0 MINISTÈRE DE L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR ET DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE UNIVERS
0 MINISTÈRE DE L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR ET DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE UNIVERSITÉ MOULOUD MAMMERI DE TIZI-OUZOU FACULTÉ DES LETTRES ET SCIENCES HUMAINES École Doctorale de Français de TIZI OUZOU OPTION : Science des Textes Littéraires Etude comparative entre l’Enfant Noir de Camara Laye et le Fils du Pauvre de Mouloud Feraoun Naima Kessal Année Universitaire: 2008/2009 Introduction générale 2 Pour les critiques, en règle générale, le texte littéraire est souvent un objet très codé et une source de témoignage. Il véhicule une certaine idéologie et offre aux lecteurs de véritables connaissances de la société. Il est donc un tableau de différents aspects socio-politiques et culturels. Certes, c’est un produit esthétique, un produit de fiction mais c’est aussi un outil mêlant réalité et fiction. Tous les romanciers adoptent l’écriture pour transmettre des messages, pour expliquer, démontrer, dénoncer etc., les romans se révèlent donc être pour la plupart de véritables portraits de la société. Mouloud Feraoun et Camara Laye, membres d’une certaine société, réagissent en tant que tels et révèlent l’opinion de leurs concitoyens, la valeur et la spécificité de leurs sociétés. Cependant, nos deux romanciers sont ceux parmi les plus avertis en matière sociale : en effet, ils ont compris réellement les aspirations profondes, l’âme de leur peuple et sa réalité. Ils ont entrepris – à partir de leur propre observation et leurs expériences vécues – l’étude de ses divers aspects, ce qui justifie et explique le choix de notre corpus littéraire. Dans ce mémoire de Magistère, nous nous proposons d’analyser et d’établir une comparaison entre L’Enfant Noir de l’écrivain guinéen Camara Laye, qui aujourd’hui le pilier de la culture africaine et Le Fils du Pauvre de Mouloud Feraoun, l’une des plus grandes figures de la littérature algérienne d’expression française. Il convient donc de s’arrêter sur ces deux romans (souvent présents dans les programmes et manuels scolaires) afin de relever leurs similitudes et leurs divergences. Nous optons pour une approche critique qui fait d’avantage appel à l’histoire et à la sociologie, en liaison étroite avec les faits littéraires intégrés ainsi dans le contexte. Il s’agit en effet de situer l’œuvre de Feraoun et celle de Laye dans son contexte 3 historique pour mieux l’éclairer et de l’analyser à la lumière de l’histoire, c'est-à-dire avec sa teneur sociale. Pour établir cette comparaison et analyser ces deux romans, nous aurons à répondre à la question suivante: comment se conçoivent et se manifestent les deux sociétés colonisées à travers les deux romans? Pour répondre à cette question et pour analyser notre corpus littéraire dans son articulation avec l’histoire et la société, il nous a semblé nécessaire de situer l’analyse des deux textes en fonction de la notion du «reflet» comme la décrivent E. Balibar et P. Macherey : le concept de reflet désigne « l’indice de réalité de la littérature »1, reflet de la réalité sociale historique, de la réalité objective. Cela signifie donc que la littérature – comme toute activité humaine – s’inscrit dans la société comme pratique sociale. Balibar et Macherey insistent pour « rétablir dans sa priorité (…) le problème de l’objectivité du reflet » : Le matérialisme dialectique affirme l’objectivité du reflet, l’objectivité de la pensée comme reflet: à la fois sa détermination par la réalité matérielle, qui la précède et lui reste toujours irréductible, et sa propre réalité matérielle »2. Une fois posé ce concept fondamental, il nous faut trouver une démarche méthodologique nous permettant d’appréhender les médiations entre la structure sociale et la structure textuelle, une théorie capable de faire apparaître la société dans le texte. Ici, la notion d’intertextualité peut s’appliquer, car elle est un des lieux où le travail du texte ne peut se lire en dehors du hors texte, ce qui signifie que doivent être envisagées aussi bien les différentes relations qui lient le texte aux autres textes littéraires et aux autres textes sociaux- historiques. Laurent Jenny appelle intertextualité « toute mise en scène fictionnelle qui se trouve ici empruntée, adaptée, 1 E. Balibar et P. Macherey, « sur la littérature comme forme idéologique. Quelques hypothèses marxistes », 1913, n°13, p. 31. 2 Ibid., p. 32 4 pervertie et contredite par le travail intertextuel »3. Ainsi l’œuvre littéraire entretient, selon lui, des rapports « de réalisation, de transformation ou de transgression »4. Ces différents rapports ne peuvent s’expliquer qu’en liaison avec les structures sociales d’où émerge l’œuvre. Nous devrons considérer l’ensemble des phénomènes d’intertextualité tels les phénomènes d’inscription de « citation », ou de d’autres textes, à l’intérieur même de l’œuvre. Comme le propose Julia Kristeva, nous allons tenter d’étudier – par le biais de l’intertextualité – les éléments que nous pourrons repérer dans le texte : Remplacer le découpage statique des textes par un modèle où la structure n’est pas, mais où elle s’élabore par rapport à une autre structure(…) un croisement de surfaces textuelles, un dialogue de plusieurs écritures : de l’écrivain, du destinataire(ou du personnage), du contexte culturel actuel ou antérieur5. Dans cette perspective, l’histoire et la société sont elles-mêmes envisagées « comme textes que l’écrivain lit et dans lesquels il s’insère en les écrivant »6. On ne peut étudier ces phénomènes d’intertextualité qu’après avoir défini les conditions de production de ces deux textes autobiographiques francophones au cœur de la société colonisée. Ainsi nous allons passer de la constatation d’un silence du texte sur la présence coloniale à une explication du non engagement dénoté dans la prise de position politique. Selon P. Barbéris, l’histoire est présente dans le texte par la lecture qu’on en fait : « L’histoire n’est pas au centre du texte comme le noyau au centre du fruit. Le texte contient de l’HISTOIRE à condition que je le mette en 3 Laurent Jenny, « La stratégie de la forme », in Poétique, Paris, Seuil, 1976, n° 26, p. 257. 4 Ibid., p. 257 5Julia Kristeva, Recherches pour une sémanalyse, Paris, Seuil, 1978, coll. « Points », p. 83. 6Ibid. 5 histoire»7. Cela pose clairement la question de l’implicite, car le refus de tel élément ou son absence est aussi significatif que la présence de tel autre. Sur le plan formel nous tenterons d’étudier le genre d’écriture élaborée, le style, la syntaxe, les moyens proprement littéraires que Feraoun et Laye ont employé pour exprimer leur société. La compréhension globale doit porter aussi sur le texte même en l’interrogeant sur sa densité et sa complexité. Pour mener à bien notre démonstration nous nous appuierons sur les travaux de Philippe Hamon8 concernant les passages descriptifs et nous étudierons le héros comme les autres personnages à partir de ses propositions méthodologiques, développées dans l’article « Pour un statut sémiologique du personnage »9. Nous aurons aussi à examiner les procédés quantitatifs, qualitatifs et fonctionnels d’identification du héros car : Le héros est donc un élément important de la lisibilité d’un récit, et son identification ne doit pas faire de doute pour le lecteur ; toute une série de procédés qualitatifs (par exemple le héros reçoit un nom, un prénom, un surnom, les qualités morales ou psychologiques valorisées par la culture,…) quantitatifs (c’est celui qui apparaît le plus fréquemment) ou fonctionnels (c’est celui qui reçoit des adjuvants, liquide le manque initial, fait fonction- sujet10. Nous allons utiliser les mêmes principes méthodologiques pour les deux romans, ce qui nous permettra de systématiser notre comparaison et de souligner les ressemblances et les divergences. Enfin, nous ne voulons pas terminer cette brève introduction sans dégager les éléments essentiels de la problématique et du plan général. Dans un premier temps, nous présenterons les conditions socio- économiques et historiques et nous essayerons de retracer le cadre géographique, de retrouver le lieu, l’époque et le milieu religieux dans 7Pierre Barbéris, Le prince et le marchand, Paris, Fayard, 1980, p.90 8 Philippe Hamon, « qu’est ce qu’une description ? », in Poétique, Paris, Seuil, 1972, n°12. 9 Philippe Hamon, « Pour un statut sémiologique du personnage », in Littérature, Paris, Flammarion, 1976, n°6. 10 Philippe Hamon, « Un discours contraint », in Poétique, Paris, Seuil, 1973, n°16, p. 435. 6 lesquels ces œuvres ont vu le jour et de préciser l’instant qui a fait naître et qui a donné vie à chacune d’elles. L’écriture réaliste et le style, qui présentent des particularités importantes, seront l’objet de la deuxième partie. Nous étudierons le vocabulaire particulier des deux œuvres. Nous nous interrogerons ensuite sur le choix d’une écriture autobiographique, sur le désir et le besoin d’écrire sa propre vie, son parcours, sur le besoin de décrire sa société avec tous ses mythes ses croyances, ses habitudes et ses traditions .Nous déterminerons les conditions qui ont contribué à l’évolution du héros, les forces agissantes qui ont concouru à la réalisation de la quête de ce dernier, à partir des propositions méthodologiques de Philippe Lejeune. Ce sera enfin le moment de conclure et de résumer les arguments qui nous ont permis de faire le rapprochement entre ces deux romans qui ont fait l’objet de ce travail de recherche. A – Aperçu historique En Algérie La production algérienne antérieure à 1945, jugée de faible qualité et écrite à uploads/Litterature/ kessal-naima-magister-t-m-151.pdf
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- Publié le Jui 15, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
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