Revue des Études Augustiniennes, 38 (1992), 3-5 Dom Pierre-Patrick Verbraken, O

Revue des Études Augustiniennes, 38 (1992), 3-5 Dom Pierre-Patrick Verbraken, OSB (1926-1992) La mort subite du Père Verbraken en a surpris plus d'un, non seulement ses confrères au milieu desquels il s'effondra au soir du 22 février dernier, terrassé par une crise cardiaque, mais aussi tous ses nombreux amis, avec lesquels il était en relation, et qui apprirent la nouvelle dans les jours suivants. Depuis quelque temps, le Père Patrick avouait éprouver une certaine fatigue, mais il continuait néanmoins à assurer sa fonction de directeur de la Revue Bénédictine et à poursuivre ses propres travaux. Il est mort à la tâche. Il était né à Anvers le 26 février 1926. Entré à l'Abbaye de Maredsous en juillet 1944, il y fit ses études de philosophie (1945-1947) après sa profession religieuse, puis passa deux années (1947-1949) à l'Université de Louvain pour des études de philologie germanique. Revenu à Maredsous pour ses études théologiques, il y est ordonné prêtre le 20 juillet 1952. Il retourna à nouveau à Louvain pour la préparation de son doctorat en théologie (1952-1956) et de sa thèse sur "Le commentaire de saint Grégoire au Premier Livre des Rois" (1957), laquelle parut peu d'années après, en 1963, dans le Corpus Christianorum, t. 144. Appartenant à une abbaye où s'étaient illustrés des Bénédictins de renom, comme Ursmer Berlière, Raymond Thibaut, Donatien De Bruyne, Germain Morin, Bernard Capelle, et d'autres, le Père Verbraken se trouvait au lendemain de ses études en un milieu idéal, conforme à ses goûts et à ses talents d'historien et de patrologue. Une orientation plus particulière se dessina bien vite, orientation qui allait faire de lui l'un des grands spécialistes de l'homélitique augustinienne. Dom Germain Morin (1861-1946), qui s'était consacré, dès 1887, à l'édition des Sermons de saint Césaire, et s'était illustré en 1930 avec l'édition du texte critique de quelques cent-vingt "Sermones post maurinos reperti", avait passé le flambeau à Dom Cyrille Lambot (1900- 1968). Celui-ci, à son tour, allait enrichir la collection des Sermons d'Augustin de nouveaux textes et se faire une renommée incontestée en la matière. C'est dans la lignée de ces érudits que Dom Verbraken va prendre rang. Bénéficiant non seulement de l'exemple et de la méthode de ses devanciers mais aussi de toute la documentation qu'ils avaient eu soin de rassembler, Dom 4 PIERRE-PATRICK VERBRAKEN Verbraken inaugure dès 1958 ses éditions critiques des sermons augustiniens avec la publication dans la Revue bénédictine des nouveaux textes des Sermons 56 et 215. Suivront, à deux ou trois ans d'intervalle, les éditions de onze autres sermons et de douze fragments de sermons. Cette fréquentation constante de l'œuvre de saint Augustin, à partir des manuscrits, l'amènera à publier en 1976 dans la collection "Instrumenta patristica", un livre fournissant pas moins de 544 notices sur chacun des sermons, anciens et nouveaux, attribués à Augustin, avec précision du sujet, de la date, du lieu de prédication, de l'état du texte, et de son authenticité ; ce livre intitulé : Etudes critiques sur les Sermons de saint Augustin, est devenu le manuel indispensable pour quiconque aborde l'étude d'un sermon d'Augustin, et il perpétuera pendant longtemps la mémoire du Père Verbraken. Il fut adjoint vers 1959 à Dom Cyrille Lambot qui, atteint par une grave affection des yeux, ne pouvait que très difficilement assurer, en plus de ses travaux érudits, la direction de la Revue bénédictine qu'il assumait depuis 1957. Dix années durant ce fut un travail de collaboration étroite entre le maître et le disciple, temps de "formation de la relève", comme l'a écrit Dom Verbraken dans la notice biographique qu'il a consacrée avec beaucoup de piété et de ferveur à Dom Cyrille, décédé le 29 août 1968 en la fête de saint Augustin (cf. Revue bénédictine, t.79, 1969, p.1-22). Très pris, depuis lors, par la direction de cette Revue, le Père Patrick continua néammoins à fournir de précieuses contributions en divers périodiques, ou à l'occasion de Colloques et Congrès (une centaine d'articles et notices au total, dont la liste complète sera donnée dans la flev. bén., n° 3-4 de 1992). On y voit une confirmation de sa parfaite connaissance du dossier augustinien, et de sa maîtrise dans l'étude des textes. Pour célébrer le "Troisième centenaire de l'édition mauriste de saint Augustin", l'Institut d'Études Augustiniennes, installé sur les lieux mêmes où cette Editio maior fut réalisée, avait tenu à inviter le Père Verbraken, comme l'un des meilleurs représentants de la tradition des Mauristes. Il avait, à cette occasion, retracé en une douzaine de pages l'histoire des "Éditions successives des 'Sermons' de saint Augustin", de l'édition princeps d'Amerbach (1494-1495), à celle du Corpus Christianorum, pour les cinquante premiers sermons. Et il concluait : "Lors du beau congrès tenu à Rome en septembre 1986..., j'ai exposé ce que, à mes yeux, doivent être les jalons pour une édition critique des sermons sur le Nouveau Testament. En particulier, j'y ai précisé la valeur de la collection De verbis Domini et Apostoli et j'y ai justifié le choix des sermons-tests déjà publiés en priorité." Ces lignes sont un peu son testament. Le grand souhait du Père Verbraken était d'éditer dans les prochaines années, à la suite de Dom Lambot, les Sermons 51 à 147, puis 148 à 183, dont il avait donné plusieurs échantillons. A l'occasion du centenaire de la Revue bénédictine, au titre de directeur, il organisa, le 25 mai 1984, un très belle journée dont il est rendu compte dans le tome 184, de la même année. Dans ce fascicule commémoratif, intitulé "Cent années d'érudition ecclésiastique : La 'Revue bénédictine' 1884-1984", le Père Patrick rendait un juste hommage à tous ses devanciers à la direction de la PIERRE-PATRICK VERBRAKEN 5 Revue, et à tous ses confrères anciens et nouveaux de l'Abbaye de Maredsous pour leur apport scientifique, un siècle durant, au service de l'Église. Je ne veux pas terminer cette brève notice sans évoquer les relations suivies et amicales que j'ai entretenues avec le Père Patrick durant près de 40 ans ; que d'avis et de conseils il m'a fraternellement prodigués pour un même idéal ! Je suis certain que beaucoup lui rendront le même hommage. Georges FOLLIET Revue des Études Augustiniennes, 38 (1992), 6-18 Tertullien, De corona, I : Carthage ou Lámbese ?* Le traité de Tertullien Sur la couronne débute par une anecdote qui concerne la vie quotidienne, les realia du monde romain au début du IIle siècle de notre ère : lors d'une distribution d'argent, un soldat renonce à sa couronne et annonce qu'il est chrétien. Il est ensuite jugé, condamné, sans doute exécuté, devenant ainsi un martyr. Les éléments concrets qui nous sont présentés à cette occasion confèrent à ce passage beaucoup d'intérêt pour l'historien, et lui donnent une grande importancei. Pourtant, le De corona est resté allusif sur deux points, la date à laquelle s'est déroulé cet événement, et surtout le lieu2. D'où des débats entre spécialistes, les uns penchant pour Carthage, les autres pour Lámbese. L'auteur, Tertullien, est assez connu, et il a donné matière à une bibliographie abondante3. Une tentative a été faite il y a relativement peu de * Les abréviatons des titres de revues ont été empruntées à VAnnée Philologique. 1. Le contenu du présent article a déjà été brièvement évoqué : N. DUVAL, S. LANCEL et Y. LE BOHEC, B.C.T.H., 1984, p. 50 ; Y. LE BOHEC, La Troisième Légion Auguste, 1989, Paris, p. 571-572. Il a été également présenté sous forme de conférences, à l'Université III de Grenoble, à l'invitation de M. S. LANCEL, et devant la Commission de l'Afrique du Nord du Comité des Travaux Historiques, à l'invitation de M. L. GALAND. Je remercie M. J.-C. FREDOUILLE, Professeur à la Sorbonne, qui a bien voulu relire ce manuscrit. 2. Pour le texte : Tertullien, De corona, par J. FONTAINE, 1966, Paris, 185 p. ; La corona, par P. A. GRAMAGLIA, Rome, 1980, 241 p. (non uidï). Commentaires : P. FRANCHI DE' CAVALIERI, «Note agiografiche, 8, XI, Sopra alcuni testi del De corona di Tertulliano», Studi e Testi, LXV, 1935, p. 357-386 ; G. DE PLINVAL, «Tertullien et le scandale de la couronne», Mèi. J. DE GHELLINCK, I, 1951, p. 183-188. Voir aussi, bien entendu, les notes suivantes. 3. Nous ne signalerons ici que quelques titres parmi les plus importants (les plus récents donneront des références sur des points précis de l'œuvre de Tertullien ; à cette fin, on consultera également la chronique annuelle de la RÉ Aug., due à R. BRAUN, S. DELÉANI, F. DOLBEAU, J.-C. FREDOUILLE et P. PETTTMENGIN) : P. MONCEAUX, Histoire littéraire de l'Afrique chrétienne, I, Paris, 1900, p. 177-461 ; Ch. GUIGNEBERT, Tertullien. Étude sur ses sentiments à l'égard de l'Empire et de la société civile, Paris, 1901, XXIV-615 p. ; M. SPANNEUT, Tertullien et les premiers moralistes africains, Paris, 1969, 220 p. ; C. RAMBAUX, Tertullien TERTULLIEN, «DE CORONA», I 1 temps pour bouleverser ce que l'on savait de sa vie4, mais cette entreprise n'a pas séduit la critique5. Les commentateurs ont estimé avec beaucoup de sagesse qu'on ne devait pas modifier les uploads/Litterature/ 38-reaug-1992-nr-1-2.pdf

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