Good bye Lenin !, entre Histoire et histoire mardi 14 septembre 2010, par Isabe

Good bye Lenin !, entre Histoire et histoire mardi 14 septembre 2010, par Isabelle Patroix Dans Good bye Lenin ! Wolfgang Becker met en scène ce qui a constitué un des derniers événements politiques les plus importants de l’Histoire de l’Allemagne : la chute du Mur de Berlin. Il y dépeint toutes les transformations politiques mais surtout quotidiennes qui s’imposent à la population de la RDA redevenue Allemande. Wolfgang Becker suit ainsi une famille de l’(ex)RDA ; observant comment en l’espace de quelques mois l’Histoire, la chute du Mur et la réunification de l’Allemagne bouleversent la vie de cette famille et de leur proche entourage. Comment ils sont projetés dans une Allemagne qui se veut moderne, active, innovante… Comment elles les poussent vers de nouvelles habitudes, vers de nouvelles visions du monde sans qu’ils n’aient vraiment le choix. L’analyse de Wolfgang Becker se complexifie grâce au personnage de la mère, Christiane. Cette femme, que son mari abandonne pour la RFA, s’investit dans le parti socialiste où elle puise toute son énergie vitale. Elle tombe dans le coma à la veille de la chute du Mur et ne se réveille que huit mois plus tard dans une Allemagne méconnaissable. Pour lui éviter un nouveau choc émotionnel son fils, Alex, décide de lui mentir. Grâce à des anciennes émissions, des vieux journaux télévisés il lui fait croire que la RDA demeure. Mieux encore il va se mettre à transformer l’Histoire, à la réécrire, à en renverser le sens et la destiné. Nous verrons donc comment Wolfgang Becker met en scène cette Histoire qui avance, transforme la vie de cette famille ; comment ces deux entités sont tour à tour sur le devant de la scène et comment finalement Alex prend le pas sur l’Histoire en la réécrivant. La chute du Mur de Berlin est bien évidement le sujet principal de ce film avec tout ce que cet évènement historique a entraîné. Il est le point départ, la cause de la chute de Christine dans le coma, et l’élément fondamental qu’Alex veut cacher. Dès le générique initial l’Histoire est au premier plan. Wolfgang Becker nous montre des symboles de la RDA. Le fond de toile de son générique est composé d’un montage de superpositions de photos ou cartes postales de Berlin-Est, de la statue de Lénine, de timbres postes de RDA. Ces différents symboles sont réutilisés par Wolfgang Becker tout au long du film. Ils viennent attester du souvenir de la RDA. Ils font partie de la reconstitution : des drapeaux allemands parsèment les scènes qui suivent la chute du Mur. Ce sont bien sûr des détails que le réalisateur ajoute au paysage Allemand actuel. Ces drapeaux sont de nouveau très présents lors des jours qui précèdent la coupe du monde de football en juillet 1990, présents sur les voitures, les bâtiments, les fenêtres… De la même manière lors des premiers soulèvements de la population, avant la chute du Mur, la police revêt l’uniforme d’époque. Tous ces éléments font partie de la reconstitution que met en place Wolfgang Becker. Il tourne en 2003, la RDA n’existe plus, il est obligé de recourir à ces symboles qui attestent de l’Histoire. Il est obligé de reconstituer l’atmosphère RDA par les costumes, mais également en reprenant des chants socialistes qu’il intègre à l’histoire, des marques de produits alimentaires issus du parti socialiste : café « Mocca fix », cornichons « spreewald » qui disparaîtront avec la réunification. Il parsème l’appartement de Christiane de photos des hommes politiques de RDA. Il reprend également des journaux d’époque tel « jumge welts ». Sa reconstitution est très minutieuse et réaliste : Wolfgang Becker, lorsqu’il recrée la manifestation de 1989, fait appel à des figurants bénévoles. Parmi eux se trouvent des personnes qui ont vécu cette manifestation de 1989. Ces gens sont très touchés par le tournage. En effet, ils ne sont pas au courant que parmi eux se trouvent des acteurs et des cascadeurs. Lorsque la police commence à brutaliser et frapper les cascadeurs, les figurants ont, alors, le sentiment de revivre la même impuissance et la même rage que lors de la manifestation de 89. La reconstitution est donc fidèle et sincère. D’autre part, Wolfgang Becker utilise énormément les images vidéo et les images d’archives dans ce film. Lorsque l’évènement historique est au premier plan, les images d’archives sont montées avec les images du film. Elles sont à l’écran. Ainsi quand Alex nous raconte les huit mois de transformations qui suivent la chute du Mur, on voit des images réelles d’archives à l’écran : on y voit la chute du mur, les nouvelles élections. De la même manière du temps de la RDA, Alex regarde une émission qui retransmet la vie Sigmund Jähn dans l’espace. Cet événement est un événement historique. Il a eu lieu le 26 août 1978. C’est un symbole de la réussite de la RDA. Les images nous sont donc données directement à l’écran. Elles sont au premier plan, elles sont réelles. Le même traitement de l’image d’archives intégrées dans le film a lieu lors du défilé du 10 octobre 1989 qui commémore les quarante ans de la RDA. De la même façon on aura les images de la victoire allemande lors de la coupe du monde de football de 1990, directement à l’écran. Là encore c’est parce qu’il s’agit d’un événement historique réel. Toutes ses images conservent leur sonorité. La bande-son qui appartient aux images d’archives est conservée. On a ainsi les commentaires télévisés, les chants ou exclamations de la population… Le réalisateur conserve l’effet de réel. Cela va dans le sens de l’Histoire, réelle, qui a existé. Au niveau de la narration l’Histoire est également l’élément déclencheur. Les habitants de RDA perdent leur travail, en changent : Alex devient employé d’une société qui vend de antennes paraboliques, sa sœur travaille dans un fast-food. Les habitants doivent changer leurs habitudes, leur vocabulaire, ils ne se nomment plus « camarades », certains regrettent la RDA. C’est le cas d’un des voisins de l’immeuble. Ils s’habillent différent, mangent de nouveaux produits, les anciens disparaissent remplacés par la consommation de masse. On voit s’implanter coca-cola : symbole, dans le film, du capitalisme envahissant. Des images de publicité apparaissent souvent dans le décor : voiture à leur effigie, affiches, banderole. On voit de la publicité pour Ikea, de nouveaux panneaux publicitaires en tout genre. Le marché de l’immobilier chute. Alex et Lara peuvent ainsi emménager dans un appartement qui a été déserté par une famille partie à l’ouest. Ils vont à une soirée et assistent au renouveau de l’art : musique électronique, happening, exposition d’art contemporain. Ce renouveau est d’ailleurs une des forces de la culture berlinoise actuelle. Tous ces éléments sont mus par l’Histoire. La nouvelle Allemagne, le capitalisme poussent les habitants vers le changement sans qu’ils n’aient vraiment le choix. On sent que c’est l’Histoire qui guide tous ces bouleversements. Les habitants sont « comme des petites particules d’un immense cyclotron » note Alex. Mais l’histoire fictionnelle n’a pas dit son dernier mot. Si c’est l’Histoire qui guide le film, la vie de la famille tient tout de même son rôle et se place. Elle reprend souvent le premier plan. Ainsi la première image du film est une autre utilisation de la vidéo : cette fois à l’avantage de la famille. Wolfgang Becker nous propose des images qui sont travaillées de manière à nous donner l’impression que ce sont des images tirées d’une caméra familiale. Elles sont de couleurs différentes, un peu brouillées et accompagnées du ronronnement de la caméra. Ce sont des images d’un film tourné par le père. Ce sont des souvenirs d’enfance. Ces images sont traitées de la même manière que les images d’archives : elles sont à l’écran. Cependant, elles ne sont pas en plein écran : un cadre noir est conservé. Cette particularité les distingue des images d’archives. Dans le film, ce procédé est repris quand on parle de l’investissement de la famille dans le parti politique. On voit ainsi des photos qui seraient prises par les membres de la famille eux-mêmes ou des vidéos. Elles ont le même traitement que celles qui ouvrent le film. Cette fois, les images sont en plein écran, mais elles n’ont pas leur bande-son. Elles sont accompagnées de la musique créée pour le film. Cette nuance est très subtile de la part de Wolfgang Becker. Ainsi, les images se situent entre réalité, Histoire – elles sont à l’écran – et fiction : on y voit les personnages fictifs et le traitement de la bande son est celui de la fiction. On a la musique de Yann Tiersen et non les sons réels. Ce procédé nous souligne comment la famille est proche de l’Histoire de part son engagement politique, mais aussi par le simple fait de vivre en RDA. De la même manière lors des bouleversements politiques la voix off est celle du narrateur, celle d’Alex. Il nous raconte à la fois l’Histoire de l’Allemagne et son histoire, sa propre histoire. Les images sont alors mélangées, uploads/Litterature/ good-bye-lenin-entre-histoire-et-histoire 1 .pdf

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