MANAGESTION Des ressources en management et sciences de gestion CARACTÉRISER LA
MANAGESTION Des ressources en management et sciences de gestion CARACTÉRISER LA STRATÉGIE D’UNE ENTREPRISE Pierre CÉLIER, professeur en CPGE-ECT à Nice Document mis à jour le 05/05/2014 . La notion de stratégie occupe une place centrale en « Management et Sciences de gestion » et il est fré- quent qu’une étude de cas commence par une phase de diagnostic, où il est demandé d’identifier et de ca- ractériser la stratégie de l’entreprise étudiée. Cette étape est logique (tous les choix opérationnels de l’entreprise, qu’ils soient marketing, financiers, hu- mains, etc., sont nécessairement contraints par la stratégie adoptée) mais particulièrement délicate compte tenu du caractère ambigu et polysémique du terme « stratégie ». Notre objectif ici est à la fois de préciser les différentes sources de confusion relatives à ce terme (afin de limiter les risques d’erreurs d’interprétation) et de fournir quelques pistes pratiques sur les moyens de ca- ractériser la stratégie d’une entreprise. L’ambiguïté du concept de « stratégie » n’est pas simple à cerner car elle découle de 4 facteurs à la fois : 1. le sens parfois contradictoire donné historiquement aux termes « stratégie » et « politique » 2. le fait qu’une stratégie a nécessairement, au moins, une double dimension (il convient donc de quali- fier chacune d’elle pour la caractériser !) 3. l’évolution de la terminologie utilisée pour désigner les deux dimensions majeures d’une stratégie 4. l’inévitable marge d’incertitude que recèle toute interprétation d’une réalité complexe (indépendam- ment des problèmes terminologiques) . 1) « Stratégie » vs « Politique » La première difficulté liée à l’utilisation du terme « stratégie » découle du sens variable donné à ce terme, selon les auteurs, depuis l’irruption dans le vocabulaire de la théorie des organisations, vers la fin des an- nées 1970, du concept de « Politique » (avec un P majuscule). Traditionnellement les premiers auteurs en théorie des organisations (à l’époque on parlait plutôt d’Administration des entreprise) distinguaient, à la suite d’Igor Ansoff, 3 grands types de décision suivant leur nature et le niveau de la structure hiérarchique où elles étaient prises : Ce vocabulaire était simple et relativement bien admis par l’ensemble des auteurs. Cependant, à la fin des années 1970, l’émergence et le succès du concept de « Politique » (introduit notam- ment par les premiers auteurs à théoriser le concept de marketing) a remis en cause cette classification tra- ditionnelle, sans qu’un consensus s’établisse sur le sens exact à donner au terme « Politique » par rapport à celui de « Stratégie » et sur leur place respective dans la hiérarchie des décisions. Si, ainsi que le souligne D. Durafour (Action commerciale, Dunod, 1993) les premiers « mercaticiens » ont simplement substitué à la sé- quence traditionnelle « Stratégie-Tactique-Opérationnelle », la séquence « Politique-Stratégie-Tactique » sans en modifier le contenu, d’autres, par la suite, l’ont remplacé par la séquence (à notre sens plus logique) « Stratégie-Politique-Opérationnel ». Ainsi, suivant les auteurs, certains placent les décisions politiques au-dessus (« Politique générale », avec un P majuscule), au-dessous (« politique fonctionnelle ») ou au même niveau (synonyme) que les décisions stratégiques… D’où une grande confusion terminologique ! Toutefois, suite à la redécouverte des grands auteurs de la littérature militaire (Sun-Tzu, Karl Von Clausewitz, Basil Lidell Hart, etc.) et à l’émergence du warketing (marketing guerrier), on peut noter que l’usage du terme « stratégie » tend à être, de nouveau, privilégié, y compris par les mercaticiens, pour quali- fier les choix majeurs pris au plus haut niveau hiérarchique d’une organisation (armée et, par extension, en- treprise) dans un contexte de compétition (combat sur le terrain et, par extension, concurrence sur le mar- ché). Compte tenu du contexte concurrentiel dans lequel baignent la plupart des organisations aujourd’hui, le terme « Politique générale » semble d’ailleurs progressivement tomber en désuétude (la plupart des ma- nuels scolaires se contentent désormais d’opposer les décisions stratégiques aux décisions opérationnelles). Les risques liés à une confusion entre les termes « stratégie » et « politique » s’avèrent donc, aujourd’hui, li- mités et un certain consensus semble s’établir actuellement pour utiliser les termes : « stratégie » pour désigner un raisonnement mené au niveau supérieur de l’entreprise, dans un contexte concurrentiel et engageant toute l’entreprise à long terme. Cette réflexion conduit donc à une répartition par grande masse des ressources de l’entreprise (finan- cières, techniques et humaines) afin d’atteindre des objectifs concourant à la réalisation de son « but » (… ce qui est assez logique avec l’étymologie de ce terme construit à partir des mots grecs stra- tos = « armée » et ago = « je conduis »). Par ailleurs, cette approche s’avère parfaitement compatible avec les définitions les plus courantes du terme « stratégie », que ce soit celle descriptive d’Alfred D. Chandler (Strategy et structure, 1962) : « la stratégie consiste en la détermination des buts et des objectifs à long terme d’une entreprise, l’adoption des moyens d’action et l’allocation des ressources nécessaires pour atteindre ces objectifs » (définition descriptive) ou celle, en termes de finalité, de Michael Porter (L’avantage concurrentiel, 1986) : « la stra- tégie est l’art de construire des avantages concurrentiel durablement défendables » (définition en terme de finalité). . « politique » pour désigner les actions et comportements à court et moyen terme de l’entreprise sur son marché. Une politique s’inscrit donc dans le cadre d’une stratégie mais a une portée plus limitée et se traduit par une action à plus court terme (par exemple : choix d’une politique de produit, de prix, de distribution et de communication dans le cadre d’une stratégie marketing). . 2) Une stratégie se caractérise nécessairement par la qualification de ses 2 dimensions La deuxième difficulté liée à la caractérisation de la stratégie d’une entreprise, provient du fait que celle-ci a nécessairement plusieurs dimensions (au moins 2 principales) et qu’il est indispensable de préciser cha- cune d’elle pour la définir complètement. Afin de bien cerner le problème, il est possible de s’inspirer de l’approche proposée par Philip Kotler et Bernard Dubois (Marketing management, Publi Union, 1993) pour décrire de manière mnémotechnique les étapes de la démarche stratégique. Selon eux, cette dernière peut se résumer par ce qu’ils appellent les « 4 P stratégiques » (par opposition aux fameux « 4 P opérationnels » de Mc Carthy permettant de caractériser un plan de marchéage) : 1. « Probe » (explorer, dans le sens de diagnostic) : évaluer la situation du marché et de l’entreprise 2. « Prioritize » (choisir ses priorités) : choix par l’entreprise de ses domaines d’activité (DAS) 3. « Partition » (segmenter) : choix pour chaque DAS du ou des segments de marché visés. 4. « Position » (positionner) : choix d’un positionnement sur chaque segment de marché retenu(s) Le premier « P » (diagnostic) ne correspond pas, bien entendu à un élément de la stratégie proprement dite. Il fait plutôt référence à l’indispensable phase préliminaire permettant au dirigeant, en fonction des opportunités / menaces du marché et des forces / faiblesse de l’entreprise, d’effectuer ses choix straté- giques. À priori, la caractérisation de la stratégie devrait donc se faire par les trois autres « P ». Toutefois, pour sim- plifier encore les choses, on peut remarquer que les deux derniers « P » renvoient tous les deux à des choix mercatiques complémentaires, relatif au positionnement concurrentiel que l’on peut caractériser par une terminologie unique, en utilisant la typologie des « stratégies génériques » de Michael E. Porter (Choix stra- tégiques et concurrence, Économica, 1982). Ainsi, au final, on s’aperçoit que la caractérisation de la stratégie d’une entreprise doit, au minimum, se faire par la qualification : 1. de sa stratégie en matière de DAS (stratégie menée au niveau du groupe => corporate strategy) : pour cela, on peut s’inspirer de la typologie d’Igor Ansoff qui, suivant que l’entreprise développe un produit actuel ou nouveau, sur un marché actuel ou nouveau identifie 4 types de stratégie possibles : stratégie de pénétration (produit actuel sur marché actuel). Il est possible de préciser cette qua- lification en indiquant le type de développement (intensif ou extensif ou concurrentiel) visé par l’entreprise. stratégie de développement de marché (produit actuel sur un nouveau marché), traduction qui peut être préférée à celle de « diversification de marché » souvent utilisée mais risquant de brouiller la différence fondamentale existant entre les stratégies de spécialisation et la stratégie de spécialisation. stratégie de développement de produit (produit nouveau sur marché actuel), traduction qui peut être préférée à celle de « diversification de produit » souvent utilisée mais risquant égale- ment de brouiller la différence fondamentale existant entre les stratégies de spécialisation et la stratégie de spécialisation. stratégie de diversification (nouveau produit sur nouveau marché) : il est possible de compléter cette qualification en précisant le type de diversification choisie par l’entreprise soit en ayant re- cours au vocabulaire classique (diversification conglomérale vs concentrique vs latérale vs géo- graphique) soit en utilisant le vocabulaire proposé par J.P. Détrie et B. Ramanantsoa (Stratégie de l’entreprise et diversification, Nathan, 1983 : diversification uploads/Management/ caracteriser-la-strategie-d-x27-une-entreprise-managestion.pdf
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- Publié le Jui 16, 2022
- Catégorie Management
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