SI de Sumer á Saussure histoire de la linguistique Histoire de la linguistique

SI de Sumer á Saussure histoire de la linguistique Histoire de la linguistique de Sumer á Saussure 2 HISTOIRE DE LA LINGUISTIQUE DE SUMER A SAUSSURE L-fi- Bertil Malmberg Professeur émérite é l’Université de Lund (Suéde) PRESSES UNIVERSITAIRES DE FRANCE 3 ISBN 2 13 043357 X Dépflt lógal — 1re édition : 1991, mars © Presses Universitaires de France, 1991 108, boulevard Saint-Germain, 75006 Paris 4 INTRODUCTION Une «histoire de la linguistique» suppose d’abord que le concept de linguistique soit convenablement défini. On enseignait autrefois, et on le fait en réalité encore assez souvent, que la linguistique n’existait guére avant le début du X1XC siécle et qu’une science digne de ce nom est le fruit de tendances scientifiques évolutives et ccmparatistes liées á la rupture avec le rationalisine. Toute réflexion théorique sur les faits de langue antérieure au XIXC siécle serait á classer comme appartenant á la philosophic ou plus exactement á la branche de celle-ci qui s’occupe du rapport entre la pensée (les idées, les concepts) et son expression dans le langage. On soutenait autrefois que les langues comme structures n’avaient guére fait l’objet de descriptions et d’analyses pour leur propre compte autrement que dans les manuels scolaires et dans l’interprétation des textos anciens (Homére), ou sacrés (la Bible), en d’autres mots comme philologie. En délimitant ainsi l’histoire de la linguistique on était en réalité sous la dépendance de deux traditions. Une était historique et diachronique et suivait, fidéle au mouvement romantique, les changements des langues, regardées sous l’aspect de leurs origines et de leurs modifications depths une langue mere, supposée et recons-truite (comme l’ancien indo-européen), ou comme et documentée (comme le latin). L’autre tradition était philosophique (logique) et impliquait une identification de l’étude du langage avec 1’Analyse de la pensée humaine. Cette derniére tradition remonte aux philosophes de l’antiquité grecque. Et elle a existe sous des formes différentes á travers l’histoire de la civilisation occidentale jusqu’á nos jours. La premiere de ces traditions est récente. Elle est née d’une combinaison de découvertes faites aux environs de 1800 et dans un climat ou l'on commengait á chercher des rapports de parenté et d’origine en partant des nouveaux matériaux réunis au contact avec l’ancienne langue de l’Inde et dans un esprit historique et nationaliste. Avec le romantisme, cet esprit prit la place du rationalisine cartésien qui avail dominé le siécle des Lumiéres. 5 6 | Histoire de la linguistique Puiscjnc c’cst cede tradition (|iii implique, plus direclemcut <|iit* la premiere, une concentration sur le langage comine phénoméne sui generis — eL par hi eu premier lieu sur son expression plionologique et graphique et sur les systéines granunaiicaux —, on comprend lacilement c|ue ee soiem les debuts du comparalisme et de I'historicisme ipii soient venus á s’interpréter aussi córame les debuts d’une linguistique autonome. Nous verrons par la suite qu’une telle interprétation de la linguistique est insoulenable el que, par consequent, l’histoire de la linguistique, au lieu de prendre ses débuts avec le XIX* siécle, remonte tres haut dans l’histoire de la civilisation humaine, probablement á une époquc dont aucun document linguistique ne nous a été conservé. 1.a definition de la linguistique coinme une science ;i peine deux lois centenaire est pourtant restée salable, tant tpie la recherche sur les patentes des langues el sur lent evolution a gardé sa dominance dans la linguistique et dans l'enseignement universitaire, approximativement jusqu'au debut des années 1**30 et suivantes. I'.n réalité, une telle délinition se comprend aisémeni, si Pon tif nt comple du fait que c’est avec la uaissance, pendant les premieres décennies du siécle precedent, d’une analyse comparée des langues et d'une perspective diacbroui(|ue dcstinée á expliquer les ressemblances et les differences entre les langues de l'Europe et du Proche-Orient qu’une science du langage a pu étrc établie sur une base méthodiquement solide et en con form i té avec un courant á la mode ¡i l’époque (romantisme, évoludonnisme). On vena plus loin que pour les grands théoriciens de l’époque toute analyse scientifique des fails de tingue devait étre historique (Hermann Paul). Avec le changement de perspective dú aux théses de Ferdinand de Saussure et á la naissance du strucluralisme entre les deux guerres mundiales. I’analyse synchronique des langues sous forme de descriptions de systéines el de valeurs fonctionnelles a pris sa place á cote de la diachronic qui, de plus en plus, vient jouer le role de complement a la synchronic. Les mécanismes fonctionnels du langage el les problémes de la formation et du transferí du content! par ces mémes mécanismes sont redevenus l’objet principal de toute science du langage. Le rapport eture la pensée et la langue se iron ve mainiennnt, comme pour les Grecs, au centre des preoccupations des linguistes. II est done devenu incorrect de voir dans le comparalisme el I'historicisme du debut du siécle dernier également le debut d'une science du langage. II faut par consequent chercher ce debut á une époque oii ¡I est possible de documentor les premiers essais de preoccupation théorique avec le langage et les langues. La linguistique a en réalité un age qui est égal á celui des premiers documents témoignant de l'existence de descriptions de langues et de reflexions aulour de leurs mécanismes. La philosophic du langage a continué, depths les plus anciens philosophes grecs, á se développer en dehors et au dessus de la recherche diachrouique. Le role des philosophes dans revolution de la linguistique ne cesse pas d'augmeuter. Une conséqueme en est que non seulement. Platón, Alistóle, les sto'iciens, saint Augustin, Isidore de Seville, Bacon. Descartes, Maupertuis et Condillac mais aussi Charles Sanders Peirce, Rudolf Carnap, Michel Foucault. Jean-Paul Sartre, Jean Piaget, Ludwig Wittgenstein, Jacques Lacan et bien d'autres doivent étre inclus dans tine histoire de hi linguistique. Ceri implique une expansion considérable du domaine de cette science par rapport á sa délimitalion traditionnelle. 6 Introduction | 7 Avcc celte definition de In linguistique, une science digne de ce nom a dú exister dans toute civilisation parvenue á tin certain niveau de pensée théorique. De Hombreases cultures out sans doute disparu sans laisser de traces de descriptions et d’analyses cjn'elles out pu faite de leurs langues. Des phénoménes tels que la rencontre a vcc d’autres langues mi la creation d'nne écrilure ont pu étre de nature á conditionner des reflexions sur la langue, la sienne propre et/ou cede des autres, et á former ainsi le point tie depart d'nne premiere linguistique primitive. En ce qui concerne beaucoup de civilisations, les documents qui nous permettraient de nous faire une idée de telles reflexions théuriqtiemeut possibles sur le langage nous font entiérement défaut ou ii’admettent pas tine interpretation adequate. Les premiers documents susceptibles d'inierprétation dans ce sens, il faut les chercher dans 1’ancienne Chine, dans l’lnde, dans le bassin de I’Euphrate el du Tigre et sur les cotes de la Méditerranée. Oil ven a plus loin le role que va jotter la prise de contact des lingüistas européens tin debut tin siécle dernier avec la langue sacrée de l’ancienne Inde — le Sanskrit — et aver les analyses phonologiques et gram mat icales de cctte langue faites par les grammairiens des l’époque védique (121)11 — 11)00 avant nutre ere), surtout par le farneux grammairieii l’anini (voir plus loin, cbap. 2). Si la tradition linguistique hindoue a été continuée et élendiie, grace au buuddliisme, jusqii’eu Chine et an [apon, il serait pourtant incorrect de se figurer une influence semblable dans le monde occidental, ni a va ni ni apees le développernent des études sanskrites dans l’Ouest oú ce!les-c¡ n’ont pas été liées á la religion, comme dans l’Est. II nous semble par conséqucnt. talsonnable, de noire point de vue occidental, de voir darts la philosophic grecque les premiers essais d’une analyse théorique du langage directement intéressant la nutre et de cormuenrer une histoire de la linguistique par un aperyu de ces essais tels qu’ils ont été développés depuis les débuts de la civilisation de ces peuples et surtout des Grecs (500 — 400 avant notre ére). Si la linguistique indienne et á plus forte raison celle de rExtréme-Orient sont traitées ici en parent pauvre, c’est en partie parce que cette linguistique n'a été connue dans le monde occidental qu’avec le début du XIXC siécle et que, par conséquent, son role ne commence á se faire sentir qu’avec le comparatisme indo-européen, mais c’est aussi parce que l’auteur de ce livre ne maítrise pas la matiére indienne et qu’il est par conséquent obligó de se contenter de références de seconde main. Ceci est encore plus le cas du monde chinois et japonais. L’auteur s’abstiendra par conséquent de toute tentative d’approfondir les questions qui y sont reírrives. L’histoire de la linguistique que nous soumetions ici á la critique de nos lecceurs est clone essentiellement et en principe une histoire de la linguistique occidentale, D’autre part, il ne faut pas perche de vue que c’est le contact pris veis l’annéc 1800 avec la langue et la grammaire de l inde <]iii a stimulé la naissance de la linguistique historique et comparative du XIX'' siécle el du début uploads/Litterature/ histoire-de-la-linguistique-malmberg.pdf

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