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75 Conclusion Comme nous l’avons annoncé en introduction, nous avons tenté de montrer les différents champs dans lesquels le rouge marque le passage d’un état à un autre et fait figure de transition. Dans un premier temps, au niveau féminin, il exprime des sentiments et émotions signalant un inconfort et invitant le personnage à (ré)agir face à cette situation : refus, fruite … Nous avons également vu que les termes de rouge désignaient souvent des jeunes filles nubiles, autrement dit entre l’enfance et l’âge adulte, prêtes à changer de tuteur, de maison ... De plus, ces jeunes filles sont souvent décrites comme belles, charmantes, selon les critères de beauté de l’époque où la rougeur du teint et la blancheur de la peau s’entremêlent et sont des qualités nécessaires pour être mariées. Les personnages féminins sont volontiers idéalisés. Nous avons aussi évoqué des parties plus érotiques jouant sur la sexualisation et des cas masculins, sur l’ambiguïté. Tous ces attraits sont bien sûr éphémères puisque ni la jeunesse ni la beauté ne durent. Puis nous avons traité de la représentation de l’aurore ainsi que de celle du crépuscule qui offrent de très belles images poétiques et usent de ce qui semble être des formules, des structures de vers fixes reprises par plusieurs auteurs et mimant la cyclicité du phénomène. De plus, Aurore est souvent représentée sur un char, faisant le tour de la Terre, toujours dans un cercle, un cycle. L’aurore est l’entité décrite selon le plus grand nombre de termes différents, renvoyant probablement à autant de nuances visibles dans le ciel lors du lever du jour. Les demi-saisons, quant à elles, présentent leur lot de floraison et de maturation de fruits, et expriment toute la renaissance dont elle font preuve par le verbe rubere, marquant l’action et l’adjectif purpureus, la richesse, la qualité mais aussi des nuances obscures, notamment pour le vin à l’automne. Que ce soit à l’échelle de la journée ou de l’année, ces périodes à la fois ouvrent et ferment une temporalité, sont et la naissance et la mort d’un cycle. Ensuite nous avons observé quelques cas de métamorphoses présentant du rouge au moment des transformations. Il s’agit souvent de mortels changés en fleur ou animal, conservant une dimension organique, vivante bien que sous une autre forme. L’ambivalence du phénomène est tangible par le mélange des termes cruor et sanguis, symbolisant la mort et la vie. La couleur se justifie non seulement par un processus vital souvent défaillant mais 76 également par le réemploi des attributs du personnage dans ceux de sa forme finale. Enfin nous avons étudié la présence du rouge lors de rituels et cultes, notamment funéraires. Ces rites marquent les différentes étapes de la vie, permettant une évolution positive de l’individu. Le rouge est souvent joint au blanc, comme dans une optique de purification, de retour à un état antérieur tout en ne le retrouvant pas puisque les rituels invitent à un avancement, à un état encore jamais connu. Le blanc renvoie également à un aspect cultuel, voire divin. Nous avons tenté de justifier l’emploi de chaque terme chromatique dans ses contextes d’apparition. Plusieurs des termes annoncés, recherchés et examinés n’apparaissent pas dans notre étude, autrement dit, dans les différentes formes de transitions analysées. C’est le cas d’assyr ou sandyx par exemple, qui sont de surcroît très peu usités chez nos auteurs. Certains termes sont plus récurrents que d’autres et couvrent de nombreux champs, dans des perspectives variées. Nous avons résumé les termes rencontrés et leurs contextes d’emploi dans un tableau : 77 78 Nous espérons vous avoir convaincu de la valeur transitionnelle du rouge, qui n’est pas son seul aspect. En effet, tous les champs n’ont pas été traités ici mais nous aurions pu davantage nous attarder sur les dieux, les personnages mythologiques, notamment Nisus, ou encore la pourpre, bien qu’elle ait déjà été largement étudiée. Précisons également que le rouge n’intervient pas à chaque mention d’un élément cité dans notre étude. En effet, pour ne prendre que quelques exemples, l’aurore ou la jeune fille ne sont pas toujours mentionnées avec un terme chromatique : Postera depulerat stellas aurora micantes ; (OV. met. 7, 110) Le lendemain, dès que l’aurore a chassé les étoiles scintillantes, Nam cur in Phrygiis Iunonem et Pallada siluis nunc quoque iudicium non tenuisse pudet ? (OV. ars 1, 623-624) Sinon, pourquoi, aujourd’hui encore, Junon et Pallas rougiraient-elles d’avoir perdu leur cause dans les bois de Phrygie ? Avec un autre corpus, nous aurions probablement obtenu d’autres résultats : plus, ou moins de termes, d’autres perspectives d’études … En effet la couleur est un champ lexical large et riche. Il serait également intéressant d’analyser de façon égale les relations du rouge avec le blanc et/ou l’or, ou avec d’autres couleurs. Une étude sur l’articulation des trois couleurs primordiales – blanc, noir, rouge – dans une même œuvre pourrait aussi être digne d’intérêt, ce qui a déjà été un peu fait par Joël Thomas dans l’Énéide116. Enfin, il serait à propos d’étendre ce type d’études à d’autres genres littéraires : comédie, tragédie ou ouvrages en prose mais aussi à d’autres époques, notamment plus tardives – Sénèque, Saint-Augustin … 116 Joël Thomas, Structures de l’imaginaire dans l’Enéide, Paris, Les Belles Lettres, 1981. 79 Bibliographie 1. Sources primaires A. Corpus CATULLE, Poèmes, texte établi et traduit par Georges LAFAYE, Paris, Les Belles Lettres, CUF, 1923. LUCRECE, De la nature, texte établi et traduit par Alfred ERNOULT, Paris, Les Belles Lettres, CUF, 1920. OVIDE, Contre Ibis, texte établi et traduit par Jacques ANDRE, Paris, Les Belles Lettres, CUF, 1963. OVIDE, Héroïdes, texte établi par et traduit par Marcel PREVOST, Paris, Les Belles Lettres, CUF, 1928. OVIDE, Les Amours, texte établi et traduit par Henri BORNECQUE, Paris, Les Belles Lettres, CUF, 1930. OVIDE, L’art d’aimer, texte établi et traduit par Henri BORNECQUE, Paris, Les Belles Lettres, CUF, 1924. OVIDE, Les Fastes, texte établi et traduit par Robert SCHILLING, Paris, Les Belles Lettres, CUF, 1993. OVIDE, Les Métamorphoses, texte établi et traduit par Georges LAFAYE, Paris, Les Belles Lettres, CUF, 1925. OVIDE, Pontiques, texte établi et traduit par Jacques ANDRE, Paris, Les Belles Lettres, CUF, 1977. OVIDE, Les Remèdes à l’amour et Les Produits de beauté pour le visage de la femme, textes établis et traduits par Henri BORNECQUE, Paris, Les Belles Lettres, CUF, 1930. OVIDE, Tristes, texte établi et traduit par Jacques ANDRE, Paris, Les Belles Lettres, CUF, 1968. PROPERCE, Elégies, texte établi et traduit par Simone VIARRE, Paris, Les Belles Lettres, CUF, 2005. 80 TIBULLE, Elégies, texte établi et traduit par Max PONCHONT, Paris, Les Belles Lettres, CUF, 1926. VIRGILE, Bucoliques, texte établi et traduit par Eugène de SAINT-DENIS, Paris, Les Belles Lettres, CUF, 1942. VIRGILE, Enéide, texte établi et traduit par Jacques PERRET, Paris, Les Belles Lettres, CUF, 1977. VIRGILE, Géorgiques, texte établi et traduit par Eugène de SAINT-DENIS, Paris, Les Belles Lettres, CUF, 1926. B. Autres sources antiques a. Latines AULU-GELLE, Les Nuits Attiques, texte établi et traduit par René MARACHE, Paris, Les Belles Lettres, CUF, 1967. CICERON, La Nature des dieux, texte établi par Clara AUVRAY-ASSAYAS, Paris, Les Belles Lettres, 2002. DONAT, Tiberius Claudius Donatus, Interpretationes Virgilianae, édition dirigée par Georges HEINRICH, Leipzig, Teubner, 1905-6. PLINE L’ANCIEN, Histoire Naturelle. Livre II, texte établi et traduit par Jean BEAUJEU, Paris, Les Belles Lettres, CUF, 1951. PLINE L’ANCIEN, Histoire Naturelle. Livre XXI, texte établi et traduit par Jacques ANDRE, Paris, Les Belles Lettres, CUF, 1969. VARRON, La Langue latine, texte établi et traduit par Pierre FLOBERT, Paris, Les Belles Lettres, CUF, 1985. b. Grecques ARISTOTE, Métaphysique, traduction d’Alexis Pierron et de Charles ZEVORT, Paris, Joubert, 1840. HOMERE, Iliade, texte établi et traduit par Paul MAZON, Paris, Les Belles Lettres, CUF, 1937. 81 2. Sources secondaires A. Monographies ALEXANDRE Renaud, GUERIN Charles et JACOTOT Mathieu (dir.), Rubor et Pudor - Vivre et penser la honte dans la Rome ancienne, Paris, Éditions Rue d'Ulm, 2012. ANDRE Jacques, Études sur les termes de couleur dans la langue latine, Paris, Klincksieck, 1949. BERLIN Brent et KAY Paul, Basic Color Terms : their Universality and Evolution, Berkeley, University of California Press, 1969. BRADLEY Mark, Colour and meaning in ancient Rome, Cambridge, Cambridge Classical Studies, 2009. CLELAND Liza, STEARS Karen et DAVIES Glenys (éd.), Colour in the ancient Mediterranean world, Oxford, B.A.R. International Series 1267, 2004. DEREMETZ Alain, Le miroir des Muses : Poétiques de la réflexivité à Rome, Villeneuve d'Ascq, Presses universitaires du Septentrion, 2017. DUMAIS-DESROSIERS Myriam, Une puella d’excellence. La femme dans l’élégie latine et sa transposition mythologique, [mémoire], Université de Laval, 2013. FABRE-SERRIS Jacqueline, Mythe et poésie dans Les métamorphoses d'Ovide : fonctions et significations de la mythologie dans la Rome augustéenne, Paris, Klincksieck, 1995. FIAMMA Emanuela, Ater et albus : la terminologia del colore in Orazio, L’Alquila, Barbara Marinacci, 1999. GAGE John, Couleur et culture : usages et significations de la couleur de l’Antiquité à l’abstraction, traduit de l’anglais par BECHARD-LEAUTE Anne et SCHVALBERG Sophie, Paris, Thames & Hudson, 2008. GROSSMANN Maria, Colori e lessico : studi sulla struttura semantica degli aggetivi di colore in uploads/Litterature/ conclusion.pdf

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