Le terme "précieux" Il existe dès le XIIème siècle dans son sens actuel. Dès le
Le terme "précieux" Il existe dès le XIIème siècle dans son sens actuel. Dès le XIVème, il se double d'un autre sens, et désigne certains manèges de la féminité. Le terme "précieuse" Ce terme est employé d'abord dans l'entourage de Gaston d'Orléans et de sa fille. Les précieuses sont des dames du grand monde qui, selon l'abbé de Pure, "se tirent du prix commun des autres". La "préciosité" Elle repose sur la volonté de se distinguer : 1. par la dignité des moeurs 2. par l'élégance de la tenue 3. par la pureté du langage C'est donc une aristocratie de l'esprit, qui s'appuie sur la culture (et donc implique l'effort intellectuel d'acquisition de cette culture), pour dire de la façon la plus singulière possible une réalité parfaitement banale. Elle devient un mode d'action, un sentiment, et même un état d'esprit collectif. Elle suppose nécessairement la mondanité : la conversation, jugée supérieure à l'écriture, est la principale occupation. Il faut bien comprendre que tous les compliments faits à une femme le sont pour être applaudis par un tiers (pour montrer sa culture et son esprit) : d'où la nécessité d'être en public. Pour finir cette présentation succinte, citons la définition de Somaize : Les lois des précieuses consistent en l'observance exacte des modes, en l'attache indispensable de la nouveauté, en la nécessité d'avoir un alcôviste particulier, ou du moins d'en recevoir plusieurs, en celle de tenir ruelle, ce qui peut passer pour la principale. Un phénomène européen Aux seizième et dix-septième siècles, on constate l'apparition de plusieurs mouvements similaires à la préciosité française ; notamment : 1. l'euphuisme en Angleterre 2. le marinisme en Italie 3. le gongorisme en Espagne Malgré les particularismes de chaque mouvement, et en premier lieu leurs rapports avec le clacissisme, différents de ceux de la préciosité française, il convient de ne pas négliger l'importance du phénomène précieux dans l'Europe du XVIIème. En France, des origines anciennes Le milieu de prédilection de la préciosité, celui dans lequel elle se développe le plus facilement, c'est la cour : elle y trouve le calme, l'éloignement des barbaries, et est favorisée par l'importance des femmes au sein de cette cour. La préciosité a une origine laïque et provençale : elle fleurit, aux XIIème et XIIIème siècles, dans les cours méridionales, où le roi, une fois réglées les affaires politiques, divertit son entourage. Elle se répand ensuite vers le nord du royaume, où les cours se laissent "conquérir" par ce genre de loisirs. Elle affecte de manière évidente la littérature, surtout la poésie lyrique et le roman courtois, où l'amour prend la première place et devient même la seule raison de vivre et d'agir des héros (cf. Lancelot...) Les chansons d'amour sont toutes écrites et chantées uniquement pour le plaisir de l'assemblée. Parmi celles-ci, le Roman de la rose, écrit au XIIème siècle par Guillaume de Lorris, est admis comme le roman le plus précieux de la littérature française du Moyen-Age. Multipliant les allégories, il se présente comme un code de l'amour. Dans les cours, la courtoisie et la galanterie transparaissent dans les conversations : le jeu du sentiment ouvre en effet de multiples sujets de débats (amour et mariage, causes de l'amour...). Dans ces débats, l'intelligence est requise au point qu'elle devient plus importante que le sentiment en lui-même. Ainsi, la préciosité se retrouve chez Du Bellay, Ronsard, etc..., comme à la cour des Valois. La "deuxième naissance" de la préciosité : le Sous Henri IV, peu habitué par son éducation et par sa vie militaire à des manières délicates et raffinées, la cour a des moeurs beaucoup plus grossières. Cela provoque une "frustration" de certains aristocrates et gens de lettres qui, pour échapper à cette atmosphère, commencent à se réunir régulièrement dans des salons, où il est plus facile de se XVIIème distinguer. Ceux-ci présentent un double avantage : d'abord, par leur relative exiguité par rapport à la cour, ils offrent un caractère plus intimiste ; ensuite, ils ne sont pas soumis à l'observation d'un protocole strict qui entrave la liberté du poète. Ces réunions d'écrivains... sont à l'origine de l'Académie Française : Richelieu, ayant appris leur existence, a voulu pour mieux les contrôler leur donner un caractère officiel (donc public). C'est ainsi que la prestigieuse institution a été créée, en 1634-1635. Et que Richelieu en a été le premier "protecteur". Le rôle des femmes A l'étranger, la France est vue comme le paradis des femmes. Cela pourrait paraître paradoxal quand on sait que celles-ci sont, toute leur vie, soumise à une tutelle masculine : leur père, puis leur mari (même celles qui rentrent au couvent ont un devoir d'obéissance envers la supérieure) ; exceptées lorsqu'elles sont veuves. Alors, d'où vient cette réputation ? Elle tient à ce que les femmes en France ont parfaitement le droit de tenir salon ("ruelle") (la ruelle, espace entre le mur et le lit de la chambre à coucher où recevaient ces dames, a fini par désigner la chambre entière), et d'y recevoir qui elles veulent (y compris des hommes). Ce qui leur permet de réunir autour d'elles les plus grands esprits de leur temps. Comme, c'est une banalité de le répéter, il est traditionellement admis que les femmes ont naturellement plus de délicatesse et de noblesse de manières, il était tout aussi naturel qu'elles donnassent (si si, c'est correct, j'ai vérifié !!) l'impulsion en imposant à leurs intimes la correction et le raffinement qu'ils ne demandaient qu'à développer. C'est la raison pour laquelle il se forme, autour d'elles, des cercles mondains, où l'on a le goût du beau style et où l'on veut éviter tout ce qui est commun (vêtements, parler...). L'Hôtel de Rambouillet De ces cercles, l'Hôtel de Rambouillet est l'un des plus marquants. Il n'est certes pas le premier, ni à ses débuts le plus important ; mais c'est celui qui a duré le plus longtemps, et attiré la société la plus brillante de son temps. Sur la maîtresse des lieux, Catherine de Vivonne, voir la page "Précieux et Précieuses". Elle reçoit dans sa "chambre bleue" ; ses intimes forment un cercle fermé, à dominante aristocratique. Avant 1625, il compte parmi ses membres un certain évêque de Luçon, à savoir Richelieu. D'une manière générale, ce salon est fréquenté, dans le courant de son existence, par : - le duc d'Enghien (futur "Grand Condé", le vainqueur de Rocroi en 1643) - le duc de la Rochefoucauld - le duc de Montausier - l'écrivain Voiture - Georges de Scudéry et sa soeur Madeleine - Sarasin - Godeau - Ménage - Benserade - Scarron (le (1er) mari de Mme de Maintenon) - de temps en temps, Corneille - sur la fin, mesdames de Sévigné et La Fayette - et j'en passe... Tous se donnent des noms romanesques (par exemple, Mme de Rambouillet se fait appeler par l'anagramme de son prénom, Arthénice. Autres exemples : page "précieux et précieuses"). Leurs activités consistent essentiellement en des jeux de société, des plaisanteries (Voiture subira ainsi un gage pour n'avoir pas su divertir la fille malade de mme de Rambouillet : il sera lancé en l'air à plusieurs reprises par ses "confrères"...), parfois des bals masqués ou des "cadeaux" (divertissements galants, accompagnés d'une collation, donnés sur la Seine ou sous les murs de Paris...). La conversation devient un art délicat : elle donne lieu à de grands débats psychologiques (cf. la page sur les conceptions précieuses de l'amour), où le jugement personnel importe plus que la science. Ce n'est pas le moindre des mérites des précieux que d'avoir "réhabilité" le goût personnel, par la confiance qu'elles avaient en son infaillibilité. L'hôtel prend part aux grandes controverses littéraires, prenant par exemple la défense de la conjonction de coordination "car", que l'Académie française voulait supprimer, et lance quelques modes littéraires, avant de décliner à partir de 1645 (mariage de Montausier avec Julie, la fille de Catherine de Vivonne, qui jusqu'alors secondait brillamment sa mère) - 1648 (mort de Voiture). Floraison précieuse à Paris Les années 1650 sont celles de l'âge d'or de la préciosité à Paris. On assiste à la multiplication des salons, tenus par : - madame de Sablé - madame Scarron (future mme de Maintenon, la deuxième femme de Louis XIV) - madame de Choisy - la comtesse de la Suze - mademoiselle de Montpensier (fille de Gaston d'Orléans) - mademoiselle de Sully - mademoiselle de Scudéry - etc... Le salon de Mlle de Scudéry Sur Mlle de Scudéry, voir la page "précieux et précieuses". Elle instaure les réunions régulières, le samedi, où vient qui veut. Parmi les familiers de son salon, de 1652 à 1659 environ : - Conrart - Péllisson - Ménage - Godeau - d'Aubignac - Sarasin - etc.. Eux aussi se donnent des noms romanesques (Sapho, pour mlle de Scudéry). Ils se livrent à des tournois poétiques, commentent les potins littéraires,... C'est un salon moins aristocratique (plus bourgeois) que l'hôtel de Rambouillet. Mais c'est le salon qui a donné le ton aux autres, et c'est celui dont Molière s'est le plus inspiré pour uploads/Litterature/ preciosite.pdf
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- Publié le Jul 07, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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