Commandée et conçue par le Service des études et de la recherche de la Biblioth

Commandée et conçue par le Service des études et de la recherche de la Bibliothèque publique d'information du Centre Georges Pompidou, cette recherche a été réalisée par la Sorgem sous la direction de Eiiséo Véron, avec la collaboration de Martine Levasseur, qui a été en même temps responsable des opérations sur le terrain; Nelly Fourcaud a réalisé une partie des entretiens semi-directifs. Nous vouions remercier ici Isabelle Giannattasio et Claude CoUard, commissaires de l'exposition Vacances en France qui nous ont aidés tCJut au long du déroulement du projet. Nous remercions aussi très particulièrement les techniciens du Centre Georges Pompidou et ceux de la BPI, qui sont venus à notre secours à tout moment, et sans lesquels nous n'aurions su résoudre les multiples problèmes posés par la mise en place du dispositif d'observation des comportements des visiteurs. © Centre Georges Pompidou ISBN: 2-902706-19-7 ETHNOGRAPHIE DE L'EXPOSITION : l'espace, le corps et le sens Eliséo Véron, Martine Levasseur Introduction de Jean-François Barbier-Bouvet Bibl~othèque publique d'information ~ Centre Georges Pompidou Dans la même collection Philippe Coulaud, La télématique documentaire à l'épreuve, Paris, BPI, 1982 (épuisé). Répertoire de la recherche sur le livre contemporain et la lecture, Paris, Documentation française, 1983 (épuisé). Philippe Coulaud, Fera-t-il beau demain ? : évaluation d'une exposi- tion, Paris, B Pl, 1984 (épuisé). Jean-Claude Passeron, Michel Grunbach, L'œil à la page: enquête sur les images et les bibliothèques, Paris, BPI, 1985 (épuisé). Jean-François Barbier-Bouvet, Martine Poulain, Publics à l'œuvre: pratiques culturelles à la Bibliothèque publique d'information du Centre Pompidou, Paris, Documentation francaise, 1986. Joëlle Bahloul, Lectures précaires: étude sociologique sur les faibles lecteurs, Paris, BPI, 1988. Michel Peroni, Histoires de lire: lecture et parcours biographique, Paris, BPI, 1988. A paraître Nathalie Heinich, Michaël Pollak, Vienne à Paris: portrait d'une exposition. Histoire des discours sur la lecture 1881-1985, sous la direction de Roger Chartier et Jean Hébrard. Introduction Le visiteur dans tous ses états Le visiteur d'exposition est devenu une figure familière du paysage culturel. La multiplication des petites expositions - en tous lieux et sur tous sujets - depuis une vingtaine d'années, le succès spectacu- laire des plus grandes, qui atteignent parfois des chiffres jusqu'ici réservés au cinéma ou à l'édition, nous le font rencontrer partout; quand nous ne sommes pas nous-mêmes l'un d'entre eux(ll. Mais ce n'est pas parce qu'ils nous sont familiers qu'ils nous sont véritablement connus. Les visiteurs de musée ont eu dès le XIX< siècle la faveur des romanciers, qui nous en ont laissé des descriptions nombreuses, et parfois délectables. Les visiteurs d'exposition d'aujourd'hui attirent plutôt les sociologues. Chaque siècle a les observateurs qu'il peut. te nôtre a gagné en rigueur ce qu'il a perdu en saveur. Nous savons que les visiteurs d'expositions ne se confondent pas nécessairement avec les visiteurs de musées; que 21 % des Français visitent une exposition de peinture ou de sculpture au moins une fois par an; nous connaissons leur âge, leur profession, leur lieu d'habi- tation, beaucoup d'autres caractéristiques encore m. Nous connais- sons même les mécanismes sociaux qui retiennent ceux qui ne les fréquentent pas d'y pénétrer, et qui poussent ceux qui les fréque:1tent à en faire état 13l ••• Par contre, la réalité même de leur pratique de l'exposition échappe encore en grande partie à l'investigation scientifique : s'il est vrai que pour ses concepteurs l'exposition est un endroit où on ne peut pas tout montrer, elle est aussi le plus souvent pour les visiteurs un endroit où on ne peut pas tout voir: comment regarde-t-on réelle- ment une œuvre, un objet, un panneau; comment s'éveille ou s'es- tompe la curiosité, se construit ou échappe la compréhension, se manifeste le plaisir ou l'ennui ? On ne peut analyser la démarche de visite en restant au niveau de généralité où se placent d'habitude ceux qui étudient l'incidence du niveau scolaire ou de l'appartenance sociale sur la fréquentation des (!) Sur le développement du phénomene-exposition en France et ses caractéristiques, voir Histoires d'expo: un lieu. un thème. un parcours. Paris, Centre Pompidou. 1983. (2) Cf. en particulier Pratiques culturelles des Français. descriptions sociodémographique, Paris. Dalloz, 1982. (3) Voir les travaux fondamentaux de Pierre Bourdieu: Pierre Bourdieu et Alain Darbel. L'Amour de l'art, Paris. Éditions de Minuit. 1966. Pierre Bourdieu. La Distinction. critique sociale du juf(emen~ Paris, Éditions de Minuit, 1979. 7 équipements culturels. Non que nous contestions cette approche, bien au contraire, mais parce que nous considérons comme acquis les principaux enseignements de la macrosociologie des comportements ~.,_,!turels. Retour au « terrain » donc, et priorité à l'observation. Nous partirons des pratiques concrètes de vi~ite, observées dans une exposition particuli.ère : Vacances en France 1860-1982 présentée à la Bibliothèque publique d'information du Centre Pompidou de juin à octobre 1982. Limiter ainsi le champ d'investigation ne veut pas dire limiter l'ambition de la recherche, ou tomber dans la monographie. Bien au contraire, cette ambition est double, sur un double registre : le registre culturel (trouver des résultats transposables au public d'autres expositions), et le registre sociologique (élaborer une pro- blématique et tester des méthodologies réutilisables ailleurs). L'exposition Vacances en France a été choisie pour son exemplarité. Il ne s'agit pas là d'un jugement sur sa qualité, mais sur ses attributs: elle présente des caractéristiques que l'on retrouve dans beaucoup d'expositions qui se montrent aujourd'hui un peu partout. Son thème d'abord. Ni artistique, ni à proprement parler historique (même si la chronologie y est fortement présente), ni réellement spécialisé (comme le serait celui d'une exposition scientifique et technique), mais mêlant ces différents registres sur un motif docu- mentaire. Les vacances sont un élément familier de la vie de chacun, l'objet d'une expérience propre, que la « mise en exposition » fait accéder à une dimension nouvelle : elle la situe dans un contexte, l'insère dans un discours, et l'exhibe. Cette spectacularisation de la vie quotidienne est encore renforcée par la forte charge culturelle que manifeste le lieu même de l'exposition: le Centre Pompidou. Sa présentation ensuite. Il s'agit d'une exposition relativement petite: 150m2 au sol, et 80 rn linéaires de cimaises. Soit une taille courante pour les manifestations organisées en dehors des grands circuits des institutions culturelles les plus consacrées, mais aussi - on l'oublie souvent - dimension que l'on retrouve fré- quemment dans ces mêmes circuits muséaux pour des expositions thématiques ou monographiqu~s. Vacances en France présente enfin l'intérêt de juxtaposer dans le même espace tous Jes supports que l'on peut rencontrer dans une exposition : du texte (panneaux explicatifs, montages de coupures de presse), de l'image, des objets (mannequins costumés, vitrines d'ac- cessoires de voyage, de souvenirs touristiques, etc.) et même du son puisqu'une bande magnétique diffusait à intervalles réguliers des chants d'oiseaux ou le bruit de la mer. 8 Les images elles-mêmes, support privilégié, sont multiples. Point de peinture, mais la photographie sous toutes ses formes : noir et blanc et couleur, en tirage papier et en projections de diapositives, légitimes !~!g!!ées de noms célèb:-es et encâd;:é;.;s) ti aüùnymes. Reste que cette exposition n'est pas présentée n'importe où, et qu'on ne peut faire abstraction ni du bâtiment qui l'abrite - le Centre Pompidou - ni de l'institution qui la propose - la Bibliothèque publique dïnformation - . Ils déterminent en partie son public, et expliquent ses attentes. Ce public obéit,.par sa composition sociale, aux « déformations par le haut » propres à tous les établissements culturels : le poids relatif des visiteurs issus des classes dominantes, et des fractions intellec- tuelles des classes moyennes (professeurs, enseignants, chercheurs, animateurs) est nettement supérieur à ce qu'il est dans l'ensemble de la population française, tandis que les classes populaires sont sous- représentées; quant aux étudiants et élèves, ils fournissent à eux seuls 40% des entrées, ce qui s'explique par leur forte implantation à la bibliothèque. Mais aucun groupe social n'est absent(41 ; la chance des expositions de la BPI est d'avoir ù'n public suffisamment nombreux (plus d'un millier de personnes par jour) et hétérogène pour y voir apparaître à peu près tous les types de visite possibles. Même s'ils sont à l'évi- dence inégalement représentés. Ce n'est pour notre étude une limite qu'en apparence, dans la mesure où le fondement de la démarche n'est pas de comptabiliser des visiteurs, mais de repérer des principes de visite quel qu'en soit le poids statistique relatif, et d'expliquer leurs variations. Nous ne faisons pas ici une enquête sur la fréquenta- tion mais sur les comportements. L'exposition, située à l'entrée de la BPI, peut être visitée tout à fait indépendamment d'un quelconque usage de la bibiiothèque ( 51• Et inversement. Mais il est évident que l'affluence observée tient autant aux autres sollicitations de l'endroit qu'à l'exposition elle-même. (4) Principales catégories socioprofessionnelles: étudiants et élèves, 40 %; cadres supérieurs. professions libérales. chefs d'entreprises. 9 %; enseignants. chercheurs, animateurs .... 11,5 %:cadres moyens. techniciens, Il %:employés. ouvriers, 12,5 %:chômeurs, 6 %; retraités. 4 %; autres. 6 %. On compte aussi 60% d'hommes pour 40% de femmes. La moyenne d'âge du public s'établit autour de 26 ans. Ces données sont extraites d'un sondage réalisé en novembre 1981 et uploads/Litterature/ veron-eliseo-et-levasseur-martine-1989-ethnographie-de-l-x27-exposition-l-x27-espace-le-corps-et-le-sens.pdf

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