INTRODUCTION Trois records de traductions La Bible est, selon l’état actuel de
INTRODUCTION Trois records de traductions La Bible est, selon l’état actuel de nos connaissances, le premier livre qui ait été traduit dans une autre langue: la traduction de l’Ancien Testament faite par les Septante à Alexandrie aux 3e et 2e siècles av. J. C. est, selon André Chouraqui, une première mondiale absolue dans la littérature de tous les peuples. C’est aussi le livre traduit dans le plus grand nombre de langues: aujourd’hui, les 4/5e de la population du globe peuvent lire au moins une partie des Saintes Écritures dans l’une des quelque 2 000 langues dans lesquelles elles ont été traduites. De plus, dans certaines d’entre elles, il existe des dizaines, voire des centaines de traductions différentes: trois records qui font de la Bible-entre autres-un livre tout à fait à part. Qu’est-ce qui a bien pu pousser les lecteurs de la Bible à rendre ce livre accessible, non seulement à des peuples de plus en plus nombreux, mais encore à reprendre sans cesse les traductions existantes pour les réviser ou en faire de nouvelles? Par quoi ces versions diffèrent-elles? Sont- elles équivalentes, ou bien, certaines sont-elles plus "fidèles" que d’autres? Que signifie, en fait, le mot "fidèle" en traduction? Comment évaluer cette fidélité? Certaines versions ne sont-elles pas davantage une paraphrase ou une interprétation du texte originel qu’une traduction? Quel est le rôle respectif de la traduction et de l’interprétation? Cette dernière doit-elle se situer avant ou après la traduction? Quelles règles d’interprétation s’appliquent à la traduction? Comment choisir, entre les versions existantes, celle qui offre le plus de garanties de transmettre le message originel de Dieu? Doit-on se limiter à une seule version ou tirer le meilleur parti de la diversité qui existe dans notre langue? Telles sont quelques questions que nous pose la multiplicité des traductions bibliques et que nous nous proposons d’examiner dans ce Cahier. Dans les trois premiers chapitres, nous ferons un bref inventaire des traductions existantes. Puis nous nous poserons la question: Pourquoi, dans une même langue existe-t-il un certain nombre-parfois même beaucoup-de versions? Dans les chapitres 5 à 8, nous analyserons les principes qui ont guidé les différents traducteurs, ce qui nous amènera tout naturellement à la question pratique que beaucoup de chrétiens se posent: Quelle version choisir? Mais avant de nous lancer dans l’étude de ces différents points, une question de principe se pose: Pourquoi traduire? Est-ce indispensable-ou même possible et souhaitable? Faut-il traduire? Dans l’Islam, le livre sacré, le Coran, ne devrait en principe pas se traduire. On devrait toujours le lire dans la langue sacrée: l’arabe. Dans une mosquée en Turquie, j’ai vu des vieillards lire le Coran pendant des heures. D’après notre guide, ils n’en comprenaient pas un mot, mais ils croyaient que cette lecture leur apporterait une bénédiction. Certains croyants de nos pays ont une opinion un peu semblable au sujet de la Bible. Tous les petits Juifs doivent apprendre l’hébreu pour pouvoir lire l’Ancien Testament dans la langue d’origine. Dans un colloque de traducteurs bibliques, André Chouraqui disait: "Pour lire la Bible, nous avons été obligés d’apprendre l’hébreu. On jouit bien plus du panorama depuis une haute montagne lorsqu’on en a gravi le sommet au prix de ses efforts que si on s’y est laissé hisser par un téléférique. Alors je ne vois pas pourquoi on dispenserait les gens d’un effort si salutaire." Est- ce pour cette raison que sa traduction essaie bien plus d’ "exporter" le lecteur vers la langue "source" que de lui faire comprendre le contenu de la Bible? 2 Il y a sans doute quelque chose de vrai dans sa remarque, mais si la lecture de la Bible était réservée à ceux qui savent la lire dans l’original, seule une petite élite pourrait avoir accès à la Parole de Dieu. Telle n’était certainement pas l’intention divine. Dieu voulait que tout son peuple prenne connaissance de sa Parole. C’est même l’un des traits distinctifs des religions juive et chrétienne: dans toutes les autres religions, la lecture des écrits sacrés est réservée aux prêtres et aux initiés, alors que l’Éternel a demandé à Moïse: "Tu liras cette loi devant tout Israël " (De 31.11). Au retour de la captivité, Esdras lut devant tout le peuple "depuis le matin jusqu’au soir" (Ne 8.3). Esaïe dit à toutes les nations: "Consultez le livre de l’Eternel et lisez" (Isa 34.16). Les écrits du Nouveau Testament sont aussi adressés à tous les chrétiens dans les Eglises. Comme le salut de Dieu devait devenir accessible à toutes les nations (Mt 12.21; Mc 13.10; Ac 26.23), sa Parole devait aussi être traduite dans leurs langues. C’est le sens du miracle de la première Pentecôte: "Nous sommes Parthes, Mèdes ou Elamites...et cependant chacun de nous les entend parler dans sa propre langue des choses merveilleuses que Dieu a accomplies" (Ac 2.9-11). Comme l’a dit W. Michaëlis: "L’influence mondiale de la Bible découle de ses traductions". Aussi, de tout temps, la diffusion du christianisme a-t-elle été accompagnée de la traduction de la Bible. En 1993, la Bible entière était traduite dans 337 langues, le Nouveau Testament dans 799 et des parties (c. à. d. un ou plusieurs livres bibliques) dans 926 autres, ce qui fait un total de 2 062 langues mondiales. D’autre part, il y avait plus de 1 200 projets de traduction en cours. La préface (rarement reproduite) de la célèbre Bible anglaise du Roi Jacques (1611) dit dans son langage imagé: "C’est la traduction qui ouvre la fenêtre, qui laisse entrer la lumière; c’est elle qui casse la coque pour que nous puissions manger la noix, qui met le voile de côté pour que nous puissions regarder dans le lieu saint; elle découvre le puits pour que nous parvenions jusqu’à l’eau, comme Jacob a roulé la pierre de l’ouverture du puits afin que les troupeaux de Laban puissent boire." Sans doute, une traduction ne rend pas toutes les nuances et les subtilités de l’original, mais, comme dit A. R. Bandini, "la moitié d’une miche vaut mieux que pas de miche du tout. Or, s’il s’agit d’une bonne traduction, nous pouvons avoir au moins les neuf dixièmes de la miche." Traduire: une entreprise difficile... Mais traduire la Bible est une entreprise difficile. "Le langage est la forme de communication la plus complexe accessible à des humains. la traduction multiplie encore la complexité à cause des différences de grammaire, de structures sémantiques, de styles et de conventions littéraires. Traduire la Bible est l’un des processus de communication les plus difficiles de l’expérience humaine." (W. Smalley). Le traducteur doit choisir constamment entre des centaines de variables et de variables potentielles sur beaucoup de niveaux à la fois (la plupart d’entre eux étant inconscients). C’est pourquoi il est important que plusieurs personnes travaillent ensemble à une traduction. "Il est plus facile de traduire un article sur la physique nucléaire du russe en anglais que de traduire le livre de Job en anglais ou l’évangile de Matthieu en mavajo" (W. Smalley). E. H. Glassman cite une dizaine de titres d’articles sur la traduction qui, tous, relèvent la difficulté de cette tâche ingrate (81 p. 11). Bruce K. Waltke, l’un des traducteurs de la NIV, dit qu’un traducteur de la Bible doit faire face à au moins 7 sortes de problèmes exégétiques: 1. textuel (Quel texte?), 3 2. lexicologique (Que signifie le mot hébreu dans son contexte historique?), 3. grammatical (Quelle est la valeur de la forme grammaticale hébraïque? et/ou: Quelle est la syntaxe de la phrase-ou: des phrases?), 4. historique (Que signifiait ce texte pour ses premiers destinataires?), 5. rhétorique (Le poète emploie-t-il une figure de style? Si oui, que signifie-t-elle?), 6. poétique ( Comment les lignes hébraïques de la poésie et ses strophes doivent-elles être divisées et analysées?) et 7. théologique (Que signifie ce texte à la lumière de l’ensemble de la Bible?). Après avoir répondu à ces questions exégétiques, il se trouve devant le problème: Comment traduire les résultats de ses recherches de manière exacte et concise, avec la même dynamique émotionnelle et de façon suffisamment claire pour l’audience visée? (91 p. 88). Bruce Metzger, un bibliste américain, dit que "la traduction des Saintes Écritures présente des difficultés particulières. Parce qu’elles sont à la fois une source d’information et d’inspiration, les traductions doivent être exactes aussi bien que belles. Elles doivent se prêter à une lecture rapide autant qu’à une étude approfondie, elles doivent aussi convenir à une lecture publique solennelle devant de grands comme de petits auditoires. Elles devraient être compréhensibles, et même attrayantes, pour des lecteurs de tous âges, tous degrés d’éducation et presque tous niveaux intellectuels. Un tel idéal est évidemment impossible à atteindre." (Biblioth. Sacra 150 (4-6. 93) p.140). Est-ce cela qui a poussé tant de traducteurs à retraduire sans cesse la Bible? T. H. Robinson avoue dans la préface de la New English Bible: "Ce qu’il y a de plus fascinant dans la traduction, c’est qu’elle est si impossible." ...impossible? C’est l’autre objection que certains élèvent contre toutes les tentatives de traduction: il n’est pas possible de rendre fidèlement uploads/Litterature/ kuen.pdf
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- Publié le Aoû 16, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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