabes pour rendre certains phonèmes arabes. Cela est évidemment à écarter pour des raisons de principe signalées ci-dessus. Pour certaines lettres (surtout les voyelles), on laisse le choix entre deux signes de translittération possibles, ce qui ouvre la voie à des équivoques. Pour rendre d'autres signes arabes, on adopte la lettre latine choisie par les créateurs du nouvel alphabet turc latin afin de rendre le son correspondant (ainsi c représente le son écrit dj en français). Rien ne s'opposerait à ce choix sinon le principe posé ci-dessus (mais de validité intentionnellement restreinte) du caractère international maximum des lettres choisies. Mais l'usage habituel des orientalistes européens a fait triompher auparavant d'autres choix. Il faut signaler surtout que le projet en question semble viser en réalité essentiellement à translittérer le turc tel qu'il était écrit sous l'Empire Ottoman, graphiquement sous la forme de l'alphabet arabe, linguistiquement encombré de môts et même de formes empruntés aux langues arabe et persane et prononcé suivant les lois de la phonétique turque. Pour cet emploi, le projet turc est à prendre en considération. Mais ce n'était pas l'objet du projet ISO qui visait essentiellement l'écriture arabe comme servant à écrire la langue arabe dans les pays arabes. Récemment le cardinal Eugène Tisserant, orientaliste renommé, a proposé un système de translittération qui a l'avantage de pouvoir être employé sur toutes les machines à écrire ayant des touches indépendantes pour les accents aigu et grave23. On sait d'ailleurs que ce n'est pas le cas sur les claviers français. Son système est en gros le même que celui adopté par l'ISO avec moins de détails prévus et les points ou autres signes placés sous les lettres remplacés par des accents aigus et graves placés au-dessus, ce qui est, paraît-il, supérieur du point de vue de la lisibilité. En outre, la lettre arabe 'ayn (consonne spéciale à l'arabe), rendue dans la recommandation ISO par l'esprit rude grec, c'est-à-dire une sorte d'apostrophe tournée vers la droite, se voit remplacée par l'apostrophe française telle qu'on l'écrit habituellement et qu'on l'imprime suivie du petit trait qui sert d'apostrophe en général sur les machines à écrire. Tout cela est assez pratique en principe. Mais la seule supériorité sur le système de l'ISO est la facilité de reproduction uploads/Ingenierie_Lourd/ la-translitteration-partie-iv.pdf

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