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Tous droits réservés © La revue Études/Inuit/Studies, 2009 Ce document est protégé par la loi sur le droit d’auteur. L’utilisation des services d’Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d’utilisation que vous pouvez consulter en ligne. https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/ Cet article est diffusé et préservé par Érudit. Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l’Université de Montréal, l’Université Laval et l’Université du Québec à Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. https://www.erudit.org/fr/ Document généré le 17 mai 2021 10:51 Études/Inuit/Studies La médiation des savoirs auprès des enseignants inuit en formation Mediation of knowledge in Inuit teacher training Gisèle Maheux Éducation et transmission des savoirs inuit au Canada Education and transmission of Inuit knowledge in Canada Volume 33, numéro 1-2, 2009 URI : https://id.erudit.org/iderudit/044968ar DOI : https://doi.org/10.7202/044968ar Aller au sommaire du numéro Éditeur(s) Association Inuksiutiit Katimajiit Inc. Centre interuniversitaire d'études et de recherches autochtones (CIÉRA) ISSN 0701-1008 (imprimé) 1708-5268 (numérique) Découvrir la revue Citer cet article Maheux, G. (2009). La médiation des savoirs auprès des enseignants inuit en formation. Études/Inuit/Studies, 33(1-2), 209–224. https://doi.org/10.7202/044968ar Résumé de l'article Cet article concerne la formation des enseignants inuit dans le cadre d’un projet de partenariat entre une université et deux communautés du Nunavik. Nous présentons d’abord le contexte historique et social de la scolarisation chez les Inuit. Nous mettrons ensuite en évidence la réalité interculturelle et trilingue de la formation et du travail de l’enseignant inuit. Enfin, à l’aide des concepts de «cognition située» et «rapport au savoir», nous discuterons de notre pratique de formation dans la perspective de la réussite scolaire des Inuit. ÉTUDES/INUIT/STUDIES, 2009, 33(1-2): 209-224 La médiation des savoirs auprès des enseignants inuit en formation Gisèle Maheux* Abstract: Mediation of knowledge in Inuit teacher training This article is about the training of Inuit teachers in a partnership project between a university and two Nunavik communities. We first identify the historical and social context of schooling among the Inuit. Then we present the intercultural and trilingual reality of Inuit teacher training and work. Finally, using the concepts of “situated cognition” and “relation to knowledge,” we discuss our training experience from the perspective of Inuit academic achievement. Résumé: La médiation des savoirs auprès des enseignants inuit en formation Cet article concerne la formation des enseignants inuit dans le cadre d’un projet de partenariat entre une université et deux communautés du Nunavik. Nous présentons d’abord le contexte historique et social de la scolarisation chez les Inuit. Nous mettrons ensuite en évidence la réalité interculturelle et trilingue de la formation et du travail de l’enseignant inuit. Enfin, à l’aide des concepts de «cognition située» et «rapport au savoir», nous discuterons de notre pratique de formation dans la perspective de la réussite scolaire des Inuit. Introduction Les Inuit du Nunavik ont commencé à exercer la fonction d’enseignant à l’école de leur communauté au début des années 1970 (Vick-Westgate 2002). On leur confiait alors l’enseignement de leur langue et de leur culture, ce qu’ils font encore aujourd’hui. Afin de répondre à l’exigence de qualification légale des enseignants inuit, leur formation a été initiée par la Commission scolaire du Nouveau-Québec et consolidée dans la mouvance de la signature de la Convention de la Baie James et du Nord * Département des sciences de l’éducation, Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue, 445 boul. de l’Université, Rouyn-Noranda (Québec) J9X 5E4, Canada. Gisele.Maheux@uqat.ca 210/G. MAHEUX Québécois en 1975, suite à laquelle la Commission scolaire Kativik fut fondée pour administrer les écoles des Inuit. En 1984, les comités d’école des villages d’Ivujivik et de Puvirnituq ont invité l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue (UQAT) à collaborer à un projet de prise en charge du développement de l’éducation dans leurs communautés. Ces dernières souhaitaient instaurer une école contribuant au maintien de leur identité culturelle inuit tout en permettant aux élèves d’acquérir les connaissances et les compétences nécessaires à la vie dans la société contemporaine (Bergeron et Maheux 1999; Puvirnituq et Ivujivik 1995). À la demande des responsables inuit, la gestion de l’ensemble des activités se fait depuis en partenariat avec des formateurs universitaires. Elle se caractérise par le respect mutuel et un rapport d’interdépendance, consolidés au fil des ans (Maheux 2001; Maheux et Kenuajuak 1998). La composante prioritaire du projet est la formation des enseignants inuit directement dans les communautés. Elle fait appel à plusieurs langues: l’anglais est la langue commune de communication, les étudiants interagissent entre eux en inuktitut et les formateurs conçoivent les activités en français. La formation des enseignants est conçue en lien avec d’autres aspects du projet éducatif de l’école, soit le développement du curriculum scolaire en inuktitut ainsi que celui des relations de l’école avec la communauté. Par ailleurs, au cours des 15 dernières années, la formation des enseignants au Québec a évolué dans ses orientations et objectifs. Elle est maintenant dispensée selon des exigences précises de professionnalisation qui amènent les enseignants inuit déjà en exercice à suivre une formation universitaire offerte au Nunavik. Les situations de pratique de formation impliquent donc la rencontre de deux perspectives culturelles: celle des enseignants inuit et celle des formateurs universitaires. Cet article propose une réflexion sur la formation d’enseignants inuit en exercice, au regard des orientations et standards de l’enseignement au Québec. Nos données proviennent de notre expérience de professeure lors de la formation des enseignants inuit à Ivujivik et Puvirnituq. Nous situerons d’abord le contexte historique et social de la scolarisation des Inuit. Suivra une section sur la formation et le travail de l’enseignant en général. Nous aborderons ensuite la formation et le travail des enseignants inuit. Enfin, nous présenterons une réflexion sur notre pratique de formation dans la perspective de la réussite scolaire des Inuit. Contexte historique et social de l’éducation chez les Inuit L’ouvrage historique d’Ann Vick-Westgate (2002) rappelle que lors des premiers contacts avec les nouveaux venus, les populations inuit du Nord du Québec vivaient en bandes d’environ 50 personnes composées de deux à cinq familles. L’éducation se faisait par mimétisme au sein des familles, les enfants apprenant de leurs parents et à leur propre rythme. Par exemple, un garçon montrait qu’il avait appris à chasser lorsqu’il tuait un animal; une fille était reconnue femme lorsqu’elle savait préserver la nourriture pour l’hiver. Cependant, la façon d’éduquer les jeunes inuit s’est dramatiquement modifiée lors de l’arrivée des missionnaires qui commencèrent à se LA MÉDIATION DES SAVOIRS…/211 rendre au Nord du 55e parallèle et à ouvrir des écoles à partir de 1850. Jusqu’en 1950, l’enseignement dépendait du missionnaire en poste. Dans ces écoles, les enfants apprenaient à fonctionner dans un monde non inuit, selon la perspective et les méthodes européennes. Par la suite, les enfants étaient retirés de leur famille, parfois pendant des années, pour être envoyés dans les écoles résidentielles, comme le relate Jack Cram: En entrevue avec des étudiants inuit gradués, j’ai entendu, à maintes reprises, des récits personnels de la séparation forcée des enfants et de leurs parents, par les autorités scolaires dans le Nord du Canada au cours des années cinquante et soixante. «[…] Nous quittions pour aller à l’école à Chesterfield Inlet et ne revoyions pas nos parents pendant deux ans. Lorsque nous revenions à la maison, ma mère était très surprise. Elle pensait que j’étais décédée» (Cram 1987: 114 in Vick-Westgate 2002: 44-45).1 Entre 1950 et 1960, le mode de vie des Inuit se transforme radicalement alors qu’ils passent du nomadisme au sédentarisme (Commission royale sur les peuples autochtones 1996). Parmi les causes de ce changement, notons surtout les politiques gouvernementales qui encourageaient l’établissement des familles dans les villages, mais aussi le déclin du commerce des fourrures, l’accès aux soins médicaux et les opportunités de travail occasionnel dans les communautés. Par la suite, deux systèmes scolaires se mettent en place. En 1962, le gouvernement canadien ouvre une école dans chaque village. La population inuit étant de tradition orale, la finalité de l’implantation de l’école dans les communautés est l’assimilation, au moyen, notamment, de l’interdiction de parler la langue maternelle, de l’instruction religieuse et de la dévalorisation du mode de vie autochtone, suivant en cela des procédés mis en place auprès d’autres populations autochtones. À partir de 1960, le Québec intensifie à son tour son implication dans l’éducation des populations du Nord. Les premières écoles québécoises ouvrent en 1963; en 1970, une école provinciale offrant l’enseignement en français et en inuktitut existe dans tous les villages (Vick-Westgate 2002). Dans les deux systèmes, les écoles fédérales de langue anglaise et les écoles provinciales de langue française, les enseignants étaient des gens du sud qui connaissaient peu les Inuit. Ne disposant ni de programme scolaire, ni de bibliothèque, ils étaient mal équipés pour éveiller la curiosité des élèves à partir du point de vue du milieu de vie inuit et de son environnement. Puis, en 1975, la signature de la Convention de la Baie James et du Nord québécois «accorde aux collectivités inuit et cries du Québec une autorité considérable sur leurs affaires politiques, économiques et sociales même si le gouvernement continue d’avoir le dernier mot» (Dickason 1992: 404). uploads/Litterature/la-mediation-des-savoirs.pdf

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