1 Beginnings and Endings Proceedings of the Ninth Annual Graduate Student Confe

1 Beginnings and Endings Proceedings of the Ninth Annual Graduate Student Conference in French, Francophone, and Comparative Literature Columbia University March 25, 2000 Editors Leigh Allen Julia Chamberlin Alison James Raina Uhden Priya Wadhera Actes du neuvième colloque étudiant annuel de littérature française, francophone et comparée Columbia University 25 mars 2000 2 Editorial Board Véronique Gaultier J. Ames Hodges Tiphaine Karsenti Geoffrey MacAdam Ève-Alice Roustang Cover Priya Wadhera Technical Assistant Marc Downie For further information please contact: FGSU Department of French and Romance Philology 521 Philosophy Hall MC 4902 Columbia University New York, NY 10027 3 Contents Ça commence comme une fin: Étude du journal intime d’Amiel Geraldine Doutriaux ............................................................... 4 Un exemple d’ekphrasis chez Proust: Passer de l’écriture à la lecture, de la mort à la naissance Priya Wadhera ...................................................................... 10 L’Écrivain Nomade; le début d’une nouvelle conscience et la fin du nationalisme? Ève Irène Therrien................................................................. 16 La fin du mythe, le commencement de la religion: Orphée et orphisme dans la poétique mallarméenne Maria Rusanda Muresan....................................................... 23 Un récit sans queue ni tête (?): Organisation narrative et signification dans L'Appareil-photo de Jean-Philippe Toussaint. Nicolas Xanthos..................................................................... 33 Marguerite Duras: Narrative uncertainty and absent origins Alison James.......................................................................... 43 The “Début du livre” and the End of Silence: Francis Ponge Lathering Le Savon J. Ames Hodges ..................................................................... 51 “Ma fin est mon commencement”: Étude des tornadas de neuf poèmes d’Arnaut Daniel Agathe Sultan ........................................................................ 59 Beginnings without End: Jacques Réda’s “Le Redoux” Aaron Prevots........................................................................ 70 4 Geraldine Doutriaux Ça commence comme une fin : Étude du journal intime d’Amiel Henri-Frédéric Amiel nota le moindre caprice de sa nature, la moindre variation de ses désirs, son journal intime s’est constitué « girouette de l’âme ambiante », une fonction quasi quotidienne et longue d’une quarantaine d’années. Cet acharnement à élucider ses humeurs justifie l’existence du journal intime et sa longévité. Cependant, en lisant ces pages, on ne suit pas un chemin de plus en plus lumineux vers la vérité du diariste : d’emblée on a une idée claire du personnage, et les quatorze tomes qui suivent ne varient guère de cette première idée. Il n’y a donc pas évolution ou mouvement qui s’approfondirait au fur et à mesure des années et de l’expérience acquise : la connaissance de soi semble d’emblée assimilée et le journal intime n’est qu’un prétexte pour la rabâcher et pour se plaindre de la rabâcher. Ce surplace journalier serait donc provoqué par le fait qu’Amiel n’a pas suivi l’itinéraire traditionnel du diariste, à savoir l’ignorance pure au point de départ, puis la progression vers une connaissance de soi pour finir par la révélation aveuglante du point d’arrivée, ou de la mort. Commençant par la fin, Amiel est presque aussi lucide à vingt-trois ans, lorsqu’il commence son journal, qu’à soixante ans, lorsqu’il s’éteint. Ainsi, ce journal intime ne serait pas, contrairement à ce que soutient le diariste lui-même, une analyse psychologique, qui est une descente vers les profondeurs du moi : alors qu’est-il ? peut-être une sorte de remise à neuf, une purification quotidienne qui le rend propre de la journée passée et ratée, une page nette qui blanchit et efface ces heures improductives, lui donne une meilleure conscience. Je voudrais saisir d’abord d’où vient que son moi soit d’emblée connu et fixé, annulant ainsi toute évolution et progression. Puis j’examinerai l’effet de ce phénomène qui est l’annulation de tous les temps, ce qui fait flotter le journal dans un hors-temps où le moi est définitivement arrêté dans sa croissance. La première lecture des fragments de ce journal semble démentir la thèse d’un moi fixé, sûr et certain dans son caractère. En effet, on assiste à des sautes d’humeur, à des variations de son tempérament qui bondissent d’un point extrême à un autre en l’espace d’un jour. Cependant, ce lunatisme s’accompagne d’une répétition lourde et 5 pesante : ses changements d’humeur sont si fréquents qu’on finit par s’y accoutumer et même un ennui honteux vient parfois chatouiller la lecture de tout ce rabâchage continuel. L’inconstance absolue d’Amiel équivaut à une constance infinie. D’ailleurs, le diariste fait souvent ces deux remarques contradictoires en apparence : d’une part il est agacé « du sautillement dans cette appréciation journalière d’une nature mobile » (34) et d’autre part il se plaint de « l’ennui de ce Journal, […] [sa] vie ennuyeuse, l’éternelle et détestable rechute sur [lui]-même » (33). Donc d’un côté un moi impossible à fixer tant il est versatile et changeant, d’un autre un moi globalement pareil à lui-même dans cela même qu’il varie toujours et inévitablement. Il s’agit de comprendre l’origine d’un tel paradoxe. Ici je m’appuierai sur l’étude de Georges Poulet dans son ouvrage Les Métamorphoses du Cercle. Faisons un bref retour en arrière. Durant son enfance, Amiel s’est soumis en bon enfant sage à l’autorité paternelle sans mère pour pallier la rigueur disciplinaire. Puis pendant l’adolescence l’émancipation prit la forme de l’étude, de ces livres qu’il dévora : la soumission fit place à une immense curiosité sans que l’adolescent ait pris le temps de se façonner un caractère, un naturel, puisqu’il passa du joug familial au joug livresque. N’ayant pas de moi particulier, il possédait une grande aptitude à s’identifier et à se fondre dans l’objet d’identification ; n’étant personne en particulier, il pouvait être tous les particuliers du monde. Cette faculté de se métamorphoser, d’abord enivrante, accéléra sa perte d’individualité, creusa ce vide, cette absence de « centralité » qu’il déplora toute sa vie. C’est alors que la question que tout le monde se pose devint chez lui une hantise désespérée : qui suis-je ? Il voit le journal intime comme un remède, un examen de soi menant à la découverte de son identité, qui lui permettra alors de se tourner vers les choses extérieures et d’agir non plus en soi mais vers l’autre. Je cite un passage clair : « Pour en finir avec cet examen, il faut d’abord se connaître à fond, puis être fixé dans sa vie, or je n’ai ni l’un ni l’autre avantage. Je cherche encore. Une fois arrêté et décidé, une fois ma nature formée et mon cœur donné, ce stade de mon Journal sera accompli, et je retournerai ma curiosité sur les choses, sur les actions, sur les faits : je deviendrai plus objectif » (35). C’est ici que la problématique se tient : Amiel déplore d’être trop subjectif, alors qu’il n’a cessé d’être une objectivité fusionnant dans une série d’objets différents. Pensant aboutir à la connaissance du moi par l’analyse objective et froide, il s’y est abandonné avec complaisance, alors qu’il s’agissait au contraire de cesser de se regarder pour vivre, de se fixer dans des actes concrets pour se déterminer. D’où le titre : Amiel commence par la fin, ça commence comme une fin, s’analysant avant d’avoir un soi, regardant exister un moi alors que celui-ci n’existe pas encore. 6 Ce vide en plein cœur engendre une temporalité qui creusera toujours davantage cette glaciation du moi, ce cercle autour duquel il ne cesse de tourner et dans lequel il trépigne sans qu’aucune issue ne soit possible. Pour illustrer cela, je vais passer en revue les trois temps de base considérés par Amiel : futur, passé et présent. Amiel est protestant et pense que la vie de chacun doit prendre une direction définie et constante pour accomplir sa vocation : certaines choses sont là pour nous aider à prendre la bonne direction, comme le mariage, le sexe, le travail, l’art etc. Toutes ses « réalisations » ont une fonction utilitaire, à nous de bien savoir les utiliser. Ainsi, le moindre sentiment éprouvé est un signe pour réaliser quelque chose : toute effusion, il faut la prendre, l’utiliser et en faire quelque chose de concret, comme un fils ou un livre. Amiel a donc le réflexe de visualiser les choses dans leur futur, dans ce à quoi elles pourraient aboutir, mener, si on les utilisait. Cette capacité d’anticiper et de voir le devenir de ce qui n’est qu’en germe lui donne l’impression d’avoir parcouru la moitié du chemin vers la réalisation. D’où les projets de livres, d’articles, qui ne verront jamais le jour, les listes de femmes susceptibles de devenir ses épouses, les passages sur le fait d’être un futur bon père alors qu’il atteint la cinquantaine. Toute chose chez lui n’existe pas en soi, de façon gratuite, mais toujours en fonction de ce qu’on peut en tirer pour plus tard. Parlant de l’amour et du mariage, son vocabulaire se fait financier : « Donner à une femme l’occasion d’exercer les vertus qu’elle porte en elle, de faire rayonner les forces et fructifier les facultés dont elle est dépositaire, lui ouvrir la carrière conjugale, maternelle, sociale, humaine, pour laquelle elle est née… c’est une bonne action, c’est une belle tâche, c’est presque un devoir » (104). Ainsi le futur est la somme des virtualités, des possibles, des buts accomplis, donc il est un résumé de toutes les joies possibles, et on sent sa volupté à parler du futur comme de quelque chose uploads/Litterature/ 10-james-marguerite-duras-narrative-uncertainty-and-absent-origins.pdf

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