Le chronotope d’un Barrage contre le Pacifique de Marguerite Duras Résumé Cet a
Le chronotope d’un Barrage contre le Pacifique de Marguerite Duras Résumé Cet article porte sur le chronotope présent dans le roman « Un Barrage contre le Pacifique » (1950) de Marguerite Duras. Il s’agit d’analyser la corrélation existente entre le temps et l’espace dans roman de l’écrivaine franco-vietnamienne du XX ème siècle. Mots clés : Roman, chronotope, colonie, espace, temps, écriture durasienne Resumen Este artículo trata sobre el cronotopo presente en Un Barrage contre le Pacifique (1950) de Marguerite Duras. Se busca analizar la correlación existente entre el tiempo y el espacio en esta novela de esta escritora franco-vietnamita del siglo XX. Palabras claves: novela, cronotopo, colonia, espacio, tiempo, escritura durasiana Introduction Un Barrage contre le Pacifique (1950) s’agit du troisième roman de Marguerite Duras, et il a été écrit sous commande : la romancière avoue dans Les Parleuses (1974) que les éditeurs de Gallimard lui ont dit : « Il faut que ce soit harmonieux. » (Duras et Porte, 1977 :139). Ce roman est son premier succès et déjà le premier de ceux qui établiront sa réputation de romancière moderne. Lors de la parution d’Un Barrage contre le Pacifique (1950), au printemps 1950, deux événements historiques ont eu lieu en France, la Guerre d’Indochine et la séparation de certains intellectuels du Parti Communiste Français, faits historiques auxquels Marguerite Duras ne reste pas indifférente. En ce qui concerne la Guerre d’Indochine, depuis 1946, la société française soutient contre ce territoire, un conflit armé qui se déroule sans succès. L’opinion publique est divisée, les uns pensent encore que l’Indochine doit rester une colonie de la France. Les autres, surtout les intellectuels, songent à la libération du peuple Indochinois. Le climat politique et social est complètement instable, c’est aussi l’époque des démissions des membres du Parti Communiste Français dont Marguerite Duras faisait partie. Les intellectuels ayant adhéré à celui-ci commencent à douter des fondements de sa lutte sociale. L’écart intellectuel pris par Marguerite Duras lui permet de s’investir davantage dans l’écriture. En outre, la critique littéraire de l’époque reçoit Un Barrage contre le Pacifique (1950) comme : « […] un document direct et, selon toute apparence, véridique, sur un aspect peu connu de la vie coloniale. » (Ligot, 1992 : 179). Il faut se souvenir qu’au moment où se situe l’intrigue de l’œuvre (1930), c’est l’apogée du système colonial français dans les territoires indochinois, contrairement à ce qui se passe en 1950, lors de la parution de l’œuvre, puisque l’empire français est menacé par les luttes d’indépendance de l’Indochine. Les spécialistes en littérature trouvent ce roman troublant, puisqu’il met en cause la vie des colons en Indochine, une existence bien différente de l’idéal colonisateur : L’Indochine traditionnelle, pour le romancier français, c’est celle des officiers de marine de Loti, des défricheurs d’empire ou des fumeurs d’opium de Farrère, de la route mandarine et de la voie royale […] Dès le début de ce livre indochinois, nous découvrons un monde beaucoup plus inquiétant […] On nous a tellement habitué à l’histoire du colon laborieux qui s’installe avec son courage pour seule richesse et réussit à faire pousser des moissons innombrables, que nous avons oublié tant d’échecs à côté d’une réussite. Les colons eux-mêmes affirment avec orgueil qu’un blanc ne débarque pas en Indochine sans avoir son billet de retour, s’il échoue. (Ligot, 1992 : 183-184) Un autre critique littéraire des années cinquante, Jean Piel affirme que : « Par-delà le cadre où l’action est située, Marguerite Duras touche à l’universel, à l’éternel. » (Ligot, 1992 : 182) puisqu’elle écrit sur l’injustice sociale et n’importe quelle personne peut se sentir identifiée. Il est intéressant de dire que cette œuvre littéraire est méconnue par le grand public Vietnamien. C’est jusqu’en 1997, grâce à une traduction faite dans cette langue qu’elle leur parvient. Avant cette année, Un Barrage contre le Pacifique (1950) n’est connu que par un petit groupe d’intellectuels, de professeurs de littérature et d’étudiants de langue française. L’écart lors de sa parution en Indochine, entre 1950 et 1997, est évident, reste important et il est considéré peu actuel, les faits qu’il raconte n’attirent plus nécessairement l’attention des possibles lecteurs vietnamiens. Notre lecture d’Un Barrage contre le Pacifique (1950) se fait des décennies après la décolonisation, ceci implique le risque de ne pas apercevoir, dès le début du roman, son caractère historique et l’intention de l’écrivain de montrer au lecteur quelques aspects du système colonial. En somme, nous remarquons que la parution d’Un Barrage contre le Pacifique (1950) se produit dans un climat politique et social très confus : il y a la Guerre qui oppose les colonisateurs et les colonisés et il y a aussi le désengagement de la romancière du Parti Communiste Français. Tous ces événements personnels et sociaux, mélangés aux souvenirs de l’écrivain en Indochine rendent ce roman très riche du point de vue de son contenu. Ce livre aborde l’un des sujets incontournables dans l’œuvre durasienne : nous y trouvons les horreurs de la vie coloniale, l’injustice subie par la mère et les expériences amoureuses de Suzanne, la protagoniste. Nous sommes en présence d’un cadre espace-temporel récurrent dans l’écriture durasienne que nous analyserons comme suit. 1. Le concept de chronotope Ce terme a été emprunté aux mathématiques et il suggère la connexion existant entre les relations temporelles et spatiales assimilées de façon artistique dans la littérature. Dans l’Esthétique et théorie du roman (1978) Mikhaïl Bakhtine mentionne que terme peut être compris comme « [...] la corrélation essentielle des rapports spatio-temporels, telle qu’elle a été assimilée par la littérature » (Bakhtine, 1978 : 235). C’est ainsi que le chronotope est le cadre où se passent les événements narratifs contenus dans un roman. Ainsi, ce concept « [...] est une catégorie de forme et de contenu basée sur la solidarité du temps et de l’espace dans le monde réel comme dans la fiction romanesque. » (Gardes-Tamine, 1993 : 35). De ce fait, nous affirmons alors qu’il n’y a pas de temps sans espace et il n’y a pas non plus d’espace sans temps. Nous entendrons ce terme comme une catégorie littéraire de la forme et du contenu. Le chronotope est constitué de motifs qui montrent au lecteur les lieux et les moments concrets qui composent ce monde fictif. Bakhtine ajoute que : [...] le temps se condense, devient compact, visible pour l’art, tandis que l’espace s’intensifie, s’engouffre dans le mouvement du temps, du sujet, de l’histoire. Les indices du temps se découvrent dans l’espace, celui-ci est perçu et mesuré d’après le temps. Cette intersection des séries et cette fusion des indices caractérisent précisément, le chronotope de l’art littéraire. (1978 : 235). Le chronotope est constitué des motifs qui montrent au lecteur les lieux et les moments concrets qui composent ce monde fictif. De cette manière, nous pouvons dire qu’au sein de toute œuvre littéraire il y un chronotope délimité et, à l’intérieur de celui-ci, il peut aussi en avoir d’autres comme ceux qui suivent : 2. Le temps D’une part, dès les premières pages de ce roman nous découvrons un cadre bien différent, voire exotique : l’Indochine des années 20 et 30, notamment les territoires du Vietnam et du Cambodge. En fait, la date du déroulement du roman n’est pas précisée. Il est question de la dégager par différentes pistes données par l’écrivaine comme par exemple, la limousine « […] Maurice Léon Bollée. » (Duras, 1950 :44) « C’est un modèle spécial, commandé spécialement à Paris. Celle-ci m’a coûté cinquante mille francs. » (Duras, 1950 : 44-45) ou encore « La B. 12 […] » (Duras, 1950 : 45). De même, le Chinois s’habille élégamment, la description de ses habits correspond à la mode de la fin des années vingt et le début des années trente : « C’était un homme […] habillé d’un costume de tussor grège. Sur la table il avait posé un feutre du même grège […] » (Duras, 1950 : 42). Ensuite, le phonographe et la musique notamment la chanson Ramona, nous donne des indices de l’époque à laquelle fait référence la romancière : J’ai choisi les nouveautés de Paris, dit timidement M. Jo […] Il prit ensuite un disque, le mit sur le plateau recouvert de drap vert et posa l’aiguilles sur le disque. Une voix s’éleva, d’abord insolite, indiscrète presque impudique au milieu de la réserve silencieuse de tous. Un soir à Singapour, Un soir, D’amour Un soir, sous les palmiers, Un soir, D’été. (Duras, 1950 : 84) D’autre part, dans ce roman, le narrateur présente dès le début un contraste entre la France et la colonie. La dénonciation du colonialisme faite dans ce roman par la femme de lettres nous fait penser à la réalité vécue par les indochinois pendant l’occupation française. S’il est bien vrai qu’il n’y a pas de précisions concernant les dates, c’est à partir des détails précédents parmi d’autres, que nous pouvons en déduire. Le narrateur fait référence à travers de la description de comment les parents du protagoniste s’y sont rendus « On était alors en 1899 » (Duras, 1950 : uploads/Litterature/ le-chronotope-d-x27-un-barrage-contre-le-pacifique-de-marguerite-duras21323.pdf
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- Publié le Jui 19, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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