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See discussions, stats, and author profiles for this publication at: https://www.researchgate.net/publication/270216644 Bouchardon, S. (2011). «Littérature numérique : une littérature communicante ?», Médiation Et Information n° 33 (MEI), Paris : L’Harmattan, 141-152. Article · January 2011 CITATIONS 0 READS 513 1 author: Some of the authors of this publication are also working on these related projects: PRECIP (http://precip.fr) View project Serge Bouchardon Université de Technologie de Compiègne 65 PUBLICATIONS 113 CITATIONS SEE PROFILE All content following this page was uploaded by Serge Bouchardon on 26 January 2018. The user has requested enhancement of the downloaded file. Littérature numérique : une littérature communicante ? Serge Bouchardon Université Technologique de Compiègne1 Résumé Les œuvres de littérature numérique constituent des objets intéressants pour étudier les rapports entre littérature et communication : elles proposent un contrat de communication renouvelé avec le lecteur, communiquent sur elles-mêmes mais aussi sur la littérature. Œuvres évolutives, œuvres processuelles, elles occupent une place à part dans la littérature. Encore peu reconnues, elles doivent communiquer sur leur existence (diffusion), leur mode d’emploi (réception), leur légitimité (valorisation). Mais en conjuguant de la sorte actes communicationnels et actes littéraires, elles jouent un rôle de révélateur : elles mettent en exergue le fait que, dans une œuvre littéraire, l’acte littéraire n’est pas coupé d’actes communicationnels. La littérature numérique nous permet par là même de saisir l’articulation et l’intrication du littéraire et du communicationnel. Abstract Digital literary works which propose a renewed communication contract with the reader, inform us not only about themselves but also about literature. They constitute interesting objects for the study of the relationships between literature and communication. As evolutive and processual works, they have a place apart in literature. Still not much acknowledged, they have to communicate on their existence (diffusion), their playability (reception), their legitimacy (valorisation). But while conjugating communicational and literary acts, they play a revealing role : they emphasize the fact that, in a literary work, literary acts can’t be separated from communicational acts. Therefore digital literature allows us to apprehend the articulation and intricacy of the the literary and the communicational. Mots-clés Littérature numérique ; interactivité ; contrat de communication ; énonciation éditoriale ; paratexte. Keywords Digital literature ; interactivity ; communication contract ; editorial enonciation ; paratext. 1 Serge Bouchardon, agrégé de lettres modernes, chef de projet pendant six ans dans l’industrie du multimédia éducatif, est actuellement maître de conférences en sciences de l’information et de la communication.Parmi ses champs de recherche : l’écriture interactive et multimédia, la création numérique. Dernier ouvrage paru : Littérature numérique : le récit interactif, Hermès Lavoisier, Paris, décembre 2009. Introduction La littérature numérique s’inscrit dans des lignes généalogiques connues : écriture combinatoire et écriture à contraintes, écriture fragmentaire, écriture sonore et visuelle (Bouchardon, 2009). Qu’il s’agisse de fictions hypertextuelles, de poèmes cinétiques ou encore d’œuvres faisant appel à la génération automatique de textes, la création littéraire numérique est actuellement florissante, notamment en ligne. Pour les auteurs, il s’agit de concevoir et de réaliser des œuvres spécifiquement pour l’ordinateur et le support numérique, en s’efforçant d’en exploiter les caractéristiques : technologie hypertexte, dimension multimédia, interactivité. Même des auteurs consacrés par l’imprimé, tels que François Bon2, y voient une occasion d'expérimenter de nouvelles formes littéraires. Si ces créations se présentent comme des œuvres, elles se situent souvent à l’articulation du littéraire et du communicationnel. Tout d’abord parce qu’elles proposent un type de communication original avec le lecteur : c’est notamment le cas des œuvres dites « interactives ». Mais aussi parce que, pour être lues – ou jouées – elles doivent communiquer sur leur mode de fonctionnement. Enfin parce que, pour exister face à un champ littéraire qui ne les reconnaît pas – ou peu – elles doivent communiquer sur leur existence. Il apparaît ainsi que les œuvres de littérature numérique s’avèrent pertinentes pour interroger les rapports entre littérature et communication. En quoi proposent-elles de nouveaux modes de communication du littéraire ? Nous analyserons cette question selon trois axes. Dans la mesure où les œuvres interactives prétendent proposer des modes de communication différents avec le lecteur, en quoi s’agit-il d’un contrat de communication renouvelé par rapport à celui d’une œuvre imprimée ? Par ailleurs, les conventions de lecture et d’écriture de la littérature numérique étant en grande partie en cours de constitution, comment les créations communiquent-elles sur elles-mêmes et sur la façon dont elles peuvent être reçues ? Enfin, si cette littérature communique sur la littérature numérique, elle communique également sur la littérature elle-même en questionnant son rapport au littéraire et à la littérarité3. Dans cet article, nous nous penchons sur les œuvres de littérature numérique consultables en ligne, sans pour autant ignorer l’existence d’œuvres qui sont accessibles hors ligne, par exemple les créations figurant sur des CD-Rom ou DVD-Rom4, celles qui font l’objet d’une installation5 ou encore celles qui sont présentées dans le cadre de « performances »6. Communication avec le lecteur Des œuvres interactives Parmi les créations de littérature numérique, les œuvres dites interactives prétendent proposer un contrat de communication original avec le lecteur. Trois grands types d’action peuvent être proposées au lecteur : accéder (à un nouveau contenu), manipuler (un contenu existant), produire (Bouchardon, 2009). Les œuvres hypertextuelles jouent avant tout sur l’accès. Une création hypertextuelle propose ainsi une lecture non-linéaire de fragments textuels reliés par des liens. Dans un récit hypertextuel, la navigation peut permettre à chaque lecteur de suivre un parcours unique. Les liens peuvent en effet être statiques mais ils peuvent également être dynamiques : si le lecteur clique à plusieurs reprises sur un même lien hypertextuel, soit au cours d’un même parcours de lecture, soit lors d’une lecture ultérieure, il ne verra pas forcément le même fragment textuel s’afficher. Les œuvres cinétiques ou animées exploitent conjointement dimension temporelle et dimension multimédia. La notion de mouvement est au cœur de ces créations. Le travail sur la matérialité du texte et le jeu sur le signifiant (mode d’apparition, animation, déformation) sont notamment particulièrement présents. Ces créations peuvent être interactives : les médias (texte, image, son, vidéo) qui apparaissent à l’écran proposent dans ce cas différentes formes de manipulation au lecteur. 2 http://www.tierslivre.net/ 3 « L’objet de la science littéraire n’est pas la littérature mais la littérarité, c’est-à-dire ce qui fait d’une œuvre donnée une œuvre littéraire » (Jakobson Roman, Questions de poétique, trad. fr., Seuil, Paris, 1973). 4 Citons par exemple la revue sur CD-Rom Alire, éditée depuis 1989 (http://motsvoir.free.fr/). 5 Par exemple les installations de Grégory Chatonsky, http://gregory.incident.net 6 Par exemple les performances de Philippe Boisnard, http://databaz.org/hp-process Enfin, certaines œuvres contributives peuvent faire appel à une autre forme d’interactivité qui relève plus du produire. Du texte peut être tapé au clavier par le lecteur et intégré dans l’œuvre. Il s’agit d’une interactivité qui n’est pas de navigation ou de manipulation, mais d’une interactivité d’introduction de données, qui correspond à une introduction de texte dans l’œuvre. Un contrat de communication renouvelé ? Toutes les œuvres de littérature numérique ne sont pas interactives : un poème cinétique, par exemple, peut se dérouler sans aucune intervention du lecteur, sur le mode de l’audiovisuel7. Concernant les œuvres interactives, l’interactivité peut prendre, nous l’avons vu, des formes très diverses. Mais dans quelle mesure peut-on parler d’un contrat de communication renouvelé ? Écriture fragmentaire et lecture non-linéaire sont souvent mises en avant par les théoriciens8. La déconstruction de la fiction qu'opèrent notamment les œuvres hypertextuelles, n'est pourtant pas nouvelle. Des débuts du roman (Sterne, Diderot) jusqu’à la modernité littéraire (Joyce, Borges, Saporta, Queneau, Perec, Calvino, Roubaud), certains auteurs ont déjà tenté de rompre avec la linéarité. Pourtant, le numérique propose pour la première fois un système intrinsèquement délinéarisé. D’un point de vue théorique, le numérique se caractérise en effet par le fait de manipuler un système d’unités discrètes indépendantes les unes des autres par des règles formelles de type algorithmique. D'emblée, le système est hypertextuel avant d'être textuel ; il s’agit d’une hypertextualité qui peut être abordée localement comme une textualité. Le support numérique permet aux auteurs de reprendre des problématiques anciennes et de concrétiser des tentatives que le support papier ne permettait pas de voir parfaitement aboutir. Dans ce contrat de parole littéraire renouvelé, on peut également souligner les manipulations requises du lecteur pour que l’œuvre se déroule. Certes, il existe de nombreux exemples d’œuvres littéraires qui requièrent des interventions de la part du lecteur, à commencer par les Cent mille milliards de poèmes9 de Raymond Queneau. Espen Aarseth a avancé le terme de « littérature ergodique » pour les désigner : « en littérature ergodique, un effort non trivial est requis du lecteur pour qu’il traverse le texte » (Aarseth, 1997). Ce qui est nouveau avec un dispositif informatique, c’est la dimension calculatoire. Par nature, un texte sur un support numérique est un texte dynamique dans la mesure où il est le résultat d’un calcul. Il y a du calcul entre une forme d’enregistrement et une (ou plusieurs) forme(s) de restitution (Bachimont, 1998). C'est d'ailleurs le calcul qui donne la possibilité au lecteur de manipuler lui-même des inscriptions. Autant que uploads/Litterature/ bouchardon-litterature-numerique-communicante-pdf.pdf

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