Facebook : La culture ne s'hérite pas elle se conquiert QUE SAIS-JE ? Mythes et
Facebook : La culture ne s'hérite pas elle se conquiert QUE SAIS-JE ? Mythes et littérature FREDERIC MONNEYRON Professeur de littérature générake et comparée à l'Universié de Perpignan-Via Domitia JOËL THOMAS Professeur de littérature et civilisation latines à l'Universié de Perpignan-Via Domitia Deuxième édition mise à jour 6e mille Facebook : La culture ne s'hérite pas elle se conquiert Facebook : La culture ne s'hérite pas elle se conquiert Introduction « Le langage des hommes m’effraie. Ils disent : “Ceci est une maison, ceci est un chien”, et disant cela, ils tuent ce qu’ils nomment. » R.-M. Rilke. « à l’instant où vous parlez d’une chose, elle vous échappe. » Koan zen. e terme de « mythe », on en conviendra volontiers, a largement envahi aujourd’hui le langage quotidien. Mais, en se vulgarisant, il a perdu son sens ancien et premier pour, dans son acception la plus familière, ne plus guère désigner qu’un ensemble imprécis de propositions qui s’opposent à la réalité. Si cette vulgarisation du terme touche même, à l’occasion, les langages les plus techniques, elle accompagne et cache tout à la fois un grand intérêt scientifique pour le mythe entendu dans son sens traditionnel comme forme essentielle de la pensée L Facebook : La culture ne s'hérite pas elle se conquiert humaine. Il est devenu rare en effet que, dans les programmes universitaires de sciences humaines comme de sciences sociales et dans des disciplines aussi diverses que l’histoire des religions, l’ethnologie, l’anthropologie, la sociologie et la psychanalyse, ou encore l’histoire et la science politique, cette notion ne soit pas abordée, analysée et débattue avant d’ouvrir sur bien des applications pratiques à même de renouveler singulièrement les champs d’études considérés. Les programmes de littérature n’échappent pas non plus à la règle, et, en premier, en second ou en troisième cycle, quelle que soit l’université considérée, un cours ou un séminaire au moins est généralement consacré à l’étude d’un mythe « littéraire ». Que ce soit dans les cursus de lettres classiques (en grec ou en latin) ou de lettres modernes (en littérature française ou en littérature comparée), voire dans ceux de langues (anglais, allemand, espagnol, italien, etc.), ce genre d’études a incontestablement pris une place de plus en plus importante depuis une vingtaine d’années. Et, dans le large éventail de mythes étudiés, un certain nombre d’entre eux comme œdipe, Faust ou Don Juan sont même devenus des passages pratiquement obligés dans un cursus littéraire. Malgré ce succès et cette inflation, ce champ d’études reste relativement mal défini, et ce, tant Facebook : La culture ne s'hérite pas elle se conquiert épistémologiquement que méthodologiquement. Si les recherches menées par les sciences humaines ont permis de s’accorder avec une certaine précision sur des définitions et de mettre en place des méthodes désormais éprouvées, ce bel ensemble se lézarde dès lors qu’il s’agit d’introduire ces définitions et ces méthodes sur le terrain de la littérature. D’une part, les relations qu’entretiennent mythe et littérature et, en particulier, la notion de mythe littéraire souffrent de bien des ambiguïtés et font l’objet de prises de position variées et contrastées. D’autre part, quand bien même les désaccords ne seraient pas trop importants sur ce premier point, les options méthodologiques qui viennent ensuite sont si diverses que, le plus souvent, elles semblent devoir manquer d’assurance et de force, pour emporter réellement l’adhésion. L’enjeu est pourtant d’importance, puisqu’il s’agit, avec l’aide des mythes, de mieux lire la littérature, en dégageant ce qu’une création individuelle doit à des récits appartenant au vieux fonds intemporel d’une civilisation, mais aussi, inversement, de manifester la pérennité d’un mode de pensée mythique à travers ce qui peut apparaître comme un de ses vecteurs privilégiés et, au-delà, l’importance d’un tel mode de pensée dans toute activité socioculturelle en général. Facebook : La culture ne s'hérite pas elle se conquiert Le propos et l’ambition de cet ouvrage peuvent dès lors se présenter ainsi : tenter d’apporter quelque éclaircissement aux relations difficiles et confuses des mythes et de la littérature ; faire le bilan de plusieurs décennies de pratiques des mythes en littérature et tout à la fois apprécier les résultats obtenus ; fournir enfin, au-delà des itinéraires critiques individuels, un cadre herméneutique à la mesure de l’objet étudié avec une perspective cohérente de recherche et, en même temps, suggérer des orientations méthodologiques. C’est, par conséquent, selon une distribution qui respecte ce programme que s’organisent les cinq chapitres que l’on va lire avec pour souci majeur de donner à chaque fois au lecteur la vision la plus synthétique et la plus adéquate possible des différents points traités et des solutions proposées. Facebook : La culture ne s'hérite pas elle se conquiert Chapitre I L’invention de la mythologie et son entrée en littérature « Ces événements n’eurent lieu à aucun moment, mais existent toujours. » Saloustios, Des dieux et du monde, IV, 9. I. Le paradigme de Cadmos vant de parler des mythes littéraires, on ne peut pas faire l’économie d’une description générale du paysage mythique, pour mieux comprendre que le A Facebook : La culture ne s'hérite pas elle se conquiert mythe littéraire n’est qu’un des aspects d’une constellation mythique plus générale. Et si, d’autre part, nos exemples sont d’abord empruntés à la mythologie gréco-latine, nous nous en justifierons en évoquant la filiation évidente entre cette culture et notre culture européenne occidentale (nous évitons toutefois la notion de « racines », et nous expliquerons pourquoi), et aussi parce que les mythologues eux-mêmes se sont unanimement accordés pour reconnaître que, dans l’ensemble des discours mythologiques, le paradigme gréco-romain était particulièrement riche et complet pour une modélisation épistémologique. Pour évoquer les relations entre mythe et littérature, il est logique de se référer aux mythes qui évoquent l’invention du discours écrit, comme prélude à une entrée en littérature. Il en est un, qui n’est pas parmi les plus connus, mais qui est particulièrement remarquable à ce propos : l’histoire de Cadmos que raconte Nonnos (Dionys., I, 140 sq. ; cf. R. Calasso, Les Noces de Cadmos et Harmonie, Paris, Gallimard, coll. « Folio », 1995) – il s’agit certes d’une version tardive, mais elle n’en garde pas moins son intérêt. Cadmos était le frère d’Europe, et, lorsqu’elle fut enlevée par Zeus, il partit à leur poursuite. Enrôlé par Zeus, dans la guerre contre le serpent Typhon (symboliquement, les forces de l’ordre qui s’édifient contre la nature sauvage), il Facebook : La culture ne s'hérite pas elle se conquiert intervient au moment où Typhon a emprisonné Zeus dans une caverne et, de surcroît, lui a ôté les tendons du pied, pour l’empêcher de s’enfuir. Par ruse, Cadmos charme Typhon avec la musique de sa lyre et profite de la situation pour prétendre avoir besoin de cordes pour son instrument de musique. Typhon lui propose les tendons de Zeus… que Cadmos s’empresse de rendre à son légitime propriétaire, qui reprend le combat, et vient à bout de Typhon. En récompense, Zeus accorde à Cadmos la main de la nymphe Harmonie, et ce furent les noces de Cadmos et Harmonie, où, pour la dernière fois, hommes et dieux mangèrent à la même table. Par la suite, Cadmos devint le roi de Thèbes, et la légende nous dit qu’il apporta aux hommes l’art de forger les métaux et l’écriture. Donc Cadmos est un civilisateur, au même titre que Prométhée. Mais c’est un homme, un simple mortel, qui mérite, par sa métis (son intelligence « rusée » et adaptatrice) et son attitude héroïque, de manger à la table des dieux, et qui établit en même temps un pont entre les dieux et les hommes : il sauve Zeus lui-même d’une mort assurée, et il sort les hommes de l’ignorance et de la sauvagerie. Il crée bien un parcours médiateur et civilisateur et, comme homme, se hausse vers les dieux, en évitant l’hybris, la démesure et l’orgueil prométhéen de l’homme qui veut s’égaler aux dieux. C’était encore Facebook : La culture ne s'hérite pas elle se conquiert l’âge d’or, mais ce fut la dernière fois (avec aussi les noces de Thétis et Pélée) que les hommes et les dieux mangèrent à la même table. Nous retiendrons que c’est le même homme qui donne l’alphabet aux hommes, qui aide les dieux, et qui est aimé et récompensé par eux. D’autre part, écriture et fondation de cités (en l’occurrence, Thèbes et sa dynastie des Labdacides) sont associées. à l’origine, pas de rupture : l’alphabet est une pierre d’un édifice harmonieux qui relie hommes et dieux. II. Les trois statuts de la parole en Grèce Les choses se compliquent ensuite. Elles ont été très bien décrites par Marcel Détienne dans Les Maîtres de vérité dans la Grèce archaïque (Paris, Maspero, 1967) : lors d’un parcours anthropologique qui vérifie d’ailleurs une structure dumézilienne, la parole est d’abord oraculaire, Logos, Verbe que le prêtre commémore comme parole des Origines, de l’illud tempus, du temps mythique et fondateur irriguant le temps des hommes. Ce prêtre est en même temps investi d’une fonction royale : le roi est, indissociablement, maître de l’oracle uploads/Litterature/ mythes-et-litterature-frederic-monneyron-joel-thomas.pdf
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- Publié le Fev 16, 2022
- Catégorie Literature / Litté...
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