Fiche de lecture : Les Liaisons Dangereuses, lettre 81 Introduction : Les Liais
Fiche de lecture : Les Liaisons Dangereuses, lettre 81 Introduction : Les Liaisons Dangereuses, paru en 1782, est l’œuvre principale de Pierre Choderlos de Laclos, alors officier dans l’armée. Malgré le scandale, ce roman épistolaire composé de 175 lettres et divisé en quatre parties connaît un succès fulgurant. Il narre les manipulations auxquelles se livrent deux libertins de la noblesse, la Marquise de Merteuil et le Vicomte de Valmont. Leurs principales victimes sont deux jeunes femmes de l’aristocratie, la présidente de Tourvel et Cécile de Volange. Cette lettre, la 81 du recueil, se situe dans la deuxième partie. La Marquise de Merteuil retrace pour Valmont son parcours et son éducation qui feront d’elle une libertine : c’est un passage autobiographique, où la Merteuil affirme clairement sa supériorité par rapport à Valmont et aux autres femmes. Problématique : Quel portrait la Marquise de Merteuil dresse-t-elle d’elle-même ? Mouvements : o La marquise se présente comme un être supérieur (L1 à 9) o L'apprentissage de la maîtrise de soi (L10 à 18) o La conquête de la liberté individuelle (L19 à 24) Mouvement 1 : La marquise se présente comme un être supérieur Il est aisé de constater dans cette lettre 81 la prédominance de la première personne du singulier, par les pronoms personnels (sujet : « je » ou complément : « me ») et les possessifs (« mon », « ma »). C’est clairement un autoportrait qu’esquisse Merteuil pour son interlocuteur. Elle se met en évidence dès la première phrase de l’extrait : « Mais moi » (L1) et se définit en opposition au reste de la gent féminine, « ces femmes inconsidérées » (L1) (le démonstratif « ces » sert ici à mettre à distance les autres femmes). Si elle met à distance les autres femmes, c’est parce qu’elle se considère comme supérieure à elles. Elle les méprise car elle estime que leurs principes ont été « donnés au hasard, reçus sans examen et reçus par habitude » (L3), alors que les siens « sont le fruit de [ses] profondes réflexions » (L4). Il convient de rappeler que même si cette lettre est destinée au Vicomte dans le roman, le lecteur en est également un destinataire indirect. Valmont est lui aussi un libertin, mais ce n’est pas le cas du lecteur lambda, qui ne fera pas la même lecture. La Marquise écrit pour impressionner son destinataire, mais en réalité l’autoportrait qu’elle peint la rend d’autant plus monstrueuse pour le lecteur : refusant les règles de la société, elle s’invente ses propres principes, « fruit de [ses] profondes réflexions » (L4). Son seul objectif semble être son profit personnel et tous les moyens sont bons pour arriver à cette fin On peut relever dans cette lettre 81 le registre de l’éloge, que Merteuil emploie pour parler d’elle-même. Elle se dépeint comme auteure de sa propre vie (« je puis dire que je suis mon ouvrage » (L5)), à la façon d’une divinité créatrice. Dans cet autoportrait, la Marquise remonte assez loin dans ses souvenirs : « le temps où, fille encore » (L6) (on peut supposer qu’elle n’a pas atteint l’âge de la puberté). Elle se présente comme une autodidacte : « j’ai su en profiter pour observer et réfléchir » (L7). Mouvement 2 : L'apprentissage de la maîtrise de soi On trouve tout au long de la lettre le champ lexical de l’éducation : « m’instruire » (L10), « guider » (L11), « je m’étudiais » (L14), « je me suis travaillée » (L16). Cet apprentissage autodidacte la mène à la découverte de l’hypocrisie et de la dissimulation. C’est en prenant le contre-pied des discours officiels et en étudiant les non-dits que Merteuil fera son éducation de manipulatrice, en jouant sans cesse sur les apparences (« je tâchai de régler de même les divers mouvements de ma figure » (L13). La Marquise se présente dans cette lettre 81 des Liaisons dangereuses comme une véritable ascète à la volonté de fer. Elle est capable de s’imposer une rigoureuse discipline : « je tâchai » (L13), « le zèle » (L15), « avec le même soin et plus de peine pour réprimer » (L16). Même à un jeune âge, elle s’impose des épreuves douloureuses (« me causer des douleurs volontaires » (L15)). Mouvement 3 : La conquête de la liberté individuelle Il est important de rappeler que Les liaisons dangereuses a été écrit à la fin du siècle des Lumières, qui avait porté aux nues le pouvoir de la raison et la puissance de la science. Elle s’efforce de s’améliorer de mettre en pratique (« j’en essayai l’usage »). Elle réussit ainsi à acquérir par l’entraînement et la mise en pratique une certaine confiance en elle (« sûre de mes gestes » (L22)). Elle révèle également que tout chez elle est calculé, et donc jamais spontané : sa froideur et sa capacité à mettre à distance (ses « premières armes » (L21)) la rendent plus effrayante encore. C’est un fin stratège, elle a donc réussi son éducation. La marquise compare son éducation à celle des hommes politiques « gestes », « discours » (L22). Elle témoigne de sa fierté et de son orgueil pour avoir renversé la posture de femme passive à celle d’une femme devenue maitre de son destin. Conclusion : L’autoportrait de Mme de Merteuil est à double-tranchant : personnage monstrueux, orgueilleux et manipulateur, elle force pourtant l’admiration. Elle s’est éduquée elle-même grâce à sa seule intelligence, remettant en cause les mensonges et les non-dits auxquels étaient soumises les femmes de son époque. S’il semble que la Marquise de Merteuil ne parle que d’elle dans cette lettre, cet autoportrait permet en réalité à Choderlos de Laclos d’aborder des thèmes qui lui tiennent à cœur, promouvant l’esprit rationnel des Lumières et dénonçant l’éducation des femmes au XVIIIème siècle. C’est aussi une lettre utile à l’intrigue, qui approfondit le portrait de l’un des personnages principaux et annonce le dénouement des Liaisons Dangereuses. uploads/Litterature/ fiche-de-lecture-les-liaisons-dangereuses-lettre-81.pdf
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Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Sep 29, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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