Vecteurs, glisseurs, torseurs ... et mathématiques sociales [NIr P. ROUGBE rUni
Vecteurs, glisseurs, torseurs ... et mathématiques sociales [NIr P. ROUGBE rUniversiti de Ro~n) La lecture de la fiche "Vecteurs" reçue dans un récent Bulletin m'incite à vous faire part de ces quelques réflexions, qui sont celles d'un utilisateur mécanicien et portent donc essentiellement sur le para- graphe 2 de cette fiche consacré à l'emploi des vecteurs en Mécanique. Vecteurs Tout d'abord, je suis heureux de l'accent mis sur le couple (P,V) d'un point P d'un espace affine  ·et d'un vecteur v de l'espace vecto- riel & associé à Â, au détriment du bipoint justement condamné, En dehors évidemment du Mathématicien traitant des rapports entre  2 et &, quel utilisateur des espaces affines a-t-il jamais besoin de l'extrémité B du vecteur lié, (A, AB)? Et va pour le terme "poin- teur" ... Par contre, je ne puis approuver la définition : "Le moment en A dupointeur (P,"V) est le pointeur (A, AI> A iD" que je propose de remplacer par : " .. est le vecteur AP AV" -964- Ce qui n'interdit pas d'introduire l!!..S..ha"!E des moments, dont le graphe est l'ensemble des pointeurs (M, MP /\ v), ME A;. Et au moin., avec cette définition, la relation Ai> /\v= Bi> /\v+ ÂÏi /\ vsi souvent utilisée exprime bien une relation entre les moment. en A et B comme on le dit couramment. . Pour exactement les mêmes raisons, vitesse et accélération d'un point M doivent, à mon avis, être définies comme étant des éléments de " et non des pointeurs d'origine M. Glisseurs Mais je voudrais surtout parler ici des vecteurs gJissants, que vous proposez d'appeler glisseurs. Auparavant, je ne résiste pas au plaisir de signaler la définition suivante, lue dans un ouvrage de cinématique datant d'une dizaine d'années; "Vecteur Il$treint à rester sur son support" J'imagine qu'une réédition postérieure à mai 1968 aurait donné "autorisé à se déplacer sur son support". Ce que je crois à propos du vecteur glissant, c'est que le problème à son sujet n'est pas d'en trouver une bonne définition et une bonne appellation, mais plutôt de l'extirper de l'esprit des gens pour cause d'inutilité. Voici mes raisons. Tout d'abord, contrairement à ce que l'on dit souvent, ce que le physicien appelle force concentrée "!!ppliquéou\ un corps matériel doit être schématisé par un pointeur (M, F) (force F appliquée en M), et non par un glisseur. Même si pour certains usages on n'utilise que le glisseur (D, F), où D est la droite passant par M et parallèle à F (c'est (presque) le cas dans l'application du principe fondamental de la dynamique à un solide) il n'en va pas ainsi pour tous les u~s ...!J!!;.exemple, la puis- sance de cette force est le produit scalaire F. V(M) où V(M) est la vitesse de M et non celle d'un hypothétique point de D. De façon plus générale, ce que le physicien appelle système de forces exercées à un instant donné sur un corps matériel occupant à cet instant la position E dans A; sera schématisé par une mesure F définie sur E et à valeur dans &, généralement définie dans la pratique par sa densité massique, volumique ou autre, c'est-à-dire par un champ de vecteurs et une mesure scalaire. Les forces de pesanteur sont évidem- ment de ce type. Cette notion devrait donc être introduite le plus rapidement possible. Or, si l'on sait ajouter (? !) deux forces exercées en un même point, on est dépourvu devant deux forces appliquées en des points différents. Les vecteurs glissants sont nés de la technique qui consiste, dans le cas de forces coplanaires, à les faire glisser (? !) sur leur support de façon à les transformer en forces appliquées en un même point pour pouvoir les ajouter. -965- Bulletin de l'APMEP n°286 - Décembre 1972 Le mathématicien comprend évidemment qu'en faisant glisser on rempl&'e un poi,nteur par un autre jugé équivalent (à certains points de vue mais bien sûr pas à tous), donc que l'on introduit une relation d'équivalence :Il., et que ce que l'on ajoute ce ne sont pas les pointeurs PI et P2 de départ mais leurs images C(p, ) et f(p, ) par W1e application f de l'ensemble P des pointeurs dans un ensemble X muni d'une loi d'addition, application f dont la restriction à chacune des classes d'équivalence est constante. L'emploi de la notion de vecteur glissant consiste à choisir pour :Il. la relation "ont même support et même mesure", pour X l'ensemble ~ des vecteurs glissants, et pour f l'application canonique de . Axl: dans Ail: . Or il s'agit là d'une demi mesure. D'une part l'ensemble des vecteurs glissants n'a pas une structure bien agréable, et en particulier la somme de deux vecteurs glissants ne peut être définie que s'ils sont coplanaires, parfois laborieusement (composition de forces parallèles) et encore pas toujours (cf. les fameux couples). D'autre part la voie est bouchée à toute généralisation: qu'estce qu'une mesure vectorielle glissante ? Enfin, une dernière chose me contrarie sur le plan pédagogique, et je m'excuse si elle. concerne plus le mécanicien que le mathématicien. Il ne me paraît pas sain de permettre à une force, qui schématise une action mécanique concrète en un point précis, de s'abandonner à des glissements dangereux pour s'accoupler au hasard des rencontres et donner naissance à un être que je baptiserai encore force, qui aura la même nature mathématique, mais qui ne schématisera plus une action mécanique précise exercée en un point précis. C'est un peu comme si en ajoutant les volumes de deux bouteilles j'essayais de faire croire que j'obtiens une nouvelle bouteille, plus grande, en partsnt des deux premières. De, telles pratiques préparent et justifient l'irruption incongrue de mystérieuses forces centrifuges ou gyroscopiques au milieu des devoirs de nos élèves. Pour en revenir à nos forces, c'estàdire à nos pointeurs, que nous voulons ajouter, il faut se persuader que ce que l'on ajoute en fait ce sont leurs chnmps de moments. Et donc que le bon choix consiste à prendre pour :Il. la relation "ont même ctlamp de moments", pour X l'espace vectoriel des champs de vecteurs, et pour f l'application qui associe à un pointeur (P,F) son champ de moments : M-MPAF Les classes d'équivalence sont toujours les vecteurs glissants, mais perdent de leur intérét puisque ce qui est ajouté ce sont les moments. Par ailleurs, l'addition est évidemment partout définie puisque f est à valeur dans un espace vectoriel, ce qui est un gros progrès. -966- .~_ ................. -~ Bulletin de l'APMEP n°286 - Décembre 1972 - Enfin la généralisation est immédiate. On remplace l'ensemble des pointeurs, A X & , par l'ensemble des mesures F définies sur A et à valeurs dans &, qui contiendra en particulier les ensembles finis de pointeurs, on définit le champ des moments d'une telle mesure comme étant le champ , '" tiF : ME & - tiF (M)= JA MPAdF(P) et l'application f sera l'application F -+ tiF On vérifie évidemment la relation caractéristique tiF (A) = tiF (B) + -=r; A BA '1 A et B E.A avec 'if F ( A ) = jA dF(P) qui montre d'une part que ti F ést un champ affine dO'!t l'8:2plication linéaire associée est l'application antisymétrique: U -+ TI An, et d'autre part et bien évidemment que nous débo.uchons sur la notion de torseur. Torseurs Ce qui précède a fait comprendre que la notion de torseur remplace avantageusement la notion de vecteur glissant, mais ne la prolonge pas. La démarche qui consiste à introduire les torseurs comme classes d'équivalence dans l'ensemble des systémes finis de vecteurs glissants, pour la relation "ont même champ de moments", démarche qui est en fait imposée par tous les programmes contenant les torseurs, est donc indéfendable. La notion de vecteur glissant ne se défend que dans la mesure où elle est jugée recevable par de jeunes éléves alors que la notion de moment, et à fortiori de torseur, ne le serait pas. Mais dès que ces notions sont utilisées le vecJ;eur glissant peut et doit être oublié. Il renaîtra d'ailleurs de ses cendres, comme nous le verrons, sous une forme convenable. Je ne crois pas pour autant qu'il faille définir les torseurs COmme classes d'équivalence des systémes finis de pointeurs: cela nous inter· dirait de parler du torseur des forces de pesanteur, qui sont des forces réparties et non discrètes. Ni d'ailleurs dans l'ensemble des mesures vectorielles: cela nous interdirait de parler du torseur des forces magné· tiques, qui, en dehors de la· fiction des masses magnétiques, ne relève pas du schéma développé ici. -967- .. __.... _-~ Bulletin de l'APMEP n°286 - Décembre 1972 Je ne crois pas enfin qu'il faille définir un torseur comme étant une classe d'équivalence, et ceci pour la simple raison que l'être mathé- matique qui sera utilisé par la suite ne sera jamais cette classe elle- même, mais presque exclusivement le champ de ses moments. Sans compter qu'un être mathématique défini par création et non· par caractérisation risque fort de rester auréolé d'un uploads/Litterature/ aaa72064.pdf
Documents similaires










-
37
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Mar 28, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
- Taille du fichier 0.3180MB