LA POROSITÉ AU MONDE. L’ÉCRITURE DE L’INTIME CHEZ LOUISE WARREN ET PAUL CHAMBER

LA POROSITÉ AU MONDE. L’ÉCRITURE DE L’INTIME CHEZ LOUISE WARREN ET PAUL CHAMBERLAND NICOLETTA DOLCE La porosité au monde L’écriture de l’intime chez Louise Warren et Paul Chamberland ÉDITIONS NOTA BENE Les Éditions Nota bene remercient le Conseil des Arts du Canada et la SODEC pour leur soutien financier. Nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre du Canada pour nos activités d’édition. L’auteure tient à remercier les fonds FCAR et FQRSC pour le soutien accordé lors de la rédaction de cet ouvrage. © Éditions Nota bene, 2012 ISBN : 978-2-89518-404-1 À la mémoire de Ferdinando Pullella Où est l’homme ? Qu’advient-il de lui quand il se perd dans la nuit ? Celle d’un monde d’une telle cruauté que même le désespoir finit par ne plus avoir de sens, un monde où il n’y a plus rien. Anne SIZAIRE, Primo Levi. L’humanité après Auschwitz. LISTE DES ABRÉVIATIONS ABRÉVIATIONS DES TITRES DES ŒUVRES DE LOUISE WARREN AG L’amant gris, Montréal, Triptyque, 1984. MJS Madeleine de janvier à septembre, Montréal, Triptyque, 1985. EL Écrire la lumière, Montréal, Triptyque, 1986. CDFP Comme deux femmes peintres, Montréal, La Nouvelle Barre du jour, 1987. NP Notes et paysages, Montréal, Éditions du Remue-ménage, 1990. TI Terra incognita, Montréal, Éditions du Remue-ménage, 1991. LM Le lièvre de mars, Montréal, l’Hexagone, 1994. NQS Noyée quelques secondes, Montréal, l’Hexagone, 1997. SR Suite pour une robe, Montréal, l’Hexagone, 1999. II Interroger l’intensité, Laval, Trois, 1999. LAT La lumière, l’arbre, le trait, Montréal, l’Hexagone, 2001. BD Bleu de Delft. Archives de solitude, Montréal, Trait d’union, coll. « Spirale », 2001. PB La pratique du bleu, Montréal, l’Hexagone, 2002. SO Soleil comme un oracle, Montréal, l’Hexagone, 2003. 9 ABRÉVIATIONS DES TITRES DES ŒUVRES DE PAUL CHAMBERLAND TQ, AH, I et AP Terre Québec [1964] suivi de L’afficheur hurle [1965] de L’inavouable [1968] et de Autres poèmes [1961-1964], Montréal, Typo, coll. « Poésie », 2003. EPN Éclats de la pierre noire d’où rejaillit ma vie, Montréal, Danielle Laliberté, 1972. DDN Demain les dieux naîtront, Montréal, l’Hexagone, 1974. PS Le prince de Sexamour, Montréal, l’Hexagone, 1976. ESEP Extrême survivance, extrême poésie, Montréal, Parti pris, 1978. ED L’enfant doré, Montréal, l’Hexagone, 1980. TS Terre souveraine, Montréal, l’Hexagone, 1980. EA Émergence de l’adultenfant, Montréal, Jean-Basile, 1981. CP et FAT Le courage de la poésie suivi de Fragments d’art total, Les Herbes rouges, nos 90-91 (avril), 1981. AI et M Aléatoire instantané suivi de Midsummer 82, Trois-Rivières, Les Écrits des Forges, coll. « Radar », 1983. RM Le recommencement du monde. Méditations sur le processus apocalyptique, Longueuil, Le Préambule, 1983. CC Compagnons chercheurs, Longueuil, Le Préambule, 1984. IG L’inceste et le génocide. Ouverture pour un livre de morale, Longueuil, Le Préambule, coll. « Le sens », 1985. MOA Marcher dans Outremont ou ailleurs, Montréal, VLB éditeur, 1987. PI Phœnix intégral, Trois-Rivières/Pantin (France), Les Écrits des Forges/Le Castor astral, 1988. G1 Le multiple événement terrestre. Géogrammes I, Montréal, l’Hexagone, coll. « Itinéraires », 1990. LM Un livre de morale. Essais sur le nihilisme contemporain, Montréal, l’Hexagone, coll. « Itinéraires », 1990. 10 LA POROSITÉ AU MONDE G2 L’assaut contre les vivants. Géogrammes II, Montréal, l’Hexagone, coll. « Itinéraires », 1994. TN Témoin nomade, Montréal, l’Hexagone, coll. « Itinéraires/ carnets », 1995. DPC Dans la proximité des choses, Montréal, l’Hexagone, coll. « Poésie », 1996. G3 Le froid coupant du dehors. Géogrammes III, Montréal, l’Hexagone, coll. « Itinéraires », 1997. IFM Intime faiblesse des mortels, Saint-Hippolyte, Le Noroît, 1999. NB En nouvelle barbarie, Montréal, l’Hexagone, 1999. ASAT Au seuil d’une autre terre, Montréal, Le Noroît, 2003. PD Une politique de la douleur. Pour résister à notre anéantis- sement, Montréal, VLB éditeur, coll. « Le soi et l’autre », 2004. LISTE DES ABRÉVIATIONS REMERCIEMENTS Je tiens à remercier Louise Dupré et Pierre Nepveu. Louise a la rare vertu de savoir allier la rigueur à la douceur, la passion pour la littérature à la passion pour la vie. Pierre m’a toujours écoutée et soutenue. La grande cohérence et la lucidité de leur pensée m’ont constamment guidée et inspirée. Je tiens également à remercier le Centre de recherche interuniversitaire sur la littérature et la culture québécoises de l’Université de Montréal pour son appui ; il mérite à cet égard une mention spéciale. Je suis très reconnaissante à ma famille, à Bruno Garibal, pour de multiples raisons, ainsi qu’à Élisabeth Nardout-Lafarge et à Ginette Michaud. AVANT-PROPOS L’écrivain italien, Erri De Luca, ce tisseur d’affinités, cherche avidement, par son écriture aventureuse et caressante, « [à] in- venter une intimité avec le monde des autres… [à] entrouvrir un passage, en espérant que quelqu’un, en le parcourant, le rende achevé » (Pressnitzer, 2007). Ses mots, nullement isolés, évo- quent un discours présent, depuis les années 1980, dans l’uni- vers culturel occidental. À ce propos, Manon Brunet fait le constat suivant : […] l’intérêt actuel pour les discours et pratiques de l’intime n’étonne guère. Les nombreuses biographies d’écrivains ou de stars qui inondent le marché du livre, un retour marqué aux thèmes romantiques tant au cinéma, dans la chanson que dans la décoration intérieure, le recours à la psychanalyse comme mode d’introspection intérieure que le théâtre des Plaques tectoniques de Robert Lepage récupère avantageusement pour démontrer la permanence de l’interrogation identitaire, le retour aux valeurs familiales « sûres », comme le mariage et les enfants, associés à l’image politically correct que veut se don- ner une jeunesse qui vieillit trop vite, une publicité visant ostensiblement un ego narcissique : tous ces discours et prati- ques de l’intime sont très représentatifs de notre imaginaire actuel (1993 : 9-10). Sur le plan strictement littéraire, des écrivains aussi diffé- rents que Geneviève Amyot, Jacques Brault, Paul Chamberland, Denise Desautels, Hélène Dorion, Rachel Leclerc, Paul Chanel Malenfant, Marie Uguay et Louise Warren ne représentent 15 qu’une petite partie des auteurs que la critique contemporaine place sous la bannière de l’intime. Comment ne pas entendre dans les mots cités de De Luca l’écho d’une autre voix, celle de Warren, qui dans son essai Objets du monde affirme : « L’artiste est celui qui ouvre » (2005 : 75) ? De toute évidence, l’écriture de cet auteur s’apparente à celle de Warren et de Chamberland, notamment sur le plan de l’intime. Dans son livre Non ora, non qui, De Luca écrit : Le destin de chacun dépend beaucoup d’une question, d’une requête qu’un jour quelqu’un, une personne aimée ou un in- connu, lui adresse : tout d’un coup, ce chacun se rend compte qu’il attendait cette question depuis longtemps, aussi banale soit-elle, elle résonne en lui comme un appel. Il sait qu’il es- saiera d’y répondre pendant toute sa vie (1992 : 60. Je traduis). Un jour, quelqu’un m’a posé une question qui résonne encore en moi. À vrai dire, je ne sais pas si elle perdurera ou si elle s’af- faiblira au fil des années. Disons, pour le moment, qu’une telle question continue de résister, envers et contre tous, aux détrac- teurs de l’humanisme et aux partisans de la production à la chaîne de la littérature. Un jour, on m’a demandé : Qu’est-ce que l’intime et qui est l’intimiste ? Dans les faits, l’intimiste est souvent vu comme un individu retranché dans sa bulle protectrice, emmuré dans sa condition existentielle, en proie à une affectivité exacerbée et à un senti- mentalisme larmoyant. Cette image me paraît foncièrement réductrice, surtout si l’on tient compte tant de la résurgence de l’intime comme manifestation sociale que du renouveau de l’intimisme dans le domaine artistique. Ces deux phénomènes ont été attestés par plusieurs spécialistes qui ont signalé leur pa- rution dans le discours socioculturel et littéraire nord-américain et européen depuis le début des années 1980. Sous un angle strictement littéraire, Michel Beaulieu, dans « La poésie en 1980 » (1980 : 8), annonce la présence, dans la poésie québécoise, de divers signes avant-coureurs permettant de prévoir le retour du 16 LA POROSITÉ AU MONDE lyrisme, du « je » et de la subjectivité. Dans cette mouvance, l’intimisme constitue le parcours emprunté par plusieurs poètes ; comme le remarque François Dumont ; il semble être « la ten- dance dans la poésie québécoise actuelle la plus nettement soulignée par les critiques » (1999 : 95). La parution d’une mul- titude de textes consacrés à ce sujet et l’intérêt que l’intime et l’intimisme suscitent dans plusieurs domaines – littéraire, histo- rique, psychanalytique, sociologique – confirment cette thèse. Deux questions majeures découlent de cette observation : peut-on réduire l’intimisme à une formule aussi étriquée ? Et l’intime renferme-t-il, dans son étymologie, une définition si contraignante ou renvoie-t-il à une notion plus complexe et plus articulée, qui a subi des variations et des ajustements au fil du temps ? Sollicitée par un tel questionnement, j’ai commencé à consulter les ouvrages traitant le sujet. Au fur et à mesure que mes lectures s’accumulaient, je me rendais compte que les études demeuraient souvent très parcellaires. Précisons qu’ici je n’utilise pas l’adjectif parcellaires avec une connotation néga- tive ; ce que j’entends par cela, c’est que chaque uploads/Litterature/ la-porosite-au-monde-l-x27-ecriture-de-l-x27-intime-chez-louise-warren-et-paul-chamberland.pdf

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