835 LE CADRE EUROPÉEN COMMUN DE RÉFÉRENCE POUR LES LANGUES : UN OUTIL D’APPRENT

835 LE CADRE EUROPÉEN COMMUN DE RÉFÉRENCE POUR LES LANGUES : UN OUTIL D’APPRENTISSAGE, D’ENSEIGNEMENT ET D’ÉVALUATION François RICHERME Centre Culturel Français de Cluj, Attaché de coopération pour le français Drd. Eva DELCEA Centre Culturel Français, Chargée de mission Delf scolaire Résumé Le CECR est un outil sur lequel se base actuellement l’élaboration de programmes de langues vivantes en Europe visant notamment l’approche actionnelle de celles-ci. En même temps, il définit une échelle de niveau visant les quatre compétences (production et intéraction orale, production écrite, compréhension de l’oral, compréhension des écrits) pour permettre de mieux établir le progrès des apprenants, mettant en place une nouvelle forme d’évaluation de la performance. Introduction A l’heure où l’Europe gomme ses frontières, l’homme vit dans une société de plus en plus cosmopolite. Il est souvent forcé, dans son travail ou ses loisirs, à communiquer dans d’autres langues que sa langue maternelle. Les échanges commerciaux et les accords passés entre les états étant de plus en plus importants, il utilise plus souvent, au travail, une langue « internationale » qui n’est ni la sienne, ni celle de son interlocuteur. Mais amené à voyager pour affaires, il se doit de connaître quelque peu la langue et la culture des personnes qu’il rencontre. La communication devient donc aujourd’hui un enjeu de taille dans notre société et l’homme doit y être préparé. L’un des objectifs du Conseil de l’Europe est d’améliorer la communication entre les personnes venant de différents pays d’Europe, car elle « facilite la mobilité et les échanges », « favorise la compréhension réciproque et renforce la coopération »1. Un outil qui aide à mettre en place une politique linguistique éducative commune et qui en donne plus de transparence et de lisibilité à l’échelle européenne était alors nécessaire. Il a vu le jour en 2000 et son influence grandit chaque année au sein des politiques nationales : il s’agit du Cadre européen commun de référence pour les langues (CECR). 1 Conseil de l’Europe, Un cadre européen commun de référence pour les langues : apprendre, enseigner, évaluer, Strasbourg, 2000, p. 4. 836 Notre exposé présentera dans un premier temps les enjeux de l’apprentissage d’une langue étrangère et l’implication de longue date du Conseil de l’Europe en faveur de la promotion des langues. Dans un second temps, nous montrerons les nouveautés et les changements apportés par le CECR dans le processus d’apprentissage, l’enseignement et l’évaluation des langues. Des enjeux pour apprendre des langues L’apprentissage d’une ou même plusieurs langues est devenu de nos jours une nécessité et les système scolaires européens s’y sont globalement adaptés. En Roumanie, au début des années 90, l’élève apprenait une première langue étrangère à partir de la cinquième (11 ans) ; aujourd’hui, il peut le faire dès la deuxième (7 ans) voire même à la maternelle. Apprendre une langue étrangère fait partie des enseignements fondamentaux de l’école : au- delà de la compétence linguistique, l’élève découvre comment d’autres communiquent, pensent, vivent et se découvre un peu mieux lui-même. Apprendre une langue, c'est sortir de sa culture que l'on considère comme la culture afin de s'ouvrir sur celle de l'autre, c'est « sortir d'une vision égocentrée », c'est « penser une autre pensée », précise T. Trebbi2 (2003). C'est le début d'un long cheminement qui amène l'apprenant vers la tolérance. C'est ainsi que l'apprentissage de langues étrangères participe à l'éducation globale des futurs citoyens de l’Europe. La citoyenneté européenne nécessite une implication dans la vie politique et sociale européenne et ne doit être en aucun cas gênée par un manque de compétence linguistique. L'apprentissage d'une langue doit passer par l'acquisition de trois compétences de base : la compétence purement linguistique, la compétence interculturelle mais aussi, l'« apprendre à apprendre les langues étrangères », c’est-à-dire le développement de l’autonomie de l’apprenant. L'apprentissage d'une langue étrangère a lieu la plupart du temps à l'école, mais doit se poursuivre tout au long de la vie. Pour cela, le futur citoyen doit apprendre à gérer seul la continuité de son apprentissage afin, non seulement de ne pas perdre ses acquis, mais aussi de les faire progresser. Le rôle de l'école est de promouvoir « l'autonomie comme condition préliminaire à un apprentissage efficace tout au long de sa vie » indique D. Little3 (2003), rapportant une idée développée dès 1979 par H.Holec pour le Conseil de l'Europe. 2 Carton, Francis & Riley, David, « Vers une compétence plurilingue », in Le français dans le monde – Recherche et applications, numéro spécial juillet 2003, Paris, CLE internationale, 2003, p. 102. 3 Carton, Francis & Riley, David, « Vers une compétence plurilingue », in Le français dans le monde – Recherche et applications, numéro spécial juillet 2003, Paris, CLE internationale, 2003, p. 110 837 Promotion d’une politique linguistique cohérente au sein de l’Europe Le Conseil de l'Europe4 porte depuis très longtemps un intérêt tout particulier à la question des langues. Dès 1954 avec le texte fondateur de la Convention culturelle européenne, le Conseil de l'Europe suggère de promouvoir l'étude des langues et annonce déjà les premiers échanges d'étudiants entre universités. Il serait quelque peu indigeste d'énumérer tous les textes écrits sur ce sujet : nous n'en retiendrons que quelques-uns. Ils témoignent tous d'une volonté de promouvoir les langues et le respect des cultures européennes, et d'ajuster une politique linguistique commune pour qu'elle soit cohérente en Europe : ● En 1992 paraît la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires qui prévoit de faire entrer ces langues dans les systèmes scolaires en tant que langues enseignées ou langues d'enseignement de l'école primaire à l'université, ce qui est le cas en France pour le créole et le corse notamment. ● En 1997, lors de la déclaration finale du 2ème sommet du Conseil de l'Europe, les chefs d'Etats affirmaient le rôle prépondérant des langues dans la construction d' « une société plus libre, plus tolérante et plus juste, fondée sur la solidarité, des valeurs partagées et un héritage culturel » (cité par Byram & Beacco, 2003) ● En 2000 voit le jour Le Cadre Européen Commun de Référence (CECR), un instrument qui vise un rapprochement des enseignements des langues en Europe. Il a donné lieu à l'élaboration d'un Portfolio Européen des Langues (PEL) que l’on considère comme étant « un passeport linguistique » de l’apprenant. ● Le Guide de l'élaboration des politiques linguistiques éducatives en Europe qui a été conçu en 2003 pour harmoniser les politiques linguistiques éducatives en Europe. Il explique avec précision les visées d'une politique commune et propose des pistes précises pour sa mise en œuvre. Il est l'aboutissement d'une réflexion menée depuis des années par les professionnels et tient compte de nombreuses études réalisées précédemment pour le conseil de l'Europe. C'est un travail de longue haleine, finalisé par J.C. Beacco et M. Byram, mais qui a nécessité le travail d'un grand nombre d'experts européens en la matière. L’Europe est un espace multilingue et multiculturelle. Pour des raisons professionnelles, économiques ou personnelles, les citoyens européens deviennent plus mobiles et sont amenés 4 Institution ayant pour objectif de « favoriser en Europe un espace démocratique et juridique commun », le Conseil de l’Europe regroupe aujourd’hui 47 états membres, soit la quasi totalité du continent européen. 838 à vivre sur une période plus ou moins longue loin de leur pays d’origine. Savoir s’adapter à la culture et à la langue du pays d’accueil n’est pas chose aisée. C’est pourquoi l’Europe doit former des citoyens plurilingues, c'est-à-dire, des citoyens qui connaissent les langues mais aussi les cultures de plusieurs pays d’Europe, qui tissent des liens entre les langues qu’ils parlent déjà et celles qu’ils apprennent, et soient autonomes dans l’apprentissage d’une langue. Cette notion même de plurilinguisme est au centre du Cadre européen commun de référence et « met l’accent sur le fait que, au fur et à mesure que l’expérience langagière d’un individu dans son contexte culturel s’étend de la langue familiale à celle du groupe social puis à celle d’autres groupes (que ce soit par apprentissage scolaire ou sur le tas), il ne classe pas ces langues et ces cultures dans des compartiments séparés mais construit plutôt une compétence communicative à laquelle contribuent toute connaissance et toute expérience de langue et dans laquelle les langues sont en corrélation et interagissent. [...] Des partenaires peuvent, par exemple, passer d’une langue ou d’un dialecte à l’autre, chacun exploitant la capacité de l’un et de l’autre pour s’exprimer dans une langue et comprendre l’autre.»5. Être plurilingue ne signifie donc pas parler parfaitement plusieurs langues mais être capable à des niveaux divers de compréhension et d'expression, de communiquer dans plusieurs langues étrangères, notamment dans celle de son voisin européen. Besoin d’un outil pour une politique linguistique européenne commune Evelyne Rosen évoque dans son ouvrage intitulé Le point sur le Cadre européen commun de référence pour les langues, le cas d’un étudiant écossais, plurilingue, qui, il y a quelques années, décide de passer différents diplômes de langue afin de les faire valoir sur son Curriculum vitae. Mais l’employeur, à la lecture du CV, est confronté à un uploads/Management/ francois-richerme.pdf

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  • Publié le Sep 21, 2022
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