Organisations & territoires (2011) 31 Volume 20, no1 Performance des services p

Organisations & territoires (2011) 31 Volume 20, no1 Performance des services publics municipaux : entre outils du contrôle de gestion et facteurs contingents Donatien Avelé, D. sc. De gestion Université de Moncton INTRODUCTION Le problème de l’organisation est d’obtenir la coopération entre un grand nombre d’individus ou d’unités qui partagent seulement et partiellement des objectifs convergents. « Le problème de l’organisation est d’obtenir la coopération entre un grand nombre d’individus ou d’unités qui partagent seulement et partiel- lement des objectifs convergents »1. Cette remarque est particulièrement marquée par des frontières internes. En particulier, l’opposition qui sépare les administrations et les techniciens est ancienne et profonde. Elle se manifeste, soit par une ignorance polie, soit par des dissensions entre des hommes ayant des formations et des logiques différentes, voire contradictoires2. Auparavant, le pouvoir se trouvait essentiel- lement entre les mains des techniciens, dont dépendaient les grandes réalisations si chères aux élus. Aujourd’hui, le secrétaire général, le directeur financier et le contrôleur de gestion semblent occuper une place de plus en plus importante3. Ils ont la responsabilité de la maîtrise des charges, la réduction des coûts afin de dégager un maximum d’autofinancement pour réaliser ces gros investissements, toujours aussi chers aux élus4. L’écart grandissant qui sépare les techniciens des administratifs produit un choc de cultures. Les principes de gestion, l’adoption d’une approche mercatique et d’un système de contrôle de gestion incitent les élus à être plus à l’écoute des spécialistes et des gestionnaires5. Les élus font ensuite exécuter leurs choix, établis à partir des avis du secrétaire général, qui devient le véritable directeur géné- ral de l’organisation municipale, du directeur des services financiers, qui détermine la possi- bilité de financer le projet, et du directeur des services techniques, qui n’est plus le seul à apporter des informations utiles à la prise de décision6. Cet article a pour objet de fournir une description de l’état des lieux des pratiques des municipalités existantes afin de contribuer à la connaissance des outils de contrôle de gestion nécessaire au suivi des performances dans ces entités locales. L’étude est menée à partir des données collectées par questionnaire auprès des 60 services visités constituant l’échantillon. Les apports théoriques et la méthodologie adoptée sont d’abord présentés; les résultats empiriques sont ensuite analysés et discutés. Les principes de gestion, l’adoption d’une approche mercatique et d’un système de contrôle de gestion incitent les élus à être plus à l’écoute des spécialistes et des gestionnaires. 1. APPORTS THÉORIQUES Une des caractéristiques des organisations publiques et en particulier des collectivités locales est leur complexité. Celle-ci est, entre autres, le fruit de l’hétérogénéité des activités. Une commune possède un grand nombre de services nécessaires au bon fonctionnement de la collectivité mais répondant à des besoins extrêmement variés n’ayant aucun lien apparent entre eux. Un des rôles du contrôle de gestion et tout spécialement la comptabilité analytique va Organisations & territoires (2011) 32 Volume 20, no1 être de tenter à mieux coordonner l’ensemble de ces activités diverses. Mais cette hétérogénéité conduit également à s’interroger sur la perti- nence d’un système unique et unificateur. Le contrôle de gestion présente de fait une double facette : une dimension technico-économique de nature comptable et financière complétée d’une dimension « managériale, psychologique » liée à la notion de contrôle et d’influence des comportements7. Toutefois, la pratique du contrôle de gestion met effectivement en évidence l’importance de l’animation des hommes. La fonction requiert l’implication de tous et un certain degré de motivation. Elle est également censée déve- lopper l’autonomie des responsables8. Ces élé- ments sont particulièrement présents au sein d’un des outils phares du contrôle de gestion à savoir le tableau de bord. En tant que dispositif souple et diversifié, le tableau de bord peut se définir comme une présentation, à partir d’indi- cateurs sélectionnés d’un suivi de facteurs clefs de gestion de l’entité concernée9. S’agissant de la responsabilisation des agents communaux, certains auteurs font référence à la notion de responsabilité transposée au monde de l’entreprise. Cette notion présente ainsi deux facettes distinctes, correspondant à deux modes gestionnaires opposés : la décentralisation et son contraire10. Les marges de manœuvre sont réelles et la possibilité d’isoler la responsabilité du manager existe. En revanche, dans une dynamique de centralisation fortement présente en milieu public, la notion de responsabilité a un champ d’action plus hiérarchique et précise. L’autorité centrale impose une obligation de résultat. Dans le premier cas, la responsabilité recouvre une définition large. Elle renvoie l’idée de maîtrise d’un domaine délimité. Les marges de manœuvre sont réelles et la possibilité d’isoler la responsabilité du manager existe. En revan- che, dans une dynamique de centralisation fortement présente en milieu public, la notion de responsabilité a un champ d’action plus hiérar- chique et précis. L’autorité centrale impose une obligation de résultat (fixation d’objectifs et évaluation de performances). Pour l’équipe dirigeante, le tableau de bord est utilisé comme « moyen de légitimation »11, des politiques imposées. En effet, son implantation repose sur un discours de modernisation, de rationalisation au nom duquel les activités doivent être conduites. L’introduction de cet outil souligne les objectifs généraux de la mairie et recherche l’adhésion de ses membres. Plusieurs agents parlent spontanément de changement de culture de gestion « affiché dès le départ ». « C’est une volonté politique en terme de management ». Le tableau de bord est par nature un outil personnalisé dans son contenu puisque étant construit sur les variables clefs d’action, particulières à chaque manager en management suppose déjà de parvenir à préciser les objectifs de manière suffisante. L’utilisation du tableau de bord en vue de construire un outil sur-mesure en adéquation aux objectifs de performances devient une pratique courante dans le secteur public. Ainsi, le tableau de bord est par nature un outil personnalisé dans son contenu puisque étant construit sur les variables clefs d’action, particulières à chaque manager en management suppose déjà de parvenir à préciser les objectifs de manière suffisante. « Mais la pluralité de missions de service public, notamment dans une mairie, limite l’exercice. Les objectifs ont alors tendance à rester dans le flou »12. En ce qui concerne l’évaluation de la perfor- mance à travers l’usage des tableaux de bord dans les mairies, le contrôle de gestion s’inscrit explicitement dans cette démarche responsabi- lisante. Dans la littérature, le croisement entre contrôle de gestion et responsabilisation, fait référence d’une part, à l’appropriation et à la maîtrise de la performance et, d’autre part, au système d’animation permettant de fixer et d’atteindre les objectifs13. La mesure de la performance peut se réaliser à l’aide du contrôle d’animation stipulant la responsabilisation. Selon cette optique, l’encadrement joue un rôle déterminant14. La responsabilisation constitue Organisations & territoires (2011) 33 Volume 20, no1 même une étape à part entière de l’établissement du contrôle de gestion (après celle de fixation des objectifs et avant celle de management opérationnel)15. Il s’agit de décliner des objec- tifs afin de permettre à l’ensemble des managers locaux de gérer la performance. La responsabi- lisation les concerne afin de rendre les décisions cohérentes aux objectifs stratégiques16. Nous retrouvons là une des missions classiques du contrôle organisationnel et, pour ce faire, les responsables locaux doivent connaître les objectifs et être incités à les respecter17. 2. MÉTHODOLOGIE DE L’ÉTUDE Le contexte des pays de l’Afrique subsaharienne influence considérablement les choix méthodo- logiques des recherches en gestion. De nom- breux problèmes particuliers se posent à tout chercheur dans ce domaine et le contraignent à adopter des stratégies de recherche appropriées afin de pouvoir disposer de données primaires nécessaires à sa recherche. Parmi ces problèmes on peut citer les difficultés d’accès à l’infor- mation, les obstacles de l’environnement, la faible fiabilité des données statistiques et le manque de collaboration des populations cibles. Ensuite, on pourrait ajouter les difficultés découlant de l’impératif d’une recherche con- frontée au terrain18. L’enquête a été menée dans les services publics municipaux des villes camerounaises. Ainsi, pour mieux appréhender l’objet de l’étude, 148 questionnaires ont été administrés aux responsables de différents services publics municipaux des villes camerou- naises. Sur les 148 questionnaires expédiés, 88 sont retournés, parmi lesquels 28 sont non exploitables et 60 sont exploitables, tel que précisé au tableau 1. Enfin, une identification des outils de gestion utilisés dans les municipalités visitées et nécessaires au suivi de la performance communale a été réalisée. Toutes les données ont été analysées avec le logiciel SPSS version 10.00. Tableau 1 : Taux de réponse global de l’enquête quantitative Totaux Pourcentage Questionnaires envoyés 148 100 % Questionnaires retournés 88 59,45 % Questionnaires non exploitables 28 18,91 % Questionnaires exploitables 60 40,54 % Organisations & territoires (2011) 34 Volume 20, no1 3. PRINCIPAUX RÉSULTATS OBTENUS ET DISCUSSION L’analyse de la performance municipale ou encore le contrôle des activités au sein des mairies camerounaises peut très souvent s’exercer de façon directe ou informelle sans véritablement nécessiter d’outils de gestion sophistiqués à l’usage que l’on peut tirer des informations recueillies dans le cadre de l’enquête de terrain. Les statistiques descriptives réalisées à partir des données recueillies lors de l’enquête quantitative révèlent que les outils de contrôle de la perfor- uploads/Management/ 343-texte-de-l-x27-article-573-1-10-20180710 1 .pdf

  • 19
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager
  • Détails
  • Publié le Jul 24, 2022
  • Catégorie Management
  • Langue French
  • Taille du fichier 0.4529MB