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29 Le thème en fi ches Fiche 1 Marche ou Crève, Richard BACHMAN (Stephen KING) Albin Michel, 1979 (« J’ai Lu », The Long Walk) L’auteur Stephen King est né en 1947 à Portland. Après une enfance marquée par l’ab- sence de son père, il se plonge dans la lecture de romans fantastiques avant de se mettre à en écrire. La publication de Carrie en 1974 lance sa carrière qui va faire de lui un écrivain à succès. L’œuvre et son contexte Écrit en 1966-1967, Marche ou crève annonce en quelque sorte Running Man, par l’utilisation de motifs voisins : la dystopie, le sport poussé à l’extrême, la critique d’une société castratrice et militarisée. L’œuvre en quelques mots Le 1er mai de chaque année, La Longue Marche entraîne une centaine de concurrents sur les routes du Maine. Les règles sont simples : il faut marcher jour et nuit, sans s’arrêter, à une allure minimale imposée et le dernier debout est déclaré vainqueur. Le thème dans l’œuvre Marche ou crève est un roman dont l’intrigue de départ est assez simple, voire simpliste, mais qui révèle, au fur et à mesure de son développement, une réelle richesse. Dès le départ, les règles de la Marche sont vagues. Le lecteur ne va comprendre, qu’au fur et à mesure, les conséquences de leurs manquements. Ainsi, l’allure ne doit pas descendre en dessous de quatre miles à l’heure sous peine d’avertissement verbal. D’autres interdictions vien- nent ensuite peu à peu s’ajouter sous forme de recommandations, parfois étranges (le port de chaussette de tennis), parfois inscrites dans un réel esprit sportif (ne pas s’en prendre aux autres concurrents). Ce mélange des genres brouille donc un peu les pistes et l’on pourrait croire, au premier abord, que cette épreuve sportive pourrait parfaitement prendre place dans notre réalité. Mais au bout de trois avertissements le fautif est exécuté par les militaires présents. 30 Le thème en fi ches Le thème en fi ches Le thème en fi ches Justement, l’omniprésence de ces militaires, l’évocation, discrète, d’un futur à moyen terme, la distribution de nourriture concentrée et l’atmosphère qui s’en dégage, placent ce roman dans un monde dystopique où la vie humaine a perdu de sa valeur, conduisant des adolescents à risquer leur vie pour la fortune et des spectateurs à se délecter de leur mort en direct. Toutes les lois sportives sont bafouées. Il ne reste en eff et qu’un vague esprit sportif écrasé par cette critique de la loi du plus fort, de la course aux muscles et à la performance. Ainsi, ce n’est pas uniquement la puissance qui fait gagner, mais surtout un mental à toute épreuve, comme le montrent les diff érents abandons. Plus la marche progresse, plus les corps s’eff ondrent. Au départ, ce ne sont que des crampes, des diarrhées, mais par la suite certains essaient de fuir, sont abattus ou deviennent fous. La pratique sportive poussée à l’ex- trême nous montre à quel point l’Homme peut tenter d’aller au-delà de ses limites. Le vainqueur qui pourra obtenir tout ce qu’il veut jusqu’à la fi n de sa vie en profi te rarement. Dans ce roman, Garraty remporte la course au bout de 345 kilomètres parce que Stebbins, son principal rival, tombe raide mort. Lui-même semble d’ailleurs perdre la raison ou ne plus être en pleine possession de ses moyens après l’arrivée. Stephen King nous fait entrer dans la psychologie de personnages tour à tour attachants ou répugnants, comme pour nous montrer jusqu’où des sportifs peuvent aller pour remporter une compétition et obtenir un peu de gloire. Tout est dit « Je me sens qualifi é pour participer à la Longue Marche parce que je suis un pauvre con inutile et que le monde se portera mieux sans moi… » DENIS LABBÉ 31 Le thème en fi ches Le thème en fi ches Le thème en fi ches Fiche 2 Running Man, RICHARD BACHMAN (Stephen KING) 1982. Albin Michel, 1988 (Livre de poche, The Running Man) L’auteur Voir fi che précédente. L’œuvre et son contexte Publié sous le pseudonyme de Richard Bachman, utilisé parce que Stephen King écrivait beaucoup trop et qu’il ne pouvait pas tout publier sous son nom, Running Man est une critique acerbe d’une télévision voyeuriste en pleine décadence. Écrit en 1971-1972, ce roman bénéfi cie du succès grandissant de son auteur pour être enfi n publié. L’œuvre en quelques mots Si Stephen King est surtout un écrivain de fantastique, ce roman mêle à la fois la science-fi ction et la dystopie, en projetant le lecteur en 2025, alors qu’un jeu sportif intitulé « La Grande Traque », passionne les foules. Il met en scène des candidats qui tentent d’échapper durant trente jours à des tueurs lancés à leurs trousses. Le thème dans l’œuvre Véritable diatribe contre les dérives du sport et de la télévision, Running Man montre les côtés les plus sombres de l’esprit humain qui peut se montrer tour à tour voyeur, avide, calculateur et sadique. En montrant tous ces travers qui sont à l’opposé des valeurs sportives, ce roman nous plonge dans un univers sombre, angoissant et étrangement prémonitoire. On y perçoit évidemment des références intertextuelles à 1984 d’Orwell, avec, en toile de fond l’omni- présence d’une télévision capable de tout pour obtenir de l’audience. En appelant « jeu », une nouvelle pratique sportive dans laquelle on met sa vie en jeu pour s’extraire de la misère, cette société futuriste s’appuie sur la représentation, sur l’image, sur le spectacle pour mieux faire accepter à la multitude une pratique inhumaine. En fait, sous couvert d’un jeu télévisé, c’est bien à de nouveaux jeux du cirque que sont conviés les téléspectateurs, des jeux du cirque modernes, tournés vers une fausse émancipation des plus pauvres qui servent en fait de chair 32 Le thème en fi ches Le thème en fi ches Le thème en fi ches à canon pour divertir les foules. Cet univers décadent propose ainsi une société à deux vitesses, qui cohabitent sans jamais se rencontrer, sans jamais se côtoyer sauf par écran interposé. Lorsque le personnage principal s’arrête un instant sur ceux qui l’entourent, il se rend bien compte qu’ils n’appartiennent pas au même monde : « Leurs visages si diff érents avaient pourtant un trait commun : il leur manquait quelque chose, comme un portrait avec des trous en guise d’yeux, ou un puzzle où l’on a oublié une petite pièce. Ce qui leur manque, songea Richards, c’est le désespoir. Pas de loups aff amés dans ces ventres. Pas d’espoirs fous ni de cauchemars déchirants dans ces têtes. » Dans cette société privée de libertés, « La Grande Traque » est devenue le sport national. Mais on passe alors d’un simple sport à une chasse à l’homme organisée, planifi ée et surtout inféodée à un pouvoir tout-puissant qui s’en sert pour mieux gérer et manipuler les foules. En ne respectant pas les règles, Ben Richards repousse les limites de la société et devient un révolutionnaire, nous montrant que ce sport était bien plus qu’un simple divertissement et qu’il participait bien à l’exploitation des masses. À noter que Paul Michael Glaser a adapté le roman en 1987 avec Arnold Schwarzenegger dans le rôle principal, mais en délestant l’intrigue de sa profondeur analytique et sociale. Tout est dit « La seule issue, c’est droit vers le ciel, se dit Richards avec philosophie. » « Nous volons à la poursuite du soleil, pensa-t-il. C’est stupéfi ant… » DENIS LABBÉ 33 Le thème en fi ches Le thème en fi ches Le thème en fi ches Fiche 3 Jouer juste, François BÉGAUDEAU Verticales, 2008, éditeur original : Seuil, 2003 (« Folio » Gallimard, 2008). L’auteur François Bégaudeau, né en 1971, est l’auteur de la célèbre autofi ction Entre les Murs, qui triompha aussi une fois portée à l’écran par Laurent Cantet ; agrégé de Lettres modernes, passionné de football depuis son enfance, il s’occupe également de musique, de reportage, de cinéma… et vient de publier il y a quelques mois un émouvant roman sur l’adolescence et ses complexes : La Blessure, la vraie. L’œuvre et son contexte Premier roman d’un surdoué touche-à-tout, Jouer juste se signale d’abord par sa brièveté (102 pages) et par sa construction : aucun retour à la ligne ne vient interrompre le monologue halluciné d’un entraîneur qui, juste avant les prolongations d’une coupe d’Europe, harangue ses joueurs et mêle aux considérations sportives des confi dences de plus en plus intimes. L’œuvre en quelques mots Le titre s’explicite dès les premiers mots : « Jouer juste, dit-il » (p. 9), mots qui referment d’ailleurs le propos cent pages plus loin : « la conviction dis-je d’avoir joué juste » (p. 102). C’est donc un texte très « écrit », très formel, qui montre la maîtrise des codes du romanesque en même temps que l’aisance à s’en aff ranchir : on peut s’agacer de ce côté « postmoderne », ou admirer le brio de l’ensemble. Le thème dans l’œuvre Certes la thématique sportive n’est pas absente de uploads/Litterature/ extrait.pdf

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