Divers: *Alain (sur Jean Hyppolite) *Qu’est-ce que l’ironie socratique ? (Miche
Divers: *Alain (sur Jean Hyppolite) *Qu’est-ce que l’ironie socratique ? (Michel Narcy) *Qu’est-ce qu’un philosophe en France aujourd’hui ? (Canguilhem) *Sur Sartre *Mauvaise foi et self-deception (Jean-Pierre Dupuy) *Sociologie et philosophie (sur Bourdieu) *Hemlock Poisoning and the Death of Socrates: Did Plato Tell the Truth ?(Enid Bloch) *Sur Socrate *Sur Bourdieu *Sur Lewis Mumford. Alain Sur Jean Hyppolite (1943) Commencement d'août 1943. J'ai lu ces jours-ci une partie de la Philosophie du droit de Hegel, traduite par Hyppolite. Le traducteur a bien fait de commencer par ce travail qui est ample et qui intéresse beaucoup. J'ai trouvé chez Véra tout ce qu'il fallait pour passer ce détroit, notamment des notes où il reproduisait de larges développements pris à La Phénoménologie. Le même traducteur va reproduire cet ouvrage, si célèbre et si mal connu.La Phénoménologie est un éclair de génie qui fait voir toute l'humanité dans son cheminement d'aveugle. Le 24 août 1943. Me voilà maintenant parti dans la Phénoménologie de Hegel, traduite par Hyppolite. Je guettais cet instant. Car, essayant de construire Hegel, j'avais dû reconstituer cet ouvrage (d'après les notes de Véra) et je l'avais deviné essentiel. C'est une oeuvre de philosophie directe ; l'auteur fait un monologue où il décrit sa propre conscience. La difficulté est alors à son plus haut point. Heureusement j'ai souvent éprouvé que l'extrême difficulté de Hegel fait paraître par elle-même une lumière très précieuse qu'on ne trouve nulle part ailleurs. C'est Herr aussi qui m'approuva quand je me lançai dans un cours sur Hegel. Au vrai ce ne fut qu'une table des matières, et cela est arrivé à d'autres. Je conclus qu'il y a bien du hasard dans les lectures ("Ne dites jamais hasard, dit l'abbé Picard, dites toujours la Providence") et justement la Providence, comme vous l'avez remarqué, a rassemblé devant moi des livres comme saint Augustin et mon propre livre : Les Aventures du Coeur qui me préparaient à vouloir relire Hegel (sans compter aussi l'événement, qui fut qu'Hyppolite traduisit la Phénoménologie de Hegel, et que Savin me l'apporta en même temps qu'un projet très encyclopédique de Dramaturgie parisienne, ce qui n'est pas sans rapport avec la puissante esthétique de Hegel). 23 juin 1944 J'ai vu hier Hyppolite, qui est un type de professeur, mais fort et éloquent. Naturellement nous voilà tous deux partis sur Hegel et abusant de l'attribut pensée. Nous étions d'accord que la suite des arts selon Hegel est aussi remarquable que la suite des sciences selon Auguste Comte. Selon Hegel les arts, à partir de l'entassement architectural où tout est ensemble, se succèdent d'après cette loi que l'objet est dépouillé de matière, ce qui, disait Hyppolite, est remarquable dans la peinture profonde par la suppression d'une dimension, par le retour à l'apparence toute simple et étalée, pleinement belle alors et admirée. Exemples : le portrait et la nature morte. Et, dit Hyppolite, Hegel dit même de cette dernière, qui [illisible] jusqu'à la beauté, l'humble couleur d'un objet familier (un livre), il dit que c'est la pureté ; ce qui frappe par la beauté et la profondeur. Ensuite vient la musique qui travaille dans le temps seul et nie l'espace, ce qui la rapproche de l'esprit. Après la musique vient la poésie, qui répand la beauté sur toutes les choses, nous ramenant au sens intérieur de Lucrèce qui prend le monde pour bon et beau. Le sauvage monde est sublime dit Kant. Il l'est d'après un retour de l'esprit sur lui-même, qui efface enfin la matière comme telle ; elle n'est que le miroir (brisé) où l'esprit se voit. Tel est le sentiment de la nature, tout à fait moderne et enfant des plus obscures philosophies (Fichte, Schelling, Hegel). Le sens du monde a été découvert par la poésie, d'après cet avertissement des sonorités et du rythme, qui divinise tout. Finalement c'est une religion qui termine les arts. Et, comme nous disions avec toute l'émotion possible, Hegel a osé annoncer la fin de l'art. L'art n'est qu'un passé dépassé. L'art nous jette à présent dans l'aventure de l'esprit qui se sauve du monde, et qui sauve en même temps le monde ; car le monde est dieu. Cette religion contemplative est le plus haut de l'histoire de l'Esprit. Nous arrivons à trouver le monde suffisant, et donc à pardonner à toute chose, ce qui est, comme Spinoza dit, aimer Dieu. L'art en effet est dépassé, car ce n'est plus le portrait qui a le privilège d'être Dieu ; mais tout est dieu par la piété. " What is Socratic Irony ? MICHEL NARCY English Summary 'Socratic irony' is often understood in modern scholarship, for instance by Gregory Vlastos, as having a rather favourable sense. It is understood as implying something different from what one says (a sense later defined by Quintilian) and doing so part of a programme of moral education that consisted in challenging the intellectual powers of his interlocutors. However, this sense of eironeia is not found in Plato or in Aristotle in the texts where he discusses Socratic irony. The term 'irony' occurs in those texts in a consistently negative sense, associated with contemptuous or arrogant treatment of others (for instance in the Republic or Symposium). In Aristotle’s Nicomachean Ethics, 'Socratic irony' may appear to have a more favourable sense; but close attention to the relevant passages, taken in the context of Aristotle’s ethical framework, shows that it signifies a kind of wilful disdain of convention, and is no more favourably understood than the other extreme of alazoneia. If we go back to the Platonic uses of the term, for instance, Thrasymachus in Republic 337a or Callicles in Gorgias 489e, we find again a negative connotation. Here, the relevant sense is that of evading one’s share in the discussion by pretending to have no answer to the questions one poses. In fact, 'evasion' is, probably, what eironeia, means, understood as a deliberate tactic to get the better of one’s opponents. The more favourable sense of 'Socratic irony' is, thus, a modern invention, partly based on the more positive usage of the term in Latin, in Cicero and Quintilian. C'est devenu parmi les modernes une tradition que d'associer l'ironie au personnage de Socrate, à un point tel qu'on en est venu, avec Gregory Vlastos, à en faire sa qualité principale, et à la rendre consubstantielle à sa pratique de la philosophie: au projet même de Socrate, d'exercer sur ses contemporains une sorte de magistère moral, il appartiendrait de ne le faire que de façon ironique. Voyant dans la définition donnée par Quintilien de l'ironie («faire entendre le contraire de ce qui est dit») celle qui s'applique le mieux à Socrate, Vlastos voit dans la profession socratique de non-savoir le procédé-type d'un véritable éducateur moral: questionnant et refusant de répondre, il force ses disciples à prendre eux-mêmes soin d'eux-mêmes. Moraliste dans la mesure même où il est ironiste, Socrate apparaît ainsi comme l'idéal même de l'éducateur moderne; on croirait le gouverneur de l'Émile de Rousseau: «s'il (scil. l’élève) vous fait quelque question, parlez-lui d'autre chose». L'interprétation de Vlastos est donc bien en ce sens la quintessence de l'interprétation moderne de l'ironie socratique. Vlastos le sait d'ailleurs si bien qu'allant au devant de la critique, il pose que c'est précisément avec Socrate que l'ironie passe de son acception première, dans la Grèce classique, à son acception moderne dont les premiers linéaments apparaissent chez Cicéron et Quintilien.1 Quel était le sens d’eirôneia avant Socrate, on est d’autant plus autorisé à se le demander que la plus ancienne occurrence du mot eirôn n’est pas antérieure aux Nuées d’Aristophane, où il désigne, sinon Socrate lui-même, du moins ce qu’on devient à son école. Comment assurer que Socrate aurait inauguré le changement d’acception d’un mot que nous ne voyons apparaître qu’à son propos? Je voudrais montrer ici que si, incontestablement, entre l’ironie socratique et l’ironie moderne, le sens du mot «ironie» a changé, ce n’est pas à partir de Socrate, avant lequel le mot semble inconnu, mais entre Socrate et Quintilien. À l’ironie toute moderne prêtée par Vlastos à Socrate, je voudrais pour cela opposer plusieurs passages de Platon et d’Aristote, dont l’interprétation conduit à conclure à un sens d’eirôneia dont l’ironia de Cicéron et Quintilien ne semble avoir gardé aucune trace. Alors que l'ironie attribuée à Socrate est, dans l'interprétation moderne, liée (quand elle n'en est pas purement et simplement constitutive) à sa supériorité sur ses interlocuteurs (disciples ou adversaires), elle est au contraire, dans les plus anciens témoignages qui nous en sont parvenus, systématiquement porteuse d'une connotation péjorative. Rien ne nous oblige naturellement à être d'accord avec les Anciens dans leur jugement sur Socrate, ni à donner la préférence aux traditions anti-socratiques sur celles qui lui sont favorables. Reste cependant à expliquer que la figure d'un Socrate ironiste appartienne au courant anti-socratique. Mais avant de l'expliquer, le point demande à être établi. C'est donc ce que je voudrais faire dans un premier temps, avant d'en chercher l'explication dans une définition de l'ironie qui la fait consister, non dans un trait uploads/Litterature/ divers-1.pdf
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- Publié le Dec 08, 2022
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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