Références 2010 traduire Délégation générale à la langue française et aux langu

Références 2010 traduire Délégation générale à la langue française et aux langues de France Activité immémoriale, la traduction jouit d’un statut ambigu. Meilleure est la traduction, moins elle est vi- sible : sa réussite semble comme l’effacer. Par ailleurs, alors que la traduction n’apparaît que rarement comme déterminante dans les échanges – culturels, sociaux, éco- nomiques –, elle leur est en fait in- dispensable, et de plus en plus, dans l’univers globalisé qui est le nôtre. 2 traduire Activité immémoriale, la traduction jouit d’un statut ambigu. Meilleure est la traduction, moins elle est visible : sa réussite semble comme l’effacer. Par ailleurs, alors que la traduction n’appa- raît que rarement comme déterminante dans les échanges, elle leur est en fait indispensable, et de plus en plus, dans l’univers globalisé qui est le nôtre. Traduire est un métier, et même une pluralité de métiers spécialisés, qui s’appuient de plus en plus sur les technologies de traitement automatique des langues. Enjeux culturels, sociaux et économiques se conjuguent dans la traduction pour favoriser l’accès à la connaissance. En Europe, peut-être plus encore qu’ailleurs, la traduction a été le moyen de la circulation des idées, des livres, des êtres humains, comme l’illustre avec bonheur la fameuse formule d’Umberto Eco, « la langue de l’Europe, c’est la traduction ». Facteur clé du dialogue interculturel, la traduction favorise la diffusion des idées tout en per- mettant aux langues de conserver leur fonctionnalité. Dans l’Union européenne, elle joue un rôle essentiel, notamment au sein des institutions communautaires où elle contribue au débat démocratique et à l’information des citoyens. De manière souvent peu visible, ou du moins peu reconnue, la traduction occupe également une place importante dans notre vie quotidienne. En tant que consommateur, salarié, usager ou spectateur, chacun de nous reçoit des informations via la traduction. Mais, pour répondre à ces enjeux cruciaux de notre temps, la traduction doit faire l’objet d’enga- gements politiques affirmés : c’est le cas en France et en Europe, par le biais d’un certain nombre de programmes de soutien. Engagé en faveur du multilinguisme, notre pays veut renforcer la place de la traduction, pour que la langue française demeure une langue internationale, pour que les langues, expressions des cultures et porteuses des diverses visions du monde, continuent à vivre dans leur pluralité et dans la fécondité de leurs échanges. 3 La traduction, un outil du droit au français Traduction et vie quotidienne La traduction, on l’ignore souvent, joue un rôle important dans notre vie quotidienne. Elle est même au premier rang des préoccupations de la loi du 4 août 1994 relative à l’emploi de la langue française, dont la vocation est avant tout de protéger les citoyens, les consommateurs, les salariés. Cette loi vise d’abord à établir et à garantir à tous le « droit au français » : pour le travail, les loisirs, l’accès à l’information, l’éducation, les services publics, la consommation… C’est là que la traduction va jouer un rôle essentiel, afin de rendre accessible à tous les ressources culturelles et matérielles internationales. Dans une France ouverte à la mondialisation, le « droit au français » marque la volonté de maintenir la langue française comme élément d’intégration et de cohésion sociale. Le consommateur La loi a été pensée pour assurer à tous les consommateurs le respect de leurs droits, mais aussi pour leur sécurité. Le principe de la loi est simple : toute indication utile ou indispensable pour le consommateur doit être facilement accessible. Il peut s’agir par exemple d’un mode d’emploi, d’une notice, ou de manière plus générale de toute indication de désignation, présentation et publicité des biens, produits et services. La mauvaise compréhension de ce type de texte peut mettre en jeu le confort d’usage et même la sécurité des personnes… Les textes en langue étrangère sont toujours possibles, tant qu’une présentation en français est accessible. Symétriquement, la loi, outre qu’elle défend les droits et la sécurité des citoyens, fait également la promotion du plurilinguisme. Ainsi, les services publics, lorsqu’ils procèdent à la traduction dans une langue étrangère d’un texte destiné au public (annonce, inscription, site internet), doivent le faire en au moins deux langues. Qu’il s’agisse d’assurer le confort d’usage des consommateurs en traduisant en français ou de promouvoir le plurilinguisme en traduisant en langue étrangère, la traduction joue un rôle primordial dans le respect de la loi et dans la vie quotidienne des citoyens. Le salarié Aujourd’hui, le monde du travail et de l’entreprise est de plus en plus ouvert sur l’international, et l’emploi des langues étrangères tend à s’y répandre : pour communiquer avec les partenaires ou les clients, pour utiliser les outils propres à chaque profession… Selon le même principe que pour le consommateur, tout ce qui est utile pour le travailleur doit lui être accessible en français (contrats de travail, notes de service, logiciels). Le confort et la sécurité sont évidemment en jeu, mais aussi l’insertion professionnelle et l’égalité entre les salariés. Les salariés ne maîtrisant pas une langue étrangère, à un poste où cela n’est pas indispensable, ne doivent pas être pénalisés. Diverses actions en justice ont établi une jurisprudence constante en ce domaine. Jacques Toubon dresse un bilan de la loi du 4 août 1994 à la Journée mondiale de la traduction (1er décembre 2006)1 « (Le) plurilinguisme est fondé sur une concep- tion extrêmement simple qui veut qu’en matière de culture et de langue – et la langue est naturellement la base de toute culture – c’est la diversité qui vaut et l’uniformité qui nous appauvrit et nous fait perdre. Le droit du citoyen, ce qu’on appelle le « droit au français », est conçu comme une politique sociale, dans la mesure où la langue est un outil d’intégration et de cohésion sociale. […] Fon- damentalement, la loi de 1994 a été faite pour servir les consommateurs : c’est une question de droit absolu mais aussi une question de sécurité. […] Cette partie de la loi est la mieux appliquée. […] Il semble donc qu’au niveau des producteurs et des distributeurs, la loi entre vraiment dans les mœurs. L’efficacité est beaucoup moins grande en revanche dans un deuxième domaine, celui des médias audiovisuels. Le Conseil constitutionnel a annulé les dispositions qui obligeaient l’emploi de la langue français dans les rapports « pri- vés », en quelque sorte, notamment dans les sociétés privées. […] C’est pour cela que nous sommes relativement dépourvus et que nous menons une politique volontariste, mais avec une base légale assez faible. […] Troisième terrain d’application : le monde du travail […]. C’est un domaine où l’application de la loi est difficile […] du fait de la pression des entreprises qui ne voulaient pas d’une applica- tion trop contraignante. Le domaine du travail compte en revanche des associations et des syndicats très actifs. […] Le propos n’est pas de faire la police de la langue, mais de se mettre au service de ceux qui ont besoin de la langue pour consommer, pour travailler, etc., en toute sécurité. Quatrième terrain : la science, la communauté scientifique, les colloques et les communica- tions scientifiques. […] Nous sommes coincés entre trois facteurs contradictoires. […] D’une part, la nécessité d’être cohérents, c’est-à-dire d’utiliser effectivement le français dans les colloques avec des savants français. […] D’autre part, la traduction ou l’interprétation coûte très cher […]. Enfin, dans un domaine qui est, par définition, international, celui de la science et de la recherche, je dois communiquer dans la langue du plus grand nombre, celle des revues, des ouvrages les plus répandus. Je dois donc communiquer en anglais. Bref, le bilan est contrasté. […] C’est l’un des domaines où les associations agréées de défense de la langue française interviennent le plus : la loi de 1994 (leur) a donné ce pouvoir de saisir la justice, et je pense que c’est extrêmement efficace. Prétendre que nous devons revenir à un modèle unique d’hommes et de femmes serait une formidable régression de l’humanité, parce que dans le modèle unique, il y a une seule langue. Or, je crois que ce serait tout simplement refu- ser de communiquer. Nous pouvons échanger justement parce que nous avons différentes langues. Si nous avions tous la même langue, que pourrions-nous nous offrir mutuellement ? » 1 Revue Traduire, n° 212, janvier 2007 4 Le domaine scientifique Le dispositif de terminologie L’enrichissement de la langue n’est certes pas de la traduction, cependant il la touche directement : pour bien traduire, il faut disposer d’une terminologie adaptée, c’est-à-dire d’équivalents français des termes étrangers. Certes, le français est bien vivant et l’adaptation de son vocabulaire aux évolutions du monde contemporain se fait en grande partie de façon spontanée, dans la rue, mais aussi dans les laboratoires, les ateliers ou les bureaux d’étude. Mais pour éviter que, dans certains domaines, les professionnels ne soient obligés de recourir massivement à l’utilisation de termes étrangers, l’adaptation du vocabulaire doit être encouragée, facilitée et coordonnée. C’est pourquoi, depuis plus de trente ans, les pouvoirs publics incitent à la création, à la diffusion et à l’emploi de termes uploads/Litterature/ rapport-traduire-2010-delegation-des-langues.pdf

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