Une nouvelle approche de la formulation des bétons - de Larrard/Sedran A paraît

Une nouvelle approche de la formulation des bétons - de Larrard/Sedran A paraître aux Annales du BTP - Version 02/02/2003 21:41:00 1 UNE NOUVELLE APPROCHE DE LA FORMULATION DES BETONS François de Larrard, Thierry Sedran Laboratoire Central des Ponts et Chaussées Centre de Nantes Résumé L'article rappelle tout d'abord les enjeux actuels de la formulation des bétons. Pour les affronter au mieux, il est nécessaire de mettre en oeuvre des méthodes scientifiquement fondées, faisant un large recours à l'informatique, et capable d'utiliser les informations issues de la recherche et des essais précédents. A cette fin, le LCPC propose aujourd'hui un ensemble de modèles résumés dans un livre, et un logiciel pour les praticiens. Les bases scientifiques de cette approche sont tout d'abord présentées, suivies d'indications sur la structure du logiciel, et d'un exemple de sa mise en oeuvre pratique. On termine en énumérant les différents domaines d'application, et les futures améliorations de l'outil. Abstract The paper makes first a point about concrete mixture-proportioning, from a contemporary viewpoint. Nowadays it is necessary to carry out an approach relying upon sound, scientific methods, with the help of computer technology, for taking a maximum profit of research state- of-the-art and past experience (including test results on local materials). For this objective, LCPC (Laboratoire Central des Ponts et Chaussées) proposes a set of mathematical models, summarized in a recent book, plus software devoted to practitioners. The article gives an overview on the scientific basis and the program structure. Then an actual example of concrete mix-design is described. Finally, the large number of potential applications is listed, together with future improvement of the tool. INTRODUCTION Le problème de la formulation des bétons s'est singulièrement compliqué dans les années récentes. Tout d'abord, de nouveaux constituants tels que les adjuvants organiques, les additions minérales (cendres volantes, fillers etc.) ou les fibres sont venus s'ajouter à la panoplie classique des granulats et des ciments. Ensuite, on s'est intéressé à un nombre croissant de propriétés d'usage du matériau, en relation avec la totalité de son cycle de vie (depuis son comportement rhéologique à l'état frais jusqu'à sa durabilité dans différentes ambiances). Enfin, la gamme des propriétés que l'on peut atteindre avec les moyens industriels modernes s'est singulièrement élargie. Pour ne citer que les deux aspects les plus communément étudiés d'une formule de béton, à savoir la maniabilité et la résistance en compression, on sait aujourd'hui formuler des bétons secs (d'affaissement nul) comme des bétons autocompactants (ou autonivelants); de même, on peut viser des résistances de 1 à 2 MPa (pour des matériaux ré-excavables destinés au remplissage de tranchée) comme des résistances supérieures à 200 MPa (pour des mortiers à ultra-haute résistance destinés à la fabrication de conteneurs de déchets radioactifs, par exemple). En résumé, le problème de la formulation des bétons comporte de nos jours davantage de variables, davantage de dimensions et l'espace dans lequel on évolue est beaucoup plus vaste. Face à ces réalités, provenant sommes toutes d'un progrès normal de la technologie, le formulateur est soumis à une pression Une nouvelle approche de la formulation des bétons - de Larrard/Sedran A paraître aux Annales du BTP - Version 02/02/2003 21:41:00 2 croissante en termes de délais et de coûts. Il n'est malheureusement pas rare de voir des études de béton démarrer moins de 28 jours avant le démarrage d'un chantier; de plus, le marché du béton restant très concurrentiel dans notre pays, les entreprises n'ont que des budgets relativement restreints à consacrer à la formulation des bétons, même si de cet acte fondateur découle une grande partie des caractéristiques du chantier et de l'ouvrage futur. Ces considérations nous ont poussé, il y a quelques années, à imaginer la construction de logiciels d'aide à la formulation des bétons. Un premier produit nommé Bétonlab [1], proposé en 1992 dans sa première version, a été développé dans un but au départ pédagogique. L'idée consistait à proposer aux utilisateurs une sorte de "laboratoire électronique", qui lui permette de "gâcher du béton sur son bureau" [2]. L'accent était mis sur la simplicité d'utilisation. Après remplissage d'un nombre très limité de cases relatives aux constituants, on pouvait simuler la réalisation de gâchées de laboratoire, avec pour inconvénient une précision limitée des résultats, mais pour avantage l'obtention instantanée des caractéristiques des bétons. Plutôt qu'une prévision fidèle des résultats expérimentaux, on recherchait, avec Bétonlab, à donner à l'utilisateur une compréhension du fonctionnement du "système béton", lui permettant de réagir efficacement dans une situation réelle. Le produit a été largement diffusé en France, et garde son intérêt dans le contexte actuel, notamment en formation initiale et continue. A l'étranger, d'autres logiciels d'aide à la formulation des bétons ont étés proposés, dont on trouvera une revue assez complète dans la référence [3]. Certains produits sont essentiellement une "mise en musique informatique" de méthodes conventionnelles telles que la méthode de l'American Concrete Institute (ACI 211 [4]), ou, en France, la méthode Dreux-Gorisse [5]. Un nombre plus restreint d'exemples concerne des approches originales, comme celle de Day, plus axée sur le contrôle de la qualité en production que sur la formulation de départ [6], ou celle de Dewar [7], basée sur un modèle ternaire d'empilement granulaire. Cependant, aucune de ses méthodes ne repose sur un corpus scientifique à la fois solide et explicite. Or, étant donné les progrès de l'informatique, l'utilisation pratique de modèles numériques ne présente plus aujourd'hui de difficultés. Le coeur du problème ne réside donc plus dans l'assemblage des modèles permettant de formuler un béton, mais bien, plutôt, dans la construction même de ces modèles, illustrant le plus fidèlement possible les relations existant entre la composition d'un mélange et des propriétés d'usage. C'est pourquoi le LCPC s'est lancé, il y a plusieurs années, dans la construction d'un tel ensemble de modèles, au travers notamment d'un certain nombre de thèses de doctorat [8-13], synthétisées, assemblées et enrichies dans un ouvrage récent [14-15]. Le présent article décrit dans les grandes lignes la démarche scientifique d'ensemble, ainsi que son pendant logiciel Bétonlab-Pro [16]. Ce dernier n'est cependant qu'une application informatique particulière des modèles décrits. Un utilisateur peut les programmer directement à partir des références [14-15], en utilisant par exemple un logiciel de type tableur. CONTENU SCIENTIFIQUE L'approche scientifique du béton qui sous-tend le logiciel s'appuie principalement sur une analyse de la structure granulaire du matériau. Trois étapes sont successivement parcourues: celle de l'empilement sec, dont on cherche à prévoir la compacité et la ségrégabilité; celle de l'empilement humide (béton frais), intéressant par ses propriétés rhéologiques; enfin, celle de l'empilement constitué du squelette du granulat noyé dans une matrice de pâte de ciment durcie. L'exposé complet de cette approche, avec ses développements mathématiques, peut être trouvé dans les références [14-15]. MODELE D'EMPILEMENT GRANULAIRE Le modèle actuel, appelé Modèle d'Empilement Compressible (MEC), est la troisième génération de modèles développés au LCPC, visant à prévoir la compacité d'un Une nouvelle approche de la formulation des bétons - de Larrard/Sedran A paraître aux Annales du BTP - Version 02/02/2003 21:41:00 3 mélange à plusieurs classes, à partir de la connaissance des compacités des tranches monodimensionnelles, de la distribution granulaire du système et de l'énergie fournie pendant la mise en place. Il s'appuie sur les notions de compacité virtuelle et d'indice de serrage. Compacité virtuelle d'un empilement Pour une population de grains donnée, on sait que la compacité, rapport du volume solide au volume total, dépend du mode de mise en place du mélange. On appelle conventionnellement compacité virtuelle la valeur maximale qu'il est possible d'atteindre en plaçant les grains un à un dans le mélange, tout en respectant leur intégrité. Les mélanges industriels, mis en place aléatoirement et avec une énergie finie, conduisent toujours à des compacités réelles plus faibles. On appelle par convention classe monodimensionnelle un ensemble homogène de grains dont la grosseur est comprise entre deux tamis successifs de la série normalisée (série de Renard). Pour calculer la compacité virtuelle d'un mélange à n classes monodimensionnelles (mais non nécessairement sphériques), on commence par distinguer la classe dominante, qui forme une phase continue dans le mélange et qui en assure le serrage (cf. figure 1). Cette classe i étant caractérisée par la compacité qu'elle atteint lorsqu'elle est empilée isolément (βi), on calcule la compacité d'ensemble en exprimant que les grains i occupent "en masse" tout l'espace laissé disponible par les classes plus grossières, et que leur porosité est partiellement comblée par les classes les plus fines. On doit au passage tenir compte de deux types d'interaction granulaire: l'effet de paroi exercé par les gros grains, et l'effet de desserrement (ou d'interférence) exercé par les grains plus fins. Une hypothèse forte du modèle est de considérer ces interactions comme additives, ce qui revient à supposer la non-intersection des zones de l'empilement des grains i perturbées par les classes étrangères. Compacité réelle: notion d'indice de serrage Les considérations précédentes permettent, pour une combinaison donnée de n classes granulaires, de calculer n expressions de la compacité virtuelle, chacune correspondant au cas où la classe i serait dominante. La "vraie compacité virtuelle" est la plus faible uploads/Ingenierie_Lourd/ nouvelle-approche-formulation-abt-p.pdf

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