Commentaire de texte sur le discours de Phénix à Achille, Illiade Chant IX « Ch
Commentaire de texte sur le discours de Phénix à Achille, Illiade Chant IX « Chante ô déesse, la colère d’Achille fils de Pélée » invoque Homère dans les premiers vers de l’illiade. Si cette demande fait partie d’un rituel religieux bien commun plaçant les poèmes grecs sous la protection de Mnemosyne, mère des muses, il sert aussi à présenter à l’auditoire de l’aède le sujet de l’œuvre qu’il s’apprête à entendre. L’illiade en effet, ne porte en fait pas sur toute la guerre de Troie, elle n’est qu’un élément du cycle qui en fait le récit. Sa narration prend en fait pour sujet l’épisode sombre de la colère d’Achille, à la neuvième année du siège de Troie. Le premier chant en conte la cause, la prise par Agamemnon de Briseis, la captive d’Achille, et les chants suivants comment les Grecs se voient privés de leur meilleur guerrier, incapables de l’emporter car Thetis, la mère d’Achille, à la demande de son fils furieux, a plaidé une victoire Troyenne à Zeus. Et sa plaidoirie est entendue puisque dans les chants IV à VI, les Achéens ne parviennent pas à l’emporter. Las de 9 années de guerre, les Achéens tentent de raisonner Achille dans le chant IX, sachant qu’il est indispensable à leur victoire. Pour mener cette ambassade sont choisis trois chefs grecs proches d’Achille : Ulysse le rusé, fin orateur et meneur d’hommes, Ajax le plus puissant guerrier après Achille, et Phénix, vieux mentor d’Achille, qui éduqua le fils de Pélée. D’abord parle Ulysse, qui est le meilleur espoir de Nestor, le conseillé des Grecs, car il est un diplomate habile. Il use de tout son art pour convaincre Achille de pardonner à Agamemnon qui lui fait une offre princière en échange de son pardon : La main d’Electre, sa fille, sept villes parmi les plus riches de Grèce, ainsi que moult autres présents et part de butin. Cette offre toutefois, malgré sa largesse, n’émeut pas l’Atride qui parle de quitter les rivages de Troie dès le lendemain, et propose à son mentor de le suivre. Alors, après l’échec de la flatterie et de la compensation financière incarnées par Ulysse, prend la parole Phénix, qui lui va jouer sur les émotions de son ancien pupille pour le persuader de ravaler sa fierté et de reprendre les armes. Pour commenter son discours, on peut se demander comment celui-ci diffère de celui d’Ulysse par son appel au Pathos, à la nostalgie et à la compassion d’Achille, en montrant comment Homère en fait la supplique d’un vieillard, et d’une figure paternelle. On pourra pour cela tout d’abord montrer comment Phénix souligne l’amour paternel qu’il a pour Achille et leur lien de maître et d’élève, puis on verra qu’il a aussi recourt à une évocation de sa jeunesse et de son malheur pour renforcer encore ce lien privilégié et susciter la pitié. Enfin, on pourra montrer comment il tente de raisonner son pupille en faisant appel à la morale et à l’honneur grec qu’il lui a transmis. On peut en premier lieu remarquer à quel point Phénix insiste sur la proximité qu’il a avec Achille et comment il souligne la nature filiale de leur relation. Il commence en effet sa plaidoirie en refusant de se séparer d’Achille si celui-ci venait à partir, et montre ainsi toute l’affection qu’il a pour son pupille. « Comment pourrais-je partir ? L1». Il appelle à plusieurs reprises Achille « mon enfant » (appellation affective qu’Achille lui rend en l’appelant père). Il mobilise aussi, pour persuader son filleul, les actes qu’il a effectué par amour paternel pour lui et ceux qu’il serait prêt à faire : non seulement « c’est pour [pour lui] que [l’a] fait partir Pélée » à Troie, mais il avance même qu’il refuserait de se séparer de lui « Quand même le ciel me ferait la promesse de me dépouiller de mon âge ». Il exprime d’ailleurs son affection pour le fils de Pélée de manière explicite « En t’aimant du fond du cœur » Il tente bien sûr ici de réveiller l’affection d’Achille pour que celui-ci soit prêt à retourner au combat par amour pour son père de substitution. Mais Phénix ne se limite pas à exprimer son affection pour Achille, il joue tente aussi d’éveiller la nostalgie de ce dernier en contant comment il s’occupait de lui alors qu’il était enfant à la manière d’un père : « Il fallait alors que tu fusses assis sur mes genoux et je te coupais la viande, te faisait boire le vin » Le détail de l’enfant sur les genoux est évidemment présent pour attendrir Achille et faire remonter ses souvenirs d’enfance. Phénix poursuit d’ailleurs sa réminiscence en employant une exophore mémorielle « « combien de fois m’as- tu trempé le devant de ma tunique en recrachant ce vin » Ici, le mentor, habile orateur, utilise le pronom démonstratif pour désigner un élément présent dans la mémoire qu’il partage avec son filleul. Pour lui c’est un moyen de rendre le souvenir plus vivace (on pourrait presque comparer le détail du vin à une madeleine de Proust) et pour Homère, cela permet de souligner le passé commun et la complicité des deux personnages. Ce passé commun et cette amitié est d’ailleurs montrée comme étant ancienne car Achille, même enfant, « ne voulait pas […] la compagnie d’un autre » et appréciait déjà Phénix. Le mentor va même jusqu’à culpabiliser quelque peu le guerrier en lui rappelant « l’enfant difficile qu’[il] était. » comme pour lui signifier qu’Achille lui doit bien de se battre contre les Troyens. Ayant ainsi exprimé son amour de père envers Achille, Phénix espère que son filleul lui rendra un amour de fils et accomplira alors les devoirs d’honneur et de fierté qui lui incombent. Il use ici de la nostalgie et de ses émotions pour faire pencher la balance en sa faveur, en faisant appel à la force de leur relation. Pour renforcer cet appel au pathos et cette évocation de leurs souvenirs communs, Phénix partage le récit de sa jeunesse. Cela sert non seulement à Homère à présenter ce personnage important, mais aussi à renforcer la nature du lien qu’il a avec Achille et à susciter la pitié. En effet, Phénix a offensé son père en séduisant sa concubine, et pour cela a été non seulement banni, mais aussi maudit par ce dernier et rendu stérile : « Il lança de fortes imprécations, il invoqua les cruelles Erinyes : il voulait jamais n’avoir à asseoir sur ses genoux un enfant issu de moi. » Les Erynies, déesses des malédictions et de la rancune, sont invoquées généralement pour les crimes familiaux, ainsi, Phénix apparaît comme complètement renié par sa famille et apatride. Non seulement cela utilise le registre pathétique pour amadouer Achille, mais cela renforce l’importance de son lien avec le héros, puisqu’il est véritablement la seule famille qu’il lui reste, ce qu’il a de plus proche d’une descendance. Phénix insiste d’ailleurs sur ce fait « Au fond de mon cœur, il n’y avait plus rien qui me retint » et sous-entend que mêmes les divinités restaient sourdes à ses suppliques, car il décrit les sacrifices exécutés en sa faveur par ses amis comme comptant « Nombre de moutons, de bœufs, de porcs débordants de graisse ». En renforçant son malheur, le vieillard espère jouer sur la corde sensible d’Achille et l’apaiser par la pitié pour son grand âge et sa détresse, ignorée même des immortels. Il construit avec son récit une figure paternelle en opposition avec celle qu’il incarne pour Achille, un père égoïste, courroucé envers son fils, qui le chasse sans avoir fait de lui un noble. Sa relation conflictuelle avec son père va presque jusqu’au meurtre, « je méditais alors de le frapper du bronze aigu, mais un des immortels arrêta ma colère ». Par son récit, Phénix trace donc un parallèle entre l’apaisement de sa colère et celle qu’il tente d’apaiser chez Achille, en opposant le mauvais père biologique qui fut le sien avec le bon père de substitution qu’il a été pour Achille. Sa malédiction l’empêchant d’avoir des enfants, « c’est [Achille] qui écarterait de [lui] l’indigne malheur ». Il fait aussi ici un parallèle entre le traitement des dieux et leurs offrandes, et la largesse de celles qu’on lui fait pour calmer sa colère : « Les dieu eux-mêmes se laissent toucher » « les hommes pourtant les fléchisse avec des offrandes, de douces prières des libations et la fumée des sacrifices. » « Achille pareil aux dieux » « Marche donc pour les présents qu’on t’offre ». Ici on voit clairement la comparaison qui est faite avec les divinités pour flatter Achille, mais aussi le cheminement logique de Phénix : si Achille est honoré comme un dieu, alors il doit, tout comme eux, accepter les présents et pardonner les offenses. On voit donc ici qu’à travers le récit de sa jeunesse, Phénix renforce l’importance du lien filial qui l’unit à Achille en rappelant qu’il est son seul fils, uploads/Litterature/ examen-monde-homerique-commentaire-de-texte 1 .pdf
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- Publié le Oct 29, 2022
- Catégorie Literature / Litté...
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