Les enjeux de l’information et de la communication Supplément 2016 A La communi
Les enjeux de l’information et de la communication Supplément 2016 A La communication numérique : acteurs, dispositifs, pratiques Les plateformes numériques des chaînes de télévision : du fantasme technologique à la réalité des pratiques des jeunes Pas de titre en anglais Pas de titre en espagnol Article inédit, mis en ligne le 15 mai 2016. Marlène Loïcq Marlène Loïcq est docteure en sciences de l’information et de la communication, de Université Sorbonne Nouvelle Paris 3, et Ph. D en communication publique, à l’université de Laval, au Québec. Elle est chercheure indépendante – Responsable de recherche sur les Cultures scientifiques, techniques et industrielles, dans le cadre du PIA projet Ecole, Numérique et Industrie (ENI) pour le réseau CANOPÉ. Ses thèmes de recherche sont les pratiques médiatiques et cultures médiatiques des jeunes, l’éducation aux médias, l’interculturalité culturelle et éducative. marleneloicq@gmail.com Elodie Kredens Elodie Kredens est docteure en sciences de l’information et de la communication. Sa thèse portait sur la réception de la télé-réalité. Ses recherches concernent les processus d’interprétation et d’appropriation des objets médiatiques et les usages des jeunes. Elle participe au projet de recherche soutenu par la région Rhône-Alpes «Jeunes, numérique et télévision», pour établir un état des lieux des pratiques télévisuelles des jeunes. elodie.kredens@univ-smb.fr Plan de l’article Introduction Du côté des pratiques : une participation relative des publics Une faible consommation des nouveaux dispositifs numériques et participatifs L’interaction n’est pas la télévision Le maintien d’une posture classique de visionnage Du côté des dispositifs : les chaînes télévisées dans une logique d’offre de contenus plutôt que de participation Etude de cas des plateformes web de W9 et d’NRJ12 Bilan et facteurs d’explication du déploiement limité de la télévision participative Conclusion Références bibliographiques Résumé Pas de résumé et de mots clés en français. Abstract Pas de résumé et de mots clés en anglais. MARLENE LOICQ Les plateformes numériques des chaînes de télévision : ELODIE KREDENS du fantasme technologique à la réalité des pratiques des jeunes © Les Enjeux de l’information et de la communication | http://lesenjeux.u-grenoble3.fr/ | n°17/3A, 2016 | Page 168 Resumen Pas de résumé et de mots clés en espagnol. Introduction L’histoire sociale des médias révèle une place importante et en tension, des peurs et des fantasmes liés aux progrès technologiques. Sans faire exception, l’arrivée d’internet a généré de l’enthousiasme, de la crainte, du scepticisme ainsi que Patrice Flichy a pu l’observer à l’occasion d’une réflexion sur l’imaginaire d’internet (2001). Comme il le souligne, mythes, utopies ou idéologies sont autant de constructions et de projections qui accompagnent les discours produits sur la technologie d’internet. L’industrie de la télévision est particulièrement concernée par le développement d’internet, qui constitue un moment clé de ses transformations récentes. En effet, en jouant la carte du numérique, de la dématérialisation des contenus, de l’intermédiation et du multi-écrans, la télévision veut entrer dans l’ère de la modernité médiatique. Internet décrète un nouvel âge de la télévision, car après la « néo-télévision » particulièrement marquée par l’engagement des téléspectateurs à témoigner, la « post-télévision » a permis d’intégrer la participation de ceux-ci, alors considérés comme des usagers, à ses programmes (Eco, 1985 ; Casetti, Odin 1990 ; Macé 1993 ; Missika, 2006). En lien avec le développement rapide des technologies numériques et de leur particularité d’instantanéité, producteurs et consommateurs de télévision ont participé, peut- être indépendamment, à sa mutation. Certains décrètent ainsi aujourd’hui l’ère de la « techno- télévision » (Bourdaa, 2009, p.401). Plus nomade, interactive et personnelle, elle se proposerait alors de créer une nouvelle expérience télévisuelle. Un rapport du CSA (2013) sur les enrichissements de contenus interactifs pouvant être apportés par les nouvelles technologies (commentaires, recommandations, jeux, votes, pilotage de programmes, réseaux sociaux) regroupe toutes ces modalités sous le nom de « télévision sociale ». Cette « nouvelle » télévision serait alors caractérisée par une transformation du rapport du consommateur aux contenus avec la possibilité d’une rétroaction beaucoup plus effective. Comme le soulignait Guy Lochard (2012, p.92), « nous basculons d’un modèle de télévision centralisé, asymétrique, linéaire et vertical vers un modèle bidirectionnel, pluriel et collaboratif. Celui-ci aboutirait donc dans sa forme la plus achevée à une forme d’horizontalisation et à une possible réversibilité des rôles entre émetteurs et récepteurs, diffuseurs et consommateurs de "contenus" ». Mais l’expérience et la participation des téléspectateurs ne se décrètent pas par le dispositif, aussi innovant soit-il. La sociologie des usages (Jouët, 2000) rapporte ainsi nombre de détournements, d’appropriations et parfois de refus face à des usages prescrits. Il semble alors hasardeux de n’envisager les mutations de la télévision qu’à partir des discours visionnaires ou centrés sur les possibilités techniques offertes aux téléspectateurs. D’autant que du côté des chaines, ces discours sont sous-tendus par des objectifs de marketing comme la promotion d’un programme avant sa diffusion, la conservation et l’agrégation des audiences pendant le passage à l’antenne et enfin, la fidélisation du public (Ibid. CSA). Une distance critique semble nécessaire pour saisir les changements induits du côté des pratiques. MARLENE LOICQ Les plateformes numériques des chaînes de télévision : ELODIE KREDENS du fantasme technologique à la réalité des pratiques des jeunes © Les Enjeux de l’information et de la communication | http://lesenjeux.u-grenoble3.fr/ | n°17/3A, 2016 | Page 169 Fort de ces constats, nous avons voulu, dans cette contribution, mettre en regard les promesses et les imaginaires sur la révolution de la télévision, et les réalités des pratiques venant relativiser au final quelques idées préconçues sur l’évolution de la télévision. Les discours modernistes tenus sur les procédés novateurs de la télévision contemporaine méritent d’être confrontés à la réalité de leur utilisation par le public. De ce fait, il s’agit ici de confronter les pratiques télévisuelles des jeunes sur internet avec les dispositifs participatifs mis en place sur les sites web de chaînes de télévision et d’essayer de saisir leur posture de spectateur. Nous optons pour une définition de la participation comme une forme d’implication couplée à de l’action. Le téléspectateur s’érige pleinement en acteur dans cette acception. Il y a participation dès lors que le téléspectateur n’est plus dans une simple consommation, qu’il devient un émetteur et que l’écran qu’il utilise cesse d’être un simple récepteur pour devenir une interface. Quant à l’interactivité, il s’agit d’une forme aboutie de participation. Il en existe deux sortes : l’interactivité fonctionnelle (agir sur le système) permettant à l’utilisateur d’avoir du pouvoir sur le contenu ; et l’interactivité relationnelle (interagir) impliquant un mode d’échange entre les usagers, la machine n’étant alors qu’un véhicule. Le destinataire n’agit pas sur le contenu mais à propos du contenu, et les outils utilisés sont des outils de communication (téléphonie, tchat, vidéo-conférence...). Nous présenterons dans un premier temps les résultats d’une large enquête sur les pratiques télévisuelles des jeunes à l’ère du numérique en nous focalisant sur leurs usages des dispositifs participatifs. Il s’agit de l’enquête « JNT : Jeunes Numérique et Télévision » menée au cours du premier trimestre 2014. Après des entretiens individuels exploratoires, un questionnaire a été soumis avec le concours de SphinxOnline en présence des chercheures. Ainsi, 2 540 jeunes de 12 à 25 ans ont été interrogés dans sept établissements scolaires ou universitaires, en Rhône-Alpes et dans le Nord-Pas-de-Calais, ces deux régions finançant l’étude. À la suite du questionnaire, des entretiens semi-directifs ont été conduits auprès de 36 volontaires issus de l’échantillon quantitatif. Dans un second temps, nous analyserons les interfaces des sites web de deux chaînes plébiscitées par ces jeunes, W9 et NRJ12. Cette rencontre des problématiques d’usages articulées entre études des pratiques et analyse des dispositifs est une approche intégrée indispensable pour penser les pratiques médiatiques des jeunes aujourd’hui et jauger la dimension renouvelée de la télévision à l’ère du numérique. Nous verrons comment l’offre et la demande, la production et la réception, la promesse et l’usage sont intimement imbriqués dans les phénomènes complexes des pratiques audiovisuelles en régime numérique. Du côté des pratiques : une participation relative des publics Généralement les jeunes sont des acteurs majeurs dans la diffusion des nouvelles technologies. Sylvie Octobre (2014 p.71) les considère d’ailleurs comme des « moteurs de diffusion des nouvelles formes de culture, notamment technologiques, puisqu’ils sont toujours les mieux équipés et les plus utilisateurs des nouveautés successives. » En étant par ailleurs plutôt consommateurs de télévision dans l’ensemble (Insee, enquête emploi du temps), on s’attendrait ainsi à ce qu’ils s’emparent des nouveaux dispositifs participatifs des chaînes. Pourtant, nous allons voir que la réalité des pratiques nuance cette représentation. Une faible consommation des nouveaux dispositifs numériques et participatifs Les sites internet des chaînes de télévision répondent à plusieurs enjeux. S’ils permettent aux chaînes d’exister en tant que telles dans la nébuleuse du web et d’établir leur territoire, ils se présentent surtout comme « un moyen d’affirmer ou de réaffirmer une identité », permettant ainsi d’établir un lien privilégié avec les téléspectateurs, un « esprit club » comme le nomme Virginie Spies (2002, p.5). Dans la pratique, les jeunes de notre panel ne sont pas très sensibles à l’offre complémentaire des chaînes proposées sur internet. Tout d’abord, la consultation des sites web officiels des chaînes uploads/Management/ 12-2016a-loicq-kredens.pdf
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- Publié le Aoû 30, 2021
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