TAXI DRIVER Présentation Palme d’or à Cannes en 1976, Taxi Driver est l’histoir
TAXI DRIVER Présentation Palme d’or à Cannes en 1976, Taxi Driver est l’histoire d’un solitaire frustré qui se réalise dans un déchaînement meurtrier. Au-delà de son propos morbide, le récit traite de la solitude ur- baine et de l’usage de la violence. Il introduit aussi le thème de la guerre du Viêt-Nam et interpelle le sens moral du spectateur. Réalisation Né à New York en 1942 et d’origine sicilienne, Martin Scor- sese a grandi dans le quartier populaire de Little Italy. Im- prégné de lecture, de cinéma et de catholicisme, il tentera le séminaire avant d’entamer des études cinématographiques. Diplômé en 1966, il enchaîne depuis fictions et documentaires, souvent déclinés autour de ses thèmes favoris : la religion, les gangsters, New York, la musique… Synopsis Vétéran de guerre et insomniaque, Travis Bickle devient chauffeur de taxi à New York. Optant pour les heures et les quartiers difficiles, il s’expose à une société qui le dégoûte. Il s’éprend de Betsy, une jeune femme qu’il tente de séduire. Econduit, il nourrit le projet d’assassiner le sénateur auprès duquel elle travaille. Il rencontre également Iris, une très jeune prostituée et se met en tête de la sauver de sa condition. Thèmes Guerre – Violence - Identité ; altérité ; racisme - Croyances religieuses ; idéologies - Santé mentale - Vie en société ; conditions socio-économiques – Amour. C’est à moi que tu parles ? TAXI DRIVER Films à la Fiche VT1332 Pistes de réflexion quant à la thématique Les vétérans du Viêt-Nam Taxi Driver aborde la question du Viêt-Nam en mettant en scène la dérive sociopathe d’un marine revenu au civil et qui tente de s’intégrer. Cependant, l’expérience du personnage n’est pas évoquée, seuls quelques sous-entendus émaillent le film. Par exemple, lorsque Travis se prépare à assassiner le candidat Palan- tine, sa mise en condition ressemble à celle d’un soldat partant au combat et la coiffure mohawk qu’il adopte est celle que des marines portaient dans la jungle. Bien que la causalité de la guerre sur les évènements n’est pas explicite, le choix d’un tel passé n’est pas gratuit et esquisse par sa seule énonciation une grille d’analyse des comportements du per- sonnage. Travis ne trouve finalement comme seule échappatoire à ses frustrations que l’exutoire d’une violence qu’il juge légitime (à l’image de l’idéologie interventionniste des États-Unis) et qui sem- ble lui offrir un statut de héros (tel un soldat revenu de guerre). Sous cet angle, le film introduit la question de la légitimité de la violence et des conséquences de son exercice sur la psychologie d’un soldat revenant de guerre. Pistes de réflexion quant à la narration Dans l’intimité d’un personnage À de rares exceptions près, l’histoire de Taxi Driver est perçue sous le point de vue exclusif de son antihéros. Plongé dans l’in- timité de Travis Bickle, le spectateur est soumis à son quotidien, à ses rencontres et à son point de vue sur le New York qui l’en- toure. Peu bavard en société, crispé, Travis s’exprime à travers son journal intime, sorte de chronologie maladive de son tour- ment et cherche à maîtriser son destin et son environnement. L’empathie que suscite ce procédé narratif propose au specta- teur une plongée dans l’esprit dérangé de Travis et l’implique dans l’enchaînement des évènements en ne lui proposant – en apparence – comme seule grille de lecture que la vision sub- jective du personnage. Seul l’épilogue du film semble un instant sortir de cette logique et fait interagir le monde extérieur au profit d’une célébration douteuse des actes du héros (voir p. 6). Éducation par le cinéma Films à la Fiche - Taxi Driver 2 Face au film Quelle influence peut avoir un film ? L’interprétation générale de l’histoire nécessite un recul que seul le spectateur peut opérer. Il appartient à ce dernier de juger le personnage, que ce soit en faisant appel à son propre sens moral ou à l’aide des éléments de mise en perspective proposés par le réalisateur comme le passé militaire du personnage (ci-dessous) ou les détails propres à la réalisation (voir p. 6-7). La question de l’interprétation du film est tout particulièrement brûlante au sujet de Taxi Driver. En effet, en 1981, un dénommé John Hinckley J.-R. tenta d’assassiner le président Reagan. Après son arrestation, Hinckley affirma être un admirateur du film de Scorsese et surtout de l’actrice Jodie Foster (Iris dans Taxi Driver) qu’il cherchait à séduire. Ce fait divers alimenta une vive polémi- que autour du film – déjà controversé pour son apparente immo- ralité – sur le thème de l’influence que peut exercer le cinéma. T outefois, le scénario de Taxi Driver est lui-même largement basé sur un autre fait divers à caractère politique : la tentative d’assas- sinat sur le sénateur Wallace en 1972. Son auteur, Arthur Bremer, relata sa préparation dans un journal intime dont s’inspira le scénariste du film, Paul Schrader, qui y puisa plusieurs éléments (dont le principe même du journal intime). Par ailleurs, les tenta- tives d’assassinat sur des politiciens médiatisés furent récurrentes dans les années 70 et souvent du fait de personnes désaxées : Sam Bicke (Travis Bickle ?) sur Richard Nixon (en 1974, adaptée au cinéma en 2004 dans The Assassination of Richard Nixon de Niels Mueller) et Sara Jane Moore sur Gerald Ford en 1975. Taxi Driver est le reflet volontaire d’une réalité dont fait partie l’acte désespéré qui l’incrimine. Reconnu irresponsable à son pro- cès, Hinckley doit avant tout son comportement à sa propre folie et indirectement à l’exemple des antécédents dont le film s’est fait l’écho. Il incarne aussi le modèle le plus extrême d’un spectateur qui a interprété Taxi Driver selon sa propre subjectivité. Éducation par le cinéma Films à la Fiche - Taxi Driver 3 Contexte sociopolitique Au moment où le film est écrit, puis tourné, les États-Unis sortent défaits d’un long conflit vietnamien dont les images violentes ont submergé les télévisions et qui laisse divisée la société américaine. L’époque est également celle de la défiance envers la classe politique, éclaboussée par le scandale du Watergate. Ce contexte politique troublé se couple à l’approfondissement d’une crise économique pro- voquée par le choc pétrolier de 1973. Dans les villes américaines, la criminalité se généralise et prend des apparences raciales. Un malaise social s’installe durablement, conforté par un sentiment de désillusion qui s’oppose radicalement aux rêves américains des années 60. Ce cocktail de désillusion, de perte de confiance dans l’État et de violence urbaine apparaît nettement dans le cinéma américain des années 70 qui s’ouvre à la critique sociopolitique. La violence et le Contextes Ligne du temps artistique 1956 – The Searchers de John Ford 1960 – A bout de souffle de Jean-Luc Godard 1971 – The Panic In Needle Park de Jerry Schatzberg 1972 – Death Wish de Michael Winner 1976 – Taxi Driver de Martin Scorsese 1978 – The Deer Hunter de Michael Cimino 1991 – Indian Runner de Sean Penn 2004 - The Assassination of Richard Nixon de Niels Mueller Ligne du temps historique Début de l’intervention américaine au Viêt-Nam - 1961 Richard Nixon devient le 37e président des États-Unis - 1969 Le massacre de civils Vietnamiens par des soldats Américains à My Lai scandalise l’opinion. Les manifestations protes- tataires étudiantes se multiplient et déstabilisent le pouvoir - 1969 Arthur Bremer tire sur le sénateur Wallace – 1972 Signature des accords de Paris qui ponctuent le désengagement américain - 1973 Guerre israélo-arabe du Kippour et embargo pétrolier par les pays arabes - 1973 Nixon démissionne suite au scandale du Watergate - 1974 John Hinckley J.-R. tente d’assassiner le Président Ronald Reagan pour séduire l’actrice Jodie Foster - 1981 Films à la Fiche - Taxi Driver 4 thème du justicier, jusque-là généralement réservés au western, apparaissent dans quelques films urbains qui véhiculeront – souvent en dépit des intentions des auteurs – une idéologie individualiste, sécuritaire et teintée de racisme. La révolte de Travis Bickle peut ainsi faire songer à celle du héros vengeur incarné par Charles Bronson dans Death Wish (de Michael Winner, 1974). Si le Viêt-Nam n’est pas le thème central de Taxi Driver, il ouvre la voie aux films critiques qui suivront et qui replaceront la violence dans son théâtre militaire (tel The Deer Hunter de Michael Cimino, 1978). On retrouve aussi le traitement indirect de l’impact du conflit sur ses vétérans dans Indian Runner (de Sean Penn, 1991) qui retrace la réinsertion impossible d’un soldat sans que ne soit évoquée son expérience militaire. Contexte artistique Grand cinéphile, Martin Scorsese n’a jamais manqué de saluer ses influences à l’aide de nombreuses références. Sublimée par la der- nière composition jazz de Bernard Herrmann, l’ambiance sombre et citadine inscrit Taxi Driver dans les traces du film noir américain des années 40 et 50. L’influence de la Nouvelle Vague française, portée par Godard ou Truffaut, est également fort palpable. En effet, le film cherche à présenter un aspect subjectif de la réalité, celle de Travis Bickle, et sa réalisation va à l’encontre des conventions cinématogra- phiques et des habitudes des spectateurs. En 1971, The uploads/Litterature/ taxi-driver.pdf
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- Publié le Jan 19, 2022
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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