1 UNIVERSITÉSORBONNE NOUVELLE –PARIS 3UFR Littérature, Linguistique, Didactique

1 UNIVERSITÉSORBONNE NOUVELLE –PARIS 3UFR Littérature, Linguistique, DidactiqueDépartement LLFLMASTER2RECHERCHE–LETTRESMODERNESParcours Discours, Culture, MédiasAnnée universitaire 2015-2016La poétique des ruines dans Ravagede René Barjavel Mémoire de recherche préparé parVincent BILEMSous la direction d’Alain SCHAFFNERDirecteur de l’UMR THALIMJury composé de Messieurs Alain Schaffner et Michel BernardMail: vincent.bilem@sorbonne-nouvelle.fr©Tous droits réservés 2 César Domela, Energie, 1928-1981, photomontage, épreuve argentique postérieure, Paris, Collection Louise et David Fleiss. 3 Déclaration sur l’honneur Je, soussigné Vincent Bilem, déclare avoir rédigé ce travail sans aides extérieures ni sources autres que celles qui sont citées. Toutes les utilisations de textes préexistants, publiés ou non, y compris en version électronique, sont signalées comme telles. Ce travail n’a été soumis à aucun autre jury d’examen sous une forme identique ou similaire, que ce soit en France ou à l’étranger, à l’Université ou dans une autre institution, par moi-même ou par autrui. Le 4 septembre 2016 4 « La science-fiction vaincra ! » Raymond Queneau (1953) « Mes deux pieds sont tenonnés et mortaisés dans le granit Je ris de ce que vous appelez dissolution Et je connais l’amplitude du temps » Walt Whitman, “Song of Myself”, Leaves of Grass (1855) 5 Sommaire Remerciements ...................................................................................................................................7 Introduction ......................................................................................................................................8 I. La « Cité radieuse » en ruines, un paradoxe ..................................................................17 1. Une ambiance eschatologique au service de la poétique des ruines ............................................17 a. Analyse par les termes .............................................................................................................17 b. Une société déjà morte : ruines en creux et en puissance ........................................................22 2. Ravage, dystopie ou contre-utopie ? Un roman au confluent de l’accélérationnisme et du futurisme ......................................................................................................................................27 a. Tentative de définition du genre de Ravage. Un roman de science-fiction futuriste ?.............27 b. Un roman contre l’accélérationnisme ? ....................................................................................33 3. Les ruines de la ville et les ruines provinciales, une disjonction qui cristallise un rapport aux ruines ambivalent .........................................................................................................................39 a. La conurbation et la province : une certaine idée des rapports sociaux ...................................39 b. De la « Cité radieuse » à l’Arcadie : le chemin des ruines ......................................................46 II. Structures et superstructures : une disruption nécessaire ? Les ruines à l’aune des classes sociales ...................................................................................................................50 1. Science, religion et magie, quels recours pour la société en ruines ? ..........................................50 a. Science et religion, les deux faces d’une même pièce ...........................................................50 b. Une odyssée entre intertextualité biblique et rabelaisienne ...................................................56 2. Gouvernement et organisation de la société : quel substrat idéologique ? ...................................61 a. Un système politique réactionnaire .......................................................................................61 b. Le système politique mis en place par François ....................................................................67 3. L’image de l’art, de l’artiste et de l’acte artistique dans la société pré-apocalyptique et post- apocalyptique ...............................................................................................................................73 a. L’Art dans la Ville radieuse ...................................................................................................73 b. L’art dans la société post-apocalyptique ................................................................................79 III. Temps et espace, les ruines chronotopes, matière et fondation du temps ....................84 1. Structure temporelle, durée et histoire .........................................................................................84 a. Quelle vision du temps propose Ravage ? .................................................................................84 b. La référence temporelle chez Barjavel, une analyse pragmatique ............................................89 2. Corps et espace : quels rapports entretiennent les ruines du paysage littéraire avec le morcellement et la pourriture des corps ? ....................................................................................93 a. Un espace mental .....................................................................................................................93 b. Le corps dans l’espace .............................................................................................................98 6 Conclusion ....................................................................................................................................101 Bibliographie .................................................................................................................................104 Annexes .........................................................................................................................................115 7 Remerciements Je tiens à remercier mon directeur de recherche, monsieur Alain Schaffner, pour son aide précieuse, pour sa patience, pour ses conseils tant bibliographiques que techniques. Mes remerciements vont également à l’endroit de Julia Abadié, pour son aide salutaire et ses conseils avisés. 8 Introduction Les massacres perpétrés par Daesh (organisation « Etat Islamique ») ont paradoxalement réactivé l’attrait pour les ruines en Occident. La prise de Palmyre, la décapitation de son directeur des Antiquités, et enfin l’entreprise de destruction des ruines du site archéologique sont autant d’éléments qui ont remis au cœur de l’actualité l’archéologie et les ruines. Dominique Fernandez et Ferrante Ferranti ont publié à la suite de ces tragiques événements Adieu, Palmyre (2016), carnet de voyage alliant réflexions sur les ruines et photographies du site de Palmyre précédant leur re-destruction. Sans rapport direct avec ces événements, a priori, nombre d’ouvrages ont été publiés sur les ruines ces dernières années, notamment dans le domaine des arts plastiques. Les récentes expositions Hubert Robert et Anselm Kiefer (respectivement au Louvre et au Centre Pompidou1), ou encore le dernier ouvrage de Michel Butor2, ont d’ailleurs permis de réactualiser l’appareil critique de ce topos littéraire et pictural. Il faut le reconnaître, les ruines sont plus l’apanage du champ des arts plastiques, tandis que le champ littéraire est resté quelque peu à l’écart3. Dans un ouvrage récent, Miguel Engaña et Olivier Schefer considèrent qu’il s’agit d’un « sujet à la mode4 ». Nous ne nous plaindrons cependant pas de ce regain d’intérêt pour un sujet si topique5, et pourtant si souvent revitalisé. C’est donc dans ce contexte propice aux considérations ruinistes que notre travail vient apporter un regard tourné vers la science-fiction. La ruine, « objet fantasmatique d’une esthétique voyeuriste6 », topos éculé, a tout pour faire bon ménage avec la science-fiction, « sous-genre » littéraire cantonné à la littérature jeunesse. Le motif de la ruine future, la ruine qui va advenir, se trouve déjà exposé en creux dans un papyrus de la XIXe dynastie égyptienne (XIIIe siècle de notre ère). Les écrivains y sont dépeints comme des « devins du futur » : « Ces écrivains, hommes de savoir, / Qui remontent 1 « Anselm Kiefer », Centre Pompidou (16 décembre 2015 - 18 avril 2016), commissaire d’exposition : Mnam / Cci, Jean-Michel Bouhours. « Hubert Robert, un peintre visionnaire », Musée du Louvre (9 mars 2016 - 30 mai 2016), commissaire d’exposition : Guillaume Faroult. 2 Michel Butor, Ruines d’avenir, Actes Sud / Ville d’Angers, 2016. 3 Le dernier ouvrage en date analysant les ruines strictement littéraires est La Poétique des ruines en France de Roland Mortier, paru en 1975. 4 Miguel Engaña et Olivier Schefer (dir.), Esthétique des ruines, poïétique de la destruction, Presses Universitaires de Rennes, 2015, p. 11. 5 L’on se souviendra de la manière dont les ruines sont moquées par Raymond Queneau au début des Fleurs bleues : « Des restes du passé traînent encore çà et là, en vrac » (Gallimard, Folio, 1992, p. 9). 6 Ibid., p. 11. 9 aux temps postérieurs à l’arrivée des dieux / Ces vrais devins du futur […]7 ». Ainsi, les écrivains de science-fiction se placent dans la lignée de ces écrivains de l’Egypte antique. La science-fiction est assurément l’un des genres littéraires les moins considérés par la critique. Reléguée au rang de paralittérature par une certaine doxa, la science-fiction peine à s’imposer comme canon littéraire. Nul doute que des chercheurs comme Simon Bréan, Valérie Stienon et Irène Langlet ont contribué à redorer le blason de cette « sous-littérature ». Les écritures de la marge (roman policier, bande dessinée, fantasy), souvent rangées dans la catégorie de littérature jeunesse, pâtissent elles aussi de cette même dépréciation de la part du public et du monde universitaire. Malgré quelques tentatives de réhabilitation, la critique finit toujours par observer une défiance vis-à-vis de la SF. Ainsi, dans son ouvrage Penser avec la science-fiction, Jameson porte un jugement contradictoire : A mon sens, ce serait une erreur que de faire l’ « apologie » de la SF en la rattachant à des valeurs littéraires « élevées » - autrement dit, d’essayer de récupérer un texte majeur en lui accordant un statut exceptionnel, un peu comme certains critiques littéraires ont voulu récupérer Hammett ou Chandler en les plaçant, par exemple, dans la lignée de Dostoïevski ou de Faulkner. La SF est un sous-genre qui possède sa propre histoire formelle […]8. S’il est vrai que tous les textes de « SF9 » ne se valent pas, et que l’on y trouve des « pulps » (romans commerciaux de qualité moindre), on y trouve également des chefs-d’œuvre qu’il convient, sous un certain angle, de comparer à la littérature canonique. Ainsi, les « cycles » d’Asimov peuvent s’apparenter à la Comédie humaine de Balzac10, dans le sens où il s’agit d’une œuvre totale, ayant pour projet de faire l’inventaire exhaustif de toutes les scories humaines. Dans ces nombreux ouvrages canoniques, nombre d’entre eux s’intéressent à la chute des civilisations et aux ruines en tant que motif littéraire. 7 Papyrus Chester Beatty IV, 2, 5-3, 11 (British Museum), cité par Assmann, Jan, Stein und Zeit ; Mensch und Gesellschaft im alten Ägypten. Munich : W. Fink 1991, p. 173, cité et traduit par Alain Schnapp, « Empreintes, moulages, traces : d’Orient en Occident », In Situ – Revue des patrimoines, consulté [en ligne] le 24/04/16, URL : <https://insitu.revues.org/12409#ftn4> 8 Frederic Jameson, Penser avec la science-fiction, trad. de l’anglais par Nicolas Vieillescazes, Max Milo, 2008 (2005), p. 11. 9 Il est d’ailleurs intéressant de noter l’usage du terme « SF » pour désigner la science-fiction. Nous l’utiliserons par commodité, cependant il convient de se demander si son usage ne serait pas une marque de mépris envers le genre. Par exemple, il n’est pas d’usage d’abréger le Nouveau Roman « NR ». 10 V. à ce propos la thèse de Thomas Conrad, Poétique des cycles romanesques : de uploads/Litterature/ la-poetique-des-ruines-dans-ravage-de-barjavel.pdf

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