LA CLEMENZA DI TITO Wolfganag Amadeus Mozart Livret de Caterino Mazzolà d’après
LA CLEMENZA DI TITO Wolfganag Amadeus Mozart Livret de Caterino Mazzolà d’après Pietro Metastasio LIVRET EN TRADUCTION FRANÇAISE Personnages Titus Vespasianus, empereur romain Vitellia, fille de l’empereur Vitellius Servilia, sœur de Sextus, amante d’Annius Sextus, ami de Titus, amant de Vitellia Annius, ami de Sextus, amant de Servilia Publius, capitaine de la garde prétorienne 1 ACTE I SCÈNE 1 Dans les appartements de Vitellia. Vitellia Mais quoi, Sextus ? Me diras-tu toujours la même chose ? Je sais que tu as convaincu Lentulus, que ses partisans sont déjà prêts et que le Capitole en flammes sera le signal de l’émeute. Tout cela, je l’ai entendu mille fois. Mais je ne vois pas ma vengeance. Attendrait-on que, sous mes yeux, Titus, dans sa folle passion, offre à Bérénice mon trône usurpé, et sa main ? Parle, dis-moi, qu’attendons-nous ? Sextus Ciel ! Vitellia Tu soupires ? Sextus Penses-y encore, ô bien-aimée, penses-y encore. Ah, n’ôtons pas, avec Titus, son bonheur au monde, son père à Rome, et notre ami à nous mêmes. Trouve son égal dans le passé, si tu le peux. Figure-toi héros plus généreux et plus clément. Parle-lui de récompense, ses deniers lui semblent modestes. Parle-lui de châtiment, il cherche en chacun des excuses au crime. Il donne à la jeunesse comme à la vieillesse. Il épargne l’honneur du sang illustre de l’un, compatit au bas état de l’autre. Il déclare vain et perdu le jour où il n’a pas rendu quelqu’un heureux. Vitellia Es-tu donc venu me faire l’éloge de mon ennemi ? Ne penses-tu donc plus que ce héros clément usurpe le trône que son père arracha au mien ? Qu’il m’a trompée, séduite (c’est là sa plus grande faute), se faisant presque aimer ? Et là, le perfide rappelle de nouveau Bérénice vers le Tibre ! Si au moins il avait choisi, 2 parmi les beautés de Rome, une rivale digne de moi ! Mais une barbare, Sextus, me préférer une exilée, une reine ! Sextus Tu sais bien que Bérénice est revenue délibérément. Vitellia Raconte ces balivernes aux enfants. Je sais leurs amours passées. Je sais les larmes qu’il versa autrefois lorsqu'elle partit. Je sais comment il l’accueille et l’honore à présent. Qui ne le voit pas ? Le perfide l’adore. Sextus Ah, princesse, tu es jalouse. Vitellia Moi ! Sextus Oui. Vitellia Je suis jalouse car je ne supporte pas le mépris. Sextus Et pourtant… Vitellia Et pourtant tu n’as pas le courage de me conquérir. Sextus Je suis… Vitellia Tu es libéré de toute promesse. Je ne manque pas d’hommes plus dignes pour exécuter ma haine. Sextus Écoute-moi ! Vitellia Je t’ai trop écouté. 3 Sextus Arrête ! Vitellia Adieu. Sextus Ah, Vitellia, ah, ma déesse, ne pars pas ! Où vas-tu ? Pardonne-moi, je te crois, je me suis trompé. Sextus Ordonne ce qu’il te plaît. Dirige mes actes. Tu es mon destin. Je ferai tout pour toi. Vitellia Avant le coucher du soleil, je veux que l’indigne soit mort. Tu sais qu’il usurpe un royaume que le Ciel m’a destiné. Sextus Ta fureur m’enflamme déjà. Vitellia Eh bien, qu’attends-tu ? Sextus Qu’un doux regard récompense ma loyauté ! Vitellia et Sextus Mille émois se livrent ensemble à une impitoyable bataille en moi. Il n’est d’âme plus déchirée que la mienne. SCÈNE 2 Entre Annius. Annius Ami, hâte-toi, César te réclame. Vitellia Ah, ne perdez pas ces brefs instants que Titus soustrait à Bérénice. 4 Annius Vitellia, tu outrages injustement notre héros : Titus est maître du monde et de lui-même. Sur ses ordres, Bérénice est déjà partie. Sextus Comment ? Vitellia Que dis-tu ? Annius C’est à raison que vous vous étonnez. Rome en pleure de surprise et de joie. Moi-même, j’ai peine à le croire alors que j’étais présent aux grands adieux, ô Vitellia. Vitellia (Ô espoir !) Sextus Ô vertu ! Vitellia Comme j’aurais aimé entendre cette orgueilleuse protester contre Titus. Annius Au contraire, elle n’a jamais été aussi tendre. Elle est partie en voyant qu’elle partait adorée et qu’il n’en coûtait pas moins à son bien-aimé. Vitellia Chacun peut se leurrer. Annius Et l’on savait bien qu’il fallait à Titus tout son héroïsme pour dépasser son amour. Il a vaincu au terme d’un lourd combat, il n’était pas abattu mais il n’était pas apaisé. Et sur ce visage, (qu’il soit dit pour sa gloire), on voyait la bataille et la victoire. Vitellia (Peut-être Titus n’est-il pas ingrat envers moi comme je le croyais.) Sextus, n’exécute pas encore mes ordres. Le projet n’est pas encore mûr. 5 Sextus Et tu ne veux pas que je voie, que je me lamente, ô cruelle ! Vitellia Qu’as-tu donc vu ? De quoi peux-tu te lamenter ? Sextus De rien ! (Ô ciel ! Qui a donc jamais éprouvé tourment pareil au mien !) Vitellia De grâce, si tu veux me plaire, abandonne tes soupçons. Ne m’importune pas avec ces doutes pénibles. Celui qui croit aveuglément, s’engage à garder sa confiance. Celui qui s’attend toujours à des pièges, invite à la trahison. Elle part. SCÈNE 3 Annius Ami, voici le moment de me rendre heureux. Tu as promis Servilia à mon amour. Il ne manque que l’assentiment d’Auguste. Tu pourrais l’implorer à présent. Sextus Annius, tous tes désirs sont des ordres. Je souhaite ce nouveau lien avec impatience. Annius et Sextus De grâce, reçois cette tendre accolade, ami fidèle. Et que le ciel me préserve à jamais ton amitié. Ils partent. SCÈNE 4 Publius, les sénateurs romains et les légats des provinces sujettes, sont arrivés pour présenter au sénat le tribut annuel imposé. Titus, précédé des licteurs, suivi des prétoriens et entouré de la foule, descend du Capitole. 6 Chœur Ô dieux gardiens du sort de Rome, préservez en Titus, le fort, le juste, l’honneur de notre temps. Annius et Sextus entrent chacun de leur côté. Publius (à Titus) Aujourd’hui, le sénat te proclame Père de la patrie. Jamais il ne fut plus juste dans ses décrets, ô invincible Auguste. Annius Tu n’es pas seulement son père, mais son dieu tutélaire. Puisque tu te montres à tous plus que simple mortel, commence à t’habituer aux vœux de tous. Le sénat te destine un temple magnifique et veut que, parmi les honneurs divins, on y adore aussi la divinité de Titus. Publius Ces trésors que tu vois, tributs annuels des provinces assujetties, consacrons-les à cette œuvre. Que Titus ne dédaigne pas ces signes publics de notre amour. Titus Romains, votre amour est l’unique objet des vœux de Titus, mais qu’il ne soit pas excessif au point que Titus et vous dussiez en rougir. Toutefois, je ne refuse pas ces trésors offerts. Je souhaite seulement en changer l’emploi. Écoutez : plus que de coutume, l’horrible Vésuve a craché des fleuves ardents de sa gorge, a secoué la terre, anéanti les champs alentour et les cités voisines. Le peuple accablé s’enfuit, mais la misère opprime ceux qui ont survécu aux flammes. Que cet or serve à réparer la détresse de ces affligés. Ô Romains, c’est là le temple qu’il faut me bâtir. Annius Ô héros véritable ! 7 Publius Combien tous les éloges et les récompenses te sont inférieurs ! Titus Il suffit, ô mes fidèles. Que Sextus s’avance, qu’Annius ne parte pas, que tous les autres s’en aillent. Tous se retirent de l’atrium sauf Titus, Sextus et Annius. Chœur Ô dieux gardiens du sort de Rome, préservez en Titus, le fort, le juste, l’honneur de notre temps. Annius Sextus, parle en ma faveur à présent. Sextus Seigneur, comment as-tu pu, ta belle reine... Titus Sextus, mon ami, quel instant terrible ! Je ne croyais pas... C’est assez, j’ai vaincu. Elle est partie. Que désormais Rome cesse de me soupçonner de voir en elle mon épouse. Elle veut l’une de ses filles sur mon trône et il faut la satisfaire. Puisque le choix de mes liens par l’amour a été vain, je veux que cela en revienne au moins à l’amitié. Sextus, qu’à ton sang s’unisse celui des César. Aujourd’hui, je prendrai ta sœur pour épouse. Sextus Servilia ! Titus Précisément. Annius Malheureux que je suis ! Sextus Ciel ! Annius est perdu. 8 Titus As-tu entendu ? Que dis-tu ? Tu ne réponds pas ? Sextus Et qui pourrait te répondre, seigneur ? Ta bonté m’accable tant que je n’ai pas le cœur… Je voudrais… Annius Sextus souffre pour moi. Titus Explique-toi. Je ferai tout pour t’avantager. Sextus Servons notre ami. Annius Courage, Annius ! Sextus Titus ! Annius Auguste, je connais le cœur de Sextus. Nous sommes liés par une tendre amitié depuis l’enfance. Se jugeant avec modestie, il craint que ce don ne soit démesuré et ne s’aperçoit pas que le bienfait d’un César nivelle tout écart. Mais ce n’est pas à lui que tu dois demander conseil. Comment pourrais-tu choisir une épouse plus digne de l’empire et de toi-même ? Vertu, beauté, Servilia possède tout. J’ai su en voyant son visage qu’elle était née pour régner. C’est là, l’accomplissement de mon uploads/Litterature/ la-clemenza-di-tito-livret-prod-2018.pdf
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- Publié le Apv 22, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
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