Questions de communication 22 | 2012 Patrimonialiser les musiques populaires et

Questions de communication 22 | 2012 Patrimonialiser les musiques populaires et actuelles Thierry GROENSTEEN, Bande dessinée et narration. Système de la bande dessinée 2 Paris, Presses universitaires de France, coll. Formes sémiotiques, 2011, 220 p. Julien Falgas Édition électronique URL : http:// questionsdecommunication.revues.org/6975 DOI : 10.4000/ questionsdecommunication.6975 ISSN : 2259-8901 Éditeur Presses universitaires de Lorraine Édition imprimée Date de publication : 1 décembre 2012 Pagination : 324-326 ISBN : 978-2-8143-0130-6 ISSN : 1633-5961 Référence électronique Julien Falgas, « Thierry GROENSTEEN, Bande dessinée et narration. Système de la bande dessinée 2 », Questions de communication [En ligne], 22 | 2012, mis en ligne le 07 janvier 2013, consulté le 01 octobre 2016. URL : http://questionsdecommunication.revues.org/6975 Ce document est un fac-similé de l'édition imprimée. Tous droits réservés 324 Notes de lecture générale de tout un chacun ou de l’imaginaire collectif. C’est bien dommage car, agrémentés des illustrations des albums dont ils traitent, les textes prendraient une toute autre dimension. Cependant, il faut peut-être n’y voir qu’une contrainte budgétaire, indépendante de la volonté des auteurs, auquel cas c’est de bonne grâce que le lecteur se prêtera au jeu et « googlera » les titres des albums pour mieux se représenter leurs couvertures. D’autre part, les essais vont bien au-delà de la seule portée de l’image d’illustration de disques : interprétations psychologiques, sociologiques, contextualisation historique et analyses littéraires dépassent fréquemment les limites de la simple question iconographique – en cela, le lecteur sera agréablement surpris par la qualité et la finesse des analyses ainsi que par la richesse du contenu de Rock Photography Cover Art from The Beatles to Post-Punk. Justine Houyaux Université de Mons, Belgique justine.houyaux@umons.ac.be Thierry Groensteen, Bande dessinée et narration. Système de la bande dessinée 2. Paris, Presses universitaires de France, coll. Formes sémiotiques, 2011, 220 p. Douze ans après Système 1 (Thierry Groensteen, Système de la bande dessinée, Paris, Presses universitaires de France, 1999), Thierry Groensteen entreprend, dans Bande dessinée et narration (Système 2), d’approfondir, prolonger et compléter ses propositions théoriques à la lumière des résultats rencontrés par la recherche contemporaine. Pour le théoricien, il s’agit de confronter sa théorie des fondements du langage de la bande dessinée avec d’autres formes que celle de la tradition européenne et, notamment, avec des évolutions récentes du média. Le résultat est une compilation de réflexions à laquelle la notion de narration sert de fil conducteur. Le « système » élaboré par Thierry Groensteen décrit la combinaison par laquelle la bande dessinée fait sens en recourant à des codes langagiers et picturaux qui ne lui appartiennent pas en propre. L’auteur entretient la conception de la bande dessinée en tant qu’« espèce narrative au sein du genre narratif » (Système 1, P . 9). Dans Système 2, il met à mal cette conception. Ceci depuis le premier chapitre (consacré à la bande dessinée abstraite) jusqu’au dernier (consacré aux rapports de la bande dessinée avec l’art contemporain) en passant par le chapitre central, qui confronte le « système » groensteenien aux marges et aux frontières du champ de la bande dessinée occidentale imprimée auquel il était initialement destiné : albums jeunesse, shojo manga (manga destiné aux adolescentes), bd numérique interactive. Au fil des pages, les résultats immanentistes de Système 1 se heurtent de plein fouet à l’ambition pragmatique : Thierry Groensteen persiste dans une approche sémiotique sans tirer parti des apports de la sémiopragmatique qui permettraient sans doute de comprendre l’incursion de formes de discours non narratives aux frontières du champ de la bande dessinée. L’auteur se révèle plus à l’aise lorsqu’il aborde la séquentialité, la mise en page, la problématique du narrateur, le personnage ou les rythmes de la bande dessinée, dans la mesure où ces chapitres constituent des mises à jour du système sémiotique original élaboré en 1999. Les pages consacrées à la bande dessinée numérique sont l’exemple le plus criant des limites de Système 2 (pp. 67-84). Le lecteur exigeant ne manquera pas de regretter le manque de rigueur de Thierry Groensteen pour aborder ce qu’il identifie pourtant comme « un tournant historique [...], la montée en puissance de la bande dessinée numérique » (p. 67). Dans les pages qui suivent, il s’appuie sur des autorités qu’il évite de nommer : les « quelques chercheurs » qui se sont intéressés à la bd numérique (p. 68), « tous ceux qui s’y sont intéressés » (p. 74). On découvre que l’auteur s’appuie sur trois références : Reinventing comics (Scott Mc Cloud, New York, Perennial, 2000), le mémoire de master d’Anthony Rageul (Bande dessinée interactive : comment raconter une histoire ? Prise de tête, une proposition entre minimalisme, interactivité et narration, Rennes, université Rennes 2, 2009) et la thèse de doctorat de Magali Boudissa (La bande dessinée entre la page et l’écran : étude critique des enjeux théoriques liés au renouvellement du langage bédéique sous influence numérique, Paris, université Paris 8, 2010), ces deux derniers évoluant dans les arts plastiques. Si le domaine de la bande dessinée numérique est encore largement inexploré par les chercheurs, le propos aurait pu s’ouvrir à des travaux réalisés dans des champs voisins. Pourtant, non avare d’exemples dans le reste de son ouvrage, Thierry Groensteen omet toute référence précise à une quelconque œuvre numérique. Nulle référence au moindre blog bd, webcomic ou bd interactive en dehors du très expérimental Prise de tête d’Anthony Rageul (http://www.prisedetete.net/, consulté le 13/08/12). Face à un objet aussi nouveau et indistinct que la bande dessinée numérique, l’auteur montre une surprenante familiarité pour quelqu’un qui déclarait sur son blog, en septembre 2010, ne pas lire de bande dessinée sur écran (http://neuviemeart.citebd.org/spip.php?page=blog_ neufetdemi&id_article=266, consulté le 13/08/12). La bande dessinée numérique devient proprement virtuelle dans le propos de Thierry Groensteen. 325 questions de communication, 2012, 22 Le manque de sources et de références ne doit cependant pas occulter les questions soulevées par le théoricien reconnu qu’est Thierry Groensteen s’agissant de bande dessinée traditionnelle. Selon lui, le développement d’une diffusion sur ordinateur n’est pas un changement de support, mais une continuité. Le rappel est salutaire : en 20 ans, la chaîne de l’édition s’est entièrement informatisée. Une large part de la production n’existe sur papier qu’une fois le livre imprimé. Pourtant, la lecture sur écran est décrite par Thierry Groensteen comme une perte. Sous forme numérique, « les pages, en se succédant, se remplacent et s’effacent, empêchant la conservation dans la mémoire du mode de rangement » (P . 71). L’auteur confirme cette observation à maintes reprises. Il fait part également de sa réserve face aux effets de surgissement rendus possibles par le numérique, pour en conclure : « Les codes de la bande dessinée, parce qu’ils ont une espèce d’efficience universelle qui les rend disponibles à toutes sortes d’usages, voire de détournements, peuvent facilement y entrer à titre d’ingrédients. Cependant, le fait de transformer le neuvième art en un Hypermédia semble contredire l’un de ses principes fondamentaux, qui est l’étalement et, partant, l’accessibilité immédiate de l’ensemble de ses parties constituantes. Le mécanisme de l’apparition, mentionné plus haut, y contredit et semble de nature à ouvrir de nouvelles possibilités. Mais ces possibilités sont avant tout de l’ordre de l’effet, et relèvent d’une logique qui est davantage celle du cinéma, où l’image est toujours en surgissement » (p. 82). Pourtant, plus tôt dans l’ouvrage, à propos des récits dessinés qui progressent au rythme d’une seule image par page, il écrit pourtant : « Le dialogue entre les images s’appuie sur la survivance mémorielle des pages déjà tournées. [...] Je ne vois pour ma part aucune raison décisive d’ostraciser ces œuvres et de les considérer comme étrangères au domaine de la bande dessinée » (p. 34). Dans quelle mesure le dialogue entre les images diffère- t-il lorsqu’il s’appuie sur la survivance mémorielle des images affichées préalablement à l’écran, plutôt que sur les pages déjà tournées ? S’agissant de mémoire, il serait intéressant de confronter cette intuition aux apports empiriques de la psychologie cognitive. On pourrait également interroger l’existence d’interfaces graphiques aptes à préserver la mémorisation du mode de rangement. Enfin, Thierry Groensteen accorde une part importante de son développement à la notion de jeu. S’appuyant sur le travail d’Anthony Rageul, il énonce différentes formes d’interaction offertes par le numérique : défilement, zoom, apparition au clic, récit bifurquant. Mais sa référence le conduit à opposer jeu et récit : à la lecture de Prise de tête, il observe qu’on se laisse happer par l’expérience ludique au détriment de la narration. Or, en dehors de travaux expérimentaux et d’exercices de style, la bande dessinée s’appuie principalement sur une interactivité qui se fait oublier. On peut parler de magie au sens propre : il y a un truc, mais tout l’art de l’auteur/magicien consiste à faire oublier au lecteur qu’il y en a un. Pourtant, Thierry Groensteen n’interroge pas l’existence d’autres bandes dessinées numériques qui offriraient une expérience interactive plus compatible avec la narration. Cela le conduit à conclure que la bande dessinée numérique, à défaut d’être un nouveau média, est une nouvelle culture qui donne la primauté au jeu face à la narration. uploads/Litterature/ falgas-thierry-groensteen-bande-dessinee-et-narration.pdf

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