2 3 4 Benoît Peeters Trois ans avec Derrida Les Carnets d’un biographe Flammari

2 3 4 Benoît Peeters Trois ans avec Derrida Les Carnets d’un biographe Flammarion www.centrenationaldulivre.fr Maison d’édition : éditions FLAMMARION © Flammarion, 2010. Dépôt légal : octobre 2010 ISBN numérique : 978-2-0813-4640-6 ISBN du pdf web : 978-2-0813-4641-3 Le livre a été imprimé sous les références : ISBN : 978-2-0812-1408-8 Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo. 5 Présentation de l’éditeur : En août 2007, le projet d’écrire la biographie de Jacques Derrida s’est imposé à moi comme une évidence. J’avais eu la chance de le connaître un peu ; je n’avais jamais cessé de le lire. Pendant trois ans, j’ai consacré l’essentiel de mon temps à cette recherche, avec une constante passion. Je suis le premier à avoir pu explorer l’immense archive accumulée par Derrida tout au long de sa vie. J’ai retrouvé des milliers de lettres dispersées à travers le monde, rencontré plus de cent témoins, souvent bienveillants, quelquefois réticents. Derrida occupait ma vie, s’insinuant jusque dans mes rêves. Parallèlement, dans de minuscules carnets, j’ai consigné les étapes de cette quête de plus en plus obsessionnelle : les rendez-vous et les lectures, les découvertes et les fausses pistes, les réflexions et les doutes. Trois ans avec Derrida est le journal de cette aventure, en même temps qu’un éloge de ce genre souvent mal aimé qu’est la biographie. Benoît Peeters est né en 1956. Écrivain et scénariste, il a publié de nombreux ouvrages, parmi lesquels Les Cités obscures avec François Schuiten (Casterman), Hergé, fils de Tintin et Nous est un autre (Flammarion). Ces Carnets d’un biographe accompagnent Derrida qui paraît chez le même éditeur. 6 Autres ouvrages de Benoît Peeters (extraits) Omnibus, roman, Minuit, 1976, Les Impressions Nouvelles, 2001. La Bibliothèque de Villers, roman, Robert Laffont, 1980 (épuisé). Les Cités obscures, bandes dessinées (en collaboration avec François Schuiten), 16 volumes parus, Casterman, 1983-2010. Le Monde d’Hergé, monographie, Casterman, 1983. Le Mauvais Œil, récit photographique (en collaboration avec Marie-Françoise Plissart), Minuit, 1986. Love Hotel, bande dessinée (en collaboration avec Frédéric Boilet), Casterman, 1993 ; Ego comme X, 2005. Tokyo est mon jardin, bande dessinée (en collaboration avec Frédéric Boilet), Casterman, 1997. Demi-tour, bande dessinée (en collaboration avec Frédéric Boilet), Dupuis, 1997. Entretiens avec Alain Robbe-Grillet, DVD vidéo, Les Impressions Nouvelles, 2001. Hergé, fils de Tintin, biographie, Flammarion, 2002. Le Transpatagonien, roman (en collaboration avec Raoul Ruiz), Les Impressions Nouvelles, 2002. Lire la bande dessinée, essai, Flammarion, 2003. Nous est un autre, enquête sur les duos d’écrivains, essai (en collaboration avec Michel Lafon), Flammarion, 2006. Villes enfuies, récits et fragments, Les Impressions Nouvelles, 2007. Lire Tintin, les bijoux ravis, essai, Les Impressions Nouvelles, 2007. Écrire l’image. Un itinéraire, essai, Les Impressions Nouvelles, 2008. Chris Ware, la bande dessinée réinventée, essai (en collaboration avec Jacques Samson), Les Impressions Nouvelles, 2010. 7 Derrida, biographie, Flammarion, 2010. Plus d’informations sur : www.derridalabiographie.com www.benoitpeeters.net 8 À Valérie, qui l’a vécu au quotidien. 9 Trois ans avec Derrida 10 En août 2007, je me suis lancé dans l’écriture d’une biographie de Jacques Derrida. Pendant trois ans, j’ai consacré l’essentiel de mon temps à ce projet, avec une constante passion. Parallèlement, dans de minuscules carnets, j’ai consigné les étapes de cette recherche : les rendez-vous et les lectures, les découvertes et les fausses pistes, les réflexions et les doutes que faisait naître ce travail. Cela pourrait être le journal d’un voyage ou du tournage d’un film, d’un deuil ou d’une campagne électorale ; ou le carnet d’enquête d’un sociologue. Chronique d’une expérience, ce livre s’est écrit comme de lui-même, sans que je sache où il me conduirait. Il m’a accompagné de la première idée à la rédaction des derniers chapitres ; il pourrait se prolonger bien au-delà. Ce n’est pas un journal intime : presque rien ne transparaît dans ces pages du reste de ma vie, ou même de mes autres travaux. Bien qu’ils puissent se lire de manière tout à fait indépendante, ces Carnets d’un biographe accompagnent Derrida qui paraît au même moment chez le même éditeur. J’ai voulu que les deux ouvrages ne se recoupent pas. Lorsque j’évoque les rencontres avec les témoins, le contenu même des entretiens n’intervient que de manière très allusive. Ce sont mes impressions que je livre, les à-côtés de la conversation, les fréquents effets d’après-coup. Ce qui se dessine peu à peu, pendant ces Trois ans avec Derrida, c’est le lien intense et étrange qui s’établit entre le biographe et son sujet. 11 Paris, jeudi 23 août 2007 Déjeuner avec Sophie Berlin, mon éditrice chez Flammarion, dans un restaurant à l’ancienne que je ne connaissais pas : Roger la Grenouille, rue des Grands-Augustins. Pendant le repas, nous parlons agréablement de choses et d’autres, sans discuter directement de mes projets d’écriture. Elle n’évoque qu’après le café l’idée que je me lance dans une nouvelle biographie. Il est devenu clair que je n’écrirai pas le Magritte, et Jérôme Lindon, qui m’aurait tenté, est infaisable sans l’appui d’Irène, sa fille. Une autre personnalité pourrait-elle me tenter ? D’instinct, je voudrais quelqu’un dont les archives soient déposées à l’IMEC – l’Institut Mémoires de l’édition contemporaine – où les conditions d’accès aux documents m’avaient semblé idéales quand j’y avais filmé de grands entretiens avec Alain Robbe-Grillet. Mais pour éviter un pur travail d’archiviste, j’aimerais aussi rencontrer des témoins, avoir affaire à du vivant : il faudrait donc une personnalité assez contemporaine. J’aurais volontiers travaillé sur Barthes, si une biographie n’existait déjà. Godard me passionnerait si son hostilité n’était à ce point prévisible. Sophie lance le nom de Derrida, qui me séduit d’emblée : je l’ai beaucoup lu depuis mes années étudiantes, un peu connu à l’époque où il écrivait la postface de l’album photographique Droit de regards que j’avais réalisé avec Marie-Françoise Plissart ; il a toujours compté pour moi, plus qu’aucun autre philosophe. Mais j’entrevois aussi les difficultés du projet : l’immense bibliographie, la technicité des textes, la plongée dans un monde qui n’est que très partiellement le mien. Je demande à réfléchir quelques jours. Rentré chez moi, Wikipédia est le premier réflexe : Jacques Derrida, né Jackie Derrida le 15 juillet 1930 à El-Biar (Algérie) et mort le 9 octobre 2004 à Paris, est un philosophe français qui a initié puis développé la méthode de la déconstruction. [...] D’origine juive, il subit la répression liée aux événements de la fin des années 1930. Il connaît, durant sa jeunesse, une scolarité mouvementée. Il voit les métropolitains comme oppresseurs et normatifs, normalisateurs et moralisateurs. Sportif, il participe à de nombreuses compétitions sportives et rêve de devenir footballeur professionnel. Mais c’est aussi à cette époque qu’il découvre et lit des philosophes et écrivains comme Jean-Jacques Rousseau, 12 Friedrich Nietzsche, André Gide et Albert Camus. Après trois années de classes préparatoires littéraires au lycée Louis-le-Grand à Paris, il entre – après deux échecs – à l’École normale supérieure en 1952, où il découvre Kierkegaard et Martin Heidegger. Il y fait la rencontre d’Althusser. Puis il est assistant à l’université américaine d’Harvard. Il se marie en juin 1957 avec Marguerite Aucouturier, une psychanalyste, et effectue par la suite son service militaire. La naissance de son premier fils, Pierre, a lieu six ans plus tard. […] En 1964, il obtient le prix Jean-Cavaillès (prix d’épistémologie) pour sa traduction (et surtout la magistrale Introduction) de L’origine de la géométrie d’Edmund Husserl. En 1965, il est professeur de philosophie à Normale Sup où il occupe la fonction de « caïman », c’est-à-dire de directeur d’études, avec Louis Althusser. Sa participation au colloque de Baltimore à l’université Johns Hopkins marque le début de ses fréquents voyages aux États-Unis. En 1967, ses trois premiers livres sont publiés (c’est aussi l’année de la naissance de son deuxième fils, Jean). Il côtoie régulièrement Maurice Blanchot et s’associe progressivement à Jean-Luc Nancy, Philippe Lacoue-Labarthe et Sarah Kofman. Les éditions Galilée sont fondées à cette époque et deviennent la « voix » de la déconstruction. En 1978, Jacques Derrida prend l’initiative de lancer les États généraux de la philosophie à la Sorbonne. Il s’implique de plus en plus dans des actions politiques, domaine qu’il avait apparemment écarté de sa vie professionnelle (il est resté en retrait par rapport aux événements de mai 1968). En 1981, il fonde l’association Jean-Hus avec Jean-Pierre Vernant, qui aide les intellectuels tchèques dissidents. Il sera arrêté et brièvement emprisonné à Prague (des agents des services tchèques ont dissimulé de la drogue dans ses bagages) à la suite d’un séminaire clandestin. C’est François Mitterrand qui le fera libérer. Il fonde le Collège international de philosophie en 1983. L’une des traces les plus visibles dans son travail de ce que certains ont considéré comme sa « politisation » aura été la publication en 1993 de Spectres de Marx. À partir de 1984, il est directeur d’études à l’École des hautes études en sciences sociales. Marié à Marguerite Aucouturier, il a en 1984 un enfant de sa relation avec Sylviane Agacinski, qu’elle a élevé seule par la suite, avant de devenir la compagne de Lionel Jospin en 1989, et ensuite son épouse. Il uploads/Litterature/ trois-ans-avec-derrida.pdf

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