Chapitre 1 Suites r´ eelles et complexes Dans ce chapitre, K d´ esigne le corps

Chapitre 1 Suites r´ eelles et complexes Dans ce chapitre, K d´ esigne le corps R des nombres r´ eels, ou le corps C des nombres complexes. Pour x ∈K, nous noterons |x| le module de x (´ egal ` a la valeur absolue de x dans le cas r´ eel). Nous appellerons distance entre deux ´ el´ ements x et y de K le r´ eel |x −y|. 1.1 G´ en´ eralit´ es D´ efinition 1.1.1. (1) Une suite ` a valeurs dans K est une famille d’´ el´ ements de K in- dex´ ee par l’ensemble N des entiers naturels. La donn´ ee d’une suite (un)n∈N ´ equivaut ` a la donn´ ee de l’application N − →K, n 7− →un (2) Une sous-suite (ou suite extraite) d’une suite (un)n∈N est une suite de la forme (unk)k∈N o` u les nk sont des entiers tels que n0 < n1 < n2 < · · · Si (un)n∈N est donn´ ee par l’application θ : N →K, alors (unk)k∈N est donn´ ee par l’application θ ◦ϕ, o` u ϕ est d´ efinie par ϕ(k) = nk. Une suite peut ˆ etre d´ efinie de plusieurs fa¸ cons : – Par une formule explicite : un = 2nn2 – Par une r´ ecurrence : u0 = 1 et, pour tout n ∈N, un+1 = u2 n + 1 – Abstraitement : un est le n-i` eme nombre premier. Il arrive que les premiers termes d’une suite ne soient pas d´ efinis. Par exemple, dans la suite un = √ n −2 2 les termes u0 et u1 ne sont pas d´ efinis. On notera (un)n≥2 cette suite. ´ Etant donn´ ee une suite (un)n∈N, on a deux suites extraites importantes : la suite (u2k)k∈N des termes pairs, et la suite (u2k+1)k∈N des termes impairs. Exemple. La suite de Syracuse d’un nombre entier N est d´ efinie par r´ ecurrence, de la mani` ere suivante : u0 = N et pour tout entier n ≥0 : un+1 = ( un 2 si un est pair 3un + 1 si un est impair Lothar Collatz a conjectur´ e (en 1937) que, pour tout N > 0, il existe un indice n tel que un = 1. Une fois que le nombre 1 est atteint, la suite des valeurs 1, 4, 2, 1, 4, 2 se r´ ep` ete ind´ efiniment. La conjecture reste ouverte aujourd’hui (2011). Elle a ´ et´ e v´ erifi´ ee par ordinateur pour N < 262. 1.2 Convergence d’une suite r´ eelle ou complexe La d´ efinition moderne de la limite, encore utilis´ ee aujourd’hui, est donn´ ee ind´ epen- damment par Bolzano en 1816, et par Cauchy en 1821 dans son Cours d’analyse de l’´ Ecole royale polytechnique. D´ efinition 1.2.1. On dit qu’une suite (un)n∈N d’´ el´ ements de K converge vers ℓ∈K si : pour tout ε > 0, il existe N ∈N tel que, pour tout n ≥N, on ait |un −ℓ| ≤ε ou, avec des quantificateurs, ∀ε > 0, ∃N ∈N, ∀n ≥N, |un −ℓ| ≤ε On dit qu’une suite diverge si elle ne converge pas. Ceci se traduit de la fa¸ con suivante : pour tout ε > 0 (arbitrairement petit), il existe un rang (l’entier N) ` a partir duquel tous les termes de la suite sont ` a une distance inf´ erieure ` a ε de ℓ. Insistons sur le fait que N d´ epend de ε ! Exemples. a) Montrons que la suite ( 1 n)n≥1 converge vers 0. Soit ε > 0, on cherche un entier N tel que, pour tout n ≥N, on ait | 1 n| ≤ε, c’est-` a-dire n ≥1 ε. On constate que, si l’on pose N = E( 1 ε) + 1, alors N ≥1 ε et donc, pour tout n ≥N, on a bien n ≥1 ε. Ainsi, pour montrer que (un) converge vers ℓ` a partir de la d´ efinition, on fixe ε > 0 et on cherche ` a traduire la condition |un −ℓ| ≤ε en une condition de la forme n ≥Nε, l’entier Nε ´ etant construit au cours du raisonnement. b) Probl` eme concret : comment calculer π ? Plus pr´ ecis´ ement, comment calculer des valeurs approch´ ees de π avec une pr´ ecision arbitraire ? Comme π est irrationnel, son 3 ´ ecriture d´ ecimale n’est ni finie, ni p´ eriodique. Une m´ ethode naturelle est de construire une suite (un) dont on sait calculer les termes et qui converge vers π. Alors, par d´ efinition de la convergence, pour tout ε > 0, il existe un rang Nε ` a partir duquel un est une valeur approch´ ee de π ` a ε pr` es. Si Nε est explicite en fonction de ε, alors on sait calculer une valeur approch´ ee de π avec une pr´ ecision arbitraire. Pour exprimer le fait que (un) converge vers ℓ, nous dirons que ℓest la limite de (un) quand n tend vers +∞, et nous noterons lim n→+∞un = ℓ ou lim un = ℓ ou encore un − − − − → n→+∞ℓ Pour que cette notation ait un sens, il faut montrer qu’une suite convergente admet une unique limite ! Proposition 1.2.2. Si une suite converge, sa limite est unique. D´ emonstration. Soit (un) une suite convergeant vers deux limites ℓet ℓ′. Soit ε > 0. Alors, comme (un) converge vers ℓ ∃N1 ∈N, ∀n ≥N1, |un −ℓ| ≤ε et, comme (un) converge vers ℓ′, ∃N2 ∈N, ∀n ≥N2, |un −ℓ′| ≤ε Alors, pour n ≥Max(N1, N2), nous avons |ℓ−ℓ′| = |(ℓ−un) + (un −ℓ′)| ≤|ℓ−un| + |un −ℓ′| ≤2ε Ceci ´ etant vrai pour tout ε, on en d´ eduit que |ℓ−ℓ′| = 0, donc que ℓ= ℓ′. (Nous avons utilis´ e le fait (trivial) suivant : si un r´ eel positif est plus petit que toute quantit´ e strictement positive, alors il est nul.) Nous avons clairement les ´ equivalences : lim un = ℓ ⇐ ⇒ lim(un −ℓ) = 0 ⇐ ⇒ lim |un −ℓ| = 0 Si (un) converge, que peut-on dire des suites extraites de (un) ? Proposition 1.2.3. Toute suite extraite d’une suite convergente converge vers la mˆ eme limite. D´ emonstration. Soit (un) une suite convergente, de limite ℓ. Soit (unk) une suite extraite de (un). Comme la suite nk est une suite strictement croissante d’entiers, nous avons nk ≥k pour tout k. Soit ε > 0, alors, comme (un) converge vers ℓ, il existe N tel que, pour tout n ≥N, on ait |un−ℓ| ≤ε. Mais alors, pour tout k ≥N, nous avons nk ≥k ≥N et par cons´ equent |unk −ℓ| ≤ε, d’o` u le r´ esultat. 4 Ceci fournit des crit` eres de divergence : – si on peut extraire de (un) une suite divergente, alors (un) diverge – si on peut extraire de (un) deux suites convergeant vers des limites diff´ erentes, alors (un) diverge Par exemple, la suite un = (−1)n diverge : la suite des termes pairs converge vers 1, la suite des termes impairs converge vers −1. Remarquons aussi que la modification d’un nombre fini de termes n’a aucune incidence sur la convergence d’une suite. D´ efinition 1.2.4. On dit qu’une suite (un) est born´ ee s’il existe un r´ eel B > 0 tel que l’on ait ∀n ∈N, |un| ≤B La proposition suivante fournit un autre crit` ere de divergence. Proposition 1.2.5. Toute suite convergente est born´ ee. La r´ eciproque est fausse. D´ emonstration. Soit (un) une suite convergente, de limite ℓ. D’apr` es la d´ efinition de la limite, et en fixant ε = 1, on trouve qu’il existe un entier N1 tel que, pour tout n ≥N1, on ait |un −ℓ| ≤1 d’o` u, pour tout n ≥N1, |un| = |ℓ+ (un −ℓ)| ≤|ℓ| + 1 On en d´ eduit que, pour tout n ∈N, |un| ≤Max(|ℓ| + 1, |u0|, |u1|, . . . , |uN1−1|) ainsi la suite (un) est born´ ee. Pour voir que la r´ eciproque est fausse, il suffit de consid´ erer la suite un = (−1)n, qui est born´ ee mais divergente. 1.3 Op´ erations sur les limites Nous allons montrer que le passage ` a la limite est compatible avec les lois du corps K. Commen¸ cons par ´ enoncer un lemme. Lemme 1.3.1. Le produit d’une suite born´ ee par une suite tendant vers 0 tend vers 0. D´ emonstration. Soit (un) une suite born´ ee, alors il existe un r´ eel B > 0 tel que : ∀n ∈N, |un| ≤B 5 Soit (vn) une suite tendant vers 0, montrons que (unvn) tend vers 0. Soit ε > 0, alors en consid´ erant le r´ eel ε B il existe N ∈N tel que, pour tout n ≥N, |vn| ≤ ε B. Nous avons donc, pour tout n ≥N |unvn| ≤B|vn| ≤ε d’o` u le r´ esultat. Th´ eor` eme 1.3.2. Soient (un) et (vn) deux suites convergentes de uploads/Litterature/ mht204-chap1.pdf

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