Dissertation, « Des cannibales » suivi « Des doches », Montaigne . – Klara Sint

Dissertation, « Des cannibales » suivi « Des doches », Montaigne . – Klara Sintive PG1 Montaigne est une figure de l’humanisme, avide de connaissances nouvelles, qui s’intéresse à ces découvertes et en fait part dans les Essais et notamment les chapitres « Des cannibales » et « Des coches » qu’il commence à écrire en 1580. Il publie ces deux premiers livres et, huit ans plus tard, ajoute de nouveaux chapitres à cet ensemble tout en offrant aux lecteurs un troisième livre inédit. Dans cet ouvrage, il se préoccupe surtout des grandes découvertes qui ont marqué le XVIe siècle. Dans le chapitre 31 du livre I et dans le chapitre 6 du livre III, il s'attarde ainsi sur le cas des peuples que les Européens qualifient trop rapidement de « barbares » ou de « sauvages » et , s'appuyant sur la découverte du nouveau monde, il interroge la société qui l'entoure en apportant une réflexion sur La découverte du nouveau monde, le colonialisme et la relativité des valeurs et des moeurs. En lisant ces deux chapitres, peut-on dire qu’ on vit une aventure ? « L’aventure », c’est vivre quelque chose d’imprévu, de surprenant, c’est aussi une entreprise qui comporte des difficultés, une part d’inconnu… De cette façon, on peut se demander si oui ou non ce récit est une aventure, comment Montaigne nous transporte-t’il dans un monde inconnu et de quelle manière il nous fait vivre cette aventure. Nous verrons que lire Montaigne c’est se confronter à vivre une aventure au sens propre, puis, vivre une aventure au sens intellectuel et littéraire et pour finir, qu’il faut relativiser la « vertu » de ce parcours aventureux car il en existe de nombreuses limites. I. Montaigne nous fait donc vivre l’aventure de différentes manières ; Tout d’abord, il y a l’aventure au sens propre, une suite de péripéties et de rebondissements dans la découverte de l’inconnu. Dans les Essais, Montaigne nous fait découvrir les Indiens à la manière de l’ethnologue (les repas, habits, mœurs…) « CITATION » . Il nous fait partager la découverte du Nouveau Monde, de l’inconnu et la conquête de l’Amérique, qui sera un exploit pour les européens et les chercheurs de l’époque. Cette conquête est un émerveillement mais deviendra une destruction tragique avec de nombreux peuples Amérindiens massacrés. Dans cette aventure au sens propre, les mœurs des sauvages nous sont dévoilés dans le chapitre « des cannibales », mœurs qui sont les habitudes de vie, les coutumes (d'un peuple, d'une société, d'un groupe) ou encore les habitudes (d'une société, d'un individu) relatives à la pratique du bien et du mal. II. Dans son Avis au Lecteur, Montaigne explicite son projet et aventure au sens figuré du terme. Dans les Essais, Montaigne rappelle que le récit de voyage donne à voir des mondes nouveaux propre à stimuler la réflexion. Le récit de voyage offre le portrait d'un être humain à la fois différent et semblable. Reconnaître et accepter l'autre comme son semblable ne va pas de soi puisque l'on compte un nombre certain de massacres des populations indigènes et de conversions religieuses forcées. Jacques Cartier relate l'incompréhension initiale entre les Européens et les Indiens. Pour Montaigne, l’aventure dans l’examen de soi est une manière de mieux revenir vers les autre. L’absolu leur étant inaccessible, les hommes ne peuvent avoir accès qu’à leur jugement. Le scepticisme de Montaigne préside à cette idée : seul notre jugement peut être saisi par le biais de nos opinions, variables et contingentes, tout le reste échappe à l’homme. Mais chaque homme étant le « patron » (au sens de modèle de couture) de tous les autres, ses opinions reflètent celles des autres, lecteurs compris, qui doivent donc les amender en faisant à leur tour l’essai de leur jugement. Savoir que l’on ne formule que des opinions, et non des vérités, rend plus humble et plus ouvert aux autres. Ce décentrement permet à Montaigne d’entrer véritablement en contact avec autrui, l’esprit ouvert à leurs différences et lucide envers les erreurs des conquistadores. Le récit de voyage s'efforce alors de proposer des réflexions menées de manière logique et rigoureuse pour convaincre le lecteur et l'émouvoir. : « je suis moi-même la matière de mon livre » écrit-il. Il précise aussi : « Que si j'eusse été entre ces nations qu'on dit vivre encore sous la douce liberté des premières lois de nature, je t'assure que je m'y fusse très volontiers peint tout entier, et tout nu. » Le Nouveau Monde et ses habitants autochtones sont donc présents dès le seuil des Essais, mêlés au projet d’écriture de soi. Montaigne pratique en effet une écriture oblique : tous les sujets lui permettant d’examiner son jugement (c’est le sens du mot « essai »), ils sont une manière biaisée de mieux se connaître. Pour lui, fréquenter les autres est un moyen d’aiguiser sa pensée, de la confronter à celle d’autrui : l’art de la conversation lui est essentiel parce qu’il lui permet aussi d’explorer des pans de lui-même, de sa pensée, de son jugement. Les essais sont donc une péripétie dans la découverte du sois et l’autre. III. Ce détour par « un autre » monde nous ramène donc vers « notre monde ». Montaigne dénonce ainsi la violence et l'hypocrisie de ceux qui, tout en s'offusquant du cannibalisme, n'hésitent pas à pratiquer la torture. Il s'étonne par exemple que « jugeant bien de leurs fautes, nous soyons si aveugles à l'égard des nôtres » avant de faire ce constat : « Je pense qu'il y a plus de barbarie à manger un homme vivant qu'à le manger mort, à déchirer par des tortures et des supplices un corps ayant encore toute sa sensibilité, à le faire rôtir petit à petit, à le faire mordre et tuer par les chiens et les pourceaux ». Il déplore également que ces actes particulièrement cruels soient accomplis « sous prétexte de piété et de religion ». Il s'en prend aussi à la cupidité de ces explorateurs qui n'hésitent pas se livrer à des massacres pour amasser toujours plus de richesses. Il ne faut donc pas s'y tromper ; tout en nous offrant une conversation qui progresse « par sauts et gambades » et dans un optique de connaissance du monde et de notre propre monde, Montaigne ne perd jamais le fil de sa démonstration. Les connecteurs qu'il utilise montrent d'ailleurs que son argumentation suit une forme de progression logique. Dans « Des cannibales », il commence ainsi un paragraphe en écrivant : « Nous pouvons donc bien appeler ces hommes barbares eu égard aux règles de la raison, mais non pas eu égard à nous, qui les surpassons en toute sorte de barbarie ». OU Notre monde vient d’en découvrir un autre » déclare Montaigne dans le chapitre « Des Coches » des Essais. Cependant, c’est plus qu’une simple découverte ( notamment de soi ou l’autre ), il s’agit d’une conquête dont l’auteur s’attache à critiquer les moyens, les motifs et les conséquences. Dans un premier temps, le texte souligne combien les moyens utilisés par les portugais lors de la conquête sont répréhensibles. En effet, ils ont agit avec une grande violence. Ainsi dans « Des coches », les supplices endurés par les rois du Mexique et du Pérou, brûlés vifs par les Européens, sont décrits avec réalisme et dénoncés par Montaigne: « Sur quoi, par un beau jugement de ceux mêmes qui lui avait imputé cette trahison, on le condamna à être pendu et étranglé publiquement, lui ayant accordé comme consolation, pour la torture consistant à être brûlé vif… » Les portugais ont largement pratiqué la torture. Ils ont massacré les indigènes: « A mesure que l’on tuait de ces porteurs pour le faire tomber…, d’autres et avec zèle, prenaient la place des morts, de façon qu’on ne le pût jamais abattre, quel que fût le nombre que l’on en massacrât. » La violence est ainsi dénoncée: « nous les avons dressés et pliés ». De plus, l’hypocrisie des occidentaux est mise en évidence. En effet pour parvenir à leurs fins, les nouveaux arrivants se sont présentés comme paisibles, pacifistes. Ils ont trompé ces peuples qui les ont naïvement cru. Dans « Des Coches », Montaigne décrit la manière dont les Conquistadors se sont présentés aux Amérindiens: « Ils firent à ce peuple leurs déclarations habituelles qu’ils étaient des gens paisibles, arrivant après de longs voyages, envoyés de la part du roi de Castille (…) que s’ils voulaient être tributaires de ce roi, ils seraient traités avec beaucoup de bienveillance… ». En outre, les motivations des Européens sont clairement dénoncées. Les Européens ne sont pas allés à la rencontre des indigènes pour développer avec eux des relations, ni par curiosité, mais par pure cupidité. Ils cherchaient à s’enrichir et mettre la main sur l’or qu’ils étaient supposés avoir: «… ils leur demandaient des vivres pour leur nourriture et de l’or dont ils avaient besoin… ». Montaigne semble se féliciter de la perte des biens pris comme uploads/Litterature/ dissertation-des-canniballes-suivi-de-des-coches-montaigne.pdf

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