1 Chapitre 5. L’étude qualitative La démarche qualitative est une démarche d’ét
1 Chapitre 5. L’étude qualitative La démarche qualitative est une démarche d’étude de nature exploratoire qui permet, par exemple, d’aborder des domaines inconnus. Ce type d’approche permet de dégrossir les problèmes en identifiant leurs diverses composantes. Dans le même ordre d’idée, elle cherche aussi à comprendre la nature des forces susceptibles d’expliquer les comportements d’achat, comme les motivations et les freins d’achat d’un produit ou d’une marque. Pour atteindre ces différents buts, la démarche qualitative se fonde sur une analyse en profondeur, longue et méticuleuse, du discours de chaque interviewé. Les techniques les plus utilisées pour recueillir ces discours sont: Techniques individuelles traditionnelles; Techniques de groupe; Techniques associatives; Techniques de recherche du sens. 1. Les techniques individuelles traditionnelles Les techniques qualitatives permettant d’interviewer ou d’observer séparément différents individus. Elles constituent un outil incomparable pour mieux comprendre les ressorts d’une décision humaine. 11. Postulats fondamentaux Deux axiomes majeurs sous-tendent les méthodes individuelles: Les comportements individuels ne sont pas aléatoires. Toute conduite a une signification et une ou plusieurs raisons que l’on peut mettre au jour en utilisant une technique particulière. L’entretient en profondeur ou l’observation constituent des moyens privilégiés. La signification d’un comportement n’est pas immédiatement accessible au sujet lui- même. En conséquence, l’individu n’est pas toujours en mesure d’expliquer les raisons de ses actes: l’analyse et l’interprétation de ceux-ci nécessitent une approche indirecte. En d’autres termes, les méthodes qualitatives adoptent une vision imprécise, non structurée et superficielle de l’information, puis s’efforce de la décoder et de la traduire en termes de motivations, d’attitudes et de comportements. Motivations Attitudes Comportements Forces, pulsions « Ce qui pousse vers » « Pourquoi agit-on comme cela ? » Freins, inhibition « Ce qui retient » « Ce qui fait peur » « Pourquoi n’a-t on pas fait cela ? » Connaissance Opinions: « Ce qu’on pense » ; « Ce qui se dit » ; « Quels a priori ? Quels stéréotypes ? » Affectif Jugements: « Ce qu’il faut faire » ; « Ce qui est bien ou mal » ; Conventions, valeurs. Évaluations: « On aime ou aimerait ceci, mais pas cela. » Attentes, idéal, points favorables et défavorables. Conatif Intention: « Ce que l’on va probablement faire. » Usage effectif « Combien fait-on ? » Environnement « Ce que l’on vit » « Comment vit-on ? » 1 12. Points méthodologiques caractéristiques Flexibilité des questions: contrairement aux techniques quantitatives qui privilégient les questionnaires rigoureux aux réponses limitées, les études qualitatives considèrent que de tels instruments n’ont guère de sens. Les méthodes individuelles s’efforcent de s’adapter le plus possible à chaque enquêté. Elles préfèrent offrir à l’enquêteur un guide d’entretien, très différents du questionnaire classique. Les méthodes d’observation reposent sur un postulat encore plus radical: toute interrogation comportant un biais de formulation, seule l’observation (directe ou indirecte) évite le risque d’interférence inhérent à toute formulation de questionnaire. Difficulté d’interprétation des données: c’est le problème majeur. Certaines techniques d’analyse de données qualitatives sont très puissantes, mais peuvent prêter le flanc à la critique, dans la mesure où leur validité et leur fiabilité ne sont pas clairement établies dans un contexte d’étude du consommateur. Deux phases centrales sont distinguées dans les techniques individuelles: le recueil des codes, puis l’interprétation. 2. L’entretien en profondeur L’étude qualitative du consommateur a été caractérisée par la prédominance de techniques empruntées à la psychologie clinique. Ces techniques trouvent leurs racines théoriques dans la psychanalyse –ou psychologie en profondeur- dont l’objet principal est la compréhension de la vie psychique de l’individu, en se basant sur les concepts de conscience, d’inconscience et de besoin, jugés prioritaires par Freud, Alder et Jung. Elles s’intéressent prioritairement au « pourquoi » d’un comportement d’une personne; c’est la raison pour laquelle, par abus de langage, ces techniques sont souvent dénommées « études de motivation ». 21. Axiomes des théories psychanalytiques Pour conduire et analyser un entretien en profondeur, le chargé d’étude doit garder à l’esprit les principaux axiomes des théories psychanalytiques. Trois points émergent: Un acheteur n’est pas forcément conscient de ses motivations. Collecte des informations = Repérer les « codes » Analyse des informations = Traduire les codes « Pourquoi et comment cela se dit » = Discours (Entretien en profondeur) Vocabulaire employé Contexte (émotion, ton…) Thèmes abordés ou évités Silence, lapsus « Qu’est-ce que cela représente » = Interprétation Associations, évocations spontanées Symboles, images mentales Couleurs, formes suggérées « Comment cela se passe » = Vision directe ou indirecte (observation) Manipulation des objets, gestes, regards Temps écoulé, hésitation « Qu’est-ce que cela représente » = interprétation Comptage, chronométrage Transpositions Débriefing de l’individu 1 Les angoisses, les complexes et les traumatismes passés resurgissent fréquemment lors de l’achat d’un produit. Pour Freud, les véritables besoins sont latents (inconscients) et leur satisfaction s’exprime par une réaction d’opposition. Chez Adler, les besoins d’estime et d’affiliation de soi sont source de motivation (pulsions, désirs de compensation) et de créativité. Chez Jung, l’archétype, le mythe et la sublimation (besoin de se transcender) motivent le comportement ; ainsi, le produit ou la marque représenteraient un miroir de soi sur lequel l’individu projette des contenus psychiques inconscients. Les mécanismes de défense de la personnalité compliquent l’investigation. Les différentes strates de notre personnalité peuvent être source de conflits intérieurs. La protection du psychisme met en jeu des mécanismes de défense (tel le refoulement) qui sont autant de pistes délicates que le chargé d’étude doit explorer. L’achat d’une marque ou d’un produit peut être un moyen de réduire ces tensions, par un phénomène de protection inconsciente (identification à autrui, déplacement, transfert, sublimation), ou un moyen de compenser une marque quelconque (le complexe). Les discours ne peuvent être analysés directement: ils doivent être interprétés. Les différentes théories s’opposent sur le sens des symboles et actes inconscients de l’individu: interprétation des rêves, association d’idées, lapsus, archétypes, etc. En revanche, l’écoute non directive et le test projectif sont des techniques d’interprétation communes aux différents auteurs. 22. La méthode de collecte de l’information Il existe trois grands principes de conduite d’un entretien en profondeur: la non-directivité pure, la semi-directivité et l’investigation « papier-crayon ». Le point commun de ces formes d’entretien est leur caractère de discussion « non structurée ». L’enquêteur est plutôt en retrait, l’interviewé est le véritable centre de l’investigation. La forme non directive pure est très proche de l’entretien clinique en profondeur, elle est modérément utilisée en marketing vu ses contraintes de collecte des données et ses difficultés d’interprétation. Par contre, les deux autres formes s’apprêtent parfaitement à l’application en marketing. Caractéristiques Entretien non directif Entretien semi-directif Entretien papier-crayon Thèmes d’études privilégiés Motivations, pulsions. Inhibitions. Représentations, symboles. Motivations, freins. Recueil d’éléments d’image de marque. Usage réel d’un produit. Recueil d’éléments d’image de marque. Usage réel d’un produit. Attitude enquêteur Compréhension. Écoute totale. Neutralité encourageante. Bienveillance. Relance progressive. Orientation thématique… Bienveillance. Relance systématique. Liste précise de thèmes. Support d’interview Magnétophone. Interrogations fondées sur un schéma « clinique ». Magnétophone. Guide d’entretien. Stylo. Guide répertoire. Avantages Fondations théoriques solides fournissant un cadre explicatif du discours. Interview plus « maniable ». Bonne adaptation à un contexte marketing. Grande flexibilité de l’interview. Formation rapide des enquêteurs. Inconvénients Formation de « clinicien ». Adaptation à un contexte marketing ? Formation spécifique des enquêteurs. Investigation superficielle. Échantillonnage 10-20 personnes. Profils variés. 20-30 personnes. Profils très variés. 30-50 personnes. Profils plus segmentés. 221. La conduite de l’entretien semi-directif 1 L’entretien semi-directif se déroule selon une progression en quatre étapes autour desquelles s’articule le guide d’entretien. Le guide d’entretien est un document écrit résumant les axes essentiels autour desquels l’interview s’orientera. Il ne s’agit pas d’une liste de questions, mais d’une sorte de canevas fournissant à l’interviewer des points de repère. Il remplit plusieurs fonctions: Indiquer succinctement à l’interviewer les objectifs généraux de l’étude et les thèmes cruciaux devant être abordés. Répertorier les phrases d’introduction et de transition qui seront répétées à l’identique pour tous les entretiens. Recenser les principaux points devant faire l’objet d’un approfondissement ou de relances de la part de l’enquêteur. La durée totale d’un entretien semi-directif est normalement d’une à deux heures, et sa structure générale comporte quatre phases: 1. Phase d’introduction: elle doit permettre au répondant d’évacuer des précautions voisines, mais pas véritablement rattachées au sujet de l’étude. L’importance de cette phase réside dans le fait qu’elle met en confiance l’interviewé, en le laissant parler de ses sujets favoris et en évitant qu’il fasse des replis ultérieurs. De même, c’est durant cette phase que l’on doit recueillir le discours rationnel, les clichés qui constituent autant de « défenses » susceptibles de masquer les mécanismes d’une motivation ou d’un frein. 2. Phase de centrage du sujet : lorsqu’un bon climat de confiance est établi, l’interviewé aborde le véritable sujet de l’étude. Une technique fréquente consiste à placer l’enquêté dans un cadre imaginaire: c’est le rêve éveillé, symbolisé par « imaginez que vous gagnez un séjour… ». Par contre, si l’on s’en tient à une situation habituelle, certains thèmes pourraient être uploads/Management/ chapitre-5-l-x27-etude-qualitative.pdf
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- Publié le Oct 02, 2022
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