vol. 10, no 2, hiver 2011 ÉCRITURES CARCÉRALES DANS LES LITTÉRATURES MAGHRÉBINE

vol. 10, no 2, hiver 2011 ÉCRITURES CARCÉRALES DANS LES LITTÉRATURES MAGHRÉBINES Dossier coordonné par Mounia Benalil Résumés: Safoi Babana-Hampton – Le retour spectral du passé carcéral dans les écrits de prison d’Abdellatif Laâbi Les écrits de prison d’Abdellatif Laâbi occupent une place privilégiée dans le corpus de la littérature carcérale au Maroc tout en s’en distinguant de manière notable. Non seulement ces textes rappellent- ils leur caractère pionnier en tant que genre, mais aussi marquent-ils la place de Laâbi comme défricheur d’une écriture véhiculaire d’une nouvelle conscience citoyenne. Suite aux mutations importantes qui remuent la société marocaine dans le contexte élargi du Printemps arabe, cette écriture est devenue d’une plus grande actualité aujourd’hui. En s’appuyant sur la notion derridienne de « spectralité », cet article tente de penser, à travers une analyse des textes de Laâbi, la place de l’écriture carcérale et de la retranscription littéraire (ou spectrale) du passé carcéral dans l’élaboration d’un discours renouvelé sur la citoyenneté au Maroc. Mots-clés : Laâbi, écriture carcérale, Derrida, spectre, citoyenneté, littérature marocaine. Abdellatif Laâbi’s prison writings hold a privileged place in the corpus of prison literature in Morocco while notably distinguishing themselves from it. Not only do they recall their pioneer character as a genre in the context of Morocco, but they also mark Laâbi’s place as a breaker of new ground insofar as the new writing he forged strives to express a new civic consciousness. The current relevance of this writing is becoming increasingly evident and recognized in the aftermath of the profound changes that have been occurring in Moroccan society in the broader context of the Arab Spring. By applying the Derridian notion of “spectrality”, the present contribution seeks to think, through an analysis of Laâbi’s texts, the place of prison writing and of the literary (or spectral) transcription of past prison experience in the construction of a renewed discourse on citizenship in Morocco. Key-words: Laâbi, prison writing, Derrida, specter, citizenship, Moroccan literature. Rim Bejaoui – Vu et vécu : la mémoire en sursis de Gilbert Naccache dans Qu’as-tu fait de ta jeunesse ? Gilbert Naccache, connu surtout pour son roman Cristal publié à sa sortie de prison, est aussi l’auteur de contes, nouvelles et d’un récit biographique paru récemment où il dénonce l’emprisonnement arbitraire, la censure et l’exil. Aussi, avec Qu’as-tu fait de ta jeunesse ? il n’ambitionne pas seulement de démasquer un pouvoir répressif mais de briser le silence et l’auto- censure qui accablent les écrivains tunisiens. Si le témoignage sert à révéler les non-dits, pour Gilbert Naccache il sert de rempart contre l’amnésie dominante. Témoigner pour faire en sorte que le passé militant de la Tunisie ne soit pas oublié, pour inspirer de nouvelles formes de contestation. Révéler peut-être pour la dernière fois ce qui est tu de la mémoire individuelle et collective pour pouvoir s’en libérer, ne pas en rester prisonnier. Le titre du témoignage retentit comme un cri du cœur. Se peut-il que l’univers concentrationnaire se prolonge à l’extérieur de la prison ? Mots-clés : Gilbert Naccache, prison, témoignage, répression, censure. Gilbert Naccache, best known for his novel Cristal, which he published when he was released from jail, has also written poems, tales, and short stories and adopted the form of testimony to denounce arbitrary imprisonment, censorship and exile. In Qu’as-tu fait de ta jeunesse? he analyses the mechanisms of punishment and describes the treatment meted out by the authorities to young dissidents. Testimonial narrative usually aims to put an end to an unbearable silence by revealing suppressed past facts. However, Naccache doesn’t seek to speak truth to power. Instead, he wants to inspire young people to conceive their own forms of dissidence. Gilbert Naccache writes his memoires as if he was still imprisoned. He tries to set himself free from his painful past, from his memories, but how can he achieve freedom when the whole country is being transformed into a giant prison? Key-words: Gibert Naccache, prison, testimony, repression, censorship. Jeanne Fouet-Fauvernier – Gardiens et bourreaux dans l’écriture carcérale marocaine : le cas de la famille Oufkir L’écriture carcérale au Maroc a été, pendant quelques années, un corpus multiforme dont les paramètres ne sont pas faciles à définir. Bien que l’étude des quatre autobiographies issues de la famille Oufkir semble posséder une unité quant au choix du sujet et à la longue expérience de la douleur partagée par les victimes, elle n’évite pas cette difficulté. Mots-clés : Oukfir, Hassan II, réalisme, disparition, autobiographie Prison writing in Morocco has been a multiform corpus in recent years, the parameters of which are not easy to define. Whereas the study of the four autobiographies issued by the Oufkir family displays an apparent unity in the choice of the topic and in the long-lasting experience of pain shared by the victims, it does not elude this difficulty. Key-words: Oukfir, Hassan II, realism, disappearance, autobiography. Azeddine Lateb – Le geste inaugural des Chants pour les nuits de septembre : le souffle clandestin d’une parole souveraine La question carcérale traverse la littérature maghrébine et la travaille en profondeur. À travers l’exemple du poète algérien Bachir Hadj Ali, nous essayons de démontrer comment la poésie comme expérience de transformation de soi redonne un sens à l’humain dans sa vérité profonde et comment à travers cette expérience, la parole transcende les barreaux. Autrement dit, comment se transforme l’écriture en un lieu de résistance. Mots-clés : Bachir Hadj Ali, conversion, prison, chant. The question of prison traverses and deeply stirs North African litterature. Through the example of the Algerian poet Bachir Hadj Ali, we try to demonstrate how poetry as an experience of self- transformation gives a new meaning to humanity in its profound truth and how words can transcend barriers. In other words, how writing can become a place for resistance. Key-words: Bachir Hadj Ali, conversion, prison, song. Valérie Orlando – Pour sortir de la « Chambre noire » : La littérature carcérale d’expression française au Maroc Depuis 1999, plusieurs anciens détenus, parmi eux Abdellatif Laâbi, Ahmed Marzouki, Abdelfettah Fakihani et Jaouad Mdidech, de l’époque appelée « les années de plomb » ont publié des témoignages parmi les plus douloureux de notre époque. Ils explorent dans « la littérature carcérale » la privation des droits civiques, l’emprisonnement des dissidents politiques et la torture. Ce qui est rapporté et documenté aujourd’hui nous révèle combien dans le passé, l’information sur l’incarcération a pu être manipulée, fabriquée et maintes fois, effacée. Exposer une histoire qui était restée enfouie jusqu’alors fournira au peuple marocain un mémento pour articuler le passé et donnera au Maroc contemporain les bases d’une nouvelle conscience collective. Cette conscience commune aidera le peuple à guérir les traumatismes causés par les années de plomb. Mots-clés : années de plomb, littérature carcérale, Abdellatif Laâbi, droits civiques, incarcération, littérature marocaine. Since 1999 the writers Abdellatif Laabi, Ahmed Marzouki, Abdelfettah Fakihani and Jaouad Mdidech, who endured the period known as The Years of Lead, have published some of the most compelling testimonies of our time. Topics explored in their “prison literature” include the deprivation of civic rights, imprisonment, and torture. What is reported and documented today reveals how information on incarceration was manipulated, manufactured and repeatedly erased. Exposing the hidden stories of the Lead Years provides a means to articulate the past, founding a new collective consciousness for contemporary Morocco. Key-words : The Years of Lead, prison literature, Abdellatif Laâbi, civic rights, imprisonment, Moroccan literature. Alisha Valani – La cage dorée : l’amour comme prison dans Le Sommeil d’Ève de Mohammed Dib S’il existe, à l’heure actuelle, une réflexion importante en ce qui concerne l’altérité, l’errance, le délire, voire la mort qu’engendre « la passion désespérée » telle que Michel Foucault la définit dans Histoire de la folie à l’âge classique, il nous faut, pour notre part, insister sur le rapprochement incontournable entre l’amour-fou, thème dans lequel le roman baigne, et l’expérience carcérale qui découle précisément de la folie que cet amour se prodigue sans compter. Pour ce faire, nous suivons les traces de Michel Foucault pour établir le lien entre l’exil physique, ce gouffre insondable qui sépare la protagoniste de son bien-aimé, et la folie, voire l’instabilité mentale dans laquelle Faïna sombre à la suite de chaque tentative de rencontre déçue, qu’elle soit réelle ou bien imaginaire. Ainsi, les analyses effectuées dans la présente étude nous permettent d’examiner le sentiment général de l’incarcération issu de l’aliénation physique et psychique qui constitue le fond même de l’amour-fou, et, par extension, de ce roman en son entier. Elles abordent aussi la difficulté, voire même l’impossibilité de sortir de cette prison à huis clos sartrien, la liberté n’étant qu’une possibilité éphémère pour la protagoniste en question. Mots-clés : amour-fou, exil, altérité, carcéralité, folie, Michel Foucault, Mohammed Dib. If there currently exists a significant reflection on the topics of alterity, wandering, delirium, and even on the death that “desperate passion” begets, as Michel Foucault defines this in Histoire de la folie à l’âge classique, we must, for our part, insist on the inescapable comparison between mad love, uploads/Litterature/ em-resume-10-2.pdf

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